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Sénat de Belgique

Belgische Senaat

Annales parlementaires

Parlementaire handelingen

SÉANCES DU JEUDI 29 JANVIER 1998

VERGADERINGEN VAN DONDERDAG 29 JANUARI 1998

(Vervolg-Suite)

DEMANDE D'EXPLICATIONS DE M. DE DECKER AU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR « LA SITUATION EN ALGÉRIE : MESURES À L'ÉCHELON BELGE ET EUROPÉEN »

DEMANDE D'EXPLICATIONS DE M. LOONES AU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR « LA SITUATION EN ALGÉRIE ET LA CONTRIBUTION ÉVENTUELLE DE LA BELGIQUE ET DE L'EUROPE À LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME »

DEMANDE D'EXPLICATIONS DE MME LIZIN AU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR « LE SOUTIEN EUROPÉEN À LA LUTTE ANTI-TERRORISTE EN ALGÉRIE »

VRAAG OM UITLEG VAN DE HEER DE DECKER AAN DE MINISTER VAN BUITENLANDSE ZAKEN OVER « DE SITUATIE IN ALGERIJE : MAATREGELEN OP BELGISCH EN EUROPEES NIVEAU »

VRAAG OM UITLEG VAN DE HEER LOONES AAN DE MINISTER VAN BUITENLANDSE ZAKEN OVER « DE SITUATIE IN ALGERIJE EN DE MOGELIJKE BIJDRAGE VAN BELGIË EN EUROPA IN DE STRIJD TEGEN DE TERREUR »

VRAAG OM UITLEG VAN MEVROUW LIZIN AAN DE MINISTER VAN BUITENLANDSE ZAKEN OVER « DE EUROPESE STEUN AAN DE STRIJD TEGEN HET TERRORISME IN ALGERIJE »

M. le président . ­ L'ordre du jour appelle la demande d'explications de M. De Decker au ministre des Affaires étrangères. Je vous propose d'y joindre celles de Mme Lizin et de M. Loones.

Aan de orde is de vraag om uitleg van de heer De Decker aan de minister van Buitenlandse Zaken. Ik stel voor de vraag om uitleg van mevrouw Lizin en die van de heer Loones daaraan toe te voegen.

La parole est à M. De Decker.

M. De Decker (PRL-FDF). ­ Monsieur le président, je tiens tout d'abord à remercier M. le ministre d'avoir accepté de nous entretenir quelques instants de la situation dramatique prévalant en Algérie.

Le G.I.A. a transformé le ramadan algérien en cauchemar, en enfer terrestre.

Face à tant de barbarie, notre pays en particulier, étant donné ses profonds liens historiques, culturels, économiques et amicaux avec l'Algérie, est appelé à jouer un rôle moteur au sein de la communauté internationale et à apporter une collaboration efficace afin de trouver une solution politique. C'est la raison pour laquelle je souhaite que M. le ministre nous livre son point de vue sur l'évolution de la situation et précise quelles sont les mesures préconisées par la Belgique à l'échelon de l'Union européenne car, une fois de plus, l'ampleur de la tragédie nous amène au constat que seule une politique étrangère et de sécurité commune est susceptible d'apporter une réponse valable à des situations de ce genre.

La France, pour des raisons historiques évidentes, est relativement paralysée. L'Allemagne, quant à elle, a défini un certain nombre de lignes de force. Dès lors, je désirerais connaître l'attitude que M. le ministre compte prendre par rapport à cette situation.

En ce qui me concerne, je n'ai pas une vision trop pessimiste quant à l'évolution des choses. Je voudrais rapidement vous donner lecture de deux extraits d'une analyse réalisée par un éminent expert français, M. Alexandre Adler : « Les hommes des groupes islamiques armés sont les exacts équivalents des Khmers rouges dans les autres parties du monde : un groupe fanatisé, désespéré, qui a basculé dans la violence radicale, qui s'est retranché dans une utopie sanguinaire et suicidaire, loin de l'humanité courante. Mais, à l'évidence, tous ceux qui, depuis le début de la crise algérienne, ont voulu nier cette dimension de violence et de haine destructrice de l'intégrisme, ne savent plus aujourd'hui comment nier ou dénaturer ces simples faits qui, par ailleurs, s'inscrivent dans la même trame sanglante que l'on retrouve en Egypte avec les assassinats de chrétiens, de policiers et de touristes, en Palestine, avec les règlements de compte du Hamas et du Djihad islamique, au Soudan avec l'atroce guerre sainte menée contre les peuples africains du Sud, et, bien sûr, en Afghanistan, avec les atroces Talibans qui se sont emparés de Kaboul l'année dernière. L'islamisme radical a tué, il tue, il tuera encore. »

Il ajoute à propos du fondamentalisme islamique : « Mais, second phénomène, là non plus nullement spécifique à l'Algérie : l'islamisme est aujourd'hui en recul dans tout le monde musulman, parce qu'il est l'objet d'un rejet croissant de la population. En Algérie, ce rejet s'est manifesté dès les élections présidentielles de la fin de 1995 qui avaient donné au président Liamine Zéroual un véritable mandat populaire qui avait débuté par le plébiscite véritable de la communauté immigrée en France. Si l'on peut douter raisonnablement de la sincérité successive des scrutins ultérieurs, législatifs du printemps dernier notamment, la volonté populaire de disposer d'institutions représente les désirs de paix civile et de pluralisme politique, qui sont, eux, incontestables. Au reste, les forces d'opposition les plus critiques du régime le savent parfaitement, qui, après avoir maugréé, finissent par occuper les sièges de députés qui leur sont octroyés. La vérité, là encore, est plus simple qu'on ne l'imagine : l'Algérie a d'ores et déjà la structure politique la plus pluraliste du monde arabe. L'armée qui domine le pays n'a pas accepté cette évolution de gaieté de coeur. Mais elle a dû la subir parce que la logique de son affrontement avec l'islamisme l'a contrainte à s'appuyer sur les sentiments démocratiques de la population, notamment dans les grandes villes, où le rejet du F.I.S. ­ du Front islamique du salut ­ et des violences intégristes a commencé, notamment chez les femmes, les jeunes et les fonctionnaires de l'État. »

Monsieur le ministre, d'une certaine manière, la violence démesurée qui s'est développée en Algérie pendant le ramadan nous a amenés, nous Européens, à analyser de façon plus approfondie la situation dans ce pays. Procédant à notre autocritique, nous pourrions d'ailleurs nous demander pourquoi nous ne nous sommes pas penchés plus tôt sur cette situation dramatique. De manière plus fondamentale, celle-ci peut-être décrite comme suit : le Groupe islamique armé, ou une partie de celui-ci, refuse une certaine évolution démocratique. Certains membres du F.I.S. rejoignent le jeu démocratique alors que l'Armée islamique du salut accepte une trêve afin de leur permettre d'intégrer un processus parlementaire démocratique. Il s'agit donc, en quelque sorte, à leurs yeux, d'une violence de dernier recours. Une telle explication ne pardonne en rien les actes commis, mais elle doit nous permettre de faire la part des choses.

Si l'on peut reprocher au gouvernement algérien un manque de transparence, d'ouverture, comme l'a dit le ministre Védrine ainsi que d'autres ministres européens, rien, à ce stade, ne nous permet d'affirmer que les autorités algériennes sont, d'une quelconque façon, complices de ces massacres. Il est probable que certains militaires aient rejoint les rangs du G.I.A., mais cette démarche ne relève pas nécessairement de la responsabilité du gouvernement algérien.

Par ailleurs, tout en respectant la volonté de l'Algérie de ne pas permettre à d'autres pays de s'ingérer dans ses affaires intérieures, nous devons l'encourager fermement à une plus grande transparence, qui lui sera beaucoup plus utile que ne le pensent ses dirigeants. Selon moi, il est indispensable que nous parvenions à convaincre les autorités algériennes d'ouvrir leurs portes aux parlementaires européens, aux journalistes, aux militants des droits de l'homme, ainsi qu'à certains experts, notamment de l'O.N.U., qui pourraient procéder à une analyse de la situation.

Monsieur le ministre, quelles sont les mesures que vous comptez prendre à la suite de la visite de la troïka en Algérie ? Pouvez-vous nous dire quelle est l'analyse qui en a été faite par le Conseil des ministres européen qui, je crois, s'est réunis lundi ? Quelles conclusions en avez-vous tirées ? Quel est le sentiment de la troïka sur l'évolution de la situation politique et sur la possibilité d'une ouverture, ou d'un début d'ouverture, du gouvernement algérien à des visites, à une intervention politique ou à une présence politique de l'O.N.U., de l'Europe et des organisations de défense des droits de l'homme dans son pays ?

Nous avons un rôle spécifique à jouer pour influencer la politique de l'Union européenne dans cette situation préoccupante. Dans le cadre actuel, la France est en effet incapable d'intervenir facilement en Algérie alors que la Belgique, pays francophone, entretient des relations particulières avec ce pays. Il me semble fondamental que nous réagissions, que nous montrions notre intérêt et que nous cessions d'adopter, comme durant les quatre ou cinq premières années de cette crise, une attitude passive rendant l'Europe plus ou moins complice de cette situation dramatique.

De voorzitter. ­ Het woord is aan de heer Loones.

De heer Loones (VU). ­ Mijnheer de voorzitter, ook de Volksunie wenst de minister enkele vragen te stellen over de huidige situatie in Algerije. Deze vragen zijn ingegeven door een sterk gevoel van sympathie en vooral van medeleven met de bevolking van dit prachtige land.

Meer en meer overheerst de overtuiging dat een doorgedreven internationale druk een positief effect kan hebben op de strijd tegen de bloedige terreur in Algerije. De Volksunie gaat ervan uit dat niet de internationale gemeenschap, maar wel de Algerijnse overheid zelf orde op zaken moet stellen.

De verkiezingen in drie fasen en in het bijzonder de parlementsverkiezingen van 5 juni 1997, waarbij ik als VN-waarnemer aanwezig kon zijn, moesten de aanloop zijn tot een sterk centraal geleide en democratische staat, waar de oppositie zich in parlementaire discussie kan uiten. Het rijke en boeiende Algerije hoopte op een radicale uitroeiing van het terrorisme, waarna economische opbouw kon beginnen. De bevolking zelf beschouwde de democratie als een middel in de strijd tegen het terrorisme.

Het huidige fiasco heeft ongetwijfeld meerdere oorzaken. Er is in de eerste plaats het moordende islamitische fundamentalisme en de weigering tot of de onmogelijkheid van gesprek, laat staan onderhandeling. Er is het verkeerd begrepen eigenbelang van het leger en de politie. Het bloedige terrorisme verantwoordt inderdaad een sterke tegenmacht. Er spelen misschien ook economische motieven mee. We lezen in de pers dat de bloedbaden een middel zouden zijn om de boeren te verjagen van hun gronden, die dan beschikbaar zouden worden voor de verdere industriële ontwikkeling. Het leger zou in de eerste plaats die industriële belangen dienen. Er zijn ongetwijfeld ook onderlinge vetes tussen deze islamitische groepen en de gewapende burgerwachten.

Een internationaal onderzoek zou misschien enige duidelijkheid kunnen geven over deze dooreenlopende oorzaken. De Algerijnse overheid zou daarvoor diverse maatregelen kunnen nemen. Ik denk bijvoorbeeld aan de toelating tot en de hulp bij een internationale onderzoeksopdracht. De regering zou gesprekken en onderhandelingen met de betrokken groepen kunnen organiseren. Een aantal van die groepen hebben zich hiertoe immers uitdrukkelijk bereid verklaard. Er zijn evenwel nog verdere stappen in het democratiseringsproces nodig, zodat de hele bevolking zich vertegenwoordigd voelt. De regering zou de strijd tegen de verpaupering van bepaalde wijken en streken en tegen de hoge werkloosheid, de ideale voedingsbodem voor het moslimfundamentalisme, kunnen opdrijven en het terrorisme van het leger en de politie nog actiever kunnen aanpakken.

Graag had ik van de minister vernomen hoe hij de toestand in Algerije beoordeelt. Beschikt hij over rechtstreekse informatiebronnen ? Vroeger beschikte de Belgische ambassade steeds over goede informatie en kon ze bogen op een goede expertise. Hoe kan België in zijn bilaterale relaties met Algerije en in internationale instellingen bijdragen tot het vinden van een oplossing voor het Algerijnse drama ? Hoe kunnen we de internationale druk verhogen om de escalatie van het moordend geweld eindelijk te doorbreken ? Is de minister het ermee eens dat de Algerijnse overheden zelf de controle over elke vorm van eventuele internationale inmenging moeten behouden ?

M. le président. ­ La parole est à Mme Delcourt.

Mme Delcourt-Pêtre (PSC). ­ Monsieur le président, je voudrais me joindre aux demandes d'explications de MM. De Decker et Loones pour émettre quelques réflexions personnelles et poser quelques questions au ministre.

Au travers des débats qui ont eu lieu ces derniers temps, nous avons eu connaissance de l'insistance du pouvoir politique algérien à indiquer que ce sont des groupes islamistes armés qui tuent et provoquent les massacres horribles dont la presse et les autorités algériennes elles-mêmes se sont fait l'écho. Relater ces massacres et s'indigner ponctuellement devant cette horreur, n'est pas suffisant. Comprendre les causes de ces violences et les origines profondes de la crise nous paraît être une nécessité afin de voir dans quelle mesure des interpellations doivent être adressées au pouvoir algérien et comment la communauté internationale, et plus particulièrement l'Europe et notre pays, pourraient jouer un rôle plus actif et, en tout cas, plus efficace qu'aujourd'hui.

Comme mes collègues l'ont dit mieux que je ne pourrais le faire, des aspects économiques interfèrent effectivement dans l'analyse de la cause algérienne, mais la difficulté de l'État algérien à exercer un pouvoir sur l'armée pour que celle-ci intervienne de manière efficace est inquiétante et suscite un certain nombre de questions que je relayerai auprès de vous, monsieur le ministre.

Quelles sont les grandes lignes de la politique du gouvernement belge vis-à-vis de l'Algérie, notamment par rapport aux massacres et aux difficultés d'intervention de l'armée en Algérie ? Quelle est la position de la Belgique quant à la demande de mise sur pied d'une commission d'enquête internationale ? Quelles sont les mesures que le gouvernement belge compte prendre pour venir en aide à la population algérienne et pour lutter contre le terrorisme international qui pourrait peut-être se développer sur notre territoire, tout en veillant à ce que les Algériens qui ­ légalement ou illégalement au hasard de leur histoire personnelle ­ se trouvent dans notre pays, ne soient pas les victimes de ces questionnements sur le terrorisme ?

M. le président. ­ La parole est à M. Jonckheer.

M. Jonckheer (Écolo). ­ Monsieur le président, je voudrais également me joindre aux demandes d'explications de MM. De Decker et Loones. Comme ces derniers, plutôt que de suggérer des réponses définitives, j'aimerais surtout connaître l'analyse du ministre sur la situation en Algérie et sur les résultats de la visite de la troïka. J'aimerais aussi savoir si cette analyse a évolué depuis le débat qui a eu lieu à la Chambre le 8 janvier, débat auquel vous avez participé, monsieur le ministre.

Les écologistes se sont exprimés à la Chambre et ont notamment revendiqué la mise sur pied d'une commission d'enquête internationale qui est aussi un moyen d'aider à la liberté de parole en Algérie, notamment des Algériens eux-mêmes. Depuis lors, nous avons reçu au Sénat le secrétaire général du R.C.D. dont les propos étaient très pointus quant aux responsabilités dans les massacres des populations civiles, indiquant qu'ils étaient le fait exclusif de l'internationale islamiste, tout en étant relativement critiques sur la manière dont le gouvernement algérien gère la crise de sa propre société.

En écoutant MM. De Decker, Loones et Mme Delcourt, je ne me sens pas à même d'effectuer l'analyse des différents rapports de force entrant dans la composante de la société algérienne, mais je constate qu'il est difficile de faire la synthèse des différents points de vue exprimés par la population algérienne et par les intellectuels.

M. De Decker a cité Alexandre Adler que j'apprécie également et, pour ma part, je souhaiterais vous lire les propos tenus par Mme Salima Ghezali, directrice du journal La Nation , qui vient de recevoir le prix Sakharov, lors d'une interview qu'elle a accordée à un magazine français.

À la question de savoir ce que peut faire la communauté internationale pour arrêter les massacres, cette personnalité algérienne a répondu : « Plusieurs choses. D'abord, ce que font les Algériens eux-mêmes, les députés de l'opposition, tous ceux qui peuvent encore s'exprimer et interpellent les autorités sur la nécessité de protéger la population. Mais il faut savoir ce qu'est l'Algérie aujourd'hui. Ce pays a inventé l'embargo de l'intérieur, son propre rideau de fer, invisible mais présent. La presse, quand elle n'est pas directement partie prenante de la politique développée par le pouvoir, subit des pressions épouvantables. Les journaux interdits ne se comptent plus. Censures, assassinats de journalistes, harcèlements judiciaires ... La peur, la mort ... Aujourd'hui, il n'y a pas de parole libre en Algérie. Après le massacre d'Ar Raïs, qui a fait plusieurs centaines de morts, le chef du gouvernement a déclaré à la télévision que c'était horrible, mais que le peuple algérien était prêt à payer n'importe quel prix pour sa souveraineté... »

Tout en rappelant ma difficulté à pénétrer la complexité de la situation algérienne, je pense que nous devons défendre l'idée de cette commission d'enquête internationale ­ la troïka y répond d'une certaine façon ­ mais il convient aussi de favoriser la visite de parlementaires et l'invitation de personnalités. Par ailleurs ­ et c'est un point qui n'a pas été soulevé ­ le gouvernement belge devrait accepter d'accorder le droit de séjour temporaire à un certain nombre de réfugiés algériens qui en feraient la demande, comme ce fut le cas pour les ressortissants bosniaques. Le ministre de l'Intérieur ne me semble pas totalement partager ce point de vue.

La façon dont le gouvernement algérien essaie de repousser toute aide internationale au nom de sa souveraineté ne me semble pas compatible avec son incapacité à assurer la sécurité de sa population. Même si, sur le plan du droit international, le gouvernement algérien peut agir de cette manière ­ bien qu'un certain nombre de juristes ­ je pense notamment à l'ancien ministre Kichman ­ contestent cette interprétation ­, il me semble que nous pouvons nous aligner sur la déclaration d'un de vos collègues, M. Kinkel, qui disait : « L'Union européenne est légitimée à intervenir pour une triple raison : le risque pour la stabilité de toute la région, les crimes contre l'humanité qui sont perpétrés en Algérie et le problème des réfugiés. »

C'est donc avec cette préoccupation, monsieur le ministre, que j'écouterai attentivement votre réponse.

M. le président. ­ La parole est à Mme Lizin.

Mme Lizin (PS). ­ Monsieur le président, j'avais fait inscrire cette demande d'explications en fonction de la réunion du Conseil. En effet, nous souhaitons surtout que le ministre nous explique de manière détaillée quelles sont les suites de la réunion du Conseil et dans quelle mesure la Belgique pourrait participer à certaines actions décidées par le Conseil.

Si l'on s'intéresse à la zone de la Méditerranée, on ne peut s'empêcher de procéder à l'analyse de la démarche de la troïka. On peut bien entendu critiquer la presse algérienne qui est multiple et qui exerce son métier dans des conditions difficiles, mais il faut surtout faire preuve de modestie et essayer de comprendre la réalité du monde au sud de la Méditerranée. Il faut bien constater que l'exercice de la troïka a frisé le scandale ! Et c'est bien là la perception qu'en ont les médias. Sur la base d'une pression très forte dans les médias européens qui ont montré des gens assassinés dans des conditions ignobles et des survivants indiquant clairement qui étaient les assassins et réclamant une protection, on a annoncé que l'on apporterait une aide. Et que constate-t-on ? Après avoir offert ces éléments à l'opinion publique européenne dans des circonstances dramatiques, on les a détournés après quinze jours et l'on fait preuve d'une absence de mémoire qui est scandaleuse. C'est une honte pour l'Europe !

En quelque sorte, on a répondu à ces assassinats que l'on allait y aller et on y va une demi-journée ! Et si l'on analyse le curriculum vitae des personnes qui sont envoyées sur place, on constate qu'elles ne connaissent pas le pays et qu'elles ne se rendent même pas sur le terrain. Ceux qui connaissent l'Algérie peuvent aisément imaginer quel a été le rythme de cette visite. Le rapport rédigé à la suite de ce déplacement en Algérie n'aborde pas la question essentielle, à savoir comment l'Europe va aider l'Algérie à se débarrasser des tueurs.

Si indépendamment de tout le battage médiatique, vous interrogez un citoyen européen moyen ­ donc pas quelqu'un dont le père a participé à la guerre d'Algérie ni un journaliste dont la liaison avec l'armée ou les services français est importante ­, un citoyen neutre, il vous répondra que nous devons aider l'Algérie à se débarrasser de ces bandes de tueurs.

Il faut savoir également que les tueurs dont nous parlons ne sont pas des assassins comme on peut en imaginer dans un pays comme le nôtre, dans des pays européens ou américains. Ces bandes de tueurs sont connues de tous ceux qui s'intéressent à cette question pour la folie particulière qui est liée à l'extrémisme religieux.

Il est important de rappeler que nous avons entendu en commission le témoignage d'un des responsables de l'opposition, M. Saadi, qui nous a dit comme il l'a fait d'ailleurs également dans l'émission d'Arte, qu'à l'école publique on explique à sa petite fille de huit ans que la femme adultère peut être tuée avec de préférence un couteau mal affûté et toujours par l'arrière pour que la mort soit plus lente et la réflexion en prévision du contact avec Allah plus fructueuse. Voilà les fous dont on parle ! Ce sont des jeunes âgés de 18 à 25 ans qui sont « allumés » pour ne pas dire drogués. C'est de ce genre de tueurs dont on parle, monsieur le ministre, et de rien d'autre !

Mais, dans le même temps, nous sommes victimes d'une fameuse campagne qui n'a strictement rien à voir avec cela.

Aussi, lorsque la troïka se rend sur place le temps d'une demi-journée et qu'elle revient avec le rapport dont nous avons vu un extrait, j'appelle cela un scandale. Nous parlons d'un pays extrêmement complexe, dans lequel ces bandes de tueurs ne sont qu'un élément de la complexité politique. Je rappelle qu'en Algérie, il existe une opposition qui combat. Il s'agit d'un enjeu important de démocratie dans le pays le plus évolué du monde arabe. L'Algérie est un pays phare sur ce plan, mais c'est aussi un pays qui traîne un boulet terrible, à savoir le fait de s'être libéré dans une guerre de décolonisation mille fois plus meurtrière encore que ce que nous vivons actuellement, d'un pays européen qui n'a pas encore tout à fait compris que ces liens-là étaient coupés.

Je ne compte pas refaire l'histoire de l'Algérie ni aborder tous les éléments du passé. Mais il faudra bien un jour ­ je le ferai sans doute dans quelques mois ­ décortiquer la campagne de désinformation médiatique qui est en cours concernant l'Algérie, parce que cette campagne est importante, elle est financée et elle n'est pas due au hasard.

J'ai parlé de scandale à propos de la troïka : pas le temps de voir, pas le temps de comprendre, mais le temps de préparer des conclusions qui, à mon avis, sont trop faibles. On y maintient une sorte de chapitre sur le nécessaire dialogue, mais un dialogue auquel on croit peu, puisque l'on est arrivé en ayant de nombreux a priori et qu'en réalité, on a peu écouté ses interlocuteurs. Or, un bon dialogue implique d'admettre que son interlocuteur est confronté à une réalité qui est précisément celle que l'on affirme vouloir comprendre. Les interlocuteurs algériens demandent simplement : aidez-nous à éliminer les tueurs. Et c'est précisément ce que pense également chez nous le citoyen moyen : aidez-les à éliminer les tueurs.

À cet égard, les conclusions du rapport comportent un point à propos duquel je voudrais que vous explicitiez les différentes positions.

En ce qui concerne le dialogue, on peut pour le moins estimer qu'il n'a pas été et n'aurait pu être approfondi. Mais j'aimerais savoir quelles opinions existent au sein du Conseil au sujet de l'intensité du soutien à la lutte antiterroriste, qui est la base d'une véritable collaboration. J'ai eu le sentiment que dans la préparation du Conseil de lundi se développaient, d'une part, un axe franco-britannique sur la question d'un minimum et, d'autre part, une position allemande nettement plus forte qui aurait souhaité ­ c'est d'ailleurs l'origine de tout ce débat sur la troïka ­ que l'on aille plus loin.

Monsieur le ministre, sur ce point précis des conclusions ayant trait à la nature de la continuation des échanges et du soutien à la lutte antiterroriste, je souhaiterais que vous nous informiez du contenu des discussions et, surtout, que vous nous fassiez part de votre appréciation des équilibres du texte final dont nous avons pu prendre connaissance. D'après les exposés qui vous ont été faits, l'Algérie a-t-elle formulé des demandes précises en matière de soutien à la lutte antiterroriste ? Je vous avais déjà posé des questions similaires avant que la troïka se rende sur place, mais vous m'aviez renvoyée vers votre collègue, le ministre de l'Intérieur. Or, à l'évidence, ces matières ne peuvent relever d'options définies par le ministère de l'Intérieur et, pour partie, par le ministère de la Justice.

Quand il s'agit de définir une politique étrangère répondant de façon positive à une demande d'aide en vue d'éliminer ces groupes de tueurs particuliers, l'impulsion doit venir du ministère des Affaires étrangères.

Comme cela a figuré dans la presse algérienne, notamment dans L'Authentique et Le Matin , des relais de ces groupes de tueurs existent en Europe. En tant que représentant de la Belgique, vous êtes-vous proposé pour effectuer une analyse, si pas unanime du moins coordonnée, de la façon dont nous répondons à cette demande ? Le gouvernement algérien a en effet déclaré que si nous voulions aider son pays à éliminer ces groupes de tueurs, il était indispensable de couper ceux-ci de leur base arrière dans les pays européens. Cette question est, parmi d'autres, au centre d'un vrai discours sur l'Algérie.

Si l'on se réfère aux paroles de la petite fille de huit ans de M. Saadi, la solution réside dans le contrôle de l'enseignement et d'une série de pratiques économiques et de développement en Algérie. Cela ne peut se réaliser que par la négociation, portant sur dix ans, d'un vaste programme de reprise en mains d'un pays partenaire important. Vous ne pourrez parler, dans de bonnes conditions, de collaboration et de contact, d'une évolution positive de la situation algérienne et de la présence européenne que si vous acceptez de jouer franc jeu sur la question de la lutte antiterroriste. Si j'éprouve quelques craintes à cet égard, c'est parce que le texte final des conclusions du Conseil sur ce point reflète plutôt un choix totalement inverse.

Avez-vous eu des précisions sur la nature du soutien que l'Algérie souhaite obtenir, notamment en matière de logistique, d'échange de renseignements ou autre ?

Si l'Algérie se borne à dire que nous connaissons suffisamment la situation que pour agir à bon escient, j'estime que nous ne pouvons plus renvoyer cette matière au seul ministère de l'Intérieur.

Qu'ils se trouvent à Bruxelles, à la mosquée de la rue de Porto à Liège ou ailleurs, ces groupes sont en connexion permanente avec les autres groupes, qu'ils soient basés hors de l'Europe ou en Suisse, en Allemagne, en France ou en Grande-Bretagne. Nous nous disqualifierons si nous n'abordons pas cette question de façon précise et claire, en réponse à cette volonté dont nous nous targuons de participer à la solution de la crise algérienne.

A-t-on envisagé, à l'issue de ce Conseil, de mettre en place un groupe permanent de contact avec l'Algérie ou se bornera-t-on à inviter M. Attaf à Londres en lui disant une nouvelle fois que nous savons mieux que lui ce qu'il faut faire, alors que Londres est depuis longtemps dénoncée ­ pas uniquement par les Algériens ­ comme un lieu de liberté totale pour ces groupes ? Les assassinats ont été structurés sur plusieurs périodes. En Allemagne, en Grande-Bretagne et en Belgique, ils ont été revendiqués d'abord à l'égard des intellectuels et ensuite des journalistes. Une série d'opérations ont été revendiquées depuis notre territoire.

Nous devons nous souvenir de tous ces faits qui aboutissent au mois de ramadan. Actuellement, des terroristes ne sont plus en mesure de tuer des intellectuels et des journalistes de façon ciblée; ils sont capables d'actions non ciblées et de tuer les gens les plus pauvres dans des lieux bien difficiles à protéger.

Les réseaux doivent être présents dans notre esprit. En Belgique, une partie importante de leurs membres n'ont plus la nationalité algérienne mais sont naturalisés belges. Allons-nous continuer à faire semblant que nous n'avons pas compris la question ?

Nous reviendrons souvent sur l'Algérie. C'est un pays que nous connaissons mal et que nous ne respectons pas du tout. Par une volonté de fierté anormale, on néglige d'écouter ceux qui ont la plus lourde charge dans ce travail qui concerne pourtant l'avenir de l'Europe. Nous entendons des voix qui représentent une partie de l'Algérie, celles de l'opposition. Ces voix sont très respectables mais souvent minoritaires. Quelques rares Européens ont encore aujourd'hui la possibilité de communiquer avec ceux qui essaient réellement de combattre ce phénomène. Je pense, monsieur le ministre, que vous êtes de ceux-là.

J'aimerais que vous puissiez répondre à ces différentes questions et nous dire comment la Belgique se positionnera dans les prochaines semaines.

M. le président. ­ La parole est à M. Destexhe.

M. Destexhe (PRL-FDF). ­ Mon intervention sera brève, monsieur le ministre. Je vous ai d'ailleurs transmis mes questions sur l'Algérie, sujet qui, comme beaucoup d'entre nous, me plonge dans la perplexité. À force de lire la presse et d'analyser les résultats des visites officielles, j'ai tout de même acquis deux convictions.

Tout d'abord, la majorité des tueurs me semble clairement identifiée. Il ne faut pas les qualifier de groupes opposants armés mais de terroristes islamistes. Cela dit, ce n'est pas une raison pour donner un blanc-seing au gouvernement, même s'il ne faut certainement pas placer sur un pied d'égalité les terroristes ismalistes et le gouvernement.

Ensuite, j'estime que l'Algérie n'est ni une dictature ni une démocratie. Il existe un certain nombre de libertés dans la société algérienne. Comme le répète régulièrement une parlementaire de l'opposition, du R.C.D., il faut peut-être que l'Europe apprenne à compter jusqu'à trois pour prendre en compte trois acteurs : les terroristes islamistes, le gouvernement, et une société civile et des partis démocratiques dont nous sommes sans doute beaucoup plus proches par les valeurs et les convictions. Ce sont aussi ces forces-là qu'il faut soutenir, que ce soient les journaux, les mouvements de la société civile ou les forces démocratiques.

Je vous pose donc trois questions concrètes, monsieur le ministre, que je vous ai d'ailleurs adressées par écrit.

Premièrement, il est très important de faire venir un maximum d'Algériens en Belgique et de leur donner l'opportunité de témoigner sur ce qu'ils vivent. Il est essentiel que des parlementaires de l'opposition, des militants des droits de l'homme, des associations de victimes, des journalistes puissent venir régulièrement, et pas seulement lorsque l'actualité met le sujet en exergue, témoigner de la situation en Algérie.

À cet égard, je souhaiterais obtenir des précisions quant à votre politique en matière d'octroi de visas susceptibles d'être accordés à des personnes qui viendraient témoigner en Belgique à la faveur de brefs séjours.

Par ailleurs, des journalistes ou des militants d'organisations, telles que Médecins sans frontières ou Handicap international, continuent à se heurter à certaines difficultés pour obtenir des visas à destination de l'Algérie. J'ai moi-même demandé un visa à titre personnel et, à cette occasion, j'ai pu vérifier le bien-fondé de ce constat.

Monsieur le ministre, je crois qu'il serait souhaitable que vous essayiez d'effectuer un certain nombre de démarches ­ amicales ou autres ­ auprès des autorités algériennes afin de les inviter à faciliter l'entrée des citoyens européens dans leur pays, de manière à maintenir un flux de contacts.

Les autorités algériennes refusent l'offre européenne en matière d'aide humanitaire. Or, la presse publie régulièrement des articles relatant la détresse des victimes, notamment des femmes répudiées ­ Mme Lizin y a fait allusion ­, des personnes déplacées, des enfants abandonnés. L'Algérie peut sans doute, jusqu'à un certain point, faire face à ses besoins humanitaires. Toutefois, des organisations internationales comme la Commission européenne ou privées, telles que Handicap international ou Médecins sans frontières, sont désireuses de s'impliquer. Il serait regrettable que l'Algérie persiste dans son refus.

Enfin, monsieur le ministre, je voudrais vous poser une dernière question que je n'ai pas eu le temps de vous adresser. Elle concerne les réseaux de soutien aux terroristes islamistes. Vous vous êtes déjà expliqué à ce sujet quant à la situation en Belgique. Toutefois, l'Angleterre est souvent citée comme étant un centre important pour les collectes de fonds, un lieu dont émanent des communiqués de presse revendiquant certains massacres et où des terroristes ont fixé leur résidence. Des collègues anglais m'ont informé que ces problèmes ne font l'objet d'aucun débat à la Chambre des Communes ou à la Chambre des Lords.

Dès lors, monsieur le ministre, j'aimerais savoir si vous avez pu en discuter avec vos homologues britanniques.

De voorzitter. ­ Het woord is aan minister Derycke.

De heer Derycke, minister van Buitenlandse Zaken. ­ Mijnheer de voorzitter, het is volkomen begrijpelijk dat de collega's die begaan zijn met de situatie in Algerije, elke dag nieuwe vragen hebben. Ik heb dergelijke vragen ook en daarom probeer ik zoveel mogelijk informatie in te winnen over de situatie. We hebben gelukkig een goede ambassadeur in Algerije en krijgen langs deze weg dus zeer vele inlichtingen. Toch blijft de situatie uiterst complex; er is geen gemakkelijke oplossing.

In het verleden hebben de Europese Unie en de afzonderlijke Europese landen inderdaad een vrij afwachtende houding aangenomen. Iedereen dacht dat de verkiezingen, die uniek zijn in de Arabische wereld, meer zouden oplossen. Men hoopte dat de situatie zou verbeteren. Dat blijkt niet zo. Er is sprake van een zekere evolutie, maar die gaat niet snel genoeg naar West-Europese normen.

Ik zal trachten de visie van de Belgische regering en de Europese Unie te verduidelijken en op de meeste vragen te antwoorden.

Ces derniers mois, le maquis islamique ­ surtout sa faction dominante, les G.I.A. ­ s'est de plus en plus marginalisé; sur ce point, je suis d'accord avec M. De Decker. Les G.I.A. ont constaté que la majorité des partis politiques avaient participé aux élections législatives et municipales en s'inscrivant ainsi dans le processus de sortie de crise élaboré par le président Zéroual. Ils constatent également que le maquis islamique est ébranlé : il n'existe plus d'unanimité sur la marche à suivre. Le F.I.S. et son bras armé, l'A.I.S., ont entamé avec le pouvoir des pourparlers secrets qui ont débouché sur l'instauration d'un cessez-le-feu unilatéral de l'A.I.S., annoncé publiquement en septembre dernier. Deux autres groupuscules du maquis islamique ont suivi cet exemple au début octobre.

Finalement, les G.I.A. se rendent compte sur le terrain que la population, même dans ces couches pro-islamiques, commence à les lâcher. Ils réagissent à tout cela en accentuant ce qu'ils appellent la « stratégie de tension » ­ drôle de terme pour un carnage dont nous sommes témoins chaque jour !

Désormais, la terreur des G.I.A. frappe tout le monde, y compris la population civile, y compris la frange pro-islamique qui les avait aidés dans le passé. Évitant de prendre trop de risques, face à une armée qui, après une étonnante passivité au mois de septembre dernier, se montre, depuis la fin octobre, de nouveau plus déterminée, les G.I.A. préfèrent s'attaquer à des hameaux et à des bourgs de montagne isolés, comme le démontrent les massacres de ces dernières semaines. Ils sont aidés en cela par des facteurs de taille : la géographie, dans de nombreuses régions algériennes, se prête parfaitement au type d'opérations pour lesquelles ils ont opté. Il suffit de se souvenir que la France, malgré d'énormes moyens militaires et près de 150 000 auxiliaires algériens ­ les fameux harkis ­ n'est jamais parvenue à éliminer la résistance armée.

Il est difficile de combattre le terrorisme, surtout si les combattants ne portent pas d'uniforme, ne frappent que la nuit et profitent de tous les avantages que le terrain accidenté leur offre. La comparaison, avancée par M. De Decker, de la méthodologie des G.I.A. avec celle des Khmers rouges ­ même si le terrain est différent et encore plus accidenté ­ est exacte.

Le ramadan de l'année passée s'était déjà caractérisé par une activité accrue des G.I.A. et par des massacres de civils. Celui de cette année le sera aussi; ainsi en a décidé le soi-disant « émir national » des G.I.A., Antar Zouabri. Les massacres de ces dernières semaines le confirment.

De toute évidence, ces massacres sont l'oeuvre des G.I.A. et d'autres groupes de la « nébuleuse islamique ». Tous les ministres des Affaires étrangères des Quinze ainsi que le commissaire européen en charge des relations avec les pays méditerranéens, M. Marín, partagent ce point de vue.

Mme Lizin a donc raison sur ce point. Même si nous avons eu une longue controverse sur les responsabilités du gouvernement et de l'armée, les Quinze s'accordent pour pointer du doigt les G.I.A. C'est non seulement de l'avis de l'Union européenne mais également des principaux représentants des forces démocratiques algériennes.

En décembre dernier, répondant à une question orale, j'ai cité textuellement Mme Messaoudi, parlementaire algérien, élue pour le parti R.C.D. de Saïd Sadi ­ je les ai d'ailleurs rencontrés l'un et l'autre la semaine dernière.

L'engagement de Mme Messaoudi pour la démocratie et les droits de l'homme ­ et de la femme ­ en Algérie est bien connu. On ne peut donc la suspecter d'être à la solde du pouvoir. Mme Messaoudi déclarait récemment dans une interview accordée à l'hebdomadaire Knack : « Ce sont les G.I.A. qui tuent. Comment est-ce que je le sais ? Parce qu'ils publient des communiqués. Et parce qu'on les voit. Les survivants des tueries peuvent les décrire. Les G.I.A. ont tout perdu dans ce pays. Ils ont encore une carte à jouer : l'internationalisation du conflit. Et ils jouent cette carte : en organisant de plus en plus de bains de sang et en stimulant ainsi l'appel à une intervention étrangère. Les G.I.A. espèrent ainsi obtenir une place à la table de négociation. »

Je partage entièrement cette analyse. Ce à quoi nous assistons actuellement est un chantage cynique : l'arrêt des massacres en échange d'une légitimation politique.

J'en reviens à la position de l'Union européenne qui peut se résumer comme suit : vive préoccupation face aux atrocités dont est victime le peuple algérien; condamnation, sans réserve, du terrorisme et expression de notre solidarité avec le peuple algérien; encouragement aux autorités algériennes à poursuivre le processus de réformes économiques et politiques qui a été engagé et dont plus personne ne parle actuellement. Mais j'y reviendrai.

En matière économique, l'Algérie coopère avec les institutions de Bretton Woods à la satisfaction de ces dernières. En matière politique, des élections législatives et municipales ont été organisées. Le rapport des observateurs de l'O.N.U., tout en relevant des lacunes et en formulant des critiques, a conclu que, somme toute, les élections législatives s'étaient plus ou moins correctement passées. Les différents partis politiques ont accepté les résultats et ont occupé leurs sièges au Parlement. L'Union encourage les autorités algériennes à poursuivre un dialogue aussi large que possible avec toutes les forces politiques ­ y compris islamiques ­ qui rejettent la violence comme moyen politique et qui acceptent le cadre constitutionnel de la République algérienne; rappel de l'importance que l'Union attache au respect par les autorités algériennes, des droits fondamentaux inscrits dans la Constitution algérienne et dans les conventions internationales auxquelles l'Algérie a souscrit; rappel de l'obligation des autorités algériennes d'assurer au maximum la sécurité de la population civile; encouragement à l'ouverture et à la transparence : les autorités algériennes ont tout à gagner d'une politique d'ouverture et de transparence vis-à-vis des médias tant algériens qu'internationaux; refus d'ingérence dans les affaires intérieures algériennes; la solution au problème algérien doit venir des Algériens eux-mêmes.

De afschuwelijke moordpartijen die de GIA gedurende de eerste week van de ramadan aanrichtte, hebben de Europese Unie ertoe aangezet een nieuw initiatief te nemen ten aanzien van Algerije. Er werd voortgebouwd op de voorstellen van een aantal ministers van Buitenlandse Zaken, waaronder de Duitse, aan hun Algerijnse ambtsgenoot. Het voorzitterschap besliste om een trojka naar Algiers te sturen. Aanvankelijk rezen er problemen over het niveau waarop de zending zou worden georganiseerd, maar ze vond uiteindelijk toch plaats op 19 en 20 januari jongstleden.

De trojka is in Algiers geweest, maar de Algerijnse regering heeft het haar niet makkelijk gemaakt. De waarheid dient te worden gezegd. Er werden bergen van moeilijkheden opgeworpen bij het vastleggen van het programma. De zending had beter kunnen verlopen.

De resultaten van de missie worden door sommigen bestempeld als too little and too late . Het eerste doel van de missie was echter het op gang brengen van een dialoog tussen de Europese Unie en de Algerijnse overheid. Tot nu toe had Algerije de voorkeur gegeven aan bilaterale contacten met de Europese lidstaten. Het eerste doel werd dus bereikt. Over het gehalte, de kwaliteit en de inhoud van de gesprekken kan men lang discussiëren, maar de dialoog met de Unie werd ontegensprekelijk aangeknoopt. De heer Attaf, minister van Buitenlandse Zaken van Algerije, zal trouwens in februari Londen aandoen om de dialoog verder te zetten. Daarna behoort een nieuwe trojka misschien tot de mogelijkheden. Hij zal wellicht op een hoger niveau worden georganiseerd en ook andere onderwerpen aansnijden.

De eerste trojka is er alleszins in geslaagd om de Europese bekommernissen en suggesties kenbaar te maken. Ik zal ze kort opsommen.

Ten eerste wil de Europese Unie met alle politieke formaties die geweld als politiek middel afzweren en het bestaande constitutionele kader aanvaarden, een zo breed mogelijke politieke dialoog op gang brengen.

Ten tweede herhaalt de Unie haar aanbod om humanitaire hulp te verlenen aan de slachtoffers van de gewelddaden. Ik ben van mening dat het belangrijk is hierover een sereen gesprek te voeren met Algiers.

Ten derde vraagt de Unie aan de Algerijnse autoriteiten om een grotere transparantie aan de dag te leggen ten aanzien van internationale instellingen en niet-gouvernementele organisaties en om persorganen toe te laten teneinde alles in een beter daglicht te kunnen plaatsen.

À cet égard, je précise à M. Destexhe que l'Europe a proposé à maintes reprises et à différents niveaux l'implication d'O.N.G. belges et autres pour aider les Algériens à la suite des massacres commis. Jusqu'à présent, l'Algérie a fermement décliné cette offre que nous devons, à mon sens, maintenir.

Verscheidene collega's hebben het belang beklemtoond van contacten tussen Europese en Algerijnse parlementairen. Ik kan bevestigen dat een eerste resultaat werd geboekt : in februari gaat een delegatie van het Europees Parlement naar Algiers. Uit de samenstelling blijkt dat het een afvaardiging van niveau is; verscheidene politieke zwaargewichten nemen eraan deel.

Tot slot heeft de Unie haar bereidheid te kennen gegeven om over alle onderwerpen met Algiers van gedachten te wisselen, inclusief het Algerijnse voorstel tot samenwerking in de strijd tegen het terrorisme.

Je dirai à Mme Lizin, qui a déjà proposé des initiatives et posé les mêmes questions, que les Algériens ont effectivement demandé la collaboration de l'Union européenne pour lutter contre le terrorisme. L'Union a marqué son accord pour discuter des questions de sécurité tout en invitant l'Algérie à formuler clairement ses demandes à l'égard de l'Union européenne. Ainsi, cette dernière pourra répondre plus facilement et voir à quel niveau elle peut être utile.

La phraséologie a son importance : quand M. Attaf se rendra à Londres pour rencontrer la présidence anglaise, il convient qu'il ait des propositions concrètes à lui soumettre. En effet, une discussion dans le vide ne présente aucune utilité.

De politieke dialoog is dus gelanceerd. Dat we uiterst voorzichtig zullen moeten zijn, is juist, want het is moeilijk om met de Algerijnen te praten. Dit komt gedeeltelijk voort uit het verleden en ik heb daar ook wel begrip voor. Het zal dus niet gemakkelijk zijn. Het succes van de oefening zal afhangen van talrijke factoren en vooral van wederzijds respect en begrip.

À cet égard, je partage l'avis de Mme Lizin. Quelques pays n'ont effectivement pas fait preuve d'un tel respect envers l'Algérie dans le passé. La Belgique ne fait pas partie de ces derniers car, après que les difficultés soient survenues, j'ai été le premier ministre à me rendre en Algérie pour discuter de la situation.

M. Saïd Saadi m'a dit personnellement que s'il est important de discuter, il faut néanmoins être attentif à leurs fiertés et à leurs exigences. Si des discussions sont entamées en l'absence d'un respect mutuel, il sera impossible de résoudre les problèmes.

Ik heb reeds gezegd dat ik voorstander ben van een internationale onderzoekscommissie.

Mais, à l'échelon européen, je dois préciser qu'un accord global n'est pas encore intervenu en ce qui concerne la mise sur pied d'une telle commission. Comme vous avez pu le constater, la même hésitation prévaut au niveau des Nations unies. On ne peut imposer une telle commission. En effet, comme je viens de l'expliquer à M. Destexhe, qui a également une bonne connaissance de cette problématique, il n'existe pas encore, à mon grand désespoir, de droit international d'intervention humanitaire.

La Belgique est un des pays qui intervient régulièrement à New York pour obtenir ce droit d'ingérence.

Dans le cas présent, la discussion porte sur le problème délicat du droit pénal international, l'ingérence humanitaire ne représentant qu'une infime partie de ce dossier dont les conséquences sont considérables sur le plan des relations internationales.

Ik ben daar dus voorstander van en België werkt er ook zeer hard aan, omdat we van mening zijn dat zo'n mogelijkheid in het internationaal bestel moet bestaan. In dergelijke discussies stel ik echter steeds vast dat het negentiende-eeuwse begrip van de « État-nation » het nog altijd haalt op een concept van internationale inmenging hetzij humanitair, hetzij strafrechtelijk. Ook in de Rwanda-commissie hebben we trouwens die discussie gevoerd. Toch geloof ik in het ingrijpen van de internationale gemeenschap en als klein land kunnen we in deze discussie even belangrijk zijn als de grote landen, indien we de moed hebben het punt voortdurend naar voren te schuiven. Iedereen weet hoe sterk Algerije gekant is tegen een internationale enquêtecommissie.

Ik wil hier opnieuw mevrouw Messaoudi citeren. Ze behoort al jaren tot de oppositie en is dus zeker niet regeringsgezind. Toch zegt ze het volgende en ik vraag grondig op haar woorden in te gaan. Ik citeer : « Algerije is onafhankelijk sinds 1962. Van 1955 tot 1962 hebben we voor onze vrijheid moeten vechten. Ik ben nu 39 jaar en ben geboren vier jaar na de onafhankelijkheid. Ik kan u verzekeren dat geen enkele Algerijn, voor zover hij geen moordenaar is, een buitenlandse inmenging zal toestaan. Zodra een dergelijke interventie werkelijkheid wordt, zullen 99 Algerijnen op de 100 zich rond de regering scharen tegen het buitenlands interventionisme. Dit is het resultaat van de geschiedenis. »

Deze analyse komt van een vertegenwoordiger van de Algerijnse democratische oppositie die het Algerijns drama dag in dag uit meemaakt en zeker niet kan worden verdacht van medeplichtigheid aan « le pouvoir ».

Als politicus kon ik tot voor kort niet begrijpen waarom de Algerijnse parlementairen, of ze nu tot de meerderheid of tot de oppositie, tot de fundamentalistische, conservatieve, linkse of gelaïciseerde strekking behoren, niet het initiatief namen om samen, over de partijgrenzen heen, de evolutie van de veiligheidssituatie in hun land en de moordpartijen te evalueren.

De jongste maanden opteerden de Algerijnse autoriteiten immers geleidelijk aan voor een meer open en transparant informatiebeleid. Dat stemt mij positief. De Algerijnse pers, inclusief de televisie, krijgen gemakkelijk toegang tot de plaatsen van de moordpartijen en kunnen ook contacten leggen met de overlevenden, tot in de hospitalen toe. Dit is totaal nieuw. Nagenoeg alle verschrikkelijke reportages die de afgelopen weken op de westerse televisiestations werden uitgezonden, zijn afkomstig van de Algerijnse TV. Ik vond het jammer dat het Algerijns parlement op deze toenemende openheid niet inspeelde.

Een tweetal weken geleden kwam hierin echter verandering. Sommige oppositiepartijen, onder meer de RCD van Saïd Saadi en de Trotskistische PT van mevrouw Hanoun eisten dat de regering het parlement in detail zou inlichten over de veiligheidssituatie, over de recente moordpartijen en over de maatregelen die de regering zal nemen om de slachtoffers te helpen. De meerderheidspartijen, inclusief de presidentiële RND, ondersteunden dit initiatief.

Begin vorige week lichtte de Algerijnse premier het beleid van zijn regering toe in het parlement en voor de camera's. De parlementaire debatten werden integraal uitgezonden. Hij kreeg echter een onvoldoende en dient zich op 2 februari opnieuw in het parlement te verantwoorden.

Ik krijg de indruk dat het parlement geleidelijk aan vat krijgt op de regering en misschien ook op de situatie. Het neemt zijn democratische taak meer en meer op, en dit is zeer interessant en bemoedigend voor de toekomst. Ik ben er immers van overtuigd dat de toekomst van Algerije mede bepaald wordt door de mogelijkheid van de nieuwe staatsorganen om hun constitutionele rol ten volle te spelen. Alleen zo kan worden bewezen dat het alternatief zich binnen de instellingen en niet in het maquis bevindt. Het is vooral aan dit aspect dat ik denk, wanneer ik erop wijs dat de oplossing niet van buitenuit, maar van de Algerijnen zelf moet komen.

Je formulerai encore quelques remarques en guise de conclusion.

Je pense qu'il est important de maintenir le dialogue avec l'Algérie à tous les niveaux. Cela vaut pour l'Union européenne, pour les gouvernements européens et les parlements comme pour les O.N.G.

Je tiens à préciser aux intervenants qu'en matière de visas, nous menons une politique très ouverte. Des parlementaires ou des journalistes qui souhaitent venir exposer et défendre leur cause en Belgique peuvent obtenir un visa en deux semaines, délai nécessaire à la concertation au sein du groupe Schengen. Je pense que c'est une bonne chose. Comme d'autres, Mme Messaoudi a eu l'occasion de venir s'exprimer en Belgique à plusieurs reprises.

À cet égard, je ne puis d'ailleurs qu'approuver la décision du Parlement belge d'inviter dans les plus brefs délais une délégation du Parlement algérien composée de représentants de tous les partis, des Trotskistes jusqu'aux fondamentalistes purs et durs du parti Ennahda. Ce genre de contact nous permettra de mieux cerner la réalité algérienne et les parlementaires et politiciens algériens comprendront mieux quelles sont nos préoccupations. J'ai donné instruction à notre ambassadeur en Algérie d'appuyer l'invitation qui a déjà été adressée au Parlement algérien. Un premier contact a eu lieu à ce sujet avec M. Bensalah, président du Parlement algérien. Je pense toutefois que cette invitation ne pourra se concrétiser qu'après la visite d'une délégation du Parlement européen à Alger en février.

Ces derniers temps, j'ai pu constater qu'il y avait en Europe une volonté claire de mieux comprendre la situation algérienne. Ces dernières semaines, diverses chaînes de télévision ont d'ailleurs consacré plusieurs émissions à l'Algérie. Tant des Européens que des Algériens ­ politiciens, journalistes, intellectuels et artistes ­ ont participé à ces reportages. Je pense entre autres aux témoignages de Bernard-Henri Levy et d'André Glucksman qui se sont rendus sur place. Ces reportages ont permis de présenter au public européen une image plus nuancée et de briser l'image stéréotypée de l'Algérie perçue trop souvent comme un pays composé de militaires au pouvoir et d'islamistes dans le maquis alors que la réalité est beaucoup plus complexe.

J'ai par contre été choqué de voir l'interview de deux représentants du G.I.A., établis à Londres, qui revendiquaient ouvertement les massacres et les justifiaient. J'ajoute que les communiqués du G.I.A. sont traditionnellement diffusés à partir de Londres. Il n'est dès lors pas étonnant que d'aucuns en Algérie ­ et pas seulement des représentants du pouvoir ­ se posent des questions sur l'attitude européenne et abordent leurs interlocuteurs européens avec une certaine suspicion. Je crois que sur ce point, madame Lizin, vous avez raison.

Verschillende sprekers hebben erop gewezen dat er voor heel Noord-Afrika gevaar dreigt, zij het niet overal even intens. De aanslag in Luxor van november jongstleden bracht op dramatische wijze aan het licht dat er ook daar een weliswaar numeriek zwak Islamitisch maquis bestaat. Recentelijk ingewonnen informatie zegt dat Lybië eveneens met fundamentalisme geconfronteerd wordt en hetzelfde moet worden gezegd van een hele reeks andere landen van Noord-Afrika.

Ik wil de uitdagingen verbonden aan deze situatie kort in een iets bredere context plaatsen. Een belangrijke factor is de bevolkingsexplosie. Met een aangroei van 3 % of meer per jaar, verdubbelt de bevolking van deze landen om de 20 à 25 jaar. Ze kennen bovendien slechts een weinig ontwikkeld of in het geheel geen systeem van sociale zekerheid. Er zijn geen sociale vangnetten en vrijwel geen herverdelingssystemen.

Ten derde moeten de economiën van die landen dringend worden hervormd. De protectionistische staatseconomie is daar veel te lang in handen gebleven van het regime en het leger, wat de economie reeds decennia lang verstikt. Ze moet geleidelijk worden omgeschakeld naar een vrije markt economie.

De ervaringen in Oost-Europa leren ons dat een dergelijke omschakeling in een eerste fase altijd gepaard gaat met een toename van de werkloosheid en van de sociale spanningen. We moeten dus zeer voorzichtig zijn met de toepassing van de recepten van het IMF en niet te snel denken dat die voor iedereen op dezelfde manier kunnen gelden. Dit geldt trouwens ook voor Zuid-Oost-Azië. De recepten van het IMF zijn vaak te algemeen en niet voldoende genuanceerd. Het opleggen van strakke recepten in een land met politieke spanningen vergroot die spanningen alleen maar.

Ten vierde moeten er politieke hervormingen worden doorgevoerd, moeten er geleidelijk meer democratische machtstructuren tot stand komen om het politieke leven beter te kunnen sturen en de sfeer van wantrouwen of zelfs van vijandigheid tegenover het Westen weg te werken.

We stellen dit ook vast in Turkije, waar initiatieven van het Westen vaak worden ervaren als verbonden met een dominantie van de christelijke op de Islamitische waarden. We moeten zeer voorzichtig te werk gaan. Ons « suprematistisch » westers katholiek denken plaatsen tegenover het islamitisch denken, is zeer gevaarlijk en wordt meer en meer tegen ons gebruikt. We moeten daarin tot een gezond evenwicht komen en bereid zijn om hierover te discussiëren.

Een laatste element is de snelle verspreiding van het politiek islamisme, in de eerste plaats aan de universiteiten, in de verpauperde volkswijken en in de grote steden.

Al deze factoren samen creëren een ideale voedingsbodem voor het gewapend radicaal islamitisch verzet met zijn eenvoudige heilsboodschap van de stichting van een islamitisch paradijs op aarde na een geweldadige tabula rasa van de huidige politieke, economische en sociale structuren en van de intelligentsia. Dat is natuurlijk niet ons project, maar het wijst wel op de immense verantwoordelijkheid van het Westen. We moeten al het mogelijke doen om te pleiten voor redelijkheid en om samen naar oplossingen te zoeken.

Je voudrais ajouter, madame Lizin, que lorsque l'on veut parler de l'Algérie, certains pays sont immédiatement exclus de la discussion. J'estime toutefois qu'il faut s'efforcer de chercher les convergences. Au cours des discussions de lundi dernier, j'ai pu constater que des pays aux positions extrêmes, à savoir l'Allemagne et la France, se sont malgré tout concertés pour tenter de dégager une approche commune. Or, c'est précisément cela qui est important. Le fait de se rendre en Algérie pour y prêcher le bien en camouflant nos propres différences, est une méthodologie qui ne me donne aucun espoir pour l'avenir. D'ailleurs, on ne trompe pas les Algériens.

Tot hier mijn antwoord, dat helaas niet volledig is; men kan uren over dit probleem discussiëren.

We moeten de situatie op de voet volgen. De volgende stap is het bezoek van minister Attaf in Londen, waar voorstellen voor samenwerking in de bestrijding van het terrorisme en de verdere politieke evolutie besproken worden.

Ik ben blij dat alle partijen in het halfrond blijk geven van een oprechte en diepe bezorgdheid voor het probleem in Algerije, dat de grenzen van dat land ruim overschrijdt. Die uitdaging moeten we samen aanpakken. (Applaus.)

M. le président. ­ La parole est à M. De Decker.

M. De Decker (PRL-FDF). ­ Monsieur le président, je remercie le ministre de ce débat et des informations qu'il nous a fournies.

Monsieur le ministre, je pense que vous avez raison de dire que la solution doit évidemment émaner essentiellement des Algériens eux-mêmes, au moyen d'un débat entre toutes les forces politiques qui, comme vous l'avez souligné, acceptent le cadre constitutionnel. C'est évidemment la ligne qu'il faut suivre et, à cet égard, je pense que face à une situation comme celle de l'Algérie, ce que l'on appelle la « diplomatie parlementaire » peut être très utile, au-delà de l'action menée par les gouvernements.

En effet, comme vous l'avez souligné en conclusion de votre intervention, il est difficile de créer une convergence entre les positions des différents États européens sur un certain nombre de sujets. Or, la diplomatie parlementaire permet de multiplier au maximum les contacts et les échanges entre les parlementaires algériens et les parlements belges et européens en général.

Je voudrais également revenir sur la question de la commission d'enquête internationale. Il convient de souligner qu'une fois de plus, les Européens ne sont pas d'accord entre eux sur un sujet. C'est toute la question du droit d'ingérence et de l'évolution du droit international en la matière. Cependant, vu la sensibilité algérienne, j'estime qu'il sera très difficile d'imposer une telle commission d'enquête internationale.

Dans ces conditions, monsieur le ministre, étant donné que l'Algérie a toujours accordé une grande importance à l'O.N.U., à sa place et à ses liens dans le cadre de l'O.N.U., ne pensez-vous pas qu'il faudrait la convaincre d'accepter à tout le moins la visite d'experts de l'O.N.U. qui pourraient, pour compte de cette dernière, dresser un rapport ?

Il ne s'agirait donc pas d'une commission d'enquête internationale comportant des membres de différents pays, mais de l'O.N.U., qui pourrait faire du bon travail en amenant l'Algérie à plus de transparence par rapport aux événements qui s'y passent.

Par ailleurs, vous nous avez dit que l'Algérie était plutôt réticente à toute forme d'aide humanitaire européenne. Le ministre allemand délégué aux Affaires européennes a formulé une proposition visant à encourager l'Algérie à accepter que des O.N.G. européennes viennent en aide de manière ponctuelle aux survivants des familles qui ont été agressées en leur fournissant les soins psychologiques et les apports matériels dont ils ont besoin.

Si cette aide était acceptée, elle participerait à la décrispation de la situation sur place et faciliterait les relations entre l'Europe et l'Algérie. Il est évident que ce pays est extrêmement susceptible sur le plan de son indépendance et de sa souveraineté, que personne ne conteste. Par le biais d'actions de ce genre, les autorités algériennes pourraient peut-être se montrer plus réceptives par rapport à notre volonté d'aide en faveur de la population.

Mme Lizin, M. Destexhe et moi-même avons parlé du terrorisme et de ses bases arrière. Vous n'avez pas répondu avec clarté à ce propos, mais peut-être ne le souhaitez-vous pas. J'engage en tout cas fermement le Gouvernement belge à tout mettre en oeuvre pour détruire, couper, disloquer toutes bases arrière du G.I.A. qui existeraient le cas échéant en Belgique.

Mme Lizin (PS). ­ Je m'exprime en ce sens depuis trois mois au Sénat.

M. De Decker (PRL-FDF). ­ Si elles existent, elles doivent être détruites et vous aurez je crois à cet égard, monsieur le ministre, le soutien de tout le Parlement.

Enfin, en ce qui concerne la mission de la troïka, il s'agit d'un premier pas un peu timide. J'ai lu dans la presse de ce matin qu'une importante délégation du Parlement européen se rendrait bientôt en Algérie. Elle sera notamment accompagnée du président de la Commission, M. Soulier qui s'intéresse à cette matière depuis très longtemps, de Mme Hélène Carrère d'Encausse, de M. Cohn-Bendit. Ces personnalités ont un charisme important et peuvent donc avoir une influence considérable.

Je me réjouirais vraiment si les informations que j'ai lues ce matin se révélaient exactes, à savoir que ces personnes pourront se rendre dans les villages où des massacres ont été perpétrés et avoir des contacts avec toutes les formations politiques respectant le cadre constitutionnel.

Je termine, monsieur le ministre, en vous encourageant au nom de la Belgique. Vous êtes l'un des premiers ministres de l'Union européenne à vous être rendu sur place depuis que les massacres ont eu lieu et je souhaiterais vivement que la Belgique puisse être un pays moteur, au sein de cette Union, sur le plan de la définition d'une position commune.

Quels que soient les points de vue de la France, de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne, etc., un pays comme le nôtre peut et doit jouer un rôle de ciment et d'unification des positions, ce qui permettra à l'Europe d'agir ensuite avec plus d'efficacité. (Applaudissements.)

De voorzitter. ­ Het woord is aan de heer Loones.

De heer Loones (VU). ­ Mijnheer de voorzitter, het verheugt mij dat de minister bereid is het gesprek over Algerije na de Kamer ook in de Senaat te voeren. Dit gesprek mag immers niet stilvallen.

Ook de minister, en het kan bijna niet anders, geeft blijk van gevoelens van hoop en vertwijfeling. We hopen met hem dat het democratiseringsproces een belangrijk middel zal zijn in de strijd tegen het terrorisme. Moge dit geen ijdele hoop zijn.

Ik heb zelf met belangstelling geluisterd naar de standpunten van twee hoge Algerijnse bezoekers in België, de heer Saïd Saadi en mevrouw Messaoudi. Daaruit blijkt dat het parlementair debat dat in Algerije wordt gevoerd niet alleen een kwestie is van meerderheid tegen oppositie en dat is alleszins hoopgevend.

Daarnaast is er de vertwijfeling. De minister is eveneens van oordeel dat we de Algerijnse kwestie moeten benaderen met bijzonder veel schroom en met respect voor de eigenheid van het Algerijnse volk, wat ik ten zeerste waardeer. Ik heb het Algerijnse volk ervaren als een bijzonder fier volk. We mogen deze fierheid niet kwetsen. We weten dat er daar bij internationale interventies vaak weinig rekening mee wordt gehouden. Ik heb bijgevolg alle begrip voor hun scepticisme tegenover een dergelijk optreden. Ik huiver voor een internationale onderzoekscommissie die daar eens de les zal gaan spellen zoals dat in het verleden op andere plaatsen vaak is gebeurd. Ik heb meer vertrouwen in een bezoek van een delegatie van het Europees Parlement.

Er bestaat in de Senaat een grote interesse voor dit dossier en ik hoop dat we op een of andere wijze kunnen bijdragen tot het vinden van een oplossing voor de verschrikkelijke situatie in Algerije.

M. le président. ­ La parole est à Mme Lizin.

Mme Lizin (PS). ­ Monsieur le président, je voudrais remercier le ministre pour l'analyse brillante qu'il vient de faire et pour les positions qu'il prend, lesquelles correspondent vraiment à ce que nous espérons, c'est-à-dire la possibilité pour la Belgique de jouer un rôle dans cette question décisive pour la Méditerranée.

Je voudrais revenir sur quelques points qui s'imposent comme des certitudes et sur les deux conclusions que vous avez émises.

Une fois pour toutes, le dialogue avec ces forces que l'on évoque encore parfois n'est pas de l'intérêt de l'Europe, certainement pas non plus de l'Algérie, pas plus que de l'intérêt global du monde. Dialoguer avec les tueurs reviendrait à réhabiliter leur capacité politique qui est aujourd'hui détruite. De toute évidence, il s'agirait d'une mauvaise orientation.

J'en viens à l'aide humanitaire et je rappelle qu'une coopération normale se poursuit avec l'Algérie où M. Perrini se rendra prochainement. Cette coopération régulière représente deux semaines d'exportation de pétrole. Il faut tout de même savoir ce que l'on propose et à qui; il ne faut pas se tromper.

Vous avez parlé de M. Saadi, qui du reste, est un ami personnel. Il est louable de dialoguer avec lui mais il faut aussi savoir que se borner à cette démarche reviendrait, dans une situation inverse, à tenter de comprendre un grave problème belge en écoutant seulement un représentant de la communauté germanophone. Dans pareil cas, que dirait, par exemple, le CVP ?

Vous avez cité des personnes éminemment respectables, monsieur le ministre, mais vous n'avez pas encore entendu l'Algérie.

Par ailleurs, je le répète, nous ne sommes pas les seuls à nous soucier de cette problématique. Les Américains ont bien compris l'importance de l'enjeu; ils sont présents et ont bien l'intention de le rester.

En ce qui concerne la commission d'enquête internationale et les experts, les choses sont claires.

L'invitation d'une délégation est une proposition que j'ai faite à l'Union interparlementaire. La réponse sera positive et nous espérons que la composition sera de très haut niveau. Je souhaite que notre ambassadeur répercute bien cette démarche, car elle est une occasion unique de venir à Bruxelles, dans un lieu très important pour la suite de ce dossier clé.

J'en viens aux deux éléments de conclusion que vous avez émis, monsieur le ministre.

Il ne faut évidemment pas attendre du gouvernement algérien qu'il remercie les Quinze d'avoir « découvert » que ce sont les G.I.A. qui tuent, car s'il s'agit d'une découverte, l'Europe devrait alors se poser la question de savoir pourquoi elle ne l'a pas vu plus tôt. Les autorités algériennes le disent depuis tellement longtemps ! Les Algériens attendent que l'Europe se demande pourquoi elle a mis autant de temps à en être consciente.

Par ailleurs, vous dites que l'Europe attend des autorités algériennes qu'elles nous donnent la marche à suivre en matière de lutte contre le terrorisme. L'Europe des Quinze ne disposerait-elle plus de services compétents pour savoir ce qui se passe sur son territoire ? N'y a-t-il plus à Londres aujourd'hui des gens qui savent ce qui se passe ?

Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous donner quelques éléments d'information. Il est tout de même étonnant qu'il faille attendre des Algériens qu'ils vous donnent des informations sur le paiement des opposants. Je ne parle pas des opposants du G.I.A. mais des acteurs de la campagne de désinformation. Je pense à Libération. Je ne citerai pas de journaux belges mais on trouve aussi des exemples dans notre pays. Des professeurs d'université véhiculent le message de dialogue avec les islamistes intégristes, je pense à M. Burgard. Quant au financement des Saoudiens, des ouvrages entiers traitent de ce sujet.

Je vous rappelle également, monsieur le ministre, qu'un journal très bien côté à Londres a aussi publié des témoins vivants qui disculpent le G.I.A. et qui attribuent tous ces crimes à l'armée algérienne elle-même. On sait tout de même bien qui tient ces propos et qui a fait le procès-verbal de tout cela. Or, les Quinze prennent le contre-pied des écrits d'une journaliste de Libération , des articles publiés dans l'Observer ou encore des avis émis par une grande organisation non gouvernementale.

Croyez-vous réellement, monsieur le ministre, que les services européens ignorent l'identité des commanditaires ? Qu'ils ne savent pas qui paie Tarek Ramadan, M. Burgard ou les opposants établis à Londres, en Suisse, en Suède, en France et en Allemagne, où subsiste un petit noyau, certainement pour peu de temps ?

Monsieur le ministre, je communique régulièrement au ministre de l'Intérieur les coordonnées des lieux où ces individus trouvent, sur notre territoire, des sources de financement. Ces informations sont d'ailleurs loin d'être secrètes.

En ce qui nous concerne, les conclusions sont évidentes et nous ne cesserons de les répéter. Quant à M. De Decker, auteur d'une analyse différente, je suis persuadée qu'il finira par se rapprocher de notre point de vue.

Monsieur le ministre, il faut entreprendre sur notre territoire une lutte contre les terroristes, en prêtant une oreille attentive aux hommes payés pour accomplir cette tâche. Demandez donc au ministre de l'Intérieur d'écouter les équipes anti-terroristes de la B.S.R. ! Elles lui diront où débusquer ces individus. Depuis trois ans, elles clament en vain leur stupéfaction face à la liberté d'action laissée aux intéressés.

J'affirme que nous pouvons transformer Bruxelles en un creuset propice à l'élaboration d'une politique d'avenir respectueuse du monde arabe. Nous possédons à cet égard bon nombre d'atouts; seule la volonté fait encore défaut. En vérité, cette politique ne peut plus raisonnablement être confiée à des capitales qui ont montré qu'elles n'étaient pas fiables en la matière.

Sur ce plan, votre attitude, monsieur le ministre, constituera un élément essentiel quant à la réussite d'un futur pacifique.

M. le président. ­ L'incident est clos.

Het incident is gesloten.