5-2192/2

5-2192/2

Sénat de Belgique

SESSION DE 2012-2013

18 JUILLET 2013


Projet de loi relatif à la prospection, l'exploration et l'exploitation des ressources des fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale


Procédure d'évocation


Projet de loi introduisant des dispositions qui régissent des matières visées à l'article 77 de la Constitution dans la loi du (...) relative à la prospection, l'exploration et l'exploitation de ressources des fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES ET DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES PAR

M. BELLOT ET MME VERMEULEN


I. INTRODUCTION

Le projet de loi portant insertion des dispositions réglant des matières visées à l'article 77 de la Constitution, dans la loi du (...) relative à la prospection, l'exploration et l'exploitation de ressources des fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale, qui relève de la procédure bicamérale obligatoire, a été déposé à la Chambre des représentants par le gouvernement le 27 mai 2013 (doc. Chambre, nº 53-2839/001).

Il a été adopté le 4 juillet 2013 par l'assemblée plénière de la Chambre des représentants par 86 voix contre 11 et 38 abstentions.

Le projet de loi relatif à la prospection, l'exploration et l'exploitation de ressources des fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale, qui y est intrinsèquement lié et qui relève de la procédure bicamérale facultative, a été adopté le même jour par la Chambre des représentants, par 86 voix contre 11 et 38 abstentions (doc. Chambre, nº 53-2838/001). Il a été évoqué par le Sénat le 5 juillet 2013.

La commission des Finances et des Affaires économiques a examiné les deux projets de loi le 3 juillet 2013, conformément à l'article 27.1 du règlement du Sénat, et le 18 juillet 2013.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE M. JOHN CROMBEZ, SECRÉTAIRE D'ÉTAT À LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE ET FISCALE MINISTRE

Il y a deux projets: le premier est le projet de loi relatif à la prospection, l'exploration et l'exploitation de ressources dans la Zone (dénommé ci-après la « loi ») et concerne les matières visées à l'article 78 de la Constitution. Le deuxième projet modifie la première loi en vue d'y insérer un article et un chapitre concernant des matières visées à l'article 77 de la Constitution. La loi crée la base juridique nécessaire pour l'application des responsabilités prévues à l'article 139, à l'article 153, § 4, et à l'article 4, § 4, de l'annexe III de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (Conférence de Montego Bay) du 10 décembre 1982, y compris ses annexes, à laquelle la loi du 18 juin 1998 a porté assentiment.

Cette base juridique permet concrètement aux personnes physiques possédant la nationalité belge ou aux personnes morales dont la création relève du droit belge d'obtenir un patronage de l'État belge, condition indispensable pour pouvoir conclure des contrats avec l'Autorité internationale des fonds marins concernant l'exploration et l'exploitation des ressources minérales des fonds marins et de leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale; elle préserve également l'État belge de la responsabilité en cas de dommages causés par la négligence ou par des actes illicites de la part de ces personnes physiques ou morales dont il se porte garant. Ainsi, en se dotant de la législation requise, la Belgique fait en sorte que sa responsabilité ne soit pas engagée en cas d'incident éventuel ou de dommage effectif.

Les dispositions à l'examen portent uniquement sur l'exploration, mais on s'emploiera aussi à fixer des conditions en ce qui concerne l'exploitation. Pour qu'une entreprise puisse se livrer à une activité d'exploration, il faut qu'elle conclue un contrat avec l'Autorité. Ce contrat est conclu uniquement par les organes de l'Autorité, qui examinent entre autres si l'État partie dispose des garanties nécessaires. Par cette législation, il est possible d'encadrer les activités d'une entreprise et de s'assurer que celles-ci sont conformes aux conditions de la Convention de manière que la responsabilité de l'État belge ne puisse être engagée.

Le projet prévoit les règles, règlements et procédures requises, dans le respect du cadre international. Il repose sur l'avis du Tribunal international du droit de la mer relatif aux responsabilités des États membres qui se portent garants pour des entreprises. Le contrôle proprement dit est exercé par l'Autorité internationale des fonds marins. Les États parties à la Convention de Montego Bay, qui participent aux sessions annuelles de l'Autorité, peuvent suivre ce processus de près. L'Autorité est donc l'instrument par lequel les États parties organisent et contrôlent les activités dans cette zone.

Le projet règle également les contributions nécessaires à cet effet, y compris les coûts du contrôle administratif et de l'appréciation des rapports environnementaux.

La présente législation s'inscrit dans le prolongement des règles appliquées en Belgique pour l'exploitation de sable et de gravier ainsi que pour les autres activités industrielles. En l'occurrence, c'est la loi sur le milieu marin, qui prévoit des exigences strictes en matière de protection de l'environnement, qui en constitue la base. Dans ce cadre, une compensation environnementale est prévue, sous la forme d'une redevance.

III. DISCUSSION

Mme Vermeulen observe que la rareté croissante des matières premières pousse de nombreuses entreprises à explorer les fonds marins, tandis qu'on réfléchit trop peu, entre-temps, à des solutions pour recycler davantage et mieux ces matières premières raréfiées.

En Belgique, nombreuses sont les entreprises qui disposent d'une expertise et de connaissances en matière d'exploration. Il y a fort à parier qu'elles passeront à une phase d'exploitation dans un futur proche car des entreprises n'investiraient pas dans l'exploration si elles n'avaient pas dans l'idée d'en tirer profit ultérieurement. Ainsi, par exemple, l'entreprise « G-TECSea Mineral ressources » est spécialisée dans la géologie offshore. C'est aussi cette entreprise qui a reçu une autorisation de l'ISA (Autorité internationale des fonds marins). Il est surprenant d'observer que cette entreprise avait déjà reçu une promesse d'autorisation en juillet 2012 et qu'elle a en outre reçu l'avant-projet de loi sans que le parlement en soit informé. En janvier 2013, elle pouvait donc déjà signer un contrat. Le projet de loi semble dès lors écrit sur mesure pour cette entreprise, même s'il peut aussi être intéressant pour d'autres entreprises.

En ce qui concerne le patronage, la Belgique devra procéder à un contrôle minutieux pour confirmer que les contractants respectent leurs obligations. Comment la Belgique contrôlera-t-elle que ces entreprises respectent les règles à des kilomètres de profondeur dans l'océan Pacifique ? Comment contrôlera-t-on qu'elles ne s'aventurent pas au-delà les limites de la concession ? Eu égard à la spécificité de l'industrie en question, l'entreprise semble être la seule à pouvoir se contrôler elle-même.

Certes, il faut soutenir l'innovation, mais ces entreprises n'investiraient pas dans l'exploration si cette dernière n'était pas rentable à terme. Il est donc important de rester particulièrement vigilant et d'exécuter correctement la mission de contrôle car le risque d'une catastrophe environnementale due à l'exploration et à l'exploitation est réel. L'exploitation des fonds marins est peut-être une priorité économique, mais on ne peut tomber dans l'optimisme écologique.

Le secrétaire d'État Crombez précise que le projet de loi concerne l'exploration. On ne sait pas encore clairement dans quel délai on pourrait parler d'exploitation.

La mission de contrôle sera assurée par les Nations unies, justement parce que cela dépasse notre compétence juridique.

Il faut en effet rester vigilant face à ce genre de choses, mais de là à dire que le risque d'une catastrophe est réel, il y a un pas. L'intervenant est toutefois d'accord sur le fait qu'il convient de se méfier de l'optimisme écologique.

Mme Vermeulen explique que l'exploitation ne saurait tarder. Une première entreprise minière est déjà active au large des côtes de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Les travaux sont actuellement à l'arrêt, non seulement pour des raisons financières, mais aussi à cause des vives protestations du monde politique et scientifique.

L'intervenante souligne la prudence extrême que requièrent des forages à cinq kilomètres de profondeur car la densité de l'eau y est très différente. Cinq gouttes d'eau remontant à la surface suffisent pour causer un problème microbiologique. Le risque d'une catastrophe naturelle est donc on ne peut plus réel.

M. Crombez précise qu'il n'est nullement question de forages.

M. Hellings se joint aux inquiétudes exprimées par Mme Vermeulen. Il estime également que ce projet de loi dépasse la compétence du ministre en charge de la mer du Nord et fait référence à la proposition de résolution pour la protection et la conservation de la région arctique de M. Anciaux et consorts (voir doc. Sénat nº 52-198/1) qui va à l'encontre des mesures proposées aujourd'hui, même s'il s'agit bien d'une autre région.

L'intervenant estime que ce projet de loi a été fait sur mesure d'une seule société et permettra à court terme l'exploitation marine rentable.

M. Crombez précise que la proposition de loi offre des possibilités pour différentes entreprises et renvoie à sa réponse précédente.

M. Hellings aimerait savoir combien d'autres entreprises sont potentiellement concernées, mais d'après lui il n'y a que G-TEC. Il estime qu'il s'agit d'un patronage d'une société en particulier et que le projet de loi en discussion ne fait que confirmer une décision déjà prise.

Mme Piryns regrette que le secrétaire d'État ne souhaite pas donner d'explication supplémentaire et se rallie aux observations formulées par M. Hellings.

IV. VOTES

L'ensemble du projet de loi relatif à la prospection, l'exploration et l'exploitation de ressources des fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale a été adopté par 6 voix contre 1 et 2 abstentions.

Les articles 1er à 3 ainsi que l'ensemble du projet de loi portant insertion des dispositions réglant des matières visées à l'article 77 de la Constitution, dans la loi du (...) relative à la prospection, l'exploration et l'exploitation de ressources des fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationaleont été adoptés par 6 voix contre 1 et 2 abstentions.

Confiance a été faite aux rapporteurs pour un rapport oral.

Les rapporteurs, Le président,
Sabine VERMEULEN. François BELLOT. Ludo SANNEN.

Les textes adoptés par la commission sont identiques aux textes transmis par la Chambre des représentants (voir les docs. Chambre, nos 53-2838/003 et 53-2839/003).