1-91 | 1-91 |
Sénat de Belgique |
Belgische Senaat |
Annales des réunions publiques de commission |
Handelingen van de openbare commissievergaderingen |
COMMISSION DES AFFAIRES INSTITUTIONNELLES |
COMMISSIE VOOR DE INSTITUTIONELE AANGELEGENHEDEN |
SÉANCE DU JEUDI 20 FÉVRIER 1997 |
VERGADERING VAN DONDERDAG 20 FEBRUARI 1997 |
M. le président. L'ordre du jour appelle la demande d'explications de M. Destexhe au Premier ministre sur « l'absence du président du Collège de la Commission communautaire française au Comité de concertation État fédéral/entités fédérées ».
La parole est à M. Destexhe.
M. Destexhe (PRL-FDF). Monsieur le président, l'article 138 de la Constitution autorise la Communauté française à transférer l'exercice de certaines compétences à la Commission communautaire française et à la Région wallonne. Ainsi, par décret spécial du 19 juillet 1993 du Conseil de la Communauté française, accompagné de décrets parallèles du Conseil de la Région wallonne et de l'assemblée de la Commission communautaire française du 22 juillet 1993, la Communauté française a transféré l'exercice de diverses matières à la Région wallonne et à la Commission communautaire française. Il s'agit essentiellement de la santé, de l'aide aux personnes, de la formation professionnelle, du tourisme, des infrastructures sportives et du transport scolaire. Il y a donc lieu de constater que la Commission communautaire française, dans l'exercice de ses compétences décrétales, est devenue une entité fédérée à la même enseigne que les autres communautés et régions.
Cette thèse est confirmée non seulement par de nombreux auteurs de doctrines, tant francophones que néerlandophones, mais aussi par la Cour d'arbitrage, dans son arrêt nº 72.4.95. De même, faut-il rappeler que, depuis la loi du 4 août 1996 modifiant les lois sur le Conseil d'État, les avant-projets de décret et d'arrêtés réglementaires de la Commission communautaire française sont désormais soumis à la section législation de cette haute juridiction administrative, au même titre que les normes législatives et réglementaires de l'État fédéral, des communautés et des régions ?
C'est pourquoi je m'étonne que le président du Collège de la Commission communautaire française soit toujours absent du Comité de concertation entre l'État fédéral et les entités fédérées, alors que les autres présidents des gouvernements communautaires et régionaux en sont membres.
Cette situation est d'autant plus regrettable que, lors des dernières réformes de l'État, dont vous êtes, monsieur le Premier ministre, l'un des principaux fers de lance, sinon le principal, le comité de concertation a été conçu, pour reprendre les termes de maître Uyttendaele, comme « l'épine dorsale d'un fédéralisme coopératif en devenir ». Or, force est de constater qu'en 1997, la Commission communautaire française est exclue de ce « fédéralisme coopératif » que la dernière réforme de l'État a voulu réaliser. Il s'agit là d'une exclusion qui vise également la représentation du Collège de la Commission communautaire française dans les différentes conférences interministérielles et, plus particulièrement, dans celles de la politique étrangère, ce qui conduit, de l'aveu même du ministre des Affaires étrangères, M. Derycke, à de graves difficultés en ce qui concerne la procédure de négociation et la conclusion des traités mixtes.
Dès lors, monsieur le Premier ministre, je souhaiterais obtenir les explications suivantes.
Pourquoi le président du Collège de la Commission communautaire française est-il le seul ministre-président d'un gouvernement d'une entité fédérée à part entière à être totalement exclu des instances de concertation et de coopération que sont le comité de concertation gouvernement fédéral-gouvernement des entités fédérées, et les conférences interministérielles ?
Si vous estimez que la solution à mettre en place pour combler cette lacune institutionnelle prendra du temps étant donné sa complexité, notamment sur le plan des équilibres linguistiques et ceux devant exister entre les représentants du pouvoir fédéral et les représentants des entités fédérées, qu'attendez-vous pour dégager une solution provisoire qui s'inspirerait, par exemple, du cas de la Communauté germanophone ?
Pourquoi, en attendant une modification législative conforme à la réalité institutionnelle actuelle, ne pas permettre, dès à présent, au président du Collège de la Commission communautaire française de participer aux réunions du comité de concertation ?
Je suis persuadé, monsieur le Premier ministre, que vous apporterez des réponses précises à ces questions, car je ne doute pas que vous connaissiez cette matière beaucoup mieux que moi-même.
M. Dehaene, Premier ministre. Sur ce dernier point, je n'ai aucun doute ! (Sourires.)
M. Destexhe (PRL-FDF). Quand on tend une perche à quelqu'un, il ne faut pas s'étonner qu'il la saisisse !
Mais, monsieur le Premier ministre, je ne tendrai pas la joue gauche !
M. le président. La parole est à M. Dehaene, Premier ministre.
M. Dehaene, Premier ministre. Monsieur le président, premièrement, en vertu de la disposition transitoire prévue à l'article 143 de la Constitution, la loi ordinaire du 9 août 1980 traitant du comité de concertation, en ses articles 31 et suivants, ne peut être modifiée que par une loi spéciale.
Deuxièmement, le comité de concertation a une double composition paritaire; il comprend un nombre égal de membres du gouvernement fédéral et des gouvernements des régions et des communautés; par ailleurs, une parité linguistique est respectée. Toute modification de cette composition devra être examinée avec la plus grande prudence à la lumière de ces éléments de base que nous pourrons difficilement modifier si le comité de concertation veut continuer à jouer son rôle.
Toutes les entités fédérées ne sont pas membres à part entière du comité de concertation. En vertu de l'article 67 de la loi du 31 décembre 1983, la Communauté germanophone ne siège avec voix délibérative que lorsqu'elle est concernée. Une solution pragmatique a été envisagée pour les cas non prévus à l'article 67.
Le problème de la C.O.C.O.F. a effectivement été soulevé à plusieurs reprises au comité de concertation. Nous avons donné l'orientation suivante : les compétences de la C.O.C.O.F. étant déduites de celles de la Communauté française, il est loisible à cette dernière de dégager une solution pragmatique en accord avec la C.O.C.O.F. Actuellement, nous en sommes à ce stade.
M. le président. La parole est à M. Destexhe.
M. Destexhe (PRL-FDF). Monsieur le président, vous m'aviez dit un jour qu'il ne fallait jamais provoquer le Premier ministre parce que cela se retourne toujours contre l'auteur des provocations. J'essaierai de me rattraper dans une autre commission où nous siégeons également ensemble ! (Sourires.)
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le Premier ministre. Si une loi spéciale, votée à une majorité spéciale, est nécessaire, vous pouvez en tout cas compter sur le soutien du PRL-FDF.
À titre provisoire, n'est-il pas possible d'adopter pour la C.O.C.O.F. la même solution que pour la Communauté germanophone, c'est-à-dire une participation sur une base ad hoc, lorsque c'est nécessaire et de façon informelle ? Si cette disposition fonctionne pour la Communauté germanophone, pourquoi ne pas l'envisager pour la C.O.C.O.F. ?
Enfin, il est vrai que la représentation de la Communauté française peut inclure des représentants de la C.O.C.O.F. mais, aujourd'hui, la Communauté française n'est plus compétente pour les matières qui ont été transférées à la C.O.C.O.F. Dès lors, je ne pense pas que l'on puisse se diriger dans cette voie.
M. le président. La parole est à M. Dehaene, Premier ministre.
M. Dehaene, Premier ministre. Monsieur le président, sur ce dernier point, ma position est plus nuancée. La C.O.C.O.F. a la pleine compétence pour les matières qui lui ont été transférées mais cette compétence a été déléguée en ce sens qu'une décision est intervenue au niveau de la Communauté française; de plus, comme cette situation ne se retrouve pas du côté flamand, cela pose des problèmes sur le plan pratique car la présence de la C.O.C.O.F. n'est pas acceptée par l'ensemble du comité de concertation alors que celle de la Communauté germanophone est admise. Pour cette raison, la solution pragmatique et provisoire que nous avons avancée est celle d'un accord entre la Communauté française et la C.O.C.O.F.
M. Destexhe (PRL-FDF). Concrètement, c'est le gouvernement flamand qui bloque...
M. Dehaene, Premier ministre. Si vous modifiez, même par une voie dégagée, l'équilibre au sein d'un comité de concertation doublement paritaire, un problème se pose. Il n'est pas nécessaire d'être un grand génie des relations communautaires pour le savoir.
M. Destexhe (PRL-FDF). Mais si, il faut être un grand génie car je ne pense pas que j'aurais pu imaginer personnellement un système aussi compliqué.
La dernière réforme de l'État a tout de même institué la C.O.C.O.F. comme entité fédérée à part entière...
M. Dehaene, Premier ministre. Je ne pense pas que cela ait été dit quelque part. C'est de la déduction.
M. Destexhe (PRL-FDF). La Cour d'arbitrage a été assez claire à ce sujet. J'espère que vous en conviendrez... (Gestes et sourires sibyllins du Premier ministre.) M. Derycke m'a apporté lors de ma précédente demande d'explications une réponse tout à fait précise. Il a admis que la Cour d'arbitrage avait reconnu la C.O.C.O.F. comme une entité fédérée à part entière.
J'espère, monsieur le Premier ministre, que les services des Annales parlementaires noteront que vous opinez du chef.
M. Dehaene, Premier ministre. Vous demanderez donc une solution à la Cour d'arbitrage.
M. Destexhe (PRL-FDF). Jusqu'à nouvel ordre, ce n'est pas un exécutif.
M. le président. L'incident est clos.
Het incident is gesloten.
Mesdames, messieurs, l'ordre du jour de la réunion publique de la commission des Affaires institutionnelles est ainsi épuisé.
De agenda van de openbare vergadering van de commissie voor de Institutionele Aangelegenheden is afgewerkt.
La séance est levée.
De vergadering is gesloten.
(La séance est levée à 10 h 25.)
(De vergadering wordt gesloten om 10.25 uur.)