1-23

1-23

Sénat de Belgique

Belgische Senaat

Annales parlementaires

Parlementaire handelingen

SÉANCES DU JEUDI 1er FÉVRIER 1996

VERGADERINGEN VAN DONDERDAG 1 FEBRUARI 1996

(Vervolg-Suite)

QUESTION ORALE DE M. DESTEXHE AU MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES SUR « LES SOUPÇONS DE FRAUDES AU DÉTRIMENT DE L'INAMI ET LA GESTION DES HÔPITAUX »

MONDELINGE VRAAG VAN DE HEER DESTEXHE AAN DE MINISTER VAN SOCIALE ZAKEN OVER « HET VERMOEDEN VAN FRAUDE TEN NADELE VAN HET RIZIV EN HET BEHEER VAN DE ZIEKENHUIZEN »

M. le Président. ­ L'ordre du jour appelle la question orale de M. Destexhe au ministre des Affaires sociales sur « les soupçons de fraudes au détriment de l'INAMI et la gestion des hôpitaux ».

La parole est à M. Destexhe.

M. Destexhe (PRL-FDF). ­ Monsieur le Président, le Journal du médecin a fait état des effets pervers du financement des hôpitaux. Certains hôpitaux auraient réadmis le jour même des patients qui venaient de faire l'objet d'une sortie administrative.

Quelle est l'ampleur de ce phénomène ? Quel est le préjudice financier subi par l'INAMI ? Quelles mesures envisagez-vous de prendre ?

La gestion des hôpitaux repose de plus en plus sur la « performance relative » de chaque hôpital, notamment la partie B. Toutefois, il existe un décalage important entre la gestion présente et les années de référence qui permettent cette comparaison, ce qui rend la connaissance exacte des résultats financiers passés et l'établissement de budgets prévisionnels extrêmement aléatoires.

Est-il exact que, pour 1995, l'année de référence est 1991 ? Que comptez-vous faire pour améliorer cette situation ?

Par ailleurs, la presse flamande a révélé que des enquêtes étaient en cours sur d'éventuelles connivences illicites entre deux firmes pharmaceutiques et des fonctionnaires et membres du cabinet des Affaires sociales en 1992.

Je m'empresse de dire qu'en tant que médecin, je ne peux qu'approuver la mise à disposition des patients du Nitroderm et du Prozac.

De quoi s'agit-il exactement ? Comment cette affaire est-elle arrivée aux mains de la justice ? Des mesures administratives ont-elles été prises ?

M. le Président. ­ La parole est au ministre Ylieff qui répond en lieu et place de Mme De Galan, ministre des Affaires sociales.

M. Ylieff, ministre de la Politique scientifique. ­ Monsieur le Président, je prends la parole au nom de Mme De Galan qui, étant souffrante, m'a demandé de lire la réponse qu'elle a préparée à l'intention de M. Destexhe.

Cette réponse est formulée comme suit : « Comme précisé au député Brouns en 1995, de nouvelles dispositions en vue d'adapter, d'une façon limitée, le financement à l'activité réelle des hôpitaux, ont été introduites dans le système de financement des hôpitaux.

C'est ainsi que, sur la base des informations contenues dans le Résumé clinique minimum, on a pu regrouper l'ensemble des patients traités dans le pays dans une série ­ environ six cents ­ de groupes homogènes de pathologies pour chacun desquels une durée nationale moyenne de séjour a été calculée.

Cette durée de séjour par groupe de diagnostics est appliquée à la population de patients à l'hôpital. Cela permet d'obtenir une durée de séjour normalisée par hôpital selon une pondération effectuée en fonction de la pathologie traitée dans l'hôpital. Cette durée de séjour normalisée est comparée avec la durée de séjour réelle de la pathologie traitée dans l'hôpital, ce qui constitue un outil de mesure de la performance des hôpitaux.

Un certain nombre de précautions ont été prises afin d'éviter que des effets inattendus ne soient constatés comme, par exemple, la limitation de la prise en compte de l'effet global calculé.

Enfin, il a également été tenu compte de l'effet de substitution de l'hospitalisation de jour à l'hospitalisation classique. Cette mesure a abouti à l'intérieur de l'enveloppe budgétaire des hôpitaux généraux ­ d'un peu plus de 120 milliards ­ à une redistribution d'environ un milliard, ce qui démontre l'effet limité des mesures prises.

À partir du moment où les données contenues dans le Résumé clinique minimum sont utilisées pour l'allocation de moyens financiers, on peut se poser la question de savoir si une manipulation des informations enregistrées peut se produire. Il me paraît impossible que cela puisse avoir lieu d'une façon généralisée et portant sur des éléments importants, et ce pour plusieurs raisons.

La pathologie ne constitue qu'un des facteurs déterminant le financement représentant moins de 1 p.c. du prix de journée.

L'arrêté royal du 6 décembre 1994 déterminant les règles suivant lesquelles certaines données doivent être communiquées au ministre qui a la Santé publique dans ses attributions ­ c'est-à-dire le Résumé clinique minimum ­ dispose, en son article 5, qu'en ce qui concerne les données relatives au patient, le numéro d'enregistrement doit être unique et ne peut comporter aucune donnée personnelle telle que la date de naissance, pour des raisons évidentes de protection de la vie privée.

Dans les directives adressées à chaque établissement hospitalier, il est spécifié ce que l'on entend par numéro unique du patient : « Le numéro d'enregistrement d'un patient dans le même hôpital doit être identique pour le séjour donnant lieu à un prix de journée et le séjour relatif à l'hospitalisation de jour. Le numéro d'enregistrement doit rester le même pour le séjour global, même si le séjour dure plus longtemps qu'une année ou est divisé sur plusieurs enregistrements. Il doit rester le même au minimum un an calendrier pour chaque patient. En d'autres termes, plusieurs séjours successifs d'un même patient au sein d'un même hôpital sont enregistrés sous le même numéro d'enregistrement pendant au moins une année. Il est souhaitable cependant que ce numéro reste identique pour chaque patient au cours du temps. »

Le point e) du même article impose également l'enregistrement de la réadmission après sortie du même hôpital. Ce code sert justement à déterminer si le patient a déjà séjourné dans le même hôpital depuis moins d'un an. De plus, la valeur enregistrée de ce code rend compte du temps écoulé entre la date de sortie du séjour précédent et la date d'admission du séjour actuel.

Tous les séjours dans le même hôpital, tant en hospitalisation classique qu'en hospitalisation de jour, interviennent pour déterminer le code de réadmission.

Ces deux dernières dispositions permettent de disposer des informations nécessaires pour vérifier si des pratiques telles que l'honorable membre décrit existent réellement.

Les organismes assureurs, par le biais de leurs médecins-conseils, peuvent contrôler ces pratiques d'admission/réadmission à partir des documents de notification d'engagement de paiement, que les hôpitaux doivent transmettre aux organismes assureurs dans les trois jours de l'admission.

Je ne pense pas que, s'il devait être hospitalisé, l'honorable membre accepterait facilement de sortir de l'établissement hospitalier pour y retourner deux jours plus tard.

La confrontation des différentes données existantes ­ facturation, Résumé clinique minimum, Résumé infirmier minimum ­ que nous sommes en train de mettre en place conduit à un système auto-contrôlé et difficilement influençable.

À ce jour, mes services n'ont pas constaté formellement de contraventions aux dispositions légales. Si tel devait être le cas, je prendrais toutes les dispositions pour faire appliquer les sanctions prévues aux contrevenants.

Cela ne doit pas nous empêcher de demeurer vigilants et je demanderai à mes services un contrôle approfondi sur cet aspect de la question dès que les données relatives à 1995 seront disponibles.

Par ailleurs, la mise en place d'une banque de données anonymes regroupant les données de facturation et cliniques, ainsi que proposée dans la note de politique hospitalière approuvée par le Gouvernement le 24 mars dernier, devra nous permettre d'analyser de manière approfondie les comportements des établissements hospitaliers et d'en tirer les conclusions appropriées.

Enfin, il conviendra de réfléchir à la façon d'identifier de manière univoque le patient dans son cheminement à travers les différentes structures de soins afin d'éviter des comportements inacceptables, tout en respectant sa vie privée.

En ce qui concerne le prix de journée 1995 des hôpitaux, il est exact que celui-ci a été fixé de manière provisionnelle sur la base des données du Résumé clinique minimum de 1991, qui étaient, à l'époque, les dernières données complètes validées. Cet élément sera révisé sur la base des données réelles de 1995.

Il est exact que cela est susceptible d'entraîner une incertitude en termes de gestion des institutions. Quoiqu'il convienne d'en relativiser l'importance, l'impact financier global de ces mesures de réallocation de moyens ne représentant, ainsi que je l'ai déjà dit, que moins de 1 p.c. du budget des hôpitaux.

Néanmoins, afin d'assurer une plus grande stabilité des moyens financiers mis à la disposition des institutions, j'ai décidé, pour 1996, de fixer de manière définitive 50 p.c. de la correction calculée sur base des Résumés cliniques minimum de 1992, les 50 p.c. restants étant révisibles, sur la base des données réelles de 1996.

À la suite de l'engagement de personnel supplémentaire à l'administration des hôpitaux, le rythme de vérification et de validation des données RCM sera accéléré, de façon à utiliser ces données avec le décalage inévitable de deux ans au maximum.

Je ne suis pas officiellement au courant de la procédure engagée sur d'éventuelles connivences illicites entre deux firmes pharmaceutiques et le cabinet des Affaires sociales, ainsi que la presse en a fait état. Je ne puis donc vous donner des éléments précis relatifs à cette affaire autres que ceux que j'ai lus, comme vous, dans la presse.

Toutefois, je souhaite vous rappeler les procédures existantes en matière de fixation des conditions de remboursement des médicaments.

Afin de fixer celles-ci, le ministre est tenu de demander l'avis du Comité technique des spécialités pharmaceutiques institué au sein de l'INAMI qui formule celui-ci en tenant compte d'un certain nombre de critères, dont la comparaison avec d'autres spécialités de la même classe thérapeutique.

Après passage au Comité de l'assurance, cet avis est ensuite transmis au ministre.

Il est évident que le ministre conserve sa liberté de choix et a le devoir de tenir compte dans sa décision de l'ensemble du contexte y relatif en termes de santé publique.

Dans cette optique, le ministre peut être amené à ne pas suivre l'avis des comités techniques concernés, et cela me semble légitime en l'occurrence, vu l'intérêt thérapeutique des deux médicaments concernés. En effet, dans les cas qui ont été cités, les débats n'ont à aucun moment remis en question le rapport efficacité/toxicité des spécialités pharmaceutiques en question. Seuls les prix demandés par les sociétés pharmaceutiques sont apparus irrecevables et l'insistance des conseils et comités n'a pas abouti à leur réduction.

Le ministre des Affaires sociales, destinataire de ces avis, a procédé à une ultime concertation avec les sociétés demanderesses afin de ne pas priver les assurés sociaux des qualités thérapeutiques de ces spécialités. Ces concertations ont conduit dans tous les cas à une diminution du prix pratiqué de 3 à 20 p.c. et, dès lors, de la base de remboursement qui a été appliquée, compte tenu des prix pratiqués à ce moment dans d'autres États membres de l'Union européenne.

Je n'ai, pour l'heure, pas d'autres commentaires à formuler à ce sujet. »

M. le Président. ­ La parole est à M. Destexhe pour une réplique.

M. Destexhe (PRL-FDF). ­ Monsieur le Président, je remercie M. le ministre pour cette réponse extrêmement complète et circonstanciée et je le prie de transmettre mes remerciements à Mme De Galan.

M. le Président. ­ L'incident est clos.

Het incident is gesloten.