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28 AOÛT 1995
La réduction de la durée du temps de travail a été en permanence un thème mobilisateur pour l'ensemble des travailleurs depuis le début de l'ère industrielle.
Les motifs pour revendiquer une réduction du temps de travail ont varié dans le temps suivant le contexte économique et social. Au XIXe siècle et dans les années 1960-1970, ces motifs s'inscrivaient dans la lutte pour l'amélioration des conditions de travail et, par conséquent, du niveau de bien-être des travailleurs en leur donnant du « temps pour vivre » et en assurant ainsi un partage équitable des fruits du progrès technique et économique.
Les années 1930 et 1980 se caractérisent au contraire par des motifs plus économiques, axés sur la résorption du chômage en assurant une meilleure répartition du travail disponible, qui doit se traduire par des emplois de substitution et des embauches compensatoires.
L'évolution de la durée hebdomadaire du travail est remarquable si l'on se réfère aux 72 heures et plus que les ouvriers devaient effectuer au milieu du XIXe siècle. Après la semaine des 48 heures acquise en 1921, il faut attendre l'après-guerre 1940-1945 pour voir se concrétiser de nouvelles réductions du temps de travail, rythmées par les différents accords interprofessionnels.
À la suite de l'accord interprofessionnel de 1955, la durée hebdomadaire est portée à 45 heures par la loi du 15 juillet 1964. L'accord interprofessionnel du 7 février 1969 organisera la réduction progressive à 43 heures.
L'accord du 15 juin 1971 portera la réduction à 42 heures.
La loi du 20 juillet 1978 mettra en oeuvre l'accord interprofessionnel de 1975 en ramenant finalement la durée du travail à 40 heures et en étendant cette durée à l'ensemble des travailleurs.
Les premières années de la décennie 1980 présentent deux caractéristiques marquantes qui ont contribué à freiner l'élan pris durant la période 1955-1975.
D'une part, l'intervention des pouvoirs publics se fait plus insistante et plus contraignante en vue de réaliser un certain partage du travail (arrêté royal du 30 décembre 1982, appelé l'opération « 5-3-3 »).
D'autre part, les préoccupations gouvernementales se tournent depuis 1983 vers un concept nouveau, celui de la flexibilité et de l'aménagement du temps de travail, lequel vient largement moduler le principe de la réduction linéaire et généralisée de la durée hebdomadaire du travail (arrêté royal nº 179, « expériences Hansenne », semaines flexibles, interruption de carrière).
Après cet « intermède », la question de la réduction du temps de travail est à nouveau inscrite dans l'accord interprofessionnel 1987-1988, lequel stipule que la généralisation éventuelle du temps de travail moyen hebdomadaire à 38 heures au cours de la période 1987-1988 est réservée aux négociations dans les secteurs. Les parties s'engagent à procéder à une évaluation, en septembre 1987, des résultats sur le plan de l'évolution de la durée moyenne hebdomadaire de travail. Pour les secteurs où aucun accord n'a pu être réalisé, les parties s'engagent à se mettre d'accord sur une convention collective supplétive au sujet des points qui n'ont pas été réalisés.
Cette convention supplétive ne pourra toutefois être conclue au sein du Conseil national du travail.
L'accord gouvernemental de Martens VIII invite enfin les partenaires sociaux à examiner s'il est souhaitable de généraliser la semaine des 38 heures et à formuler un avis au Gouvernement sur la fixation légale de la durée maximale hebdomadaire du travail à 38 heures.
Malgré le fait que la revendication de la généralisation des 38 heures n'a pas été reproduite dans le texte final des accords interprofessionnels 1989-1990 et 1991-1992, on peut constater que de nombreux secteurs opèrent dès 1987 une réduction du temps de travail à 38 heures par voie de convention collective de travail.
Reste toutefois un nombre important de secteurs pour lesquels la durée hebdomadaire du travail est encore supérieure à 38 heures.
Il en est ainsi pour des secteurs à forte proportion de petites et moyennes entreprises, pour certains secteurs appartenant au non-marchand ou encore pour des secteurs dans lesquels la commission paritaire compétente ne fonctionne pas.
Le nombre des travailleurs concernés n'est pas connu avec précision, mais certaines estimations citent le chiffre de 5 p.c. de l'ensemble des travailleurs, lesquels font ainsi l'objet d'une discrimination, sans que celle-ci puisse être justifiée d'un point de vue social.
En parallèle avec cette approche sectorielle de la problématique des 38 heures, il convient de mettre en exergue le contexte économique et social que la Belgique connaît actuellement et qui peut se résumer en deux points : d'une part, une croissance économique ralentie, d'autre part, un taux de chômage qui reste important, le nombre des travailleurs sans emploi s'étant encore fortement accru en 1991 et 1992.
En vue d'assurer une meilleure harmonisation de la durée hebdomadaire du travail pour tous les secteurs et entreprises et d'apporter un des éléments de solution au problème crucial de l'emploi qui touche tous les travailleurs de notre pays, il convient que le législateur intervienne et rende la durée hebdomadaire du travail de 38 heures applicable à toutes les entreprises.
Lydia MAXIMUS. |
Article premier
La présente proposition de loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
Aux articles 19, premier alinéa, 28, § 2, et 29, § 2, de la loi du 16 mars 1971 sur le travail, les mots « quarante heures » sont remplacés chaque fois par les mots « trente-huit heures ».
Lydia MAXIMUS. Andrée DELCOURT-PÊTRE. Eddy BOUTMANS. |