2-1532/2

2-1532/2

Sénat de Belgique

SESSION DE 2002-2003

24 MARS 2003


Projet de loi réglementant le prix du livre


Procédure d'évocation


AMENDEMENTS


Nº 1 DE M. DESTEXHE

Art. 4

Au dernier alinéa de cet article, remplacer le mot « supprimer » par le mot « ajouter ».

Justification

Le Roi ne peut pas être autorisé à supprimer des exclusions voulues par la loi. Comme il s'agit d'une loi particulière qui s'oppose à la règle générale de la libre formation des prix sur le marché, le Roi ne peut être autorisé qu'à ajouter des exclusions.

Nº 2 DE M. DESTEXHE

(Amendement subsidiaire à l'amendement nº 1)

Art. 4

Supprimer le dernier alinéa de cet article.

Nº 3 DE M. DESTEXHE

Art. 5

Compléter cet article comme suit :

« Cette disposition s'applique à tout acheteur de livre à des fins aussi bien professionnelles que privées. »

Justification

L'article 77 de la loi du 14 juillet 1991 précise que « la vente à distance est celle qui se forme en dehors de la présence physique simultanée du vendeur et du consommateur ». À l'article 1er, 7º, de la même loi, le consommateur est défini comme « toute personne physique ou morale qui acquiert ou utilise à des fins excluant tout caractère professionnel des produits ou des services mis sur le marché ».

Il convient que l'article 5 puisse également s'appliquer à une entreprise utilisant des livres à des fins de cadeaux d'affaires et donc professionnelles.

Nº 4 DE M. DESTEXHE

Art. 8

À cet article, apporter les modifications suivantes :

A) Au premier alinéa, remplacer les mots « compris entre 95 % et 100 % du prix fixé par l'éditeur ou l'importateur. » par les mots « compris entre 90 % et 100 % du prix fixé par l'éditeur ou l'importateur. »;

B) Supprimer le deuxième tiret proposé;

C) Compléter cet article par un alinéa nouveau, libellé comme suit :

« Par dérogation à l'alinéa 1er, les détaillants sont autorisés à pratiquer un prix effectif de vente au public compris entre 85 % et 100 % du prix fixé par l'éditeur ou l'importateur, dans le cas de vente de livres pour leurs besoins propres, excluant la revente, aux organismes poursuivant une mission scientifique ou d'éducation, ainsi qu'aux établissements d'enseignement, de formation professionnelle ou de recherche, aux bibliothèques accueillant du public pour la lecture ou pour le prêt. »

Justification

A) Les remises moyennes pratiquées par les libraires sont de l'ordre de 8 % en moyenne en Belgique (certains libraires pratiquant la carte de fidélité jusqu'à 10 %). Dans les grandes surfaces en revanche, les remises moyennes se situent au environ des 12 % en moyenne malgré les discounts sauvages de 30 %. Le fait de fixer par la loi le maximum de rabais à 10 % respecte les pratiques actuelles des libraires d'une part et fixe le prix minimum non loin de celui pratiqué par les grandes surfaces en moyenne. Par la loi on lutte efficacement contre le discount sauvage et exagéré (jusqu'à 30 %) pratiqué par les grandes surfaces sur produits d'appel, tout en maintenant la possibilité d'offrir à leur clientèle des avantages proches de ceux d'usage actuellement en moyenne. Par cet amendement, l'effet de l'enrichissement accéléré des grandes surfaces et grands détaillants/discounteurs, généré par une loi stricte type Lang, s'atténue sans pour autant porter préjudice au grand public acheteur.

B) En excluant les organismes publiques de la loi, le législateur semble confirmer que celle-ci est génératrice de prix plus élevés. À noter qu'en France, la loi Lang est également en cours de révision sur ce point, en vue de limiter les remises aux organismes publics (environ 15 %) et il serait grotesque de promulguer une loi entachée des mêmes défauts que sa consour française.

C) Par cette dérogation, on fixe le prix minimum pour les organismes publics non loin de celui pratiqué actuellement par le marché, en évitant les discounts sauvages, tout en maintenant quasi intact le pouvoir d'achat de ces organismes.

Nº 5 DE M. DESTEXHE

Art. 11

À l'alinéa premier, supprimer les mots : « et dont le dernier approvisionnement remonte à plus de 6 mois ».

Justification

Le contrôle d'une telle disposition est impraticable sur le terrain, pourrait être sujet à des contournements et ne tient pas compte des pratiques du métier du livre (droit de retour intégral pour les libraires vers les éditeurs ou distributeurs). Si elle est votée cette phrase ne permettra jamais d'organiser des promotions sur les livres qui remontent à plus de 24 mois.

Il convient également de défendre la bande dessinée belge qui est soumise à la concurrence féroce d'autres formes de loisirs (DVD, CD, vidéo, jeux électroniques, etc.).

Alain DESTEXHE.

Nº 6 DE M. ROELANTS du VIVIER

Art. 4

Au dernier alinéa de cet article, insérer les mots « ou ajouter » entre les mots « supprimer » et « certaines conclusions » et supprimer le mot « visées ».

Justification

Il s'agit de permettre que, par arrêté royal, le champ d'application de la loi puisse être étendu mais aussi restreint. En effet, il est nécessaire que la législation belge puisse s'adapter avec souplesse au contexte européen du marché du livre qui peut connaître, comme ce fut récemment le cas en France, certains bouleversements. Les évolutions des marchés du livre hollandais et français ont une incidence indéniable sur le marché belge. Cet amendement répond, en outre, à une demande exprimée lors du colloque sur « L'économie du livre dans l'espace européen » (Strasbourg, 2000), à savoir garantir l'évolutivité des législations en fonction des évolutions économiques sectorielles qui seront constatées au sein de la chaîne du livre.

Nº 7 DE M. ROELANTS du VIVIER

Art. 8

À l'alinéa 1er, remplacer le chiffre « 95 » par le chiffre « 90 ».

Justification

La remise autorisée de 5 % sur le prix de vente au public fixé par l'éditeur est insuffisante car elle induira, en fait, une augmentation de prix du livre dont les conséquences sociales, culturelles et économiques doivent être prises en compte.

En termes sociaux, un taux de ristourne maximal autorisé de 10 % serait de nature à limiter l'impact négatif de la loi sur le budget des familles, et particulièrement des familles socialement défavorisées ou avec enfants en bas âge scolaire. Celles-ci tirent un réel bénéfice des ristournes aujourd'hui autorisées en grande surface. En outre, elles ne perçoivent pas d'allocations de rentrée scolaire, contrairement aux familles françaises, bien que la loi française sur le prix du livre ait inspiré la présente proposition de loi.

En termes culturels, il s'agit de ne pas défavoriser le livre par rapport à d'autres produits de consommation culturelle ou de loisirs alors qu'une enquête Marketing Unit, réalisée en 2000, a montré que 25 % des Belges n'ouvrent jamais un livre, que 57 % n'en achètent jamais et que la Belgique francophone compte quelque 400 000 illettrés.

En termes économiques, il s'agit de soutenir le secteur de l'édition qui subsiste, en partie, grâce aux fonds communautaires d'aide à l'édition, car il n'est pas certain que la baisse de volume des ventes, induite par l'augmentation du prix des ouvrages, sera compensée par cette augmentation dans le chiffre d'affaires des éditeurs. Or, la situation du secteur de l'édition n'est pas florissante. La toute récente étude du LENTIC (1) sur le marché du livre montre « la faible croissance des sciences humaines et de la littérature générale » sur un marché qui n'a progressé, en 2002, que de 0,5 %.

D'autre part, sur le marché du livre belge francophone, la part relative des ouvrages édités par des maisons belges s'effrite régulièrement depuis quelques années déjà : 21 % aujourd'hui pour quelque 30 % il y a seulement 5 ans.

Enfin, en raison de l'étroitesse du marché belge, la possibilité doit être laissée, à l'ensemble des acteurs de la chaîne du livre, de pratiquer une politique des prix relativement souple, qui permet notamment aux libraires de fidéliser leurs clients en leur octroyant une remise de 10 %, et parfois plus.

Nº 8 DE M. ROELANTS du VIVIER

Art. 8

Compléter cet article par un nouvel alinéa, rédigé comme suit :

« Les détaillants peuvent pratiquer des prix inférieurs au prix de vente au public fixé conformément au premier alinéa pendant deux périodes d'un mois au maximum par an. Le Roi fixe la durée et les dates de début et de fin de ces périodes. »

Justification

Il s'agit de ne pas défavoriser des lecteurs socialement fragilisés car la loi engendrera une augmentation du prix du livre, au moins dans certains canaux de distribution. À titre d'exemples, un volume Bescherelle, référence du cours de français, est vendu, à 5,70 euros dans les magasins Carrefour en Belgique et 7,45 euros dans les mêmes magasins en France; un dictionnaire Harrap's est vendu à 20,50 euros en Belgique pour 32 euros en France, soit une différence de 11,50 euros, toujours dans la même chaîne de magasins.

Il s'agit également de relancer la consommation du livre en tant que produit culturel concurrencé par d'autres produits de loisirs. Une enquête Marketing Unit, réalisée en 2000, a montré que 25 % des Belges n'ouvrent jamais un livre, que 57 % n'en achètent jamais et que la Belgique francophone compte quelque 400 000 illettrés.

Il s'agit, enfin, de soutenir le secteur de l'édition belge, concurrencé par l'édition étrangère, et dont la croissance économique est particulièrement faible ces dernières années : seulement 0,5 % en volume, en 2002. Ces dernières années, les librairies indépendantes ont, elles, vu leur croissance progresser sur le marché de la distribution. Elles ne devraient donc pas pâtir exagérément d'une mesure de « soldes » qui, en favorisant la consommation, leur serait également bénéfique grâce à un possible « effet amplificateur ».

Nº 9 DE M. ROELANTS du VIVIER

Art. 11

A l'alinéa 1er, supprimer les mots « et dont le dernier approvisionnement remonte à plus de six mois ».

Justification

Cet amendement vise à corriger une disposition doublement favorable aux grandes surfaces alors que l'objectif de la proposition de loi est de garantir à la librairie indépendante un contexte concurrentiel équilibré.

En effet, les grandes surfaces ont une double facilité à mener une politique d'achat et de stockage qui leur permettra de ne pas réassortir leurs stocks durant les six mois précédant l'échéance à laquelle les prix seront libéralisés.

Premièrement, elles disposent de lieux de stockage plus importants que les petites librairies indépendantes. Deuxièmement, elles ont une capacité financière à immobiliser un fonds que n'ont pas les libraires indépendants. Ceux-ci seront souvent plus enclins à utiliser « le droit de retour » à l'éditeur dont ils disposent et seront donc amenés à réassortir leur stock plus fréquemment. Aux échéances prévues à l'article 11, compte tenu de ces inégalités en termes de coûts de stockage, le libraire indépendant est défavorisé par rapport à la grande surface.

François ROELANTS du VIVIER.

Nº 10 DE M. THISSEN

Art. 8

A l'alinéa 1er, remplacer les mots « 95 % » par les mots « 90 % ».

Justification

Afin de laisser jouer une certaine concurrence, la marge laissée au détaillant pour la détermination du prix de vente au public doit être supérieure à 5 %. C'est pourquoi nous proposons de remplacer la limite inférieure du prix effectif de vente au public en permettant que celui-ci soit compris entre 90 % et 100 % du prix fixé par l'éditeur ou l'importateur.

Nº 11 DE M. THISSEN

Art. 11

A l'alinéa 1er, supprimer les mots « et dont le dernier approvisionnement remonte à plus de six mois. »

Justification

Si la présente proposition de loi a pour objectif d'encourager la diffusion de livres « à rotation lente » comme étant des lieux d'expression d'opinions minoritaires ou de courants artistiques neufs, indispensables à l'évolution de nos sociétés, il n'en reste pas moins qu'il convient d'être attentif aux différents secteurs éditoriaux dont notamment le secteur de la bande dessinée et du livre « jeunesse » afin de maintenir une édition de qualité dans notre pays.

En effet, même si la bande dessinée doit certainement être considérée comme un livre à part entière, son secteur et sa consommation semblent très différents du livre dit « traditionnel ».

En Belgique, la bande dessinée est un produit très populaire et particulièrement sensible aux offres promotionnelles dont notamment sur les prix. Le marché de la bande dessinée est, en effet, composé majoritairement de séries d'albums, articulées autour d'un « héros » qui bénéficie, en moyenne, d'un nouveau titre par série et par an mais dont la mise en place est l'occasion de dynamiser l'ensemble de la série.

En outre, les albums de bandes dessinées semblent devoir faire face à une concurrence de plus en plus forte de la part d'autres produits du monde des loisirs (jeux électroniques, CD, vidéos, DVD, etc.) dont le développement est assuré à grand renfort de publicité et de promotion.

Le présent amendement vise à supprimer les mots « et dont le dernier approvisionnement remonte à plus de six mois » qui offre uniquement la possibilité aux détaillants de solder des ouvrages dont les ventes de fonds sont inexistantes. Cette opportunité semble inutile dès lors qu'il existe un droit de retour des détaillants aux éditeurs. Par contre, elle ne permettrait plus d'organiser des promotions sur le fonds. Or, celles-ci sont particulièrement utiles pour le secteur de la bande dessinée qui doit sans cesse renouveler son public et dont les ventes de fonds représentent 70 % du total de celles-ci.

René THISSEN.

(1) Laboratoire d'études sur les nouvelles technologies de l'information, la communication et les industries culturelles ­ ULg.