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Question écrite n° 7-1248

de Tom Ongena (Open Vld) du 21 mai 2021

à la ministre de l'Intérieur, des Réformes institutionnelles et du Renouveau démocratique

Extrême droite - Sociétés de gardiennage et de sécurité - Infiltration - Chiffres et tendances

extrémisme
sécurité et gardiennage
racisme
statistique officielle
extrême-droite

Chronologie

21/5/2021Envoi question (Fin du délai de réponse: 24/6/2021)
24/6/2021Réponse

Aussi posée à : question écrite 7-1247

Question n° 7-1248 du 21 mai 2021 : (Question posée en néerlandais)

Des rapports sur l'extrême droite, comme celui établi en 2018 par le service de sécurité néerlandais, ont révélé que plusieurs groupes d'extrême droite en Europe comptaient dans leurs rangs d'anciens agents de police et militaires. Outre le fait que ces personnes devraient en réalité soutenir l'État de droit au lieu de le saper, elles ont l'expérience du combat, ont parfois accès à des armes et savent les manier, ce qui les rend particulièrement dangereuses.

On constate également que ces groupes d'extrême droite tentent d'infiltrer une nouvelle cible : les sociétés de sécurité privées. Le 14 février 2020, une équipe de télévision allemande de la chaîne ARD a réalisé un reportage qui a fait grand bruit. Il montre des travailleurs (presque tous des migrants) d'une division allemande d'Amazon dans la Hesse qui sont surveillés par une société de sécurité privée employant quasi uniquement des néonazis. L'appartenance idéologique de ces derniers saute encore plus aux yeux lorsqu'ils apparaissent sur le lieu de travail, vêtus d'une tenue portée exclusivement par les néonazis.

Cette société de sécurité ne s'appelle pas «HESS» par hasard (en référence à Rudolph Hess). Amazon a mis fin à la collaboration avec elle après la diffusion du reportage. Il ne s'agit pourtant pas d'un fait isolé. Selon le journal allemand Märkische Allgemeine, ce phénomène inquiète les politiques. Dans le land de Brandebourg, il s'avère que près d'un travailleur sur dix dans les sociétés de sécurité privées partage les idées fascistes d'extrême droite.

Une société de sécurité privée doit en premier lieu garantir la sécurité de tout un chacun, ce qui n'est pas le cas lorsque cette tâche est confiée à des extrémistes qui ne conçoivent pas que tous les hommes soient égaux. Cette profession continue néanmoins d'attirer des sympathisants d'extrême droite, car elle s'assimile à une forme d'exercice du pouvoir.

En ce qui concerne le caractère transversal de la présente question : les différents gouvernements et maillons de la chaîne de sécurité se sont mis d'accord sur les phénomènes à aborder en priorité au cours des quatre prochaines années. Ces priorités sont définies dans la Note-cadre sur la sécurité intégrale et le Plan national de sécurité pour la période 2016-2019 et ont été discutées lors d'une conférence interministérielle à laquelle participaient aussi les responsables de la police et de la justice. La présente question porte donc sur une compétence transversale partagée avec les Régions, qui interviennent surtout dans le volet préventif.

Je souhaiterais dès lors vous poser les questions suivantes :

1) Parmi les extrémistes de droite qui sont suivis par les services de sécurité et qui représentent un grand danger potentiel, y a-t-il des personnes qui ont travaillé ou qui travaillent encore dans des sociétés de sécurité privées ? Pouvez-vous donner des chiffres à ce sujet ? Sont-ils en hausse ou en baisse ?

2) Combien de plaintes ont été déposées ces deux dernières années par des citoyens contre des agents de gardiennage pour des incidents de nature raciste ? Ces plaintes concernent-elles une ou plusieurs sociétés ?

3) Pouvez-vous indiquer si des sociétés de sécurité privées ont déjà dû être sanctionnées ou fermées en raison de comportements déplacés (de nature raciste) ? Si oui, combien ?

4) Les tests (en particulier les tests psychologiques) menés actuellement lors du recrutement de personnel de sécurité privé sont-ils suffisants?

5) Quelle surveillance une entreprise ou une communauté peut-elle exercer elle-même pour déterminer si le recours aux services d'une société de sécurité présente un risque ?

6) Avez-vous connaissance d'une tendance dans notre pays qui révélerait l'infiltration de groupes extrémistes dans des sociétés de gardiennage et de sécurité ? Pouvez-vous donner des explications à ce sujet ?

Réponse reçue le 24 juin 2021 :

1) Je ne peux répondre à votre question concernant d’éventuels ex-agents du secteur de la sécurité privée qui seraient suivis par les services de sécurité, je dois vous renvoyer vers les services de sécurité et de renseignement. Mon administration enquête sur les conditions de sécurité (des candidats qui souhaitent désormais accéder les secteur ou qui sont encore en activité dans le secteur de la sécurité privée).

L’extrémisme n’est, bien entendu, en aucun cas compatible avec le profil d’un agent de gardiennage ou d’un agent de sécurité. Je peux vous informer que s’il y avait des indices qu’un membre du personnel, qui a déjà été screené avant son début de l’emploi, pourrait avoir des liens avec l’extrémisme, mes services peuvent ouvrir une nouvelle enquête sur les conditions de sécurité à tout moment. Dans le cadre de cette enquête, des informations seront demandées aux services de renseignement et de sécurité, aux services de police et éventuellement aussi aux autorités judiciaires. S’il s’avère que la personne concernée ne correspond pas au profil que toute personne doit rencontrer pour être autorisée à travailler dans le secteur de la sécurité privée et spéciale (intégrité, loyauté, respect des valeurs démocratiques, absence de relations suspectes avec le milieu criminel, absence de risques pour la sécurité intérieure ou extérieure de l’État ou pour l’ordre public, respect des droits fondamentaux des concitoyens, absence de comportement agressif), une procédure de retrait de son autorisation personnelle sera démarrée voire, le cas échéant, une suspension préventive sera décidée.

2) Depuis 2019 mes services ont traité dix-neuf plaintes dénonçant des discriminations opérées par des agents de gardiennage et de sécurité dans diverses entreprises. Toutes ont été suivies et traitées. Dans la majorité des cas, il n’a pas été possible de relever le caractère discriminatoire des actes posés par les agents, les éléments n’étant pas établis à suffisance pour caractériser l’infraction.

La Banque de données nationale générale (BNG) est une base de données policières dans laquelle sont enregistrés les faits sur base de procès-verbaux résultant des missions de police judiciaire et administrative.

Pour la période 2016-2019 et les trois premiers trimestres de 2020, il n’y a qu’un seul fait enregistré dans la BNG, pour lequel la qualité du suspect indique qu’il s’agit d’un membre du personnel d’une firme de sécurité ou d’une firme de surveillance.

Il convient de noter qu’il n’est pas obligatoire d’enregistrer les informations en matière de suspects, ce qui laisse supposer que les données ne sont pas exhaustives.

Compte tenu de la description de la BNG et de ses variables disponibles, il n’est pas possible de savoir si les plaintes sont centrées sur une ou plusieurs firmes.

3) Depuis 2019 aucun procès-verbal rédigé pour une infraction à l’article 105, alinéa 5, de la loi du 2 octobre 2017 réglementant la sécurité privée et particulière («Les agents de gardiennage ne peuvent refuser ou empêcher l’accès à un lieu sur la base d’une discrimination directe ou indirecte.»).

4) Le candidat-agent de gardiennage doit suivre une formation obligatoire et réussir les examens qui sont organisés dans ce cadre.

De plus, il doit également réussir un test psychotechnique. Ce test psychotechnique vérifie si le candidat agent de gardiennage:

a une personnalité équilibrée;

respecte les droits fondamentaux et les droits de ses concitoyens;

a la capacité de faire face aux comportements agressifs de tiers et a la capacité de se contrôler;

a le respect des valeurs démocratiques.

Les tests se composent d’une partie informatisée et d’un interview comportemental. Ces examens et tests ne peuvent être réalisés que par le SELOR ou un centre d’examen d’une entreprise de gardiennage ou d’un service de gardiennage interne agréé à cet effet par le ministre de l’Intérieur.

Au cours de cette procédure d’autorisation, le SELOR donne des conseils sur les tests qui seront utilisés et dans quelle mesure ils testent les compétences requises, la manière dont l’entretien sera conduit. Il est également vérifié si les experts de sélection qui seront déployés pour la gestion de ces examens psychotechniques remplissent les conditions qualitatives.

Par conséquent, la qualité des tests et leur gestion sont surveillées.

5) Lors de l’embauche d’une entreprise de gardiennage, un client doit au préalable contrôler qu’il fait appel à une entreprise de gardiennage qui dispose d’une autorisation délivrée par le service public fédéral (SPF) Intérieur et que les agents de gardiennage mis à disposition sont en possession d’une carte d’identification valable. Le SPF Intérieur effectue un certain nombre de vérifications et contrôles de sécurité avant de délivrer une autorisation à une entreprise de gardiennage. Comme indiqué ci-dessus, il est également vérifié pour chaque candidat-agent de gardiennage dans quelle mesure il répond au profil idéal prévu par la loi. En conséquence, les personnes qui, par exemple, font preuve d’un respect insuffisant des droits fondamentaux et des droits de leurs concitoyens ou font preuve d’un respect insuffisant des valeurs démocratiques ou présentent un risque pour la sécurité de l’État ou l’ordre public peuvent exclus du secteur de la surveillance.

6) J’informe l’honorable membre, qu’en réponse à cette question, je me réfère aux réponses à la question écrite no 7-1247 adressée au vice-premier ministre et ministre de la Justice et de la Mer du Nord.