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Mme Fabienne Winckel (PS). - Le non-emploi des jeunes se pose avec acuité dans notre pays.
Ainsi, le SPF Économie a indiqué, lors de la publication de son dernier rapport en décembre dernier, que « le chômage des jeunes en Belgique atteignait 24,5% au troisième trimestre, en hausse de deux points de pourcentage par rapport au trimestre précédent. Et de préciser que c'est le plus haut niveau depuis 2010. ».
Le gouvernement a fait de la lutte contre ce problème crucial une priorité absolue et son souci constant est de développer et de favoriser de nouvelles stratégies d'insertion socio-professionnelle qui atteignent les groupes cibles. Nous pouvons nous en réjouir.
Madame la ministre, vous avez, pour votre part, récemment manifesté votre volonté d'introduire un nouveau dispositif, à savoir la création de chèques-emploi en vous inspirant des titres-services, afin de diminuer les coûts du travail et les contraintes administratives découlant de l'engagement par les plus petites entreprises.
J'ose croire que le statut du jeune engagé dans cette formule pourra, à terme, évoluer vers un véritable contrat de travail. Le dossier est extrêmement délicat quand on sait que les jeunes qualifiés connaissent eux aussi beaucoup de difficultés à décrocher un premier emploi.
Madame la ministre, je voudrais savoir quel est l'état de la question et obtenir des informations sur l'agenda des concertations prévues avec les partenaires sociaux et les entités fédérées.
Mme Monica De Coninck, ministre de l'Emploi. - Je partage l'inquiétude de Mme Winckel. Il importe non seulement que les jeunes puissent trouver du travail rapidement mais également qu'ils aient un emploi stable leur offrant une certaine sécurité.
Ma proposition concernant les chèques-emploi présente des similitudes avec le système des titres-services. Ce dernier fonctionnant très bien, il est logique que nous nous en inspirions pour la mise en place des nouvelles mesures projetées.
Un facteur de réussite important des titres-services est le fait que l'utilisateur en connaît précisément le coût : une heure de travail coûte un chèque, ni plus ni moins. L'employeur peut avoir la certitude qu'il n'y aura pas de frais soudains ou imprévus. Nous avons repris cet-aspect-là dans le système des chèques-emploi. L'employeur paie un montant fixe par heure de travail prestée. C'est simple, facile à comprendre et cela rassure l'employeur qui sait à quoi s'en tenir.
Le travailleur titres-services perçoit un salaire normal, y compris pour les jours fériés ou les jours de vacances. Il reçoit également un double pécule de vacances, comme tout autre travailleur. Cet aspect a également été intégré dans le système du chèque-emploi.
Cela ne signifie toutefois pas que nous copions intégralement le système des titres-services. Le travailleur titres-services travaille de façon très flexible auprès de différents utilisateurs. Le système des chèques-emploi est différent de ce point de vue, car nous voulons précisément que les recrutements débouchent sur des emplois stables, le but n'étant évidemment pas de créer un nouveau statut précaire.
L'employeur doit conclure un contrat de travail avec le jeune et toutes les règles de protection normale du contrat de travail sont applicables. Nous sommes même plus stricts. Ainsi, nous voulons que le contrat de travail soit conclu au moins à mi-temps et qu'après deux ans, il le soit automatiquement pour une durée indéterminée.
Nous désirons que le jeune qui travaille avec des chèques-emploi ne soit pas engagé pour remplacer un autre travailleur. Le système doit surtout viser à créer des emplois supplémentaires.
La semaine dernière, ma cellule stratégique a organisé une première concertation avec les cellules stratégiques pour l'emploi des Régions. Au cours de cette concertation, le principe des chèques-emploi a été expliqué en détail et toutes les demandes d'explications ont reçu une réponse.
Les Régions sont en train de réfléchir à ce qu'elles vont faire exactement de leurs nouvelles compétences, notamment en ce qui concerne les réductions ONSS et les activations ONEM. Le transfert des compétences leur donne de nouvelles opportunités pour élaborer leur propre politique mais l'étendue du transfert, en particulier pour la politique relative au marché de l'emploi, constitue un défi majeur face auquel elles restent prudentes. Ainsi, sur le plan budgétaire, elles souhaitent que cela n'entraîne pas des dépenses importantes et imprévues.
Je comprends leurs inquiétudes, mais je ne suis pour autant pas prête à abandonner un bon projet. Le taux de chômage des jeunes est élevé. Nous avons déjà consenti des efforts dans ce domaine, que ce soit au niveau fédéral ou au niveau régional, mais nous devons faire plus encore.
Bien sûr, ma proposition arrive en fin de législature et à la veille d'une importante réforme de l'État. Mais cela, le jeune chômeur ne s'en soucie guère. Il veut un emploi tout de suite. Dans le monde politique, un an, ce n'est peut-être pas long, mais dans la vie d'un jeune, douze mois peuvent sembler une éternité.
Je crois réellement que les chèques-emploi seront un incitant important à la création d'emplois pour les jeunes. Je ne vais pas rater cette opportunité pour une question de timing. Je vais au contraire continuer à approfondir l'idée et à la défendre avec ferveur. Cela m'est complètement égal de savoir si c'est moi qui prendrai la mesure ou si ce sont les Régions qui vont l'exécuter. Ce qui importe, c'est qu'elle soit prise. Le plus tôt sera le mieux.
Mme Fabienne Winckel (PS). - Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse très détaillée. Il est en effet temps d'agir pour l'emploi des jeunes. Je me rends compte que vous avez balisé le système pour que les chèques-emploi débouchent à terme sur des emplois stables. Vous avez notamment parlé de contrats à durée indéterminée après deux ans d'activités, et j'en prends bonne note.
J'attends de voir concrètement vers quoi tout cela va nous mener. En attendant, je suis rassurée d'apprendre que vous avez lancé une concertation avec les entités fédérées. Je pense qu'il est important d'agir, mais il faut faire en sorte de promouvoir des emplois stables, avec un statut correct pour les jeunes.