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M. André du Bus de Warnaffe (cdH). - Madame la secrétaire d'État, je souhaite revenir sur une problématique que nous rencontrons fréquemment, principalement dans les grandes villes : la mendicité des enfants ou, plus précisément, la mendicité à laquelle ils sont associés par des adultes. Pour ces populations, principalement des populations roms, la mendicité s'inscrit dans une histoire caractérisée par l'exclusion et est avant tout la conséquence d'un état réel de pauvreté.
Une politique efficace de lutte contre la mendicité nécessite un schéma structurel de prise en charge sociale réunissant tous les niveaux de pouvoir et organismes concernés. Les initiatives qui s'adressent aux enfants roms comme les centres d'intégration du Foyer bruxellois, l'asbl Diogène, le RORA - la coordination de la consultation régionale des affaires roms -, doivent être encouragées.
En mars 2011, la conférence interministérielle « Intégration sociale » a mis sur pied un groupe de travail consacré aux Roms. En février 2012, ce groupe de travail a adopté la « stratégie nationale pour l'intégration des Roms ». Cette stratégie repose sur cinq piliers : l'accès à l'éducation, l'accès au travail, l'accès aux soins de santé, l'accès au logement et la lutte contre la discrimination. Ce plan n'aborde pas la question de la mendicité en tant que telle. Il aurait été décidé que l'amélioration des politiques fondées sur les cinq piliers aurait automatiquement une répercussion sur la situation de pauvreté des Roms et donc sur la mendicité.
Je ne partage pas cette position. Je suis d'avis qu'il est nécessaire d'avoir une réflexion spécifique sur la mendicité dans le cadre de ce plan national d'autant plus que la question de l'exploitation est liée aux phénomènes de mendicité, principalement, selon la police fédérale, en ce qui concerne les populations roms.
Depuis 2010, j'ai interpellé à plusieurs reprises la ministre Huytebroeck sur la question de la mendicité infantile mais je ne vois aucune amélioration. En janvier 2012, la ministre m'a par ailleurs répondu qu'elle devait vous contacter pour aborder la question des Roms, notamment dans le cadre de la lutte contre la pauvreté.
Madame la secrétaire d'État, avez-vous eu des contacts avec la ministre Huytebroeck depuis janvier 2012 ? Si oui, quels thèmes avez-vous abordés ? Quelles ont été les conclusions ainsi que les suites données à ces rencontres ?
Quelles mesures concrètes menant à la diminution de la mendicité, plus spécifiquement la mendicité infantile, ont-elles été adoptées dans le cadre de la stratégie nationale d'intégration des Roms ? Ce plan ne devrait-il pas être modifié afin d'y intégrer une réflexion spécifique sur la mendicité ?
La Commission européenne prévoyait de publier un rapport d'avancement sur la mise en oeuvre des stratégies nationales d'intégration des Roms au printemps 2013. Ce rapport est-il disponible ? Si oui, quelles en sont les conclusions ?
Le groupe de travail consacré aux Roms se réunit-il encore ? Si oui, quels sont les projets en cours ?
En mai 2013, vous indiquiez en réponse à une autre question parlementaire que le plan de lutte contre la pauvreté infantile était en cours de finalisation. Dans quel timing se situe-t-on ? Ce plan intègre-t-il la question de la mendicité infantile ?
Dans cette même réponse, vous indiquiez que la DG Home de la Commission européenne menait une étude sur le phénomène des mères mendiant avec leurs enfants. Les résultats de cette étude sont-ils disponibles ? Si oui, quelles en sont les conclusions ?
Mme Maggie De Block, secrétaire d'État à l'Asile et la Migration, à l'Intégration sociale et à la Lutte contre la Pauvreté. - Le dialogue entre les niveaux de pouvoir et les ministres compétents est important. Il se pratique notamment dans le cadre de la Conférence interministérielle Intégration sociale.
II n'existe pas d'action spécifique pour lutter contre la mendicité infantile dans la stratégie nationale pour l'intégration des Roms. Dans le cadre de mes compétences, je préconise une approche plus intégrée où l'objectif général est de sortir ces enfants de la rue et de les intégrer dans notre société, afin qu'ils puissent aller à l'école et ensuite travailler et construire leur vie.
Le rapport annuel de la Commission européenne relatif aux avancées en la matière est publié et fait l'objet d'une analyse de mes services.
Le groupe de travail Roms s'est réuni le 27 novembre 2012 et a dressé un état de la situation en ce qui concerne la mise en oeuvre de la stratégie nationale pour l'intégration des Roms. Le document a été transmis à la Commission européenne. Le groupe de travail se réunira pour donner suite à ce rapport.
Le 10 juin, la Conférence interministérielle Intégration dans la société a approuvé le Plan national de lutte contre la pauvreté infantile. Ce plan se fonde sur une approche intégrée. Pour la première fois dans notre pays, au-delà des frontières des communautés et régions, un plan a été élaboré spécifiquement pour lutter contre la pauvreté chez les enfants et promouvoir leur bien-être. Si ce plan ne contient pas d'actions spécifiques pour lutter contre la mendicité infantile, il inclut toutefois une mesure par laquelle je m'engage à oeuvrer à la poursuite du programme ROMED du Conseil de l'Europe et de la Commission européenne en 2013-2014. En effet, je suis convaincue que la médiation est très importante pour résorber les inégalités auxquelles cette communauté est confrontée.
J'ai déjà eu l'occasion de présenter le plan devant votre commission des Affaires sociales où j'avais évoqué le plan de lutte contre la pauvreté infantile. Si vous le souhaitez, je pourrai vous faire envoyer ces documents. Sachez que le plan est le résultat d'une pleine collaboration avec les régions et communautés. Ce n'est pas moins de 119 mesures qui ont été décidées en faveur des enfants.
Le rapport de l'Étude de la typologie de la mendicité infantile dans l'Union Européenne et des réponses politiques qui y sont apportées a été publié. Cette étude comporte des idées intéressantes pour la Belgique, en ce qui concerne les différentes typologies, les différentes catégories d'áge, l'importance de la coordination et de la collaboration européenne, l'analyse de la législation, etc.
L'analyse de ce groupe de population est difficile. Les différences culturelles par rapport à notre mode de vie sont considérables. Ce ne sont pas les enfants qui posent problème mais les parents.
M. le président. - Pensez-vous que les Roms constituent un problème, madame la secrétaire d'État ? Ce sont des êtres humains comme les autres.
Mme Maggie De Block, secrétaire d'État à l'Asile et la Migration, à l'Intégration sociale et à la Lutte contre la Pauvreté. - Je veux simplement dire qu'il est très difficile de les convaincre de travailler avec nous. Ainsi, ils ne souhaitent pas envoyer leurs enfants à l'école.
Nous faisons tout notre possible. Nous privilégions la communication avec eux par le biais de personnes auxquelles ils font confiance, des personnes issues de leur communauté mais qui ont entamé une démarche d'intégration, parfois depuis plusieurs générations. C'est le cas à Gand, par exemple. Ces personnes ressources peuvent leur expliquer leur propre cheminement par rapport à la nécessité de scolariser les enfants, d'habiter dans une maison, etc. Elles font un travail d'accompagnement.
Nous sommes également attentifs aux bonnes pratiques en vigueur dans d'autres pays.
Les populations concernées n'apprécient pas - ce que je comprends - d'être sous la surveillance constante des assistants sociaux, des écoles, du gouvernement, des communes, etc. C'est pourquoi nous encourageons le dialogue avec des personnes de même origine qui se sont intégrées, et plus particulièrement avec de jeunes adultes qui peuvent aussi servir d'intermédiaires entre les générations.
Nous pourrions leur demander d'expliquer à ces populations comment les autorités pourraient les aider à s'installer dans des maisons, mais beaucoup continuent à voyager d'un pays à l'autre.
M. André du Bus de Warnaffe (cdH). - Cette question a déjà fait l'objet de plusieurs débats et auditions. Le plan national auquel vous faites référence sera, je l'espère, de nature à fournir des réponses crédibles aux problèmes dénoncés par de nombreux acteurs sociaux. Les ONG se sont exprimées dans des communiqués de presse et en commission pour affirmer qu'il s'agit d'un problème d'accompagnement, d'un problème d'ordre social.
La difficulté est effectivement de trouver le bon intermédiaire entre les structures d'accompagnement et les populations roms.
Je fais référence à une expérience financée il y a quelques années par la Fondation roi Baudouin où l'on mettait précisément en avant les compétences requises pour approcher ces populations.
Cependant, malgré ces expériences, différentes initiatives et l'existence de l'asbl Diogène, du RORA, etc., nous ne disposons guère d'éléments nous permettant d'apprécier une évolution positive de la situation.
Dans ce contexte, je me réjouis de la mise en oeuvre d'un plan d'action qui, pour la première fois, rassemble les entités fédérées et le fédéral sur cette question. La manière dont ses 119 mesures seront déclinées en constitue l'enjeu fondamental.
Je vous remercie de bien vouloir me faire parvenir ce plan par écrit.