5-1633/4 | 5-1633/4 |
16 JUILLET 2013
I. INTRODUCTION
La proposition de loi qui fait l'objet du présent rapport relève de la procédure bicamérale facultative. Elle a été déposée au Sénat le 24 mai 2012 par Mme Faes et consorts. Elle a été prise en considération le 31 mai 2012 et envoyée à la commission de la Justice.
La commission était également saisie des propositions de loi suivantes:
— proposition de loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale, en vue de créer une banque de données ADN « Inculpés et suspects » (doc. Sénat, nº 5-1576/1, de Mmes Inge Faes et consorts);
— proposition de loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale, en vue de créer une banque de données ADN « Intervenants » en matière pénale (doc. Sénat, nº 5-1634/1, de Mme Inge Faes et consorts);
— proposition de loi modifiant l'article 8 de la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en vue de faciliter l'échange international de données ADN (doc .Sénat, nº 5-1831/1 de M. Gérard Deprez et consorts);
— proposition de loi étendant le système du prélèvement obligatoire de l'ADN chez certains groupes de condamnés (doc. Sénat, nº 5-844/1 de Mme Anke Van dermeersch et consorts).
La commission a examiné les propositions de loi précitées de manière conjointe lors de ses réunions des 17 juillet, 6 et 13 novembre, 5 décembre 2012, 30 avril, et 28 mai 2013, en présence de Mme Turtelboom, ministre de la Justice.
La commission a toutefois décidé de disjoindre la présente proposition en date du 3 juillet 2013.
Le rapport a été approuvé le 16 juillet 2013.
II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE MME FAES, AUTEURE PRINCIPALE DE LA PROPOSITION DE LOI
Mme Faes indique que l'objectif principal de la présente proposition vise à permettre et organiser le prélèvement d'échantillons de cellules en vue de l'identification de personnes décédées non identifiées.
En effet, une disparition est plus grave qu'un décès. Aussi faut-il mettre tous les moyens en œuvre pour retrouver les personnes portées disparues, même si elles sont décédées. Il ne faut pas que des personnes soient inhumées ou incinérées sans que leur identité ait été établie. Et s'il est malgré tout impossible de faire autrement, il faut alors, au préalable, prélever sur le corps un échantillon de cellules. On peut ainsi établir un profil ADN qui permettra de déterminer — peut-être après de nombreuses années — l'identité de la personne décédée.
Aux Pays-Bas, une banque de données ADN « Personnes disparues » a été créée dès 2006. Selon le ministre néerlandais de l'époque Johan Remkes (VVD), les proches peuvent entamer leur travail de deuil plus facilement s'ils savent exactement ce qui est arrivé à la personne disparue, aussi difficile la vérité soit-elle à entendre. Cette banque de données néerlandaise contient à ce jour quelque neuf cents profils de personnes disparues et de membres de leur famille ainsi que de dépouilles mortelles non identifiées. Elle est gérée par l'Institut néerlandais de médecine légale.
En Belgique, on considère que la création d'une banque de données similaire doit être la prochaine étape en matière d'expertise médico-légale. Sur le terrain, il y a longtemps d'ailleurs que l'on est demandeur. Des projets ont été élaborés dès 1999, mais aucun n'a encore abouti à ce jour. L'utilité d'une telle banque de données demeure pourtant évidente, ainsi qu'il ressort du commentaire de la dernière adaptation apportée à la loi ADN (projet de loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale, doc. Chambre, nº 53-1504/001, p. 5).
La présente proposition vise à répondre à la demande du terrain et à suivre la tendance qui se dessine au niveau européen.
L'idée est de créer cette banque de données au sein de l'Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC) puisque celui-ci gère aujourd'hui déjà, en sa qualité d'instance centrale, les banques de données ADN « Criminalistique » et « Condamnés ». Vu l'expertise dont il dispose, l'INCC est en effet le mieux à même de gérer cette nouvelle banque de données relative aux personnes disparues.
Dans la même optique et en vue de garantir une certaine cohérence dans la législation, le volet « Personnes disparues » sera inséré dans la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale (dénommée ci-après « loi ADN »). Cette loi fixe déjà le cadre législatif en ce qui concerne l'utilisation des analyses ADN dans le domaine de l'expertise médicolégale.
Un autre élément à prendre en compte est le fait que lors de la découverte d'un corps non identifié, il y a souvent présomption que la mort est consécutive à une infraction. Or, la loi ADN actuelle n'est pas totalement adaptée et devrait être modifiée sur plusieurs points. En effet, dans la loi ADN actuelle, la procédure d'identification par analyse ADN est axée sur la recherche de l'auteur d'une infraction alors que s'il s'agit de personnes disparues, l'identification porte précisément sur des victimes potentielles et non sur l'auteur.
Pour le reste, la présente proposition de loi s'inscrit dans la logique de la loi ADN actuelle, tout en s'en différenciant sur un point essentiel, à savoir l'élément de contrainte. Alors qu'en matière pénale, le prélèvement d'un échantillon de cellules humaines sur une personne peut être effectué si nécessaire sous la contrainte, l'objectif en l'espèce est de faire en sorte que les prélèvements d'échantillons pour la banque de données ADN « Personnes disparues » soient obtenus avec le consentement des intéressés. C'est aux membres de la famille de la personne disparue qu'il revient de décider si du matériel ADN se rapportant à cette personne peut ou non être recueilli ou si eux-mêmes se soumettent au prélèvement d'échantillons de référence.
L'auteure se réfère pour le surplus aux développements de sa proposition de loi et propose que la commission entame des auditions sur l'ensemble des propositions de loi précitées dont la commission est saisie.
À la suite de cet exposé, la commission a décidé de procéder à une série d'auditions.
III. AUDITIONS
A. Auditions du 13 novembre 2012
1. Exposé de M. Willem Debeuckelaere, président de la commission de la protection de la vie privée (CPVP)
M. Debeuckelaere rappelle que la CPVP est un organe, composé de seize membres désignés par la Chambre des représentants, qui est chargé de rendre un avis collégial quant aux matières qui ressortent de sa compétence. Par conséquent, l'orateur précise qu'il rappellera les avis qui ont été émis par la CPVP à l'occasion de l'adoption des lois de 1999 et 2007 et de leurs arrêtés royaux.
Pour ce qui concerne les propositions de loi à l'examen, l'intervenant n'émettra qu'un avis personnel.
De manière générale, M. Debeuckelaere estime que les propositions de loi nos 5-1576, 1633 et 1634 et plus particulièrement celle relative aux personnes disparues, ne poseront pas de réelles difficultés à la CPVP. En effet, les auteurs des propositions précisent que celles-ci respectent l'enseignement de l'arrêt « Marper contre UK » qui énonce les principes directeurs de l'utilisation de l'ADN dans les procédures pénales. Dans la mesure où la CPVP a toujours veillé à ce que la jurisprudence de la CEDH rendue sur pied de l'article 8 de la CVEDH soit suivie, elle n'a donc à priori pas d'objection.
La CPVP tient toutefois à la mise en place d'un contrôle direct sur le traitement des données personnelles existantes dans les banques de données ADN. Or, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 22 mars 1999, l'INCC ne dispose toujours pas d'un préposé à la protection des données alors que celui-ci est imposé par la loi. L'intervenant plaide donc pour que cette personne soit désignée dans les meilleurs délais et ce d'autant plus qu'elle est censée rédiger un rapport annuel à l'attention de la CPVP.
Pour la banque de données « personnes disparues » (doc. Sénat, nº 5-1633/1), il convient de constater qu'elle implique de prime abord une violation de la sphère privée très étendue. Il faut sans doute l'accepter, mais à la condition que toutes les garanties juridiques nécessaires à la protection des données personnelles soient mises en œuvre et précisées. À ce jour, l'intervenant précise que loi ne prévoit pas la possibilité pour une personne de s'opposer à l'insertion de son profil dans les deux banques de données ADN « criminalistique » et « condamnés ».
Il convient également de définir avec plus de précisions la notion de « suspect » prévue dans la proposition de loi « suspects » nº 5-1576/1. Ce terme est assez général. Ne vise-t-on que les cas où l'action publique est menée ? Ce point devrait être clarifié.
À titre d'exemple, l'intervenant cite l'affaire « Marianne Vaatstra » qui fut violée et tuée en 1999 à Groningen. Cette affaire a engendré la plus grande enquête ADN des Pays-Bas puisque 8 080 hommes ont volontairement accepté que leur ADN soit prélevé. Dans cette hypothèse, l'intervenant estime qu'il ne peut être question de conserver définitivement les profils de ces 8 080 hommes dans une banque de données « suspects » (doc. Sénat, nº 5-1576/1) dès lors qu'ils ont volontairement collaboré à une enquête judiciaire.
Dans une enquête similaire dans la région de Turnhout, la police a également comparé les profils de nonante personnes dont un seul fut positif. Or, la personne concernée s'est ensuite suicidée; éteignant ainsi l'action publique. Dans un tel cas de figure, il convient de régler le sort des quatre-vingt-neuf autres profils ADN ? Doivent-ils être repris dans la base de données « suspects » ? L'intervenant ne le pense pas.
M. Debeuckelaere précise qu'il s'agit là de réflexions personnelles et préconise que les propositions à l'examen, éventuellement amendées, soient adressées pour avis à la CPVP.
2. Exposé de M. Alain Remue, chef de la « cellule Personnes disparues », police judiciaire fédérale
M. Remue explique que la « cellule Personnes disparues » a été créée en 1995. Elle est chargée de la problématique de la disparition de personnes mais aussi des corps et des parties de corps non identifiés. Ces deux aspects sont d'ailleurs étroitement liés. La « Cellule Personnes disparues » est un service d'appui opérationnel spécialisé de la police fédérale. Elle a pour mission de coordonner les recherches de grande ampleur visant à retrouver les personnes disparues, d'apporter un appui aux polices locales et de développer une expertise en rapport avec cette problématique. L'intervenant indique qu'il se limitera ici à évoquer la création d'une banque de données « Personnes disparues ».
Attributions
Les attributions de la « cellule Personnes disparues » portent sur trois domaines:
— Les disparitions inquiétantes
Depuis sa création il y a dix-sept ans, la Cellule a ouvert, au total, 20 008 dossiers pour des disparitions inquiétantes. Dans la pratique, la Cellule est appelée par la police locale, après un contact avec le parquet. Parmi les personnes disparues, il peut y avoir aussi bien des enfants et des personnes ágées que d'autres adultes. Parfois, la disparition est liée à un malentendu ou à une fugue, mais elle peut aussi être liée à des faits criminels. Par an, cela représente quelque 1 200 dossiers, soit deux à trois nouveaux dossiers chaque jour.
Dans 19 285 cas (96,4 %), la personne fait l'objet d'un désignalement. Dans 2 228 cas (11,5 %), la personne est décédée (suicide, faits criminels, mort naturelle). À ce jour, 723 personnes font encore l'objet d'un signalement pour disparition inquiétante. Plusieurs d'entre elles ont encore donné signe de vie (coup de téléphone, sms, etc.) mais d'autres ont consciemment fait le choix de disparaître. On peut présumer que la plupart d'entre elles sont décédées, mais, à ce jour, elles n'ont toujours pas été retrouvées. Quand on dit qu'il y a 723 personnes qui sont toujours portées disparues, cela veut dire aussi qu'il y a quelque 21 000 personnes qui s'inquiètent chaque jour du sort de l'une d'entre elles. Derrière chaque chiffre, il y a donc d'énormes souffrances. Il faut en être conscient.
— L'identification de corps ou de parties de corps (hors les situations de catastrophe)
En 2012, la Cellule a été appelée à 33 reprises pour l'identification d'hommes, de femmes et de parties de corps:
— hommes: 23, dont 17 ont été identifiés;
— femmes: 7, qui toutes ont été identifiées;
— parties de corps: 3
La Cellule a également été contactée dans le cadre de 141 dossiers étrangers:
— hommes: 103, dont 6 ont été identifiés;
— femmes: 38, dont 4 ont été identifiées.
En ce qui concerne la problématique des corps et parties de corps non identifiés, on constate que, pour les 12 années écoulées, 150 dossiers environ sont toujours ouverts en Belgique. Soit l'identification est impossible (corps ou partie de corps en état de décomposition), soit — et c'est un cas de figure fréquent — le corps est celui d'une personne qui était en séjour illégal dans notre pays, ce qui implique que l'on ne dispose d'aucun échantillon de référence.
— L'identification de patients amnésiques
Tout comme elle le fait pour les dépouilles mortelles, la Cellule s'emploie aussi à identifier les personnes qui ont perdu la mémoire. Cela concerne quatre ou cinq personnes par an.
La procédure d'identification se déroule comme suit:
— première phase: la collecte de données ante mortem concernant la personne disparue
Les principales données d'identification sont les suivantes:
• données recueillies par la police: données visuelles, vêtements, bijoux, documents, tatouages mais aussi empreintes digitales;
• données médicolégales (recueillies par le pathologiste médicolégal): il s'agit de données intangibles: radiographies, interventions chirurgicales antérieures, fractures, etc.;
• données anthropologiques: données relatives au squelette, à l'ossature, à l'áge, à l'origine. Parmi elles, il y a aussi des données fournies par la reconstruction du visage, etc.;
• données odontologiques (odontologue médico-légal): données liées à la dentition;
• données ADN.
— deuxième phase: la réalisation d'une description post mortem du corps, avec une attention particulière pour ses caractéristiques spécifiques.
— troisième phase: la transmission des données à la « Cellule Personnes disparues », laquelle procède à un contrôle.
On compare les données précitées à celles de la banque de données de la « Cellule Personnes disparues » et l'on procède à d'éventuels recoupements. M. Remue cite plusieurs exemples afin de montrer à quel point l'identification scientifique est nécessaire.
L'intervenant est donc favorable à la création d'une banque de données ADN « Personnes disparues ».
3. Exposé de M. Damien Vandermeersch, avocat général près la Cour de cassation, professeur à l'UCL et aux Facultés universitaires Saint Louis
M. Vandermeersch précise qu'il se focalisera plus particulièrement sur le contenu même de certaines des propositions de loi.
A. Proposition de loi modifiant la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale en vue de créer une banque de données ADN « Personnes disparues », (doc. Sénat, nº 5-1633/1)
Pour M. Vandermeersch, cette proposition de loi est de nature à recueillir un large consensus. En effet, tant pour les proches que dans l'intérêt général, il importe, d'une part, de se donner le maximum de moyens pour retrouver la trace de personnes disparues et, d'autre part, de procéder à l'identification de personnes inhumées sans que leur identité n'ait pu être établie. Il faut donc se réjouir d'une telle proposition.
Toutefois, la lecture du texte en projet soulève pour l'intervenant un double questionnement:
— les prélèvements et l'enregistrement des profils ADN des personnes « inconnues » inhumées ou incinérées sans identification
Les auteurs de la proposition de loi souhaitent pouvoir prélever un échantillon de cellules sur le corps d'une personne décédée non identifiée en vue d'établir son ADN et de permettre ultérieurement de déterminer l'identité de la personne décédée. Or, pour M. Vandermeersch, le texte de la proposition ne rencontre pas explicitement cette question car suivant l'article 8quater, § 1er, de la proposition en projet, la banque des personnes disparues ne contiendra que les profils des personnes disparues et/ou de leurs proches.
Par ailleurs, ne serait-il pas opportun de prévoir explicitement la compétence du procureur du Roi pour ordonner un tel prélèvement avant l'incinération ou l'inhumation et pour faire opérer la comparaison et l'enregistrement du profil obtenu dans la banque de données « Personnes disparues — Personnes décédées inconnues ». Les développements se réfèrent d'ailleurs à l'exemple néerlandais où la banque de données contient non seulement les profils des personnes disparues et de membres de leur famille mais aussi ceux des dépouilles mortelles non identifiées ?
En effet, il est essentiel d'enregistrer et de pouvoir comparer les profils des personnes décédées sans identification avec les profils actuels et futurs des personnes disparues. Il ne peut être exclu que le profil d'une personne décédée sans que son identité ne soit connue, soit établi et enregistré avant celui de la personne disparue « correspondante ».
— la question du consentement des proches
Suivant les développements (p. 2), il revient aux membres de la famille de la personne disparue de décider si du matériel ADN se rapportant à cette personne peut ou non être recueilli ou si eux-mêmes se soumettent au prélèvement d'échantillons de référence.
Si l'intervenant peut concevoir que le consentement du parent concerné doit être obtenu pour un prélèvement sur sa personne (article 8quater, § 5, alinéa 2 proposé — article 8 de la proposition de loi), il ne perçoit pas l'intérêt de solliciter l'accord de celui-ci lorsqu'il s'agit de rechercher ou de prélever d'autres échantillons de référence (article 8, § 5, alinéa 1er). Cela signifierait-il qu'il faut obtenir l'accord d'un parent (ou de tous les parents) pour faire un prélèvement sur la brosse à dent de la personne disparue ou sur la personne d'un autre parent ?
Cela ne paraît pas justifié car la recherche d'une personne disparue ne concerne pas que les intérêts particuliers des proches mais également l'intérêt général (les affaires de disparitions constituent des affaires fort graves). M. Vandermeersch plaide dès lors pour que le procureur du Roi ou le juge d'instruction compétent puissent procéder à tous les prélèvements utiles pour l'enquête sans autorisation préalable si ce n'est le consentement de la personne sur laquelle le prélèvement doit être opéré.
B. Proposition de loi modifiant la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale en vue de créer une banque de données ADN « Intervenants », (doc. Sénat, nº 5-1634/1)
Cette proposition de loi a pour objectif de créer une nouvelle banque de données ADN dans laquelle sera enregistré le profil ADN de tous les intervenants (p. 2 des développements). Il s'agirait notamment des membres des services de secours, de ceux des services de police, des juges d'instruction, des magistrats du parquet et du personnel des laboratoires et de l'INCC.
L'objectif poursuivi est de pouvoir détecter toute contamination éventuelle. En effet, s'il est vrai que l'analyse ADN a une fiabilité particulièrement haute, c'est toutefois à la condition essentielle que toute contamination soit exclue. Idéalement, pour atteindre un tel but, il faudrait que le profil de tous les intervenants soit enregistré. D'un point de vue pratique, cela semble beaucoup moins réalisable vu le nombre de personnes visées.
À cet égard, l'intervenant estime que les développements ne sont pas explicites. Si l'on prévoit que les profils de tous les intervenants sont systématiquement enregistrés, il faudrait prévoir une procédure « systématique » de prélèvement. Mais, comme indiqué ci-dessus, est-ce réellement praticable ?
Pour M. Vandermeersch, la lecture du texte proposé semble plutôt indiquer que seuls les profils des intervenants pour lesquels le magistrat a ordonné un prélèvement dans une affaire déterminée seraient enregistrés dans la banque de données « Intervenants ». Comme, dans la pratique actuelle, c'est plutôt un cas exceptionnel, la portée de la banque de données « Intervenants » risque d'être fort limitée.
Par ailleurs, l'intervenant ne saisit pas bien la portée de l'article 6 de la proposition qui prévoit l'information de l'intéressé si son profil a déjà été établi. En effet, si le profil de l'intéressé se trouve déjà dans la banque de données « intervenants », il a dû en être informé préalablement lors du prélèvement fait en application de l'article 44sexies ou de l'article 90duodecies du Code d'instruction criminelle. Il est inutile de le prévenir une nouvelle fois. En revanche, il importe qu'avant de procéder à un prélèvement sur un intervenant, le procureur du Roi ou le juge d'instruction puisse se renseigner auprès de la cellule nationale ADN sur l'existence d'un profil de cet intervenant dans la banque de données « intervenants » afin d'éviter un nouveau prélèvement et une nouvelle analyse inutiles.
Enfin, il n'est pas exclu que certains intervenants se montrent fort réticents à l'idée de voir leur profils ADN enregistré dans une banque de données. Mais si l'analyse porte réellement sur des segments non codants de l'ADN comme l'impose la loi et que la banque de données est anonymisée (la banque de données ADN ne contient que des numéros de Code ADN et seule la cellule nationale sera en possession des identités correspondantes), ces objections relèveraient principalement de questions de principe ou d'ordre psychologique.
C. Proposition de loi modifiant la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale en vue de créer une banque de données ADN « Inculpés et suspects », (doc. Sénat, nº 5-1576/1)
M. Vandermeersch estime qu'il s'agit de la proposition qui risque de soulever le plus de questions dès lors qu'il s'agit d'enregistrer les profils de personnes qui ne sont pas condamnées (la banque de profils ADN « Condamnés » existe déjà). Il importe qu'un réel débat soit mené sur cette problématique. Cela pose la question du respect de la vie privée et du principe de la présomption d'innocence (puisque les données resteraient enregistrées même après un non-lieu ou un acquittement).
Ceci étant dit, l'intervenant est d'avis que les mêmes questions peuvent être soulevées à propos des personnes disparues et des intervenants qui, également, doivent pouvoir bénéficier du droit au respect de la vie privée et qui sont innocents (et pas seulement présumés innocents). Il y a donc un choix à faire:
— soit l'on considère que les banques de données ADN soulèvent une problématique particulière qui justifie un statut à part eu égard au caractère fort sensible de telles données. Il appartient alors au législateur de vérifier si cette particularité justifie l'exclusion de toute banque de données relative à des suspects et des inculpés;
— soit l'on estime que ces banques de données ne méritent pas de statut particulier dès lors qu'elles ne contiendraient pas d'informations plus sensibles que, par exemple, la banque de données nationale de la police intégrée (art. 44/1 de la loi sur la fonction de police), le Bulletin central des signalements ou le Service d'identification judiciaire. Ces dernières banques de données contiennent des données non seulement concernant des suspects mais également d'autres personnes.
M. Vandermeersch rappelle que l'analyse ADN porte sur des séquences non codantes et que les corrélations et les profils enregistrés sont anonymes (la banque de données ADN ne contient que des numéros de Code ADN et seule la cellule nationale sera en possession des identités correspondantes).
Une comparaison avec le service d'identification judiciaire (les empreintes digitales) paraît pertinente. Pour M. Vandermeersch, on peut se demander si, d'un point de vue de la protection de la vie privée, la différence est si grande entre la banque d'empreintes digitales de suspects nominatifs telle qu'elle existe au sein de nos services judiciaires et une banque de données de profils ADN anonymisée et obtenus à partir des séquences non codantes de l'ADN.
Enfin, le texte à l'examen appelle les remarques suivantes.
La notion « Inculpés et suspects » n'est pas clairement définie et balisée. Si la notion d'inculpé au sens de la personne inculpée formellement par le juge d'instruction (article 4bis, al. 2, 2, proposé de la loi du 22 mars 1999 — article 5 de la proposition de loi) ne pose pas de difficulté, il n'en va pas de même de la notion de suspect. Si l'on considère que le suspect est la personne contre laquelle le procureur du Roi exerce l'action publique (article 4bis, al. 2, 1, proposé), cela signifie que les profils ADN de suspects obtenus dans le cadre de l'information ne pourront être enregistrés qu'après la citation directe de l'intéressé (ou la convocation par procès-verbal) devant le tribunal correctionnel ou qu'après la mise à l'instruction du dossier pour autant qu'ils soient visés nominativement dans le réquisitoire (initial ou subséquent) du ministère public. Est-ce le choix fait par les auteurs de la proposition ? Enfin, qu'en sera-t-il des personnes qui ne seraient mises en cause que par la partie civile dans sa constitution entre les mains de juge d'instruction, sans être inculpées formellement par ce dernier ou mises en cause explicitement par le parquet ?
L'article 8 de la proposition de loi nº 5-1576/1 appelle la même remarque que l'article 6 de la proposition de loi nº 5-1634/1. L'intervenant ne perçoit pas l'intérêt d'informer une nouvelle fois un suspect déjà prévenu lors du prélèvement initial de l'enregistrement de son profil dans la banques de données ADN « Inculpés et suspects » (ce qui importe c'est que le magistrat puisse obtenir l'information de la cellule nationale). En revanche, il convient d'informer le condamné du transfert, après condamnation, des données de la banque « Inculpés et suspects » vers la banque de données « Condamnés ».
4. Échange de vues
Questions des membres
Mme Faes remercie les intervenants pour leurs exposés et leurs commentaires constructifs sur les propositions de loi à l'examen, qui poursuivent différents objectifs.
M. Debeuckelaere a déclaré n'avoir aucune objection à formuler. Le point de départ des propositions de loi est effectivement l'arrêt Marper c. Royaume-Uni. L'option a été prise d'instaurer un solide régime de protection de la vie privée dans les trois propositions de loi à l'examen.
En ce qui concerne la question de savoir si un recours doit ou non être possible, on a fait référence au caractère excessif de la mesure, d'une part, et à la définition plus précise du suspect, d'autre part. L'intervenante souligne que le Code d'instruction criminelle ne contient aucune définition de ce qu'est un suspect. On a ainsi fait le choix explicite de passer par le juge. Dans le cas contraire, on risquerait de réagir de manière trop globale et d'entrer en conflit avec le régime de protection de la vie privée et la jurisprudence européenne. La limitation est donc une option explicite.
L'intervenante conclut qu'il semble n'y avoir aucune objection à l'instauration des trois banques de données, même si l'une ou l'autre précision doit être apportée.
Mme Defraigne s'interroge quant au coût pratiqué en Belgique et dans les pays voisins par les laboratoires pour une recherche « ADN ». D'après ses informations, ce coût serait de l'ordre de 300 euros.
M. Torfs souhaite tout d'abord poser une question de principe, que lui a inspirée l'exposé de MM. Debeuckelaere et Vandermeersch. Qu'en est-il de la protection de la vie privée à une époque où l'on peut repousser les limites toujours plus loin ? On se fait une certaine idée de la vie privée à un moment donné, mais, dans le même temps, les techniques ne cessent d'évoluer. L'objectif est-il d'aller toujours plus loin avec ces techniques, en rendant la vie privée élastique ? Jusqu'où peut-on finalement aller ? Où sont les limites ?
Une autre question concerne les notions utilisées. Qu'entend-on exactement par la notion de « suspect » ? Peut-on qualifier quelqu'un de suspect et, partant, récolter du matériel qui sera conservé pendant de nombreuses années ? Un suspect a-t-il la possibilité de demander des contre-expertises ? Est-ce souhaitable ou non ? La combinaison de notions juridiques vagues, d'une part, et de conséquences profondes, d'autre part, est inquiétante et exige une sorte de « contre-poids » sur un autre terrain.
Un dernier point concerne le fait que l'on vit dans une société de plus en plus répressive. Si nous pouvons résoudre un dossier infractionnel à l'aide des possibilités techniques toujours plus étendues, doit-on toujours y avoir recours pour toutes les infractions ? Ne doit-on pas appliquer une différenciation plus grande ? La proposition à l'examen énumère une liste d'infractions plus longue que ne le fait la loi de 1999. Ne pourrait-on pas également prévoir un équilibre différent, selon l'infraction, entre la protection de la vie privée, d'une part, et les possibilités d'enquête, d'autre part ? Une analyse plus fine est-elle utile ?
M. Delpérée estime qu'outre le coût pour établir le profil ADN d'une personne, il convient également d'évaluer le coût global du système (la mise en place du service, la procédure à suivre et l'organisation desdites banques de données).
M. Laeremans demande s'il est utile et judicieux de maintenir ou de renforcer la distinction entre la banque de données « Condamnés », d'une part, et la banque de données « Suspects », d'autre part. En ce qui concerne les condamnés, l'intervenant demande s'il ne serait pas utile d'instaurer des catégories, par exemple en cas de condamnations à partir d'une peine d'emprisonnement effective de trois ans ou s'il ne serait pas utile d'intégrer tous les condamnés dans la banque de données concernée.
Mme Khattabi s'interroge quant à l'étendue du consentement d'un proche lors du prélèvement ADN. Ne faudrait-il pas prévoir une information supplémentaire relative aux conséquences de ce consentement ?
En matière de banques de données « intervenants », Mme Khattabi se demande si le délai de conservation des données de trente ans n'est pas excessif puisque par hypothèse des intervenants n'ont rien à se reprocher. Elle propose éventuellement un effacement au terme d'une période de dix ans à partir du moment où la personne concernée a quitté les fonctions qu'il l'ont amené à être en contact avec la scène de crime ou des pièces à conviction.
Enfin, ne faudrait-il pas prévoir pour la base de données « personnes disparues » les mêmes réserves en matière d'échange international que celles prévues à l'article 7 de la proposition de loi relative à la banque de données « intervenants » ?
M. Courtois demande des précisions quant à l'informatisation des échanges d'informations entre les magistrats et la « cellule personnes disparues ».
Réponses des orateurs
M. Debeuckelaere confirme que la réponse de Mme Faes relative à la définition du suspect est claire et permet de mieux circonscrire l'objet des propositions de loi à l'examen.
En ce qui concerne le coût d'une analyse ADN, celui-ci est en diminution constante depuis 1985. L'intervenant estime que le coût a déjà été réduit par 1 000. Pour le coût global du système, il faudra se référer aux informations de l'INCC.
Quant à la question de M. Torfs relative aux limites existantes en matière de preuve, l'intervenant rappelle que la manifestation de la vérité continue à être l'objectif primordial mais doit être tempérée par les principes prévus à la convention européenne des droits de l'homme ou énoncés par la Cour de justice. Ainsi, il ne peut être question d'utilisation de force ou de torture. Ce n'est pas le cas pour la prise de sang ou d'un échantillon ADN. Enfin, il est primordial qu'une fois l'identification effectuée, l'échantillon soit détruit.
La CPVP constate aussi une tendance à la répression.
À la question posée par M. Laeremans, l'intervenant confirme que la distinction entre les différentes catégories d'individus est nécessaire. Ceci étant, de nombreuses discussions ont encore lieu. Par exemple, la notion de « criminalité grave » utilisée notamment dans divers traités internationaux fait débat au sein de la CPVP: faut-il se référer à la qualification pénale ou à la peine prononcée, faut-il avoir égard à la peine d'emprisonnement ou également à la sanction pécuniaire ? Il s'agit d'un exercice difficile. L'avantage d'une liste « fermée » d'infractions procure plus de sécurité juridique.
M. Remue se limitera à réagir aux questions relatives à la banque de données « personnes disparues » qui ressort de la compétence de la cellule « personnes disparues ».
Si le coût d'un profil ADN est effectivement de l'ordre de 300 euros, il convient de le mettre en relation avec le coût d'une enquête judiciaire qui peut s'étendre sur plusieurs des mois si cette comparaison ADN n'était pas effectuée. Par ailleurs, cette comparaison ADN ne sera pas toujours nécessaire car dans certains cas des constatations peuvent être établies à partir des restes du corps humain.
Enfin, pour les personnes disparues, l'intervenant rappelle que la démarche est humanitaire dès lors qu'il s'agit d'identifier un corps et qu'il n'y a donc pas de réelle atteinte à la vie privée.
L'informatisation des transferts de profils ADN ressort de la compétence de l'INCC. Dans le cadre de la collaboration entre la police et les magistrats, la cellule intervient à la demande du ministère public ou du juge d'instruction. En pratique, la comparaison ADN nécessite deux réquisitoires: le premier visant à établir et à transmettre l'échantillon ADN et le second visant à le comparer avec la banque de données.
M. Vandermeersch précise à cet égard que la loi de 2011 a prévu cette comparaison de manière automatique.
Par ailleurs, l'intervenant souhaite mettre l'accent sur les garanties à prévoir dans un tel système. À ce jour, ce qui est enregistré est une suite de numéros qui est personnelle à tout individu et qui ne fournit en tant que tel aucune information. D'autre part, la cellule nationale ADN, crée au sein du ministère public, va disposer lorsqu'elle sera opérationnelle, des identités de sorte qu'un lien pourra être établi entre une identité et le code ADN enregistré. Puis reste l'analyse de départ: c'est l'échantillon qui est analysé sur les segments non codants. Il faut s'assurer que cela reste bien les séquences non codantes, c'est là que se situe l'enjeu principal de la question des limites. En effet, même si l'on effectue des progrès sur les non codants, si on détruit l'échantillon cela ne pose pas de problèmes. Mais si tout devient codant, il faudra changer la loi. En d'autres mots, la série de chiffres ne délivre rien en tant que tel. Par contre, le codant direct lui donne un résultat.
La contre-expertise existe déjà à l'heure actuelle et fonctionne correctement. Il y a peu de contestations sur l'expertise ADN elle-même. Les contestations portent plus généralement sur les conséquences que l'on attribue ou non au résultat du profil.
Quant à la question de la liste des infractions et du caractère plus ou moins répressif de celle-ci, M. Vandermeersch rappelle que les propositions de loi reprennent la liste des infractions de la loi de 2011. Il n'y a rien de nouveau.
À la question de M. Laeremans, l'intervenant estime qu'on ne peut fusionner les banques de données « Condamnés » et « Suspects ». Il y a là un aspect psychologique important et ce d'autant plus que le profil d'un suspect reste dans la base de données « suspect » même s'il a été acquitté.
Pour l'aspect plus répressif ou pas, M. Vandermeersch estime que l'on se trompe de question. C'est une question d'efficacité de la justice. La résolution d'une affaire de meurtre est avant tout une question de justice et de manifestation de la vérité et non une question de répression. En revanche, l'établissement de la liste des infractions pour lesquelles l'enregistrement de l'ADN des condamnés ou suspects est obligatoire relève du législateur. Un choix a été opéré en 2011; ce qui n'exclut pas qu'un autre choix puisse être fait en 2013.
En ce qui concerne la question du coût et des moyens, l'intervenant rappelle que cette question fut déjà débattue en 2011. Or, la loi actuelle prévoit un appel d'offres. On constate toutefois que le coût d'un profil ADN est deux à trois fois plus élevé en Belgique que dans les pays limitrophes avec la nuance que la quantité d'analyses demandée à un laboratoire détermine aussi le prix de revient d'une analyse ADN puisque l'infrastructure reste la même.
Pour le coût global, la cellule nationale ADN devra gérer les comparaisons ce qui nécessite des moyens notamment en personnel. L'alimentation des banques de données est également coûteuse. Mais en ce qui concerne l'outil informatique, l'intervenant ne perçoit pas de difficultés puisqu'il ne faut pas une infrastructure poussée pour effectuer une comparaison entre deux séries de chiffres.
La question de la portée du consentement des proches est pertinente. Elle se pose d'ailleurs également pour les intervenants qui, en théorie, peuvent avoir commis à un moment donné des infractions; raison pour laquelle M. Vandermeersch estime que le prélèvement ne devrait jamais être effectué sous la contrainte. En l'espèce, on informe les proches que leurs profils figureront dans la banque données « personnes disparues » et seront comparés à la banque de données « criminalistique ». C'est inévitable puisque l'on essaie de faire un lien avec une personne qui a été sur une scène de crime. Aussi, l'intervenant plaide pour que les profils des personnes décédées non identifiées ne figurent pas dans la base de données « criminalistique » mais dans la banque de données « personnes disparues » car ce sont pas des « suspects ». La difficulté provient du fait que la banque de données « criminalistique » contient bien plus que les profils ADN de personnes disparues ou tuées sans avoir été identifiées. L'obligation de prévoir une information particulière liée au consentement n'élimine toutefois pas le risque pour une victime de se voir confondre comme auteur d'une infraction dans un tout autre dossier; raison pour laquelle le législateur devra être attentif à la liste des infractions. On peut imaginer l'hypothèse d'une personne qui aurait échappé à la justice car son ADN n'a jamais été communiqué et qui serait confrontée à un drame personnel comme la disparition d'un enfant.
Une alternative serait d'obliger de rapatrier de la banque de données « criminalistique » tous les profils des personnes non identifiées (ADN prélevés sur des corps humains) vers la banque de données « personnes disparues », la comparaison se fera entre les profils de personnes disparues et de corps non identifiés, à l'intérieur d'une seule banque de données. Or, à ce jour, la comparaison s'effectue avec la banque de données « criminalistique » qui contient évidemment beaucoup plus que des profils ADN de corps non identifiés. On pourrait éventuellement envisager un double enregistrement et une comparaison avec une seule banque de données.
La définition du « suspect » dépend du législateur et procède d'un difficile équilibre entre la répression et les droits fondamentaux de chaque individu.
Quant au délai, le profil ADN de l'intervenant sera comparé à la banque de données « criminalistique » en temps réel. On pourrait réduire le délai à cinq ans.
Mme Faes renvoie à l'observation de M. Torfs concernant la répression toujours plus forte et l'instauration de limites face à des techniques de plus en plus pointues. L'intervenante fait référence au fait que la criminalité continue elle aussi à progresser, usant toujours de nouvelles techniques. La Justice ne peut se permettre d'être à la traîne. Sur la question de l'ADN aussi, il faut rester au contact de la réalité.
En ce qui concerne la définition du suspect, l'intervenante confirme que c'est le moment de l'introduction de l'action pénale qui a été choisi, afin d'offrir ainsi la garantie nécessaire. La liste des infractions a par ailleurs été reprise de la loi de 2011.
Une dernière observation concerne les coûts. Il faut aussi se dire qu'en créant des banques de données, on économisera des coûts de recherche; par ailleurs, il ne faudra pas à chaque fois soumettre une même personne à un prélèvement d'ADN, pour ensuite détruire à nouveau l'échantillon. Le fait que l'on puisse retrouver plus rapidement les auteurs d'infractions gráce à la banque de données « Suspects » peut contribuer à réduire le nombre de victimes et à économiser des coûts pour la collectivité.
M. Vandermeersch estime que si le « suspect » vise la personne à l'encontre de qui l'action pénale est dirigée, son profil ADN devra être effacé de la banque de données dès qu'elle aura été acquittée.
Mme Faes souhaite apporter une nuance. Si l'appréciation de faits suffisamment graves par le parquet est une chose, le fait qu'un autre juge conclue à un acquittement en est une autre.
B. Auditions du 5 décembre 2012
1. Exposé des représentants de l'Institut national de criminalistique et de criminologie (INCC)
M. De Kinder remercie la commission de la Justice de l'avoir invité et de lui donner ainsi l'occasion de fournir un certain nombre d'éléments utiles à la discussion des propositions de loi à l'ordre du jour.
La situation actuelle
Mme Vanvooren, gestionnaire des banques de données ADN à l'INCC, rappelle tout d'abord le cadre juridique actuel. En Belgique, la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale prévoit la création de deux banques de données à l'INCC:
— une banque de données « criminalistique » qui contient les profils génétiques des traces relevées sur les scènes de crimes;
— une banque de données « condamnés » qui contient les profils génétiques de référence de personnes condamnées pour un certain type d'infractions liées aux personnes (meurtres, viols, ...).
Ces deux banques de données sont anonymes de sorte que l'INCC ne dispose pas de l'identité des personnes enregistrées chez elle. Elle ne dispose que d'un code ADN qui est relié au profil génétique d'une personne. Seul le magistrat dispose du lien entre ce code ADN et le nom de la personne.
À ce jour, 55 000 profils génétiques sont enregistrés dans ces deux banques de données contre 200 000 aux Pays-Bas. En termes de résultats, 10 à 15 % des profils enregistrés donnent lieu à un résultat positif; soit près d'un dossier sur six.
Il n'existe à ce jour pas d'autres banques de données.
Au niveau des suspects, le procureur du Roi a le droit s'il y a une correspondance dans le dossier en question (entre le suspect et la trace) de demander la comparaison unique (une seule fois) vers les banques de données. Une fois la comparaison effectuée, le profil est effacé.
La banque de données « criminalistique » est en augmentation constante depuis 2002 et enregistre aujourd'hui près de 4 000 profils par an. Les quatre catégories principales de délits pour lesquels l'INCC reçoit des profils génétiques concernent: les vols avec effraction, les vols à mains armée, les affaires de mœurs et les meurtres.
La banque de donnes « condamnés » a commencé à être alimentée en 2004 et enregistre près de 3 000 profils par an. Les profils des condamnés relatifs à des vols à mains armée et vols avec effraction représentent respectivement 36 % et 5,3 % des cas. Mais dans 21 % des cas, l'INCC ignore la catégorie de délits pour laquelle le condamné est enregistré dans la banque de données.
La loi du 22 mars 1999 prévoit une procédure administrative très lourde car l'enregistrement d'un profil nécessite l'envoi d'un réquisitoire au laboratoire pour effectuer l'analyse ADN mais aussi pour le transfert des données vers l'INCC. Ce transfert n'est pas automatique. En outre, le magistrat doit adresser à l'INCC un réquisitoire pour la comparaison et l'enregistrement des données. Cela implique que si, à un moment ou à un autre, un réquisitoire n'a pas été adressé, un élément manquera dans la banque de données.
Mme Vanvooren signale qu'il existe actuellement au sein de l'INCC un projet de recherche sur les réseaux criminels. En effet, à l'heure actuelle, lorsque plusieurs individus participent ensemble à un délit (vol d'ordinateurs dans une entreprise par exemple) le magistrat n'aura d'informations que sur le seul individu dont il aura demandé l'analyse ADN. Le magistrat n'a pas de vue d'ensemble sur l'existence d'un éventuel réseau. Le projet en cours vise à développer un programme permettant de produire des schémas afin de visualiser l'ensemble des protagonistes d'un seul dossier reliés par leurs profils ADN.
La nouvelle loi du 7 novembre 2011 (non entrée en vigueur)
Cette loi prévoit un élargissement de la liste des infractions permettant un enregistrement dans la banque de données « condamnés ». Ceci engendrera une augmentation annuelle de l'ordre de 5 000 profils; soit un total de 8 000 profils par an. Par ailleurs, la loi du 7 novembre 2011 permet l'enregistrement des profils de suspects sous certaines conditions. Ainsi, si une correspondance est obtenue entre le profil d'un suspect et le profil de la trace relevée sur la scène de crime, le profil de ce suspect pourra être enregistrée dans la banque de données.
S'il n'existe pas de correspondance dans le dossier en question, le profil pourra tout de même être envoyé à l'INCC pour une comparaison unique. S'il existe une correspondance avec la banque de données, le suspect pourra aussi être enregistré dans la banque de données. Si un suspect ne « matche » pas dans un dossier ni dans la banque de données, il ne sera pas enregistré.
La nouvelle loi permet également une coordination des codes ADN puisqu'une cellule nationale sera chargée de coordonner ces codes ADN; l'INCC n'ayant pas l'identité des personnes. La loi prévoit également la suppression du réquisitoire et le transfert automatique des profils du laboratoire vers les banques de données de l'INCC.
En ce qui concerne les garanties et contrôles, les données restent anonymes et sont effacées automatiquement trente ans après l'enregistrement des profils génétiques de traces et de condamnés.
Mme Vanvooren souligne que l' entrée en vigueur de cette loi engendrera une surcharge de travail pour l'INCC qui se verra probablement contrainte d'accroitre le cadre de son personnel. Il y aura en effet:
— une augmentation du nombre de profils de condamnés (8 000 au lieu de 3 000);
— une augmentation du nombre de profils de traces;
— une augmentation du nombre de profils de suspects comparés et/ou enregistrés;
— un délai strict de réponse de quinze jours.
Échange international de données ADN
Actuellement, si un pays souhaite faire une comparaison avec une banque de données de l'INCC, elle commandite une commission rogatoire qui est adressée à l'INCC soit par le parquet fédéral, soit par un des arrondissements judiciaires.
La nouvelle loi du 7 novembre 2011 prévoit dorénavant un échange automatique de données ADN. L'INCC sera le point de contact pour ces échanges qui s'effectueront en deux étapes:
— une étape automatique sans aucun échange d'informations personnelles; seul le profil génétique étant transféré à l'étranger avec en retour une réponse limitée à l'information « hit/no hit »;
— ensuite, la cellule nationale prendra le relais pour l'échange d'informations personnelles.
Mme Vanvooren signale également l'existence d'un projet européen dénommé « PIES » (the Prüm Implementation, Evaluation and Strenghtening of Forensic DNA Data exchange). Ce projet européen doté d'un million d'euros est coordonné par l'INCC et est soutenu par la France, les Pays-Bas, l'Angleterre et Europol. Il permettra de recruter trois personnes pendant une période de deux ans afin de gérer le lancement de tous ces échanges internationaux (plus ou moins 6 millions de profils génétiques). Ce projet a aussi pour objectif de faire une cartographie des correspondances obtenues entre la Belgique, la France et les Pays-Bas.
Proposition de loi 5-1633/1 relative à une banque de données « personnes disparues »
Actuellement, il n'existe pas de banque de données « personnes disparues ». Si un corps non identifié est retrouvé, des traces peuvent être collectées et enregistrées dans la banque de données « criminalistique » moyennant un réquisitoire du ministère public.
M. Renard, chercheur à l'INCC, estime que cette proposition de loi créé une nouvelle manière de travailler dans la mesure où elle demanderait de pratiquer « des rapprochements parentaux ». À l'heure actuelle, les recherches ADN sont menées afin de retrouver des profils génétiques identiques. Si des personnes apparentées (parents, frères et sœurs) à la personne disparue sont également enregistrées dans une banque de données, l'INCC sera contrainte de pratiquer des rapprochements familiaux. Il s'agit d'un changement de philosophie puisque l'on ne recherchera plus un profil génétique identique.
L'intervenant se réjouit du fait que la finalité d'utiliser les banques de données ADN pour la recherche d'une personne disparue soit énoncée explicitement dans la proposition de loi, ce qui n'est pas le cas ni dans la loi de 1999 ni dans la loi de 2011. C'est un élément positif.
Par contre, l'enregistrement d'un profil de « victime » dans une banque de données crée un risque de voir ledit profil de « victime » comparé avec un profil « trace » figurant dans la banque de données « criminalistique ». Or, le résultat de cette comparaison pourrait ne rien avoir avec le profil de la personne disparue; la victime pouvant elle-même être auteur d'un autre fait. Or, ce n'est pas la finalité qui est énoncée dans la proposition.
L'intervenant souligne que la proposition prévoit que le prélèvement est effectué, sur une base volontaire, sur des personnes apparentées. Ceci garantit que la personne soit informée des conséquences de son enregistrement dans une banque de données ADN. Toutefois, il faudrait préciser que l'information donnée à la personne sera plus large que la simple information relative à l'identification de la personne disparue apparentée. Elle doit être informée du risque de se voir identifiée dans un dossier tout autre que celui qui concerne une personne de sa famille. Enfin, il faudra prévoir une procédure de contre-expertise.
En termes d'échanges internationaux, la loi du 7 novembre 2011 prévoit que ces échanges peuvent s'opérer avec toutes les banques nationales de données ADN. Or, la proposition nº 5-1633/1 ne prévoit aucune disposition particulière à ce sujet. Par conséquent, la future banque de données « personnes disparues » fera également partie des banques de données soumises à comparaison internationale. L'intervenant suggère dès lors de préciser à l'article 8 de la loi ADN que seules les banques de données « criminalistique » et « condamnés » pourront faire l'objet d'un échange international.
L'intervenant estime qu'un délai de deux ans pour la mise en œuvre de cette banque de données « personnes disparues » est long dès lors que les logiciels ad hoc existent déjà.
Enfin, le législateur devra veiller à ce que des moyens financiers soient accordés pour la mise en place de cette banque de données. L'établissement d'un profil génétique coûte approximativement 300 euros. Or, si on tient compte de toutes les personnes concernées, il y aurait donc des profils supplémentaires à enregistrer, ce qui augmentera à due concurrence les frais de justice. À cet égard, M. Renard précise que les prix pratiqués en Belgique pour les profils de référence sont excessifs dès lors que le prix de revient d'une analyse ADN est de l'ordre de 60 euros. Un prix de revient réduit pourrait être obtenu si un seul laboratoire était chargé de l'analyse de ces profils ADN car ce laboratoire pourrait investir massivement dans un processus automatique. À l'heure actuelle, ce n'est pas le cas puisque neuf laboratoires différents sont actifs dans ce domaine.
La proposition 5-1634/1 relative à une banque de données « intervenants »
Mme Vanvooren estime que la création de cette banque de données est cruciale car les techniques d'analyse ADN sont devenues extrêmement sensibles. La contamination devient presque inévitable car l' ADN est omniprésent. Toucher un objet peut donc le contaminer. Des contaminations peuvent être observées à différents stades et/ou lieux:
— l'usine où le matériel destiné aux prélèvements ADN est fabriqué;
— la scène de crime où différents intervenants (ambulanciers, policiers, pompiers, experts) sont présents;
— le laboratoire.
Ces contaminations ne sont pas théoriques mais bien réelles. La création d'une telle banque de données permettra d'éviter de chercher pendant des années un lien entre deux dossiers alors qu'il s'agit en l'espèce d'une trace d'un intervenant.
M. De Kinder ajoute que la banque de données « Intervenants » est particulièrement souhaitée et que ce souhait se justifie aussi par une nécessité juridique. Les personnes qui travaillent sur le lieu du délit et manipulent des pièces à conviction courent le risque de voir leur profil ADN se retrouver dans les banques de données ADN sous forme de trace. Il y a lieu de remédier le plus rapidement possible à l'insécurité juridique qui règne sur ce point.
Sur le texte même de la proposition, M. Renard formule les remarques suivantes:
— la définition des « intervenants » devrait être complétée. Il faut que la personne soit en contact direct ou indirect avec le lieu de l'infraction et/ou les pièces à conviction, mais aussi que ce contact ait eu lieu dans le cadre de ses fonctions;
— la définition de la « contamination » pourrait être améliorée dans le sens suivant: « tout intervenant qui a laissé son ADN sur une pièce à conviction ou sur la scène de crime »;
— l'effacement des profils ADN dix ans après le décès de la personne à laquelle ils se rapportent est difficile à mettre en œuvre car l'INCC n'est pas forcément informée du décès de la personne. Il serait plus opportun de prévoir un effacement automatique trente ans après la date d'enregistrement du profil;
— l'information donnée aux intervenants pourrait également être améliorée dans la mesure où seule une hypothèse sur deux est prévue. Si l'article 6 de la proposition prévoit effectivement l'information de l'intervenant en cas de prélèvement de son profil, rien n'est prévu dans le cas où le profil n'est pas encore disponible et qu'il faut demander aux intervenants de faire leur prélèvement;
— la finalité énoncée à l'article 6 de la proposition devrait être revue car il est, en pratique, impossible d'effectuer une comparaison systématique du profil ADN d'un intervenant avec les profils ADN des traces découvertes dans chaque affaire dans laquelle il est intervenu. En d'autres termes, il n'est pas possible d'effectuer une comparaison avec une partie de la banque de données. Chaque comparaison s'effectue avec l'intégralité de la banque de données;
— cette comparaison serait en outre effectuée aux seules fins « d'identification d'une contamination directe ou indirecte des traces biologiques découvertes ». Or, une correspondance pourrait exister dans un cas où la personne n'est pas intervenue dans le dossier. Il faut prévoir ce cas de figure car il ne revient pas à l'INCC de faire le tri entre ce qui pourrait être une contamination ou non. Il reviendra à un magistrat de confirmer qu'il s'agit d'une contamination ou d'un cas où un intervenant habituel est, par ailleurs, auteur d'un acte déjà enregistré en ADN. Il faut donc affiner la finalité car il ne s'agit pas seulement d'écarter les intervenants en cas de contamination mais aussi de les identifier dans des faits qu'ils auraient commis;
— le texte proposé devrait être retravaillé sur différents points. M. Renard énonce notamment l'article 2 qui prévoit de faire subir à l'intervenant la même procédure que celle appliquée au suspect alors qu'il s'agit objectivement de deux catégories distinctes. L'article 5 de la proposition prévoit le prélèvement et l'effacement mais omet l'étape de la comparaison et des conditions y associées;
— dans cette proposition, il est expressément prévu que la banque de données « intervenants » n'est pas soumise à l'échange international, ce qui est positif;
— enfin, il faut être attentif aux moyens financiers à mettre en œuvre. Les intervenants potentiels à enregistrer sont nombreux (40 000 policiers, plusieurs centaines de magistrats instructeurs, centaines d'ambulanciers, ...), ce qui engendrera un coût de plusieurs millions d'euros.
La proposition 5-1576/1 relative à une banque de données « inculpés et suspects »
Cette banque de données n'existe pas actuellement. La loi du 7 novembre 2011 prévoit toutefois l'enregistrement des suspects dans certaines conditions.
Sur le texte même de la proposition, M. Renard formule les remarques suivantes:
— le critère légal justifiant l'enregistrement du profil dans la base de données doit être mieux défini. Si une première catégorie comprend les personnes inculpées d'infractions prévues par la loi, la seconde catégorie relative à des personnes contre lesquelles il existe des « d'indices de culpabilité » n'est pas claire;
— le délai de conservation est identique à celui prévu pour la banque de données « condamnées ». Or, ici on fait référence à l'arrêt Marper tout en prévoyant dans le texte un délai identique;
— il convient d'être attentif au fait que la loi du 7 novembre 2011 prévoit déjà l'enregistrement, sous certaines conditions, de suspects. Le gestionnaire des banques de données devra être informé du cadre dans lequel la demande d'enregistrement est effectuée: soit dans le cas de la loi de 2011, soit dans le cadre de la présente proposition si celle-ci devait être adoptée;
— ici encore, il conviendra de prévoir des moyens financiers;
— à défaut de disposition spécifique, cette banque de données fera l'objet d'un échange international en vertu de la loi du 7 novembre 2011. Est-ce bien là la volonté de l'auteur de la proposition ?
La proposition 5-844/1 relative à une extension de la banque de données « condamnés »
L'objectif de cette proposition vise à rajouter dans la loi une catégorie générale dont le critère serait la durée (trois ans) de la condamnation définitive sans aucun renvoi à un nombre limitatif d'infractions bien définies.
M. Renard souhaite réagir quant à la motivation de ladite proposition. En effet, l'intervenant conteste que la liste actuelle des infractions puisse être considérée comme arbitraire. La liste a d'abord été conçue en 1999 en vue de cibler les personnes ayant commis des infractions contre d'autres personnes. En 2011, de nouvelles infractions ont été ajoutées à la liste pour tenir compte des lois pénales promulguées depuis 1999 soit pour tenir compte des profils de trace les plus fréquemment enregistrés à la demande des magistrats. Il s'agissait de tenir compte de la pratique existante. La liste n'est donc nullement arbitraire.
D'autre part, les auteurs de cette proposition font erreur lorsqu'ils énoncent que « la loi du 19 décembre 2003 relative aux infractions terroristes ne contient aucun renvoi à la loi relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale ». C'est justement le contraire puisque c'est la loi ADN qui renvoie à des dispositions pénales.
Par ailleurs, certaines critiques reprises dans les développements ne sont plus d'actualité dans la mesure où la loi de 2011 y a répondu.
Enfin, s'il est vrai que la liste des infractions justifiant un enregistrement automatique est un critère strict et limité, il permet de cibler de manière précise les personnes dont les profils ADN doivent être enregistrés. Prévoir une second critère lié uniquement au seuil de la condamnation est un critère beaucoup plus large et difficile à évaluer en termes de proportionnalité. En effet, le Code pénal belge a été modifié et complété à de nombreuses reprises ce qui implique que la hiérarchie des peines n'est plus toujours respectée.
Mme Vanvooren souligne que la création de ces différentes banques de données peut se faire rapidement dès lors que tant le logiciel de l'INCC que celui mis à disposition par le FBI américain permet de créer de telles banques de données. Seule la gestion de toutes les correspondances pourra poser des difficultés si aucun renfort en personnel n'est prévu.
La proposition 5-1831/1 en vue de faciliter l'échange international de données ADN
Cette proposition vise à mettre la Belgique sur un pied d'égalité avec d'autres pays européens. En effet, l'article 8, § 2, alinéa 2, de la loi du 22 mars 1999 tel que modifié par la loi du 7 novembre 2011 ne prévoit que la transmission de profils ADN non-identifiés aux fins de comparaison avec les données indexées ADN enregistrées dans les banques étrangères de données ADN. La proposition vise à supprimer les termes « non-identifiés » afin d'étendre le champ d'application de la loi à tous les profils ADN.
L'INCC est favorable à cette proposition qui est, par ailleurs, conforme aux recommandations d'un groupe de travail du Conseil de l'Europe concerné par les échanges Prüm.
2. Exposé de Mme Isabelle Andoulsi, avocate au barreau de Bruxelles, spécialisée en droit européen et en protection des données personnelles et de la vie privée, représentante de l'Ordre des barreaux francophones et germanophone
Mme Andoulsi souligne qu'elle a examiné essentiellement l'opportunité de l'adoption des propositions en discussion, au regard de la réforme du cadre européen de la protection des données personnelles et la conformité de ces propositions à ce qui sera le nouveau cadre européen de protection des données.
A. Considérations générales
Dans les États membres de l'Union européenne, la collecte, le traitement et le stockage des données personnelles sont régis par la directive 95/46 du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, dite directive protection des données.
En Belgique, cette directive a été transposée dans la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données personnelles (préexistante à l'adoption de la directive européenne), telle que modifiée par la loi du 11 décembre 1998.
Cependant, la directive protection des données ne s'applique pas aux traitements de données personnelles mis en place en matière pénale (article 3, point 2, premier tiret, de la directive). Dans ce domaine, les États membres de l'Union européenne ont adopté la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil du 27 novembre 2008 relative à la protection des données à caractère personnel traitées dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.
La décision-cadre, mise en œuvre dans la législation belge, s'applique au seul traitement des données à caractère personnel transmises ou mises à disposition entre les États membres (article 1er, paragraphe 2). Le traitement des données à caractère personnel par la police et la justice dans le cadre d'affaires pénales au niveau national ne relève pas de cette décision-cadre.
En 2012, la Commission européenne a lancé un vaste projet de réforme du cadre juridique général de l'Union européenne sur la protection des données personnelles, avec notamment pour objectif de « (...) durcir la position de l'Union européenne en matière de protection des données à caractère personnel dans le cadre de toutes les politiques européennes, y compris dans les domaines répressif et de la prévention de la criminalité (...) ».
Elle a ainsi adopté, le 25 janvier 2012, une proposition de règlement relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données visant à remplacer la directive protection des données. Elle a adopté, le même jour, une proposition de directive relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d'enquêtes et de poursuites en la matière ou d'exécution de sanctions pénales et à la libre circulation de ces données.
Ces projets sont entrés, en février 2012, dans le processus d'adoption par le Parlement européen et par le Conseil. Il y à ce stade un consensus afin d'adopter le plus rapidement un nouveau cadre juridique européen en matière de protection de donnée personnelles.
La mise en œuvre de ces projets, étant une priorité pour les institutions européennes, Mme Andoulsi estime que la Belgique pourrait se retrouver, dans le courant/la fin de l'année 2013, avec deux nouveaux textes européens applicables à la protection des données personnelles (l'un en matière civile et commerciale qui sera immédiatement applicable dans les États membres de l'Union et donc en Belgique et l'autre, en matière pénale, qu'il conviendra de transposer dans la législation nationale belge).
L'intervenante s'interroge donc sur l'opportunité d'adopter les propositions à l'examen. Les modifications législatives apportées sur base de ces propositions risquent, en effet, fort de devoir être amendées, voire même abandonnées, une fois les textes européens co-décidés par le Parlement et le Conseil. Ce constat est d'autant plus vrai que certains éléments desdites propositions entrent en contradiction avec les textes européens en devenir.
B. Proposition de loi modifiant la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale en vue de créer une banque de données ADN « Inculpés et suspects » (doc. Sénat, nº 5-1576/1)
Ainsi que l'a soulevé M. Damien Vandermeersch, Mme Andoulsi estime que cette proposition risque de soulever le plus de questions dès lors qu'il s'agit d'enregistrer les profils de personnes qui ne sont pas condamnées.
Un réel débat doit être mené sur la proposition, et ce d'autant plus qu'il est prévu, dans le premier paragraphe de l'article 8 de la proposition de directive européenne, que les États membres interdisent, entre autres, le traitement des données génétiques, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Cette interdiction de traitement des données génétiques ne fait l'objet que de trois exceptions. Le traitement de données génétiques est notamment permis lorsqu'il est autorisé par une législation prévoyant des garanties appropriées — l'exception apparaissant comme la plus appropriée pour le traitement de données proposé.
Or, la proposition de loi ne mentionne pas des garanties appropriées, mais uniquement des garanties suffisantes, afin de protéger la vie des suspects et des inculpés.
Les auteurs de la proposition de loi s'en réfèrent, par ailleurs, à un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme en 2008, dans une affaire « S. et Marper c. Royaume-Uni », pour justifier que les garanties proposées pour la constitution d'une banque de données « Inculpés et suspects » sont suffisantes et répondent bien au prescrit de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Dans l'arrêt en question, la Cour fait observer « que la protection offerte par l'article 8 de la Convention serait affaiblie de manière inacceptable si l'usage des techniques scientifiques modernes dans le système de la justice pénale était autorisé à n'importe quel prix et sans une mise en balance attentive des avantages pouvant résulter d'un large recours à ces techniques, d'une part, et des intérêts essentiels s'attachant à la protection de la vie privée, d'autre part ».
Mme Andoulsi estime que les éléments de la proposition de loi doivent faire l'objet d'une mise en balance, afin de déterminer s'ils sont proportionnés au but poursuivi par ladite proposition et s'ils reflètent un juste équilibre entre les intérêts publics et privés en jeu.
Or, cette mise en balance nous semble difficile à mettre en place, car le but poursuivi par la création d'une banque de données « Inculpés et suspects », ne nous apparaît pas comme suffisamment défini, à la lecture de l'exposé des motifs. En d'autres mots, calquer les garanties pour la banque de données ADN « inculpés et suspects » sur celle de la banque de données ADN « condamnés » ne satisferait pas à l'équilibre exigé entre intérêts privés et intérêt public car il s'agit en l'espèce que de personnes inculpées ou suspectes mais non condamnées.
C. Proposition de loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale, en vue de créer une banque de données ADN « Intervenants » en matière pénale (doc. Sénat, nº 5-1634/1)
Mme Andoulsi relève qu'à la lecture de l'exposé des motifs, la proposition de loi a pour but de créer une banque de données ADN « Intervenants », afin de déterminer si des preuves collectées dans le cadre d'une information judiciaire, n'ont pas éventuellement été contaminées par l'un ou l'autre des intervenants de l'enquête (secouriste, policier, juge d'instruction, magistrat du parquet, collaborateur d'un institut médico-légal, etc.).
Or, la réflexion émise par l'intervenante pour la proposition de loi nº 5-1576/1 concernant l'article 8 de la proposition de directive européenne, est également valable pour cette proposition de loi. Le traitement de données proposé étant un traitement de données génétiques, il sera vraisemblablement interdit en application de l'article 8, premier paragraphe, de la proposition de directive, à moins de correspondre à l'une des trois exceptions reprises au deuxième paragraphe dudit article.
Pour le surplus, l'OBFG se rallie à la position émise par M. Damien Vandermeersch concernant la proposition de loi, et notamment concernant le fait qu'en vue d'atteindre l'objectif annoncé dans l'exposé des motifs, le profil de tous les intervenants à une information judiciaire doit être enregistré.
D. Proposition de loi modifiant la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale, en vue de créer une banque de données ADN « Personnes disparues » (doc. Sénat, nº 5-1633/1)
Cette proposition devrait susciter un vaste assentiment, car comme l'explique l'exposé des motifs, une disparition étant plus grave qu'un décès, tous les moyens doivent être mis en œuvre afin de retrouver les personnes portées disparues, même si elles sont décédées, et afin d'éviter que des personnes ne soient inhumées ou incinérées sans que leur identité n'aient été établie, et ce notamment pour permettre aux familles de faire leur deuil (développements, p. 1).
On relève encore dans l'exposé des motifs, que la constitution d'une banque de données ADN « Personnes disparues » devrait être utile en matière pénale, car lors de la découverte d'un corps non identifié, il y a souvent présomption que la mort est consécutive à une infraction (développements, p. 2).
À la lecture des développements, il semble donc que le but poursuivi par la création d'une base de données ADN « Personnes disparues », soit double:
— un motif d'intérêt privé, soit permettre aux familles de savoir ce qu'est devenu leur proche disparu et
— un motif d'intérêt public, soit de déterminer si une personne décédée est une victime potentielle.
Pour l'intervenante, il n'est donc pas évident que la mise en place de la banque de données proposée passe par une modification de la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale.
Par ailleurs, sur base de ce constat, il semble impossible de déterminer le cadre européen de protection des données personnelles de référence, et même le cadre national de transposition, auquel la création de la base de données en question devrait répondre.
3. Exposé de M. Dominique Matthijs, avocat, représentant de l'Ordre des barreaux flamands
M. Matthijs se rallie au point de vue de l'OBFG. Il ajoute cependant que la méthodologie employée par le service d'étude de l'OVB est plus pragmatique. L'intervenant souhaite qu'une plus grande attention soit accordée aux problématiques suivantes: le respect de la vie privée, le respect scrupuleux du principe d'égalité et de non-discrimination, le principe intangible de la présomption d'innocence, les droits de la défense et le droit à un procès équitable.
État des lieux — Contexte de la problématique
En Belgique, l'enregistrement de l'ADN de suspects et de condamnés est possible depuis la loi du 22 mars 1999. L'ADN d'une catégorie limitée de condamnés peut ainsi être conservé dans une banque de données.
La presse néerlandaise a fait état, en 2003, des excellents résultats de l'utilisation de la banque de données ADN en ce qui concerne les suspects et les condamnés. Le recours à cette banque de données améliore très nettement le taux d'élucidation. La justice néerlandaise enregistre non seulement les profils ADN des suspects, mais aussi ceux de certaines catégories de condamnés dans la banque de données. Il s'agit, dans ce dernier cas, d'auteurs de délits graves tels que des délits de mœurs et des infractions violentes graves. Depuis 2008, tous les condamnés doivent faire l'objet d'un prélèvement d'ADN.
Les auteurs de la proposition de loi nº 5-844/1 considèrent que la liste exhaustive d'infractions pour lesquelles il est obligatoire d'enregistrer l'ADN des condamnés dans une banque de donnée est trop limitée et arbitraire. Il avait été choisi d'imposer systématiquement le prélèvement d'ADN dans le cas de personnes ayant été condamnées à une peine privative de liberté d'au moins trois ans.
Il existe déjà deux banques de données ADN dans notre pays, à savoir les banques de données ADN « Condamnés » et « Criminalistique », qui ont toutes les deux été mises en place au sein de l'Institut national de Criminalistique et de Criminologie (INCC) par la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale. Cette loi (qui n'est toutefois pas encore entrée en vigueur) a été modifiée en profondeur par la loi du 7 novembre 2011 modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale. Elle prévoit la modernisation du recours à l'analyse ADN en matière pénale et a pour principal objectif d'améliorer et de simplifier la procédure, sans toutefois toucher à la philosophie de la loi de 1999, ni à l'équilibre entre les libertés individuelles et le respect de la vie privée des citoyens, d'une part, et la protection de la société, d'autre part. Les mesures que prévoit la loi du 7 novembre 2011 peuvent être résumées comme suit (doc. Chambre, nº 53-1504/001):
— une adaptation des conditions d'ouverture d'une expertise concernant une personne;
— une circulation maximale des profils ADN vers les banques de données ADN par le biais d'une transmission d'office;
— la possibilité pour l'INCC de comparer de façon systématique les profils enregistrés;
— une actualisation de la liste des infractions donnant lieu à un enregistrement dans la banque de données ADN « Condamnés », avec entre autres l'intégration, dans cette liste, des infractions commises par des organisations criminelles et des infractions perpétrées en association;
— la mise en conformité de la loi belge avec le Traité du 27 mai 2005 relatif à l'approfondissement de la coopération transfrontalière, notamment en vue de lutter contre le terrorisme, la criminalité transfrontalière et la migration illégale.
La banque de données ADN « Condamnés » contient le profil ADN de chaque personne qui a été condamnée définitivement à une peine d'emprisonnement pour une liste restreinte d'infractions, ou à l'égard de laquelle une mesure d'internement a été ordonnée de manière définitive. Le ministère public ordonne l'enregistrement d'un profil ADN de l'intéressé et sa destruction, dix ans après le décès de l'intéressé. Il n'y a pas d'établissement ni d'enregistrement du profil ADN pour toutes les personnes condamnées ou internées. L'enregistrement dans la banque de données n'est ordonné que pour une liste restreinte d'infractions graves, comme les violations graves du droit international humanitaire, les infractions terroristes, les organisations et associations criminelles, la prise d'otage, certaines infractions sexuelles, en particulier celles commises envers des mineurs, le meurtre et certains cas de traite des êtres humains.
En vue de garantir la protection de la vie privée, la loi du 7 novembre 2011 a créé une « cellule nationale » au sein du ministère public. Cette cellule nationale sera le centre névralgique pour l'attribution du numéro de code ADN unique qui garantit l'identité des personnes dont le profil ADN est établi. Cette cellule se voit dès lors accorder un rôle central dans la bonne gestion de la transmission de données depuis et vers le gestionnaire des banques nationales de données, les magistrats et les experts. La composition et le fonctionnement de la cellule garantissent la protection de la vie privée. La cellule sera également la seule instance à connaître l'identité de la personne qui présente un lien positif avec les traces ADN découvertes sur le lieu de l'infraction.
La banque de données ADN « Criminalistique » contient les profils ADN de traces de cellules humaines découvertes sur le lieu de l'infraction. La banque de données permet d'établir une corrélation entre différents dossiers en faisant le lien entre différentes traces découvertes ou entre des traces découvertes et les profils prélevés sur des personnes suspectées. Une fois établi, le lien renvoie donc à certains faits et non à une personne. Si des échantillons de référence sont prélevés sur un suspect, seule une comparaison unique avec les banques de données ADN « Criminalistique » et « Condamnés » est possible. Ensuite, le profil ADN est effacé, sauf si un lien positif est établi avec les traces découvertes sur le lieu de l'infraction. Dans ce cas, ce lien est enregistré dans la banque de données ADN « Criminalistique ». Ne sont donc enregistrés que les liens qui se rapportent à certains faits et non les liens qui concernent certaines personnes. En l'absence de lien, ce qui est généralement le cas, il faut recommencer toute la procédure lorsque la même personne est suspectée d'avoir commis d'autres faits ou lorsque de nouveaux éléments sont versés au dossier. Il se peut alors que le suspect soit introuvable et que l'on ne puisse pas prélever un nouvel échantillon d'ADN. Sans compter que tout cela a un coût non négligeable. Si l'on veut pouvoir obtenir une référence à une personne, il faut créer une banque de données ADN « Inculpés et suspects ».
La proposition de loi nº 5-1576/1 vise à créer une banque de données ADN supplémentaire. Elle tend à créer, au sein de l'INCC, une nouvelle banque de données ADN dans laquelle sont conservés les profils ADN de certaines personnes inculpées et de certains suspects. Les infractions qui donnent lieu à un enregistrement dans cette banque de données sont les mêmes que dans le cas de la banque de données ADN « Condamnés ». Contrairement à ce qui se passe aujourd'hui, le profil ADN de suspects ou d'inculpés sera conservé dans la banque de données ADN « Inculpés et suspects » en cas de non-lieu ou d'acquittement. Par analogie avec la procédure prévue pour la banque de données « Condamnés », les données seront effacées dix ans après le décès de l'intéressé sur ordre du ministère public et seront de toute façon effacées automatiquement trente ans après leur enregistrement. L'on ne peut que souscrire à cette proposition, étant donné qu'elle augmente considérablement les chances d'élucider les délits.
La proposition de loi nº 5-1576/1 prévoit des règles strictes pour le traitement et l'utilisation des profils ADN. Seule une catégorie restreinte de personnes inculpées et de suspects peut faire l'objet d'un enregistrement dans la banque de données. Les mineurs en sont exclus, sauf dans le cas exceptionnel où un mineur de plus de seize ans est dessaisi et jugé comme une personne majeure.
La question se pose toutefois de savoir si des mineurs ne peuvent pas aussi se rendre coupables de crimes odieux. On peut penser à l'affaire James Bulger, qui a marqué le Royaume-Uni. Rien n'exclut qu'un cas similaire puisse se produire dans notre pays. Il est évidemment compréhensible que l'on veille à l'intérêt des mineurs, mais il est indéniable que la sécurité publique prime l'intérêt des mineurs criminels dans des affaires comme celle-là.
Par ailleurs, l'enregistrement n'est prévu que pour une liste restreinte d'infractions graves portant atteinte à l'intégrité sexuelle ou physique. Seuls sont enregistrés les profils de personnes à l'encontre desquelles des indices de culpabilité ont été relevés dans le cadre d'une infraction figurant dans la liste restreinte d'infractions graves. Pourquoi la propriété ne peut-elle pas être protégée ? Ne faudrait-il pas pouvoir mettre fin aux agissements de ces bandes criminelles itinérantes ?
L'inculpation n'a lieu qu'en cas d'indices sérieux de culpabilité (article 61bis du Code d'instruction criminelle), tout comme l'exercice de l'action publique par le ministère public. L'enregistrement et la conservation des profils ADN ne peuvent être ordonnés que par le ministère public ou le juge d'instruction, selon le cas. Les garanties en vigueur pour les banques de données ADN existantes seront aussi appliquées intégralement à cette nouvelle banque de données ADN. Il va de soi qu'il faudra être très attentif à cet aspect.
Il ne faut pas que des personnes soient inhumées ou incinérées sans que leur identité ait été établie. Et s'il est malgré tout impossible de faire autrement, il faut alors, au préalable, prélever sur le corps un échantillon de cellules. On peut ainsi établir un profil ADN qui permettra de déterminer — peut-être après de nombreuses années — l'identité de la personne décédée. La proposition de loi nº 5-1633/1 vise dès lors à permettre l'identification de personnes décédées inconnues. Ici, l'élément de contrainte est tout à fait absent. Les proches des personnes disparues peuvent volontairement faire prélever leur ADN, en vue de faciliter toute identification.
La proposition de loi nº 1634/1 vise à renforcer la qualité de la collecte des preuves. Au cours d'une information judiciaire, il est inévitable que les « intervenants » les plus divers laissent (sans le vouloir) des traces d'ADN et contaminent ainsi la trace découverte. Seuls les aspects non codants sont enregistrés et les prélèvements sont anonymes. Dans ce contexte, la violation de l'aspect privé est donc moins présente. Il est nécessaire de créer une banque de données reprenant tous les profils ADN des (ex-)collaborateurs qui, directement ou indirectement, entrent (ou peuvent entrer) en contact avec des traces biologiques qui doivent être examinées. Si un enregistrement systématique peut s'avérer utile, il y a tout de même lieu de se demander s'il est réalisable dans la pratique. Il ne faut pas non plus négliger le coût que cela représente.
La proposition de loi nº 5-1831/1 vise à permettre l'échange de profils ADN.
Protection de la vie privée
Il est clair que la proposition de loi nº 5-1576/1 est celle qui est le plus susceptible de porter atteinte à la présomption d'innocence. Il peut être question de violation de la vie privée dans les différentes situations visées par les propositions.
Alors que l'article 8 de la CEDH ne tolère effectivement aucune violation de la vie privée, il prévoit cependant au § 2 qu'elle est tolérée pour « la défense de l'ordre et la prévention des infractions pénales, ... ou la protection des droits et libertés d'autrui ».
Dans l'intérêt public et pour la sécurité de tous les citoyens, on peut comprendre qu'il est utile de disposer de banques de données bien développées. Cela signifie qu'il y aura plus souvent des prélèvements d'ADN chez un nombre accru de personnes. Cette façon de procéder présuppose toutefois une cellule nationale forte, qui travaille conformément à des critères stricts. On ne saurait trop insister sur l'importance de la cellule nationale.
La loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale prévoit des garanties strictes en ce qui concerne l'obtention, la gestion, l'enregistrement et la suppression des données obtenues, en vue de garantir le droit au respect de la vie privée. Il est dès lors crucial que la vie privée soit bien protégée.
La question qui se pose est de savoir si les propositions en question sont bel et bien conformes aux nouveaux projets européens concernant la protection des données à caractère personnel.
Présomption d'innocence
Il convient, en tout cas, de savoir dans quelle mesure le stockage dans une banque de données et la conservation de données ADN de personnes qui n'ont pas encore été condamnées peuvent se concilier avec la présomption d'innocence.
Il en irait autrement si le prélèvement d'échantillons d'ADN était généralisé, à la naissance par exemple.
Il reste toutefois à savoir comment définir les notions « inculpés et suspects ». Il nous paraît important de donner une définition cohérente à ces notions.
Vie privée et l'affaire « S et Marper c. Royaume-Uni » devant la Cour européenne des droits de l'homme
L'arrêt de la CEDH « S et Marper c. Royaume-Uni » a conduit à une condamnation du Royaume-Uni. La Cour reconnaît que la technique de l'analyse ADN est indispensable dans le cadre de la lutte contre la criminalité et que l'enregistrement de données ADN de suspects et d'inculpés poursuit des buts légitimes, à savoir l'identification possible de futurs auteurs d'infractions. La Cour exige toutefois que l'on préserve un équilibre proportionnel entre, d'une part, le droit à la protection de la vie privée, et, d'autre part, la protection de l'ordre public, étant donné que les données conservées concernent des personnes n'ayant pas fait l'objet d'une condamnation. Dans l'affaire S et Marper, la Cour a toutefois considéré que le Royaume-Uni n'avait pas suffisamment préservé cet équilibre.
Conditions
En l'état actuel des choses, le prélèvement de cellules humaines ne peut, au stade de l'information, être effectué qu'avec le consentement de l'intéressé et dans les conditions fixées par la loi.
Au stade de l'instruction par contre, le juge d'instruction peut ordonner à une personne de se soumettre à un prélèvement dans les conditions fixées par la loi et pour autant qu'il s'agisse d'une infraction pour laquelle est prévue une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement ou une peine plus lourde.
Des garanties sont prévues en ce qui concerne les droits de la défense (possibilité de contre-expertise) et la protection de la vie privée (seuls le ministère public ou le juge d'instruction peuvent prendre connaissance de l'identité de la personne à laquelle se rapporte un profil ADN; de plus, l'analyse ADN s'effectue sur des segments d'ADN non codants dont on ne peut tirer aucune information sur les caractéristiques physiques ou psychiques de la personne concernée). Les échantillons de cellules découvertes ou prélevées doivent être détruits dans les conditions fixées par la loi.
Approche fondée sur le droit comparé
En France, la législation en vigueur prévoit que le consentement explicite de l'intéressé n'est pas nécessaire pour le prélèvement, mais que celui-ci ne peut néanmoins être effectué sous la contrainte. Le refus de subir le prélèvement est sanctionné pénalement et la peine est plus lourde lorsque l'intéressé a été condamné pour crime. La loi nº 2003-239 du 18 mars 2003 relative à la sécurité intérieure prévoit l'enregistrement des empreintes génétiques de prévenus et de condamnés et ce, pour la quasi-totalité des crimes et délits.
Les profils génétiques sont stockés pendant quarante ans si l'intéressé a été condamné, est décédé ou a disparu, et pendant vingt-cinq ans s'il existe à son encontre des indices graves et concordants.
Aux Pays-Bas, la réglementation relative aux analyses ADN en matière pénale trouve son fondement dans le Code de procédure pénale, la loi « DNA-onderzoek bij veroordeelden » et l'arrêté « DNA-onderzoek in strafzaken ».
La première réglementation légale en matière d'analyses ADN est entrée en vigueur le 1er septembre 1994 et a subi par la suite plusieurs modifications. Ainsi, il y a eu la loi du 5 juillet 2001, qui a élargi l'éventail des possibilités de prélèvement de cellules sous la contrainte chez les suspects, ainsi que la loi du 8 mai 2003 qui a autorisé les analyses ADN en vue de l'établissement de certaines caractéristiques physiques de prévenus inconnus à des fins de simplification de la recherche.
Ces dispositions figurent dans le Code de procédure pénale et concernent toutes l'enquête préparatoire. Il est possible de procéder à des analyses ADN sous la contrainte s'il existe des indices sérieux à l'encontre du suspect et ce, dans l'intérêt de l'enquête et pour certains types de délits tels que définis à l'article 67, alinéa 1er, du Code de procédure pénale (il s'agit essentiellement de délits qui donnent lieu à une peine d'emprisonnement de quatre ans ou plus). L'analyse peut être ordonnée par l'officier de justice et le juge-commissaire. Des prélèvements de cellules peuvent également être effectués sur base volontaire sur des suspects et il est également possible de réaliser des analyses ADN à grande échelle. Dans ce dernier cas, on sollicite la collaboration, sur une base volontaire, d'un grand nombre de personnes, par exemple tous les hommes qui habitent dans une région déterminée.
La loi « DNA-onderzoek bij veroordeelden » est entrée en vigueur le 1er février 2005. Depuis cette date, les personnes condamnées pour un crime puni par la loi d'une peine d'emprisonnement de quatre ans ou plus, à qui une peine déterminée a été infligée ou à qui une mesure déterminée a été imposée, doivent se soumettre à un prélèvement d'ADN. La loi ne s'applique pas si seule une amende ou une mesure financière a été infligée. Aucune objection ne peut être formulée contre le prélèvement lui-même.
Les profils ADN de personnes qui ne peuvent plus être considérées comme des suspects doivent être éliminés. Cette opération peut aussi avoir lieu plusieurs années après le décès du suspect ou du condamné. Un autre motif de suppression est l'expiration du délai de conservation. Celui-ci est de trente ou de vingt ans, selon la gravité des soupçons ou de la condamnation. Dans certaines circonstances, ce délai peut être prolongé.
En Allemagne, d'aucuns souhaiteraient qu'à des fins d'identification, on généralise le recours aux analyses ADN, comme c'est le cas pour les empreintes digitales, et que l'on abandonne certaines mesures de précaution comme l'intervention d'un juge. D'autres, en revanche, mettent en garde contre les effets pervers d'un fichage ADN systématique.
À l'heure actuelle, les dispositions relatives aux analyses génétiques en matière pénale figurent aux articles 81a, 81e, 81f et 81g du Code de procédure pénale allemand. Dans le cadre de l'enquête pénale, il est possible de procéder au prélèvement de cellules corporelles chez le suspect afin d'établir des faits importants pour la procédure. Elles doivent être détruites dès qu'elles ne sont plus utiles à la recherche de la vérité (§ 81a, StPo). Les recherches de l'identité génétique peuvent être exécutées si des éléments indiciels ont été découverts sur le suspect ou sur la victime (§ 81e StPo). Ces recherches ne peuvent être ordonnées que par le juge (§ 81f StPo). Une analyse ADN peut également être effectuée en vue de l'identification de coupables de futures infractions. C'est ainsi que des analyses ADN peuvent être effectuées sur des personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction d'une « importance considérable » ainsi qu'une infraction sexuelle, s'il est à craindre qu'elles ne récidivent. Les prélèvements ne doivent servir qu'à cette fin et être détruits dès qu'ils ne sont plus nécessaires (§ 81g StPo). Ces analyses ne peuvent être ordonnées que par le juge.
Les mêmes mesures peuvent être prises à l'égard des personnes condamnées. Ces empreintes génétiques peuvent être enregistrées dans la banque de données de l'Office fédéral de police criminelle qui peut utiliser les échantillons ADN en vue de l'identification d'une personne ou de la coordination de pistes menant à une personne déterminée. Il est toutefois interdit de constituer le profil d'une personne.
La Cour constitutionnelle fédérale a statué à plusieurs reprises sur l'analyse ADN. Ainsi, elle a estimé que l'enregistrement des empreintes génétiques, utilisées dans le cadre d'une procédure pénale, est compatible avec la Constitution, mais que l'analyse des circonstances laissant présager la récidive devait être faite au cas par cas; elle a considéré aussi que l'analyse ADN ne devait être utilisée que lorsque le droit de la société à la sécurité prévaut sur l'atteinte à un droit personnel, etc. Plusieurs Länder veulent aller plus loin.
En Angleterre et au Pays de Galles, les analyses ADN sont très fréquemment utilisées dans le cadre d'affaires criminelles. Le Forensic Science Service (FSS) est chargé de l'exécution pratique de ces analyses. Il a pour mission d'épauler l'administration de la justice, principalement en fournissant un appui scientifique dans le cadre des investigations et en mettant son expertise à la disposition des tribunaux. Le FSS détermine les normes qui doivent être respectées lors d'une analyse ADN, y compris par les autres prestataires d'analyses ADN. La banque de données ADN contient deux types de données: d'une part, les Criminal Justice Data, qui sont des données à caractère personnel, et, d'autre part, les Crime Scene Data, qui sont des données relatives à des traces recueillies à l'endroit où l'infraction a été commise. Les données qui permettent l'établissement d'un profil restent la propriété du service de police spécifique qui a reçu les échantillons en vue de l'analyse. Dès que le profil a été établi, il est intégré dans la banque de données ADN. La concordance avec un échantillon découvert à l'endroit où une infraction a été commise et qui est déjà enregistré dans la banque de données est alors vérifiée. Si cette concordance existe, l'information est communiquée à la police. Cette méthode a déjà été utilisée avec succès pour toute une série d'actes, comme des assassinats, des meurtres, des viols, des vols ou des vols de voitures. De nombreux high volume crimes, tels que des cambriolages, sont ainsi élucidés à grande échelle. La NDNAD est la première banque de données de ce genre qui ait été créée et la plus performante au monde. Les données ADN rassemblées sont conservées pour une durée indéterminée, y compris en cas d'acquittement du prévenu au terme de la procédure judiciaire. Le nombre élevé de profils s'explique par le fait qu'en Angleterre, les garanties en termes de protection de la vie privée sont sensiblement moindres. La CEDH a remédié à cet état de choses.
Conclusions
Il est indéniable que cette problématique implique une mise en balance de différents intérêts, à savoir la protection de l'intérêt public, d'une part, et d'autres intérêts comme la vie privée ou la présomption d'innocence, d'autre part.
Il est question, dans toutes les propositions, d'ADN non codé, ce qui est quand même un pas dans le sens de la protection de la vie privée. À l'heure actuelle, on relève et conserve déjà des empreintes digitales.
L'approche de droit comparé nous apprend que la problématique peut être réglée de nombreuses manières. La récolte d'ADN d'auteurs et de suspects peut être propice à une plus grande sécurité publique. À cet égard, il est cependant crucial de veiller à ce que la vie privée de l'intéressé soit respectée.
Enfin, M. Matthijs souhaite encore formuler une réflexion personnelle qui n'engage à rien. Pourquoi ne soumettrait-on pas tous les nouveau-nés et résidents belges à un prélèvement d'ADN afin de créer une banque de données tout à fait neutre ? Le coût est bien évidemment un élément important à cet égard.
4. Échange de vues
Mme Faes remercie les intervenants pour les explications détaillées données sur les propositions de loi à l'examen. Elle se réfère également à l'audition précédente du président de la commission de protection de la vie privée. En effet, on a souligné plusieurs fois aujourd'hui que la question de la protection de la vie privée suscitait une certaine crainte. M. Debeuckelaere estimait lui aussi que les propositions de loi à l'examen s'inscrivent dans le prolongement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, plus particulièrement de l'affaire Marper, et que toutes les directives et garanties en la matière sont dès lors respectées.
L'intervenante remercie les personnes, comme M. Renard, qui ont également commenté le côté pratique des choses, ce qui est d'une grande utilité.
En ce qui concerne la banque de données « Personnes disparues », la question de l'échange international des données a été soulevée. L'intervenante renvoie au choix délibéré fait à ce sujet dans l'article 8 de la proposition de loi concernée. Il lui semble très utile d'agir par-delà les frontières. Quelle est la position de l'INCC à ce sujet ? Est-ce réalisable sur le plan pratique ?
Pour ce qui est du coût, l'intervenante renvoie à l'explication fournie par M. Alain Remue lors d'une audition précédente. Il a expliqué que sur une période de dix ans, on compte quelque neuf cents personnes disparues toujours non identifiées à ce jour. On peut dire que le coût de la banque de données des personnes disparues sera proportionnellement peu élevé.
En ce qui concerne la banque de données « Intervenants », l'oratrice fait sienne l'observation formulée à propos de la conservation. Il faut peut-être effectivement opter pour une suppression automatique. L'observation relative aux intervenants qui n'interviennent pas personnellement dans le dossier doit également être examinée.
La remarque relative à la meilleure définition des suspects et des inculpés a déjà été formulée et notée. L'intervenante note que M. Renard est favorable à une définition stricte, prévoyant l'inculpation en soi en tant que critère d'enregistrement dans la base de données.
En ce qui concerne la remarque relative à l'arrêt Marper et à la conservation des profils des condamnés, l'intervenante avait l'impression que la limitation dans le temps était suffisante. Elle examinera cela de plus près.
M. Swennen renvoie à la remarque selon laquelle les propositions de loi à l'examen amèneraient la Belgique au niveau d'autres pays. Quel pays tient lieu d'exemple à cet égard ? Dans quel pays la législation réalise-t-elle un très bon équilibre entre la protection de la vie privée, d'une part, et l'intérêt général, d'autre part ?
Pour le reste, l'intervenant demande de plus amples explications sur l'observation formulée par M. Matthijs.
En ce qui concerne les personnes disparues, Mme Vanvooren précise que si on retrouve un corps non identifié ou si on possède le profil génétique d'une personne disparue, il y a un intérêt à comparer son profil avec une banque de données à l'international. Toutefois, cette comparaison se fera avec l'ensemble des pays. Aucun choix de pays avec lesquels l'échange pourrait avoir lieu n'est admis.
Sur la question du prix relatif à l'enregistrement des profils ADN des 900 personnes actuellement disparues, M. Renard estime qu'il s'agit d'un choix politique: la société est-elle disposée à faire cet investissement dès lors qu'il y existe 900 familles qui restent dans le doute quant à un de leurs proches. Ceci étant, l'intervenant rappelle qu'il y a certainement des mesures qui pourraient être prises afin de réduire le coût des analyses ADN.
Quant à l'arrêt « Marper », M.Renard souligne que la Cour a critiqué l'absence de différenciation entre les condamnés et les suspects. De ce point de vue-là, la proposition devrait être adaptée.
En ce qui concerne les législations étrangères qui pourraient servir de modèle, M. Renard estime que les Pays-Bas disposent d'une législation de « deuxième génération », ce qui n'est pas le cas de la Belgique. La législateur néerlandais a d'une part bien intégré les différentes contraintes qui doivent être prises en compte (directives européennes, jurisprudence de la CEDH) et, d'autre part, a opéré d'autres choix politiques alors qu'en termes de population les deux pays sont assez comparables.
M. Matthijs renvoie à la situation des personnes qui arrivent sur le sol américain et sont soumises à un scan de l'iris sans qu'on leur en ait demandé l'autorisation. L'intervenant voit peu d'objections à cette pratique. Elle est en effet indolore, on sait à quelles fins le scan peut être utilisé et la règle est la même pour tout le monde. Toute personne doit subir un scan de l'iris, quels que soient son áge, son sexe ou sa couleur de peau. Si le but est de créer une banque de données aussi pertinente que possible, un instrument d'identification, pourquoi ne pourrait-on pas obliger tous les citoyens, sur un pied d'égalité, à subir le prélèvement d'un échantillon de leur ADN, pour autant que les procédures d'utilisation et le contrôle de ce prélèvement fassent l'objet de règles strictes ?
M. Swennen en déduit qu'il serait également possible de prélever, dès la naissance, un échantillon d'ADN qui serait conservé dans une banque de données ADN.
Mme Faes souhaite encore poser une question d'ordre pratique en ce qui concerne la banque de données ADN « Personnes disparues ». Est-il souhaitable ou envisageable, sur le plan pratique, d'ouvrir à l'échange international de données uniquement la banque de données « Personnes disparues » ?
Mme Vanvooren confirme que le logiciel permet de gérer les banques de données de l'INCC selon différentes finalités en ce y compris l'échange international ou non d'une banque de données spécifique.
IV. DISCUSSION GÉNÉRALE
M. Mahoux demande quel est l'avis du gouvernement par rapport à la création d'une banque de données ADN « personnes disparues ». Quel serait le coût lié à la mise en place d'une telle banque de données ? Enfin, à quel endroit la banque de données serait-elle tenue et quelle efficacité peut-on espérer d'une telle mesure ?
La ministre rappelle que pour ce qui concerne la problématique de l'identification ADN, le gouvernement travaille par étape. La première étape visait à moderniser le recours à l'analyse ADN en matière pénale. C'était l'objectif de la loi du 7 novembre 2011 qui a permis d'améliorer et de simplifier la procédure. Cette loi entrera en vigueur le 1er janvier 2014. La seconde étape vise à réduire le coût des analyses ADN. Le gouvernement a lancé à cet effet une procédure d'appel d'offres. L'attribution du marché aura lieu très prochainement et le laboratoire chargé d'effectuer les analyses sera connu sous peu. La troisième étape vise à examiner les possibilités d'étendre la base de données ADN en tenant compte des coûts d'une telle mesure. L'intervenante relève que la banque de données ADN « personnes disparues », qui existe aux Pays-Bas depuis 2006, contient environ neuf cents profils. Il faudra donc que le gouvernement dégage des moyens budgétaires si une telle banque de données devait être créée en Belgique. C'est la raison pour laquelle l'entrée en vigueur de la banque de données ADN « personnes disparues » doit être quelque peu différée dans le temps. Sur le fond, le gouvernement n'est cependant pas opposé à l'extension de la banque de données ADN à la catégorie des personnes disparues.
En ce qui concerne les coûts, Mme Faes signale qu'il y a environ 150 cas de disparitions non résolus chaque année.
Sur la base d'informations qu'elle a recueillies auprès de l'Institut national de criminalistique et de criminologie ainsi que de la Cellule des personnes disparues de la Police fédérale, 58 analyses ADN ont été effectuées l'année dernière. Il y aurait donc au total seulement une centaine d'affaires supplémentaires nécessitant une analyse ADN. Tenant compte d'un coût de 300 euros par analyse, cela correspond à un coût total d'environ 30 000 euros.
On peut supposer qu'à la suite de la procédure d'adjudication publique, le coût de chaque analyse ADN se réduira sensiblement. Même si le nombre d'analyses augmente, l'oratrice est convaincue que le coût total restera inférieur à 17 000 euros. Elle en conclut que la création d'une banque de données ADN « personnes disparues » ne devrait pas avoir de grosses répercussions sur le plan budgétaire.
Madame Talhaoui renvoie à sa demande d'explications nº 5-3640 sur les problèmes d'administration de la preuve dans les affaires de viol. La ministre a renvoyé, dans sa réponse, à l'évaluation qui est faite par le parquet général de Liège des sets d'agressions sexuelle (SAS). Le groupe de travail qui se penche sur cette question devrait formuler des conclusions et des recommandations avant la fin de l'année. L'intervenante pense que ces recommandations pourraient être utiles dans le cadre de l'élargissement des possibilités de recours à l'identification ADN.
M. Mahoux relève que personne ne semble contester l'efficacité de la création d'une banque de données ADN des personnes disparues afin de permettre l'élucidation de certaines affaires de disparition. Quant à l'aspect du coût, l'orateur note que le gouvernement fait preuve de prudence. Sait-on évaluer le nombre d'analyses ADN qui devront être effectuées si l'on met le système en place ? Il semblerait en effet logique d'appliquer la nouvelle procédure à la totalité des personnes disparues et pas uniquement aux nouveaux cas de disparitions. Si le coût reste dans les limites annoncées par Mme Faes, il serait dommage de se priver de cette méthode.
L'intervenant se demande cependant s'il est raisonnable d'adopter la proposition de loi sans attendre l'avis de la Commission pour la protection de la vie privée et ce, d'autant plus que cet avis est annoncé pour le 17 juillet 2013.
M. Courtois demande si la commission accepte de disjoindre la proposition de loi nº 5-1633 des autres propositions de loi ADN.
Mme Faes est convaincue que la création d'une banque de données ad hoc offre une réelle plus-value dans l'élucidation de dossiers de disparition. L'exemple hollandais, où le système existe depuis 2006, a prouvé son efficacité. En ce qui concerne l'avis de la Commission pour la protection de la vie privée, l'oratrice rappelle que lors de son audition en novembre 2012, le président de la commission a déclaré n'avoir aucune objection majeure quant à la création d'une banque de données pour les personnes disparues. Il a estimé que l'outil proposé était proportionné au but recherché.
Mme Faes souligne par ailleurs que la proposition de loi s'inscrit parfaitement dans la logique de la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale. Or, la Commission pour la protection de la vie privée avait marqué son consentement sur ce texte. Elle précise par ailleurs que la proposition de loi à l'examen prévoit une série de garanties du respect de la vie privée. Ainsi, seul les profils ADN sont enregistrés dans la banque de données et pas le matériel génétique.
L'intervenante renvoie enfin à l'audition de M. Remue, chef de la cellule des personnes disparues, qui a plaidé pour la création d'une banque de données ADN des personnes disparues afin de faciliter l'identification de dépouilles mortelles non identifiées. On peut de la sorte plus rapidement donner des informations fiables aux proches des personnes disparues. L'oratrice pense que pour toutes ces raisons il est possible de passer aux votes sur la proposition de loi nº 5-1633 et de poursuivre la discussion des autres textes après la réception de l'avis de la Commission pour la protection de la vie privée.
M. Vastersavendts est favorable à l'idée de disjoindre la proposition de loi nº 5-1633 des autres propositions de loi ADN. La création d'une banque de données ADN pour les personnes disparues serait un pas en avant.
M. Mahoux est d'accord de disjoindre la proposition de loi nº 5-1633 des autres propositions ADN. Il pense qu'il est cependant préférable d'attendre que l'avis de la Commission pour la protection de la vie privée ait été rendu avant de voter le texte.
Mme Faes ne comprend pas pourquoi reporter le vote puisque la Commission pour la protection de la vie privée a confirmé, lors des auditions, qu'elle n'avait pas d'objection quant à la création d'une banque de données ADN « personnes disparues ».
Mme Van Hoof demande ce qui se passerait si l'avis de la Commission pour la protection de la vie privée devait malgré tout contenir certaines remarques ou réserves alors que la commission a déjà adopté la proposition de loi.
Mme Faes est convaincue qu'il n'y aura pas de remarques de fond de la Commission pour la protection de la vie privée sur la proposition de loi nº 5-1633. Et même si des remarques devaient être formulées, le texte à l'examen pourra encore être amendé en séance plénière ou par la Chambre des représentants.
V. DISCUSSION DES ARTICLES
Articles 1er et 2
Ces articles n'appellent pas d'observations.
Article 3
Amendement nº 1
Mme Faes dépose l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 5-1633/2) qui tend à compléter cet article par un c) rédigé comme suit: « c) dans le 2º, les mots « ou sur des traces découvertes de la personne disparue » sont insérés après les mots « prélevés sur une personne » ».
L'article 2, 2º, de la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale définit l'échantillon de référence comme suit: « les bulbes pileux, les cellules buccales ou de sang, prélevés sur une personne afin d'établir son profil ADN ». Il convient d'affiner cette définition en ce qui concerne les personnes disparues, en précisant que l'échantillon de référence peut aussi être prélevé sur des traces découvertes de la personne disparue.
Articles 4 et 5
Ces articles n'appellent pas d'observations.
Article 6
Amendement nº 2
Mme Faes dépose l'amendement nº 2 (doc. Sénat, nº 5-1633/2) qui tend à remplacer cet article par la disposition suivante: « Dans l'article 5quater de la même loi, inséré par la loi du 7 novembre 2011, les modifications suivantes sont apportées:
1º dans le § 1er, les mots « et 5ter, § 3, alinéa 2, » sont remplacés par les mots « , 5ter, § 3, alinéa 2, et 8quater, § 4, alinéa 5, »;
2º il est ajouté un § 5 rédigé comme suit:
« § 5. S'il est question d'un profil tel que visé à l'article 8quater, le magistrat concerné ne peut utiliser le lien positif que dans la finalité visée à l'article 3, § 2. » »
Mme Faes souligne que l'amendement vise à inscrire la proposition de loi à l'examen dans la logique de la loi du 7 novembre 2011 qui a modifié la « loi ADN » (loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale). En effet, cette loi modificative du 7 novembre 2011 a inséré dans la loi ADN un article 5quater fixant les dispositions générales conformément auxquelles le gestionnaire des banques nationales de données ADN ou son délégué doit enregistrer les profils ADN et les comparer aux profils déjà stockés dans les banques de données en question. Dans sa version actuelle, l'article 6 de la proposition de loi à l'examen prévoit une procédure presque identique mais rompt inutilement avec la logique de la loi modificative de 2011. Outre qu'elle n'est pas nécessaire, l'instauration d'une procédure distincte vient compliquer inutilement la loi ADN. C'est pourquoi l'auteure de l'amendement suggère d'inscrire dans l'actuel article 5quater les modifications nécessitées par la proposition de loi « Personnes disparues ». C'est dans cette optique qu'est insérée dans l'article 5quater, § 1er, une référence au nouvel article 8quater.
Cette insertion dans l'article 5quater a une conséquence particulière. Au départ, les auteurs envisageaient uniquement la comparaison d'un profil ADN d'une personne disparue avec les profils stockés dans les banques de données ADN « Personnes disparues » et « Criminalistique », et non avec les profils contenus dans la banque de données ADN « Condamnés ». Or, la pratique montre que ce type de comparaison est tout aussi utile. En effet, il se peut qu'une personne disparue ait fait l'objet d'une condamnation dans le passé et qu'elle ait, à ce titre, été enregistrée dans la banque de données ADN « Condamnés ». Par conséquent, en procédant également à la comparaison avec les profils ADN de cette banque de données, on accroît les chances d'identification de la personne disparue. À cet égard, l'auteure de l'amendement tient à rappeler une fois encore la finalité de la banque de données ADN « Personnes disparues »: celle-ci ne peut être utilisée que pour « permettre d'identifier directement ou indirectement des personnes décédées inconnues ou faciliter la recherche de personnes disparues ».
Cet amendement vise à prévoir ce qu'il y a lieu de faire dans l'hypothèse où la comparaion d'un profil ADN avec les profils stockés dans les différentes banques de données ferait également apparaître un lien positif hors de la finalité d'identification de personnes disparues. Au cours des auditions, plusieurs experts ont souligné qu'il n'était pas possible de comparer sélectivement un profil ADN au contenu des banques de données. En d'autres termes, lorsque le profil ADN d'une personne disparue est comparé aux profils stockés dans la banque de données ADN « Criminalistique », il est comparé au profil ADN de toutes les traces présentes. D'un point de vue technique, on ne peut donc pas éviter qu'une personne disparue soit encore mise en relation avec le lieu d'un délit qu'elle aurait elle-même commis. Le gestionnaire des banques nationales de données peut donc être confronté à plusieurs liens positifs. En outre, l'INCC a encore fait remarquer lors des auditions qu'il n'appartient pas à ce gestionnaire de décider de quelle finalité relève telle ou telle information. L'INCC a affirmé à juste titre durant les auditions que cette décision revient à un magistrat. Cet amendement vise, en conséquence, à donner suite à cette observation par le biais d'une disposition allant expressément dans ce sens. Le magistrat concerné recevra donc tous les liens positifs du profil ADN, mais ne pourra ensuite utiliser que le lien positif spécifique qui correspond à la finalité pour laquelle il a fait prélever le matériel ADN de la personne disparue.
Article 7
Cet article n'appelle pas d'observations.
Article 7/1 (nouveau)
Amendement nº 3
Mme Faes dépose l'amendement nº 3 (doc. Sénat, nº 5-1633/2) visant à insérer un article 7/1 rédigé comme suit: « Dans l'article 8 de la même loi, remplacé en dernier lieu par la loi du 7 novembre 2011, les mots « banques nationales de données ADN » sont chaque fois remplacés par les mots « banques nationales de données ADN « Condamnés » et « Criminalistique » ».
Cet amendement modifie l'article 8 de la « loi ADN » en vue d'éviter que les profils ADN de personnes disparues ne soient automatiquement échangés avec des points de contact étrangers à des fins de consultation et de comparaison automatisée de profils ADN. Bien qu'un tel échange soit possible pour les profils ADN enregistrés dans les banques de données ADN « Criminalistique » et « Condamnés », il doit être exclu dans le cas de la banque de données ADN « Personnes disparues ». Le but n'est pas de faire de la nouvelle banque de données ADN un instrument automatique dans le cadre d'enquêtes pénales à l'étranger. Toutefois, il est important de noter que le présent amendement n'exclut pas totalement les échanges internationaux, puisqu'il reste tout à fait possible de demander des données dans un dossier individuel, dans le cadre de l'entraide judiciaire.
Article 8
Amendement nº 4
Mme Faes dépose l'amendement nº 4 (doc. Sénat, nº 5-1633/2) qui vise à apporter diverses modifications à l'article 8quaterproposé.
Dans le § 3, alinéa 2, les mots « à l'intéressé » sont remplacés par les mots « au parent concerné ».
Cette modification a pour but de clarifier le texte actuel. En effet, il n'est possible de communiquer les informations requises qu'au parent concerné. Le texte initial prévoyait, sans le vouloir, que ces informations devaient aussi être communiquées à la personne disparue.
Dans le § 3, alinéa 2, 2º, il est proposé de remplacer les mots « afin de permettre » par les mots « dans le but exclusif de permettre ».
Au cours des auditions, les représentants de l'Institut national de criminalistique et de criminologie ont souligné qu'il fallait améliorer l'information à l'intéressé, étant donné que la comparaison au contenu des banques de données ADN peut faire apparaître l'existence d'un lien positif entre l'intéressé et un délit qui a été commis. Afin que le droit de ne pas s'accuser soi-même soit respecté, cet amendement vise à préciser que la comparaison avec les banques de données « Personnes disparues » et « Criminalistique » ne peut se faire que pour permettre l'identification de la personne disparue.
L'amendement propose par ailleurs d'insérer, dans le § 4, alinéa 4, les mots « , en indiquant qu'il s'agit d'un profil destiné à la banque de données ADN « Personnes disparues » » après les mots « l'échantillon de référence ».
Cette modification a pour but de clarifier le texte actuel. Comme plusieurs banques de données ADN sont constituées, il faut que l'expert concerné ainsi que le gestionnaire des banques nationales de données ADN (à qui l'expert transmet directement le profil ADN) sachent clairement pour quelle banque de données ADN le profil est établi. À cet effet, l'amendement précise que le procureur du Roi doit communiquer à l'expert qu'il s'agit d'un profil destiné à la banque de données ADN « Personnes disparues ».
L'amendement vise enfin à remplacer le § 5 par ce qui suit:
« § 5. Le prélèvement d'échantillons de référence d'un parent en ligne ascendante, en ligne descendante ou en ligne collatérale de la personne disparue n'est possible qu'avec le consentement du parent concerné. »
Le texte initial du § 5 prévoyait que tant l'identification directe (par exemple, des traces d'ADN prélevées sur une brosse à dents ou sur un vêtement de la personne disparue) que l'identification indirecte (par prélèvement d'un échantillon de référence d'un parent) n'étaient possibles qu'avec le consentement de certains parents ou cohabitants légaux ou de fait de la personne disparue. Au cours des auditions, certains intervenants ont attiré l'attention sur les difficultés pratiques que pose la condition prévoyant que les membres de la famille doivent également donner leur consentement pour un prélèvement de matériel ADN susceptible de mener directement à l'identification de la personne disparue. Prenons un exemple: si l'on retrouve sur le lieu d'un délit un manteau portant des traces de sang mais aucune indication quant à son propriétaire, le procureur du Roi peut ordonner sans problème un prélèvement d'ADN à des fins d'analyse. Par contre, si l'identité du propriétaire est connue (le manteau trouvé contient par exemple une indication de son identité), le procureur doit d'abord rechercher d'éventuels membres de la famille de l'intéressé. Or, cette information n'est pas toujours disponible, surtout pour les personnes de nationalité étrangère. Étant donné ces difficultés pratiques, l'auteure de l'amendement suggère que l'on renonce à la formalité du consentement dans l'hypothèse de l'identification directe. Il est en effet question, en l'occurrence, d'un prélèvement d'ADN d'une personne disparue et non d'un prélèvement d'ADN des membres de la famille. En outre, la collectivité a tout intérêt à ce que les personnes disparues soient retrouvées rapidement ou à ce que des corps non identifiés puissent l'être dans les plus brefs délais. L'amendement est dès lors formulé de telle manière que le consentement du parent concerné ne soit requis que pour l'identification indirecte (c'est-à-dire par prélèvement d'un échantillon de référence d'un parent de la personne disparue).
Article 9
Amendement nº 5
Mme Faes dépose l'amendement nº 5 (doc. Sénat, nº 5-1633/2) qui tend à remplacer dans cet article les mots « le premier jour du vingt-quatrième mois qui suit celui au cours duquel elle aura été publiée » par les mots « un an après sa publication ».
Il ressort de l'audition des représentants de l'Institut national de criminalistique et de criminologie que le délai prévu pour l'entrée en vigueur, à savoir au plus tard vingt-quatre mois après la publication de la loi, est trop long. À la lumière de cet élément, l'auteur du présent amendement propose de ramener ce délai à un an au maximum après la publication de la loi au Moniteur belge.
Amendement nº 6
Mme Faes dépose l'amendement nº 6 (doc. Sénat, nº 5-1633/3) visant à régler l'entrée en vigueur du nouveau texte. L'amendement propose de déléguer au Roi le soin de fixer la date d'entrée en vigueur de la banque de données « personnes disparues ». L'entrée en vigueur doit cependant avoir lieu au plus tard le 1er janvier 2015.
Mme Faes souligne que son amendement a été préparé en concertation avec le cabinet de la ministre de la Justice. Le cabinet prépare actuellement les arrêtés royaux d'exécution de la loi du 7 novembre 2011 modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 22 mars 1999 relative à la procédure d'identification par analyse ADN en matière pénale. Il est important de travailler par étapes. L'amendement nº 6 permet de réaliser cet étalement.
Par conséquent, l'amendement nº 5 est retiré.
VI. VOTES
Les articles 1er et 2 sont adoptés à l'unanimité des 13 membres présents.
L'amendement nº 1 et l'article 3 ainsi amendé sont successivement adoptés à l'unanimité des 13 membres présents.
Les articles 4 et 5 sont adoptés à l'unanimité des 13 membres présents.
L'amendement nº 2 remplaçant l'article 6 est adopté à l'unanimité des 13 membres présents.
L'article 7 est adopté à l'unanimité des 13 membres présents.
L'amendement nº 3 est adopté à l'unanimité des 13 membres présents.
L'amendement nº 4 et l'article 8 ainsi amendé sont successivement adoptés à l'unanimité des 13 membres présents.
L'amendement nº 5 est retiré.
L'amendement nº 6 et l'article 9 ainsi amendé sont successivement adoptés à l'unanimité des 13 membres présents.
VII. VOTE FINAL
La proposition de loi amendée est adoptée à l'unanimité des 13 membres présents.
Le présent rapport a été adopté par 8 voix et 1 abstention.
Le rapporteur, | Le président, |
Guy SWENNEN. | Alain COURTOIS. |