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M. Alain Courtois (MR). - Je vais m'efforcer d'être plus calme que M. Laeremans. Crier ne sert à rien...
Ma question porte donc sur la pénurie de personnel affecté à la Justice et sur son cadre linguistique, plus particulièrement à Bruxelles.
Le Conseil des ministres a finalisé un accord sur le contrôle du budget 2013 et sur la plus grande partie du budget fédéral 2014.
Au même moment, une dépêche Belga affirme qu'un dossier judiciaire sur neuf concernant des faits d'association de malfaiteurs, d'escroquerie, de blanchiment, de terrorisme, de fraude fiscale ou de trafic international de drogue ne fait pas l'objet d'une enquête par la Justice et cela par manque d'enquêteurs.
Il ressort du même communiqué que 11% des affaires ont été classées sans suite en raison d'un manque de personnel au sein de la police ou des parquets.
Par ailleurs, le premier président de la Cour d'appel de Bruxelles poussait récemment un énième cri d'alarme dans le journal De Morgen en déclarant que 1 600 dossiers de fraude fiscale sont pendants, dont 700 en attente d'être jugés. Pire encore, faute de personnel suffisant, les juges sont obligés de débouter, dans ces mêmes dossiers, des demandeurs qui ont intenté des actions représentant des millions d'euros de manque à gagner pour l'État belge car le délai raisonnable est dépassé pour juger les affaires à temps !
La réforme de la Justice prévoit une modification du management : un contrat de gestion deviendra le baromètre objectif sur la base duquel le personnel et les moyens seront attribués. Ce contrat de gestion sera lié à un engagement de résultat sur la base duquel seront attribués le personnel et les moyens.
L'Association syndicale des magistrats et l'Ordre des Barreaux francophone et germanophone de Belgique craignent que cette réforme ne serve absolument à rien si elle n'est pas accompagnée de moyens supplémentaires en personnel et en magistrats. Ils ont, vous le savez, déposé un préavis de grève.
C'est également la position du Conseil consultatif de la magistrature qui estime, dans un avis du 20 juin, que « le transfert de la responsabilité en matière de gestion ne peut pas libérer les deux autres pouvoirs constitutionnels de leur responsabilité de fournir au pouvoir judiciaire les moyens humains et matériels qui lui permettent de fonctionner correctement ».
Je pointerai au passage que les crédits pour le personnel affecté à la Justice sont passés de 1,263 milliard en 2010 à 1,253 milliard en 2012.
Pour le troisième pouvoir de l'État, c'est un véritable scandale.
J'ajoute encore qu'à Bruxelles, l'accord institutionnel basé sur les rapports annuels de fonctionnement du tribunal bruxellois prévoit une clé de répartition de 80/20 entre magistrats francophones et néerlandophones.
Il semblerait qu'une étude supplémentaire commandée à la société KPMG par vos soins et prônant le retour à un ratio de 66/33 ait été réalisée sur des bases moins objectives que celles retenues lors de l'accord institutionnel. De plus, selon mes informations, cette clé de répartition se base sur les dossiers sortants et non pas sur les dossiers rentrants. La différence est énorme.
Madame la ministre, compte tenu des récents accords budgétaires et institutionnels, ainsi que de la réforme de la Justice en cours, je souhaite vous poser les questions suivantes.
Des moyens supplémentaires seront-ils accordés à la Justice afin de renforcer le cadre de magistrats, tout spécialement à Bruxelles ?
Quel sort allez-vous réserver à l'étude de KPMG, et envisagez-vous de remettre en cause l'accord institutionnel prévoyant une clé de répartition de 80/20 entre magistrats francophones et néerlandophones ?
En tout cas, une urgence s'impose : les nominations.
Mme Annemie Turtelboom, ministre de la Justice. - Lors de l'élaboration du budget initial 2013, l'Ordre judiciaire s'est vu attribuer un montant supplémentaire de 979 000 euros en crédits de personnel, en vue notamment de compléter le cadre du parquet général de Bruxelles, afin de pouvoir gérer la charge de travail supplémentaire, de compléter le cadre existant de magistrats fiscaux et d'élargir le cadre existant de cinq substituts fiscaux.
Par ailleurs, si la nécessité d'un renforcement supplémentaire du cadre de magistrats se fait jour, à Bruxelles en particulier, je ne manquerai pas de demander les crédits nécessaires dès les prochaines discussions budgétaires.
KPMG n'a pas encore déposé son rapport final. Il m'est dès lors impossible d'indiquer d'éventuelles conséquences sur l'établissement des cadres dans des juridictions bruxelloises.
Conformément à la loi du 19 juillet 2012, en tant que ministre de la Justice, j'informerai le comité de monitoring des résultats de la mesure de la charge de travail à Bruxelles. En effet, c'est à ce comité qu'incombe l'évaluation des résultats. Les décisions qui en découleront seront exécutées par la Justice.
M. Alain Courtois (MR). - Je n'ai pas grand-chose à ajouter à mes propos. Je vous demande, madame la ministre, d'être attentive au cadre et j'en reviens à ma dernière remarque : il faut nommer, nommer et encore nommer.
En outre, je serai particulièrement vigilant, dans les semaines à venir, en ce qui concerne la clé de répartition 80/20.