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M. Ahmed Laaouej (PS). - Vous avez manifesté votre intention de saisir les services de l'administration fiscale en vue de mener des enquêtes et des vérifications à la suite des révélations de l'Offshore Leaks. On ne peut évidemment que s'en réjouir.
Quasi simultanément, un hebdomadaire francophone, Marianne Belgique, a mené de son côté une enquête fouillée et documentée relative à un vaste courant de fraude transitant par le Panama et que l'on a, pour cette raison, nommé le Panamagate. Les dernières éditions de cet hebdomadaire en ont abondamment parlé et il est possible que cela continue.
Plus d'une centaine, si ce n'est davantage, de personnes physiques belges et de personnes morales ayant un lien économique ou juridique avec la Belgique, semblent concernées par ce courant de fraude.
Certaines sociétés offshores situées à Panama auraient notamment permis d'opérer des achats et des ventes d'oeuvres d'art en vue de frauder le fisc. Parmi les personnes concernées, certaines sont de notoriété importante mais il ne m'appartient pas de les citer nommément à cette tribune.
Il ne s'agit là que d'un exemple. L'existence de ces structures offshore au Panama peut potentiellement servir à d'autres opérations frauduleuses qui restent bien entendu à établir.
Monsieur le secrétaire d'État, êtes-vous informé de ces éléments révélés par Marianne Belgique ? Avez-vous saisi l'Inspection spéciale des impôts en vue de mener une enquête appropriée ?
M. John Crombez, secrétaire d'État à la Lutte contre la fraude sociale et fiscale. - J'ai pris connaissance de cet article sur le Panamagate. Cette semaine, le ministre des Finances et moi avons d'ailleurs été interrogés par le magazine Marianne Belgique sur cette question, parmi d'autres.
L'Inspection spéciale des impôts, qui suit de près les informations publiées par la presse, ouvre une enquête chaque fois qu'elle dispose de renseignements suffisamment détaillés.
Depuis le début des dossiers dits offshore, il est question de quatre listes ainsi que de l'existence d'une banque de données au sein de l'administration fiscale de quatre pays.
La presse a déjà fait état de la réaction des parquets. Nous avons mis en place au sein du Collège pour la lutte contre la fraude une coordination entre les parquets, l'ISI, la police et tous les acteurs concernés, y compris la cellule spécifique pour la lutte contre les fraudes dans les paradis fiscaux. Cette coordination ne concerne pas les dossiers individuels et les séquences des listes.
Le commissaire européen compétent pour cette matière a demandé aux journalistes à pouvoir disposer des informations utilisées pour écrire leurs articles. Il serait bon que cette demande dépasse le niveau national. Certains pays ont posé la question mais les journalistes ont répondu par la négative. Le commissaire européen s'efforce malgré tout d'obtenir ces informations.
Les initiatives prises aux niveaux européen et mondial me semblent une démarche plus structurelle que des enquêtes individuelles, compte tenu de l'augmentation du nombre de dossiers liés aux paradis fiscaux, au sens large. Outre les bases de données disponibles, la cellule spécifique et l'ISI utilisent de plus en plus le datamining pour la détection des constructions problématiques dans les paradis fiscaux.
M. Ahmed Laaouej (PS). - Je prends bonne note de vos réponses. Je me réjouis d'entendre que les choses sont prises en main. Ça nous change. Vous témoignez d'une volonté claire et nette de faire avancer ces dossiers de grande criminalité financière et de grande fraude fiscale. Je vous soutiens totalement dans vos efforts pour coordonner les travaux des différents services concernés par la lutte contre la criminalité financière. Je profite de l'occasion pour souligner que le parquet fédéral, plutôt que de s'en émouvoir, devrait au contraire s'investir un peu plus dans la lutte contre la criminalité financière et la grande fraude fiscale en particulier. Nous aurons sans doute l'occasion de revenir sur ce sujet.