5-927/4 | 5-927/4 |
26 JUIN 2012
La commission a examiné la proposition de résolution qui fait l'objet du présent rapport au cours de ses réunions des 29 mai, 5 et 26 juin 2012.
I. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE MME ZRIHEN, CO-AUTEUR DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Le dixième Fonds européen de développement (FED) qui couvre la période 2008-2013, voit actuellement une révision se préparer du onzième programme.
Le FED est l'instrument principal de l'aide de l'Union européenne (UE) pour la coopération au développement avec les pays d'Afrique, Caraïbe et Pacifique (ACP). De nature extra-budgétaire, cet instrument, qui équivaut à une somme de 22,5 milliards d'euro, est financé par les contributions volontaires des États membres de l'UE et est soumis à ses propres règles financières tout en étant dirigé par un comité spécifique.
Le FED est composé de plusieurs instruments, notamment l'aide non-remboursable, les capitaux à risque et les prêts au secteur privé. Les instruments, tel que le STABEX et le SYSMIN (visant à aider respectivement les secteurs agricole et minier), ont, quant à eux, été supprimés par l'Accord de partenariat de Cotonou en 2000. Cet Accord a également rationalisé les instruments du FED et introduit un système de « programmation glissante » supposant plus de flexibilité et accordant une responsabilité plus importante aux États ACP.
Chaque FED est conclu pour une période de cinq ans et le nouveau programme définit les orientations et les priorités qui seront soutenus pour chaque pays et chaque région. Le dixième FED couvrait la période 2008-2013 (une révision à mi-parcours a d'ores et déjà été entamée). Une enveloppe budgétaire à hauteur de 22,6 milliards d'euros avait alors été arrêtée. Les documents de stratégie par pays et région (DSP et DSR) définissaient les principales priorités et orientations qui devaient être soutenues et financées par le FED pour chaque pays et chaque région. Ils s'accompagnaient d'un plan indicatif national (PIN) pour les uns et régional (PIR) pour les autres.
Il est un fait que le dixième FED présentait en son budget une hausse de 61 % par rapport au Fonds précédent. Le onzième programme doit à son tour prendre en compte la situation de crise dans laquelle nous nous trouvons à l'heure actuelle.
L'esprit de partenariat qui anime l'ensemble du dispositif du FED est tout à fait particulier parce que l'UE avait décidé d'avancer unilatéralement le processus d'élaboration du onzième programme. Par conséquent, différents points fondamentaux du FED n'ont pas pour autant été respectés.
Dans le cadre de l'élaboration du 11e FED (2014-2020), il importe de rappeler que le débat international sur le développement et l'aide reflète un changement de paradigme, passant d'une approche centrée sur la lutte contre la pauvreté à un modèle basé sur la croissance économique inclusive. Il faut examiner de quelle manière ce nouveau concept de croissance inclusive sera traduit en stratégie d'action. Ces tendances ont une influence sur les politiques de l'UE comme le montre le débat sur le nouveau document politique publié en 2011, intitulé « Programme pour le Changement ».
Il faut veiller à ce que les fonds de développement alloués de l'UE bénéficient à tous les partenaires et ne pas uniquement aux intérêts économiques et sécuritaires de l'UE. Il faut insister sur le fait que le Parlement européen, à la demande même de la Commission européenne, a un droit de regard beaucoup plus important à cet égard.
Il faut plaider pour que la société civile locale et les gouvernements ACP soient inclus et écoutés dans le processus de révision du FED, tout comme dans son élaboration initiale. Les droits de la population locale doivent être respectés. Il faut également demander une plus grande transparence du processus d'élaboration du onzième programme de tous les partenaires concernés.
II. DISCUSSION GÉNÉRALE
Mme Temmerman souscrit au contenu et aux objectifs de la proposition de résolution à l'examen.
M. Daems est, lui aussi, favorable à l'idée qui sous-tend la proposition de résolution, mais il voudrait connaître l'avis du ministre des Affaires étrangères quant aux effets que cette résolution pourrait avoir sur la politique du gouvernement.
À cet égard, l'intervenant renvoie au point 1 du dispositif, dans lequel on demande au gouvernement de « plaider pour que l'aide du FED soit de meilleure qualité, orientée vers la promotion de l'égalité homme-femme et des droits humains et vers les secteurs de la santé, de l'éducation et de l'agriculture, et garantisse une allocation adaptée des ressources pour ces secteurs afin de réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) en vue de répondre aux priorités des pays ACP et de favoriser les secteurs cruciaux au développement humain ».
Qu'entend-on par le souhait que « l'aide du FED soit de meilleure qualité » ? Vise-t-on des objectifs qui n'ont pas été atteints ou l'utilisation qu'on fait du budget en consacrant éventuellement trop de moyens aux frais de personnel ?
Dans le point 1, on demande aussi au gouvernement de veiller à ce que l'aide du FED contribue à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes ainsi que les droits de l'homme en général. Or, dans le point 6, on prie le gouvernement de ne pas imposer aux pays ACP de nouvelles conditionnalités économiques et géopolitiques pour pouvoir bénéficier de l'aide. Comment peut-on résoudre cette contradiction ? M. Daems pense que l'on peut quand même imposer des conditions aux pays concernés, notamment en matière de lutte contre le terrorisme.
Dans le point 3 proposé par l'amendement nº 6 de Mmes Zrihen et Arena, on recommande de lutter contre la pauvreté autrement qu'en stimulant la croissance économique. Cela ne revient-il pas à faire marche arrière ? La Commission européenne a pourtant déjà décidé de procéder de la sorte pour lutter contre la pauvreté, et l'intervenant soutient cette méthode.
M. De Bruyn renvoie, lui aussi, aux points 3 et 6 du dispositif qui précisent, d'une part, que l'on ne peut pas lutter contre la pauvreté en misant sur la croissance économique et, d'autre part, qu'il ne faut pas soumettre l'aide accordée aux pays ACP à de nouvelles conditionnalités géopolitiques et économiques. Comment concilier ces deux éléments avec les déclarations politiques que le ministre de la Coopération au Développement a faites le 8 mai 2012, lors des états généraux de la Coopération au développement ? Le ministre a alors clairement indiqué que la croissance économique allait bel et bien de pair avec la lutte contre la pauvreté, et que les questions de la sécurité et de l'immigration avaient également leur importance dans ce domaine. Comment peut-on concilier ces deux visions divergentes ?
III. DISCUSSION DES AMENDEMENTS
Mmes Zrihen et Arena déposent les amendements nos 5 et 6 (doc. Sénat, nº 5-927/3) qui visent à remplacer l'intitulé et l'ensemble de la proposition de résolution, devenue en partie obsolète. Il s'agit à présent de rédiger une proposition de résolution relative au processus d'élaboration du 11e Fonds européen de développement (FED).
La commission décide de prendre ces amendements comme base de ses discussions.
Par conséquent, M. Miller retire ses amendements 1 à 4 (doc. Sénat, nº 5-927/2) à la proposition de résolution originale et dépose ensuite les sous-amendements nos 12 et 13 à l'amendement global nº 6. Mmes Temmerman et Piryns déposent les sous-amendements nos 7 à 11.
Intitulé
Mme Zrihen et Arena déposent l'amendement nº 5 qui tend à remplacer l'intitulé par ce qui suit:
« Proposition de résolution relative à l'élaboration du 11e Fonds européen de développement (FED) »
Mme Zrihen explique que ce nouvel intitulé reflète mieux le contenu de la proposition de résolution.
L'amendement nº 5 est adopté par 7 voix et 2 abstentions.
Considérants
Point A
Mmes Temmerman et Piryns déposent l'amendement nº 7 qui vise à insérer, dans le point A des considérants, les mots « en principe, » devant les mots « sur une base ».
Mme Temmerman indique que cet amendement vise à corriger le texte. Les périodes de financement du FED n'ont pas toujours la même durée. Le 10e FED couvrait une période de six ans, tandis que le 11e FED portera sur une période de sept ans. Il est donc préférable de parler d'une base « en principe » quinquennale, dès lors que cette durée est variable.
L'amendement nº 7 est adopté par 7 voix et 2 abstentions.
Point C
Mmes Temmerman et Piryns déposent l'amendement nº 8 qui vise à compléter le point C des considérants par les mots « pour une période de sept ans ».
Mme Temmerman indique qu'il est important de préciser la période pour laquelle la Commission européenne octroie le budget de 34 milliards d'euros aux États ACP.
L'amendement nº 8 est adopté par 7 voix et 2 abstentions.
Point 6
M. Miller dépose l'amendement nº 12 qui tend à remplacer le point 6 du dispositif proposé par les mots « de défendre une évaluation en profondeur du mécanisme de la tranche incitative gouvernance afin de vérifier son efficacité et son adéquation avec les principes de la déclaration de Paris ».
M. Miller explique que la tranche incitative gouvernance n'a pas été prévue pour favoriser un retour aux conditionnalités. L'approche est incitative, contractuelle et fondée sur le dialogue politique.
Le pays partenaire ne reçoit pas moins d'aide s'il ne répond pas aux objectifs de l'UE; il reçoit plus d'aide s'il développe un plan de gouvernance. Ce mécanisme est le reflet même de l'importance donnée par l'UE à la gouvernance démocratique dans le processus de développement.
Les conclusions du Conseil de 2009 invite les États membres à appliquer cette approche incitative et positive dans leur coopération bilatérale. La Belgique défend en effet l'utilité d'une évaluation de cette approche pour l'améliorer à l'avenir.
L'amendement nº 12 est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.
Point 8
M. Miller dépose l'amendement nº 13 qui vise à supprimer au point 8 du dispositif proposé, les mots « ainsi que sur le processus de réalisation des documents de stratégie par pays ».
M. Miller signale qu'il s'agit d'une revendication du Parlement européen, auquel s'oppose le Conseil car précisément, en vertu de l'appropriation par les pays partenaires et leur parlement, ce n'est pas au parlement des bailleurs de définir les secteurs de programmation.
L'amendement nº 13 est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.
Dispositif
Point 8bis (nouveau)
Mmes Temmerman et Piryns déposent l'amendement nº 9 qui vise à insérer un point 8bis rédigé comme suit: « de veiller à ce que l'UE, conformément à l'article 12 de l'Accord de Cotonou, informe et consulte les gouvernements des États ACP lorsqu'elle prend des mesures affectant, au titre des objectifs de l'Accord de Cotonou, les intérêts des États ACP ».
L'amendement nº 9 est adopté par 7 voix et 2 abstentions.
Point 8ter (nouveau)
Mmes Temmerman et Piryns déposent l'amendement nº 10 qui vise à insérer un point 8ter rédigé comme suit: « de reconnaître et de soutenir le rôle joué par les organisations non gouvernementales au Nord et au Sud en tant qu'acteurs importants du processus et de veiller à ce que celles-ci soient associées au processus décisionnel, à la définition des objectifs stratégiques et à leur mise en uvre ».
Mme Zrihen propose de mettre les amendements 9 et 10 ensemble parce qu'ils ont le même objectif.
Selon Mme Temmerman, les deux amendements sont bien de nature différente: l'amendement nº 9 vise les gouvernements, tandis que l'amendement nº 10 est axé sur les ONG.
Mme Zrihen propose ensuite d'intégrer le point 8ter proposé au point 9 du dispositif.
Mme Temmerman souhaite que les deux points restent distincts.
L'amendement nº 10 est adopté par 7 voix et 2 abstentions.
Point 8quater (nouveau)
Mmes Temmerman et Piryns déposent l'amendement nº 11 visant à insérer dans le dispositif proposé un point 8quater rédigé comme suit: « d'insister sur le rôle de coordination que la Commission européenne doit jouer pour assurer la complémentarité des donateurs et mettre en pratique une division du travail efficace ».
La commission marque son accord sur la proposition de Mme Zrihen de faire du point 8quater, le point 15.
L'amendement nº 11 est adopté par 7 voix et 2 abstentions.
IV. VOTE FINAL
L'amendement nº 6 sous-amendé, et la proposition de résolution ainsi amendée, sont adoptés par 7 voix et 2 abstentions.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 9 membres présents.
Le rapporteur, | Le président, |
Philippe MAHOUX. | Karl VANLOUWE. |
Texte adopté par la commission (voir le doc. Sénat, nº 5-927/5 — 2011/2012).