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1er FÉVRIER 2012
I. INTRODUCTION
La proposition de résolution « en vue de lutter contre l'obsolescence programmée des produits liés à l'énergie » a été déposée au Sénat le 7 octobre 2011 par Mme Targnion et consorts (doc. Sénat, nº 5-1251/1).
La commission des Finances et des Affaires économiques l'a examinée les 24 et 31 janvier et le 1er février 2012.
Lors de la réunion du 24 janvier, la proposition a été examinée une première fois en présence du secrétaire d'État à l'Environnement, à l'Énergie et à la Mobilité, adjoint à la ministre de l'Intérieur.
La discussion s'est poursuivie le 31 janvier 2012 en présence du vice-premier ministre et ministre de l'Économie, des Consommateurs et de la Mer du Nord.
Les votes ont eu lieu le 1er février 2012.
II. EXPOSÉ INTRODUCTIF
L'auteure principale de la proposition de résolution, Mme Targnion, a souligné que le texte de la proposition de résolution a pour objectif de lutter contre l'obsolescence programmée des produits liés à l'énergie.
L'obsolescence programmée peut être définie comme étant le fait de développer puis de commercialiser un produit en déterminant à l'avance le moment de sa péremption.
Toutefois, cette surconsommation programmée provoque des dommages environnementaux et sociaux: le principal impact écologique lié à l'utilisation des produits électriques ou électroniques a trait à leur consommation d'énergie et donc à leur efficacité énergétique. Le coût environnemental qu'entraînent la production et la gestion de ces produits, une fois ceux-ci usagés, est aussi extrêmement élevé. L'intervenante se réfère à cet égard à l'étude française réalisée en 2010 par le Centre national d'information indépendante sur les déchets (CNIID): environ 70 % du total des déchets d'équipements électriques ou électroniques français ont fini incinérés, enfouis ou traités dans des filières informelles.
En outre, l'obsolescence programmée entraîne un coût financier pour les ménages.
Une solution qui permettrait aux consommateurs de choisir en toute connaissance de cause serait d'obliger les fabricants à indiquer la durée de vie des produits sur l'emballage.
De plus, la miniaturisation croissante des circuits intégrés fait qu'il devient de plus en plus difficile de réparer les appareils électriques ou électroniques. Or, la réparation d'un appareil défectueux constitue l'une des conditions de base de l'allongement de sa durée de vie. Il conviendrait donc de décourager au maximum la commercialisation de produits non réparables.
Afin d'éviter que les modifications réglementaires apportées provoquent une hausse significative du prix des produits, une concertation avec les secteurs professionnels concernés est nécessaire.
Au point 1 du dispositif de la proposition de résolution, il est demandé au gouvernement d'adopter, en concertation avec les secteurs concernés, un arrêté royal de lutte contre l'obsolescence programmée des produits liés à l'énergie:
— qui impose l'affichage de la durée de vie de ces produits sur leur emballage;
— qui impose l'affichage d'indications quant au caractère réparable du produit;
— qui s'assure que les modifications apportées n'entraînent pas une hausse significative du prix des produits concernés.
Dans le point 2 du dispositif, il est demandé au gouvernement de favoriser au niveau européen l'adoption d'une directive de lutte contre l'obsolescence programmée des produits liés à l'énergie, en concertation avec les secteurs concernés.
III. DISCUSSION
A. Compte rendu de la réunion du 24 janvier 2012
Si le secrétaire d'État à l'Environnement, à l'Énergie et à la Mobilité a déclaré pouvoir souscrire pleinement à l'objectif poursuivi par le point 2 du dispositif, il accepte plus difficilement la recommandation formulée au point 1, par laquelle le Sénat demande au gouvernement d'adopter un arrêté royal de lutte contre l'obsolescence programmée des produits liés à l'énergie, en concertation avec les secteurs concernés.
Le secrétaire d'État, M. Wathelet, précise que la Belgique ne dispose que d'une marge de manuvre limitée dans ce domaine et que ce dossier doit être traité surtout au niveau européen.
À cet égard, il renvoie au passage suivant de l'accord de gouvernement du 1er décembre 2012: « Le gouvernement plaidera au niveau de l'UE pour uniformiser l'étiquetage des produits et y intégrer des informations harmonisées relatives au cycle de vie des produits, à leur caractère réparable, à leur durée de vie et aux conditions sociales de leur fabrication. » (point 2.6.1. Promouvoir les pouvoirs publics comme moteurs de la transition durable, p. 125)
M. Boogaerts et Mme Maes émettent certaines réserves sur le texte proposé:
— l'affichage obligatoire de la durée de vie ne risque-t-il pas d'être interprété comme une garantie ?
— si les choses évoluent comme prévu dans la proposition de résolution, on risque de disposer de moins de moyens financiers pour la recherche, le développement et l'innovation;
— pour certains produits, le risque est réel qu'une réparation soit irréalisable et impayable.
M. Morael déclare qu'il soutient pleinement les intentions de la proposition de résolution. Le texte à l'examen est un pas dans la bonne direction, mais il ne va pas suffisamment loin. L'intervenant fait référence également aux différentes propositions en la matière qu'Ecolo a déposées à la Chambre des représentants.
Selon M. Siquet, coauteur de la proposition de résolution, le marché ne risque en aucun cas d'être perturbé par l'adoption d'une réglementation belge en la matière, puisque le but est d'imposer les mêmes normes à tous les produits liés à l'énergie, quelle que soit leur origine. Cependant, il insiste sur la nécessité d'entreprendre la démarche au niveau européen.
Mme Targnion, auteure principale, réplique ce qui suit:
— le texte de la proposition de résolution date du 7 octobre 2011, et est donc antérieur à l'élaboration de l'accord de gouvernement;
— le processus décisionnel européen prend beaucoup de temps, et elle souhaite aller de l'avant dès 2012, tout particulièrement en ce qui concerne les produits électriques ou électroniques;
— au niveau belge, nous avons la loi du 21 décembre 1998 relative aux normes de produits ayant « pour but la promotion de modes de production et de consommation durables et la protection de l'environnement et de la santé »; tout ce qu'elle demande au gouvernement belge, c'est d'adopter un arrêté d'exécution pour les produits liés à l'énergie.
B. Compte rendu de la réunion du 31 janvier 2012
Le vice-premier ministre et ministre de l'Économie, des Consommateurs et de la Mer du Nord explique que le sujet traité dans la proposition de résolution concerne une compétence partagée: le département dont l'intervenant a la charge est responsable de la publicité sur l'emballage. Le secrétaire d'État à l'Environnement, à l'Énergie et à la Mobilité est, quant à lui, responsable de la partie qui concerne le produit proprement dit. Le ministre déclare ensuite qu'il n'a pas grand-chose à ajouter au point de vue défendu par le secrétaire d'État, M. Wathelet, dans son plaidoyer pour une approche européenne.
Monsieur Bellot rejoigne les objectifs de la proposition de résolution, mais n'est pas totalement d'accord avec les moyens de le faire. Il s'agit d'un marché très ouvert et l'intervenant estime que la problématique devait être réglée au niveau européen. Il dépose ensuite un amendement nº 1 pour supprimer le point 1 du dispositif de la résolution qui propose d'adopter un arrêté royal.
À côté de cela, le point 2 du dispositif parlant de favoriser l'adoption d'une directive, l'intervenant propose, par un amendement nº 2, de « plaider » pour cette directive au niveau européen le plus rapidement possible. (doc. Sénat, nº 5-1251/2)
Ensuite, Madame Targnion propose d'amender le texte de la proposition et introduit à cette fin les amendements nos 3 et 4 (doc. Sénat, nº 5-1251/2). Le texte de ces amendements demande au gouvernement belge de prendre des mesures qui soutiendraient la mise sur le marché de produits réparables et lutteraient contre l'obsolescence programmée. L'intervenante tient à garder un point premier qui insiste sur la problématique au niveau belge. Un deuxième point demande de plaider au niveau européen pour que l'on impose un affichage sur les produits.
Monsieur Laaouej, rapporteur, rappelle qu'attendre que l'Europe prenne en considération un problème risque de faire perdre de vue qu'il y a aussi une part de responsabilité en terme de volontarisme politique. Il y a une série de domaines où il est possible de prendre des initiatives. L'intervenant comprend que si l'on est trop concret, on risque d'être pris à défaut par rapport à des orientations qui pourraient être prises au niveau européen. Rien n'empêche de demander au gouvernement, en ce qui concerne les objectifs généraux, d'être attentif à ce problème et de prendre les initiatives possibles.
C. Rapport de la réunion du 1er février 2012
Au cours de la réunion du 1er février 2012, les amendements consensuels nos 3 et 4 ont été déposés par les groupes politiques de la majorité (doc. Sénat, nº 5-1251/2).
IV. VOTES
Point 1 du dispositif
L'amendement nº 1 a été retiré.
L'amendement nº 3 a été adopté par 9 voix et 2 abstentions.
Point 2 du dispositif
L'amendement nº 2 a été retiré.
L'amendement nº 4 a été adopté par 9 voix et 2 abstentions.
La proposition de résolution ainsi amendée a été adoptée dans son ensemble par 9 voix et 2 abstentions.
Confiance a été faite au rapporteur pour la présentation d'un rapport oral en séance plénière.
Le rapporteur, | Le président, |
Ahmed LAAOUEJ. | Ludo SANNEN. |