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M. Richard Miller, rapporteur. - La commission des Finances et des Affaires économiques a examiné en sa réunion du 9 novembre 2011 le projet de loi portant approbation de la 14e révision générale des quotes-parts des membres du Fonds monétaire international.
Par les temps qui courent, je voudrais attirer l'attention de nos collègues sur l'importance de ce projet de loi en me référant aux propos du ministre des Finances dans son exposé introductif. Il a en effet précisé que ce projet de loi avait pour objet d'approuver la 14e révision générale des quotes-parts des membres du Fonds monétaire international, d'une part, ainsi que les amendements aux statuts du FMI, d'autre part, comme cela était prévu dans une résolution du 15 décembre 2010.
La 14e révision générale des quotes-parts poursuit, selon le ministre, un double objectif : garantir que le FMI dispose de moyens suffisants en cas de crise mondiale et renforcer la légitimité du FMI en adaptant la répartition des quotes-parts aux nouveaux rapports de forces économiques. Concernant l'ampleur totale de l'augmentation des quotes-parts, il a été convenu de doubler ceux-ci et de les faire ainsi passer d'environ 238,4 milliards de dollars de droits de tirage spéciaux à 476,8 milliards. La quote-part de notre pays sera dès lors portée à 6,410 milliards de droits de tirages spéciaux ce qui représente une augmentation de 1,805 milliard, soit une hausse de 39%. Proportionnellement, la quote-part belge dans le Fonds diminuera et passera de 1,93% à 1,35%.
Par ailleurs, les amendements au statut visent une réforme de l'organisation et du fonctionnement du conseil d'administration et concernent l'élection des administrateurs et de leur suppléants, d'une part, la taille et la composition du conseil d'administration, d'autre part.
L'objectif est d'améliorer la représentation de tous les pays membres au sein du conseil d'administration et d'augmenter ainsi la légitimité des décisions de ce conseil. Étant donné ces éléments, le gouvernement estime que notre pays doit marquer son accord sur l'augmentation de sa quote-part et sur la modification des statuts du Fonds.
Dans la discussion générale, notre excellente collègue, Mme Zrihen, a posé plusieurs questions sur la révision des quotes-parts. Elle a également demandé ce qu'il en était de la position des pays émergents et des pays en transition. Enfin, elle a tenu à rappeler qu'une proposition de résolution déposée en avril 2007 par le groupe socialiste avait pour préoccupation première de souligner que les politiques générales du FMI ne favorisaient pas vraiment le développement le plus équitable possible puisque le Fonds n'a pas été fort présent dans la lutte contre la contagion des crises financières.
M. Daems a insisté sur les modifications qu'allaient entraîner la réforme des statuts et la différence de poids relatif de la Belgique. Notre pays voit son poids relatif diminuer, il a donc interrogé le ministre à ce sujet.
Dans sa réponse, le ministre a indiqué que les modifications proposées ont fait l'objet d'amples discussions tant au conseil d'administration du FMI qu'entre les chefs d'État et de gouvernement et les ministres des Finances des États membres, mais encore durant le G20, au sein du conseil Ecofin de l'Union européenne et dans l'Eurogroupe.
Toutes ces discussions avaient porté sur un point précis : l'équilibre entre les intérêts nationaux puisque qui dit adaptation des quotes-parts dit aussi renforcement de la présence de régions ou d'États au détriment d'autres régions ou États.
Il est exact, comme le ministre l'a déclaré, dans son introduction que la position de la Belgique au FMI va être affaiblie, son poids dans les votes passera de 1,86 à 1,30%. M. le ministre a toutefois précisé que ce résultat des négociations s'aligne sur une résolution adoptée en 2007 par le Sénat. On ne peut pas, a-t-il dit, demander dans une résolution de tenir davantage compte des pays émergents et des pays en transition et ne pas en tirer la conclusion que cela entraîne la diminution de la part des pays plus développés.
Quant aux adaptations des statuts, l'élection des administrateurs et de leurs suppléants, d'une part, et la taille et la composition du Conseil d'administration, d'autre part : jusqu'ici, les statuts du FMI prévoyaient en effet deux sortes d'administrateurs, désignés et élus. Désormais, tous les administrateurs devront être élus.
Toutefois M. Reynders reconnaît qu'un point fait encore l'objet de discussions, à savoir le fait que certains États membres - y compris des pays européens - ne représentent qu'eux-mêmes en raison de leur poids au sein du FMI, tandis que d'autres représentent un groupe de pays, par exemple la Belgique qui dirige une constituante dont les autres membres actuels sont l'Autriche, la Hongrie, la Turquie, la République tchèque, la Biélorussie, le Kosovo, la Slovaquie, le Luxembourg et la Slovénie. Après l'adoption des amendements, les discussions devront se poursuivre notamment avec les Pays-Bas, car si nos deux pays entrent dans une constituante commune, une alternance sera mise en place pour les organes de gestion et le staff de gestion du FMI. La Belgique défendra donc la position de tous les pays membres de la constituante.
Mme Arena a souligné qu'il serait grand temps d'évaluer les conditionnalités des interventions du FMI. Il faudrait avoir un débat et le mener plus loin que les conditionnalités économiques, et prendre aussi en compte les aspects sociaux et environnementaux, d'autant qu'aujourd'hui on voit le Fonds intervenir en Europe. Aux yeux de Mme Arena, il serait intéressant de se poser la question des conditionnalités par rapport à l'Union européenne.
Le texte a été adopté à l'unanimité des onze membres présents.
(Voorzitster: mevrouw Sabine de Bethune.)
Mme Olga Zrihen (PS). - Je voudrais d'abord remercier le rapporteur.
Le projet de loi qui vise à permettre au Fonds monétaire international de disposer de moyens financiers supplémentaires pour faire face aux crises mondiales est essentiel.
Il tend en effet à renforcer le poids des pays en voie de développement au sein de cette institution. Ce pas en avant ne peut toutefois pas nous faire oublier l'ampleur du chemin qu'il reste à parcourir.
À cet égard, le 26 avril 2007, le Sénat avait déjà adopté, à une très large majorité, une proposition de résolution déposée par le groupe PS demandant au gouvernement d'oeuvrer à une réforme profonde de la gouvernance et de la politique du Fonds monétaire international.
Il s'agit, en qui concerne l'organisation interne du FMI, de plaider pour une révision en profondeur du système de droit de vote impliquant la mise en oeuvre effective sur le long terme du principe « un État - une voix » des Nations unies, puisque que le FMI est une institution spécialisée de l'ONU ; l'équité le réclame, même si c'est à notre détriment, comme nous l'a fait remarquer le ministre.
Sur le plan des politiques à mettre en oeuvre, il faudrait appeler le FMI à redéfinir la nature des conditionnalités afin que celles-ci ne constituent pas une entrave à la nécessité pour les États de concevoir leurs propres stratégies de développement. Il convient d'insister auprès du FMI pour que ces conditionnalités n'empêchent pas les pays débiteurs de poursuivre une politique monétaire qui promeut des objectifs de croissance, d'emploi et de protection sociale. On doit enfin inciter le FMI à redéfinir sa politique afin qu'il n'exige plus la privatisation de produits et services d'intérêt essentiel ou même général - eau, santé, éducation - et qu'il n'impose plus la privatisation d'entreprises publiques génératrices de revenus pour les autorités nationales.
À l'heure où la Troïka, composée de représentants du FMI, de la BCE et de la Commission européenne, impose à la population grecque, en échange d'une aide financière, plus de 50 milliards de privatisation et des mesures qui affectent dans l'immédiat le bien-être de millions de Grecs, je veux exprimer ici le souhait, au nom de l'ensemble de mes collègues socialistes, que la position de cette assemblée soit enfin entendue et respectée.
Je rappelle également le point 24 de la résolution qui demande au gouvernement de présenter chaque année au parlement, au plus tard le 30 juin, un rapport incluant notamment les positions adoptées par la Belgique sur les grandes questions débattues au sein du FMI. Le Sénat serait largement intéressé de recevoir ce rapport.
Le groupe socialiste soutiendra bien entendu ce projet de loi.
M. François Bellot (MR). - Le texte qui nous est soumis aujourd'hui est le résultat d'un arbitrage intervenu au niveau international.
La révision générale des quotas et la réforme du conseil d'administration ont fait l'objet de longues discussions pendant plus de deux ans au conseil d'administration du FMI, au Comité monétaire et financier international du FMI, au G20 et dans d'autres forums, plus particulièrement au sein de l'Union européenne.
À la suite de la crise économique et financière, la crainte a été formulée que le FMI ne dispose pas de moyens suffisants pour fournir une aide financière adéquate aux États membres qui la demanderaient.
Parallèlement, plusieurs économies émergentes ont vivement critiqué les rapports internes de pouvoir au sein du FMI. Ces rapports de pouvoir s'expriment, comme vous le savez, dans et via les quotas.
En 2009, le FMI a lui-même reconnu qu'une réforme des quotas s'imposait afin d'améliorer son efficacité et de renforcer sa légitimité. Il a reconnu que la répartition des quotas devait mieux refléter les poids respectifs des États membres du FMI dans l'économie mondiale et laisser ainsi une place plus importante aux économies émergentes.
Au regard de la crise économique et financière que nous traversons, il a été décidé de doubler les quotes-parts actuelles qui passent de 238,4 milliards de droits de tirage spéciaux (DTS) à 476,8 milliards de DTS. Pour la Belgique, ces DTS passent à 6,410 milliards de DTS, soit une hausse de 39%.
Proportionnellement, par contre, à la suite de la nouvelle répartition des quotas et de la place laissée aux économies émergentes à forte croissance, la quote-part belge passera de 1,93% à 1,35%.
Dans le total des votes, le poids de la Belgique, comme de l'ensemble des pays européens industrialisés, diminuera également. Cela mesure bien entendu la diminution de l'activité économique proportionnellement aux pays émergents. Tel est cependant le prix à payer afin de mieux prendre en compte les pays émergents et les pays en transition.
Les amendements des statuts concernent l'élection des administrateurs et de leurs suppléants au sein du conseil d'administration ainsi que la taille et la composition de celui-ci.
L'objectif recherché est d'améliorer la représentativité de tous les pays membres au sein du conseil d'administration afin d'augmenter la légitimité normale de ses décisions.
Vu les éléments qui précèdent, notre groupe estime nécessaire de voter ce projet de loi.
M. Bernard Clerfayt, secrétaire d'État à la Modernisation du Service public fédéral Finances, à la Fiscalité environnementale et à la Lutte contre la fraude fiscale. - J'ajoute qu'il existe un accord unanime sur la question de fond qui est d'accroître la part des pays en développement et de réduire la part correspondante des pays dits « riches », créanciers, dans le FMI.
Un débat parallèle vient s'ajouter, celui de la conditionnalité des aides que le FMI accorde aux pays qui font face à une situation d'urgence. Ce ne sont jamais les pays créanciers qui sont à la base de la crise économique et financière grave qui frappe des pays souverains. Ces derniers ont eu le choix de leur politique économique pendant un certain temps et se retrouvent soudainement dans une situation de crise et demandent l'aide du FMI.
L'aide est nécessaire dans ce cas-là, et elle est accordée. C'est à cela que sert le FMI. Cependant, elles n'est pas accordée sans conditions car l'objectif est qu'elle soit remboursée et qu'elle contribue à permettre au pays de retrouver sa pleine souveraineté économique, financière, sociale et autres.
Il est légitime qu'il y ait un débat démocratique sur les conditions du FMI. Il répondra aux questions que bon nombre se posent. Il suffit d'ailleurs pour s'en rendre compte de se pencher sur les livres du Professeur Stiglitz mettant en cause certaines politiques du FMI.
Un débat devrait naturellement avoir lieu sur la manière de concevoir de bonnes conditionnalités aux programmes d'aide du FMI. Sans l'aide du FMI, ces pays seraient confrontés à une situation économique et financière plus grave encore.
Pour en revenir à la question principale, le simple fait d'accorder plus de poids aux principaux bénéficiaires de ce programme, les pays en développement et les pays émergents, permettra de mener ce débat, au sein du FMI, sur les conditions des programmes d'urgence que le FMI accorde aux pays en crise.
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