5-29

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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 7 JULI 2011 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van mevrouw Christine Defraigne aan de minister van Justitie over «de justitiekosten» (nr. 5-245)

Mme Christine Defraigne (MR). - La Commission de modernisation de l'ordre judiciaire vient de publier un rapport consacré aux frais de justice en matière pénale. Ce rapport fait état de dépenses s'élevant à 107 millions d'euros, montant auquel il faut ajouter 16 millions d'euros de factures impayées en matière de téléphonie.

Nous débattrons tout à l'heure du projet de loi « Salduz », dont le coût est estimé à quelque 30 millions d'euros pour l'assistance judiciaire.

Quelles sont les causes de l'explosion de ces frais et comment comptez-vous y remédier ? Pour la Commission de modernisation, cette explosion s'explique par l'internationalisation de la criminalité et par l'évolution des techniques scientifiques, comme les tests ADN. Elle épingle toutefois aussi des lacunes administratives et une gestion problématique, sans vision globale des frais. Elle cite, par exemple, l'absence de tarification pour la facturation des recommandés mis à charge de la justice par les huissiers de justice. Cette tarification devait être prévue par un arrêté royal qui, semble-t-il, n'a jamais vu le jour.

Cette commission signale aussi le manque de dialogue, en matière d'expertise, entre les mondes judiciaire et scientifique. La communication semble effectivement difficile dans ce domaine.

On ne peut en tout cas que déplorer des lacunes administratives et un manque de contrôle des frais, lesquels croissent de manière anarchique.

Si cette commission a placé beaucoup d'espoir dans le projet FedCom qui modernisera et uniformisera la comptabilité des frais de justice, les questions et les interrogations demeurent néanmoins.

Comment allez-vous tenter de contenir ces dépenses ? Prendrez-vous en compte les pistes lancées par la Commission de modernisation ? Celle-ci a notamment émis une suggestion en matière de commission rogatoire, en proposant de se limiter à la traduction du résumé du dossier au lieu d'assurer sa traduction intégrale, ce qui occasionne parfois des coûts inattendus.

Un problème se pose également en ce qui concerne le paiement des honoraires des experts. On sait que les avocats crient aux portes du palais de justice pour obtenir le paiement d'une aide judiciaire décente. Comment comptez-vous procéder, monsieur le ministre ?

J'ai également lu votre intention de négocier avec les opérateurs de téléphonie, en vue d'obtenir 30% de diminution de ces frais.

Comment faire pour atteindre toutes les diminutions envisagées : téléphonie, internet, conservation de données, frais d'enlèvement et de gardiennage de véhicules, etc. ? Tout cela est problématique.

M. Stefaan De Clerck, ministre de la Justice. - J'ai préparé un exposé sur les frais de justice et un texte sur la mise en oeuvre d'une meilleure gestion de cette problématique. Je vous le ferai parvenir.

On le sait, l'augmentation de ces frais est constante et je crains qu'il en soit de même dans le futur. En effet, la justice est devenue beaucoup plus technique et même technologique. C'est un avantage, dans la mesure où cela accroît son efficacité mais hélas aussi son coût. À cela s'ajoutent les dimensions européenne et internationale beaucoup plus importantes et, par conséquent, une coopération internationale et transfrontalière qui engendre des frais de toutes sortes. De plus, la société est de plus en plus complexe et « juridisée », ce qui génère aussi un accroissement des frais.

Par le passé, nous avons connu des problèmes de budget et de paiement. J'ai tenté de trouver des solutions. L'an dernier, nous avons modifié le budget afin de payer des arriérés qui ont parfois atteint les 25 millions d'euros. Nous avons trouvé des moyens supplémentaires pour y répondre. Pour cette année, un budget d'environ cent millions d'euros est prévu pour rencontrer la totalité de ces frais.

Nous sommes face à une obligation globale ; tout le monde devra coopérer : le ministère public, les juges d'instruction, les magistrats, l'administration. Nous partageons une obligation collective de mieux gérer.

Plusieurs éléments sont d'ordre pratique, par exemple, la comptabilité, le suivi de toutes les factures, le contrôle des prestations, etc. Avant la fin de l'année, nous disposerons d'un nouveau système de comptabilité et de suivi qui nous aidera à détecter les éventuels problèmes.

Le deuxième problème, que je mets aussi un peu de côté, est celui des experts, y compris ceux auxquels il est fait appel dans des affaires civiles et commerciales. C'est un problème important, qu'il s'agisse de la qualité, des risques, du contrôle des experts, des frais d'expertise. C'est aussi un des facteurs qui expliquent les nombreux retards pris par la justice dans son ensemble.

Plusieurs grands chantiers ont toutefois été lancés. Hier, j'ai été très heureux de l'adoption, en commission de la Justice de la Chambre, d'un projet de loi relatif à l'analyse ADN. Il s'agit d'un projet non pas politique, mais technique qui nous permettra de mieux gérer le problème de l'ADN. Il concerne la procédure à suivre, l'enregistrement des données dans une seule banque de données, la manière de consulter le marché pour obtenir des prix plus intéressants que les prix actuels. Nous constatons en effet qu'en Grande-Bretagne, une prestation est facturée quelque 90 euros et que nous payons parfois en Belgique jusqu'à 300 euros pour une même prestation. Il y a donc un décalage énorme entre les prix pratiqués dans les différents pays.

Le prix est bien sûr fonction de la quantité d'analyses effectuées, de l'automatisation, etc. La nouvelle loi nous permettra de mieux gérer l'ensemble des expertises et analyses ADN. J'espère que la Chambre pourra encore adopter ce projet avant les vacances et que le Sénat ne fera pas usage de son droit d'évocation afin que le texte puisse entrer rapidement en application !

Par ailleurs, nous avons préparé un arrêté royal sur les frais des opérateurs. Nous avons réduit de 30% les coûts de la consultation facturés par les opérateurs GSM et de télécommunications.

En conclusion, nous devons avancer en sachant que les prestations techniques sont très importantes. Pour réduire la pression sur le budget, il faut adapter certains tarifs excessifs. Il faut créer un cadre réglementaire, généraliser les exigences de qualité imposées aux prestataires, élargir les moyens de contrôle, assurer un contrôle approfondi du cadre réglementaire qui génère les frais de justice. Il faut aussi sensibiliser et responsabiliser les autorités judiciaires. À cet égard, je renvoie aussi à la réforme du paysage judiciaire lors de laquelle nous avions suggéré de créer des entités davantage responsabilisées et de prévoir la possibilité de donner des enveloppes à certains arrondissements pour que ceux-ci soient plus conscients des frais et des limites budgétaires.

Il s'agit d'un travail de longue haleine pour un futur gouvernement. Je reprendrai tous ces éléments et arguments dans la lettre que vous recevrez dans les prochains jours.

Mme Christine Defraigne (MR). - Je guette le facteur qui va m'apporter votre lettre pleine de bonnes intentions. Vous avez déjà relevé certains éléments, dont la responsabilisation des acteurs de justice et leur gestion propre des frais de justice.

Vous avez également parlé de vérification comptable. À ce propos, je me demande si nous ne devrions pas réaliser un audit précis. Ainsi, face à l'explosion des frais de téléphonie, problème qui n'est pas neuf, ou des frais d'huissiers pour lesquels nous avons en outre à faire face à une difficulté de tarification, je me demande s'il ne faudrait pas procéder à une analyse approfondie des départements plutôt que de se contenter d'un simple suivi comptable.

Une piste est porteuse d'espoir. On a coutume de dire que le droit court après les progrès scientifiques mais, en l'occurrence, c'est l'administration judiciaire qui court après les progrès scientifiques. Elle a peut-être appliqué les techniques dans le désordre. Il serait sans doute possible d'opérer une rationalisation et de définir une méthode de travail, notamment pour les tests ADN.