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12 MAI 2011
I. INTRODUCTION
Le Comité d'avis fédéral chargé de questions européennes a organisé le mardi 3 mai 2011, conjointement avec la commission des Relations extérieures et de la Défense du Sénat et la commission homologue de la Chambre des représentants, une réunion consacrée au Service européen pour l'action extérieure (SEAE) et a entendu à cette occasion le Directeur général administratif de celui-ci, M. David O'Sullivan.
Le présent rapport présente brièvement l'échange de vues qui a eu lieu lors de cette réunion.
II. EXPOSÉ DE M. DAVID O'SULLIVAN, DIRECTEUR GÉNÉRAL ADMINISTRATIF DU SEAE
A. Remarque préliminaire
L'une des ambitions du Traité de Lisbonne est de faire en sorte que l'Union européenne devienne un acteur plus influent dans le monde, ce qui suppose aussi que les moyens nécessaires soient mis à disposition afin de garantir une meilleure défense des intérêts européens sur la scène politique et économique internationale.
Le nouveau cadre institutionnel des relations extérieures de l'Union européenne a été créé dans le but de renforcer la cohérence de l'ensemble des actions entreprises en la matière et de parvenir à organiser et gérer plus efficacement les différents domaines stratégiques et instruments concernés.
Le SEAE est l'instrument le plus adéquat pour atteindre cet objectif, bien que cette question ait fait l'objet de longues discussions avec la Commission européenne et au sein de celle-ci.
B. Présentation du service
La création du SEAE permet à l'Union européenne de rationaliser les différents instruments qui étaient précédemment aux mains de la Commission européenne, du Conseil et d'autres organes et institutions, et de les utiliser plus efficacement dans le cadre de la politique extérieure de l'Union européenne. Le SEAE n'est pas une institution, mais plutôt une structure hybride qui réunit en son sein l'ensemble des connaissances professionnelles, complémentaires, des différents membres du personnel, à savoir les diplomates des États membres, les agents de la Commission européenne et le secrétariat du Conseil. Ce service ne fait pas partie de la Commission européenne ni du Conseil et dispose de sa propre autonomie institutionnelle. Il emploie 9 200 personnes au total: il y a le personnel du siège central à Bruxelles, celui des délégations à l'étranger, sans compter le personnel déployé dans le cadre d'opérations civiles et militaires.
C. Défis administratifs
Le principal problème à régler à l'heure actuelle est de garantir un bon encadrement des services du siège central et des délégations tout en respectant les équilibres nécessaires.
Un autre impératif est de veiller à ce que les différentes composantes du SEAE se forgent une identité commune. Leur regroupement au sein d'un même bâtiment est un élément important à cet égard, car cela permet aux membres du personnel de collaborer de manière efficace et pragmatique au sein d'une structure clairement identifiée. C'est l'ancien bâtiment d'AXA, situé à la Place Schuman, qui a été retenu pour abriter l'ensemble des services en question.
Sur le plan budgétaire, le SEAE est une entité autonome et est donc tenu à ce titre de rendre des comptes devant le Parlement européen. À l'heure actuelle, son budget s'élève à 460 millions d'euros, ce qui offre peu de marge pour les années à venir. En dépit des mesures d'économie proposées, les coûts liés à la création du SEAE demeurent particulièrement élevés, comme c'est le cas généralement lors de la mise en place de toute nouvelle structure.
En ce qui concerne le budget, il convient de faire remarquer que certains domaines, comme l'aide au développement et le commerce, continueront à relever de la responsabilité budgétaire de la Commission européenne.
En ce qui concerne les délégations à l'étranger, le Traité de Lisbonne introduit aussi de nombreux changements. En effet, les délégations font désormais partie du SEAE et leurs missions ont été considérablement étendues. C'est ainsi qu'elles assureront désormais le rôle qui était traditionnellement exercé jusqu'à présent par les ambassades du pays assurant la présidence de l'Union européenne. Cela pourrait créer des problèmes, surtout dans les pays où il est nécessaire d'entretenir de nombreux contacts multilatéraux. Toutefois, on peut dire de manière générale que la transition s'opère sans difficultés et qu'elle constitue véritablement un exemple de collaboration entre les États membres.
On escompte que les obstacles administratifs qui sont propres à la création d'un nouveau service seront levés d'ici un an ou deux.
D. Défis opérationnels
La tâche principale du SEAE consiste à veiller à la cohérence de l'action de l'Union européenne. Il s'agit en l'occurrence de définir l'engagement politique à long terme, de mener des négociations diplomatiques et d'intervenir dans des sujets concrets et précis, comme l'aide au développement, la gestion des conflits civils et militaires et la promotion des droits de l'homme dans le monde.
Les États membres souhaitent surtout qu'il soit possible d'agir plus efficacement, par exemple dans le cadre des relations entre l'Union européenne et ses partenaires stratégiques. La solution pour ce faire est à trouver tant au niveau interne qu'au niveau externe. Sur le plan interne, il faut fixer les priorités stratégiques et prévoir une bonne programmation politique. D'un point de vue externe, il convient de définir et de mettre en uvre la politique générale en collaboration avec la Commission européenne et les États membres. À cet effet, une collaboration de type intergouvernemental et communautaire s'impose, ce qui est particulièrement important lorsqu'il s'agit de réagir à des crises, de prendre des initiatives, de prévenir des conflits ou de consolider des traités commerciaux.
Aux Nations unies, la création du SEAE a posé un problème concret. Alors qu'auparavant, le droit de parole revenait à la présidence tournante (et donc aux divers États membres à tour de rôle), c'est aujourd'hui le SEAE qui parle au nom de l'Union européenne. De ce fait, l'Union européenne ne dispose plus que d'un statut d'observateur, avec toutes les conséquences que cela comporte en ce qui concerne le temps de parole, le moment de l'intervention, etc. Une résolution a été déposée à l'assemblée générale des Nations unies en vue de l'obtention d'un statut spécial. Dans un premier temps, cette résolution n'a pas été retenue, mais elle sera à nouveau déposée prochainement. Cette fois, il y a bon espoir qu'elle puisse recueillir un soutien suffisant.
E. uvrer à des relations extérieures plus ambitieuses
L'objectif final est évidemment de développer des relations durables avec les partenaires extérieurs, tant au niveau bilatéral que sur le plan multilatéral. Depuis la naissance de l'Union européenne, plus de 700 accords ont déjà été conclus avec des pays tiers, des groupes régionaux et des institutions multilatérales.
Au cours de ces dernières années, l'Union européenne a également développé un énorme réseau dont la densité est la preuve du rôle central que l'Union joue aujourd'hui dans le monde. Actuellement, des négociations sont en cours notamment avec la Russie, l'Ukraine, l'Inde, etc.
L'Union européenne a besoin d'instruments adaptés aux capacités et aux besoins de ses partenaires. Il faut aussi tenir compte des nouveaux défis de la politique mondiale et traduire le plus efficacement possible les principes et les valeurs de l'Europe par des actions et des objectifs concrets.
F. L'avenir et les priorités
La Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité a défini trois priorités pour le SEAE:
— la politique de voisinage, motivée non seulement par le souci d'autrui mais également par la prise de conscience du fait que les pays concernés influencent eux aussi la qualité de vie au sein de l'Union européenne, comme l'ont montré les événements récents en Afrique du Nord;
— les relations avec les partenaires stratégiques. La promotion des droits de l'homme est d'une importance capitale à cet égard;
— la gestion des conflits, avec une capacité renforcée de prévention des crises ou, du moins, d'atténuation de leur impact.
L'Union européenne entend s'engager à agir préventivement, dans la mesure du possible, contre d'éventuelles atteintes à la stabilité et à la sécurité. À cet égard, il faudra mettre au point une stratégie européenne de sécurité claire et forte.
Il faudra évidemment toujours tenir compte de la bonne (ou mauvaise) volonté des États membres à collaborer à cette stratégie. De nombreux États membres considèrent toujours la politique étrangère comme une responsabilité strictement nationale. Il faudra dès lors encore un certain temps avant que tous les États membres soient sur la même longueur d'onde et que de véritables avancées puissent être enregistrées.
G. Défis sur la scène mondiale
L'Union européenne doit retrouver l'élan qui constituait le moteur de son processus d'intégration. Il faut en outre redéfinir le concept de la gouvernance globale. Enfin, un projet de réforme ambitieux et réaliste est indispensable.
Une contribution européenne plus cohérente aux débats fondamentaux est également nécessaire, par exemple en matière de mondialisation (au sein du G20 notamment) ou de lutte contre le changement climatique (négociations de Cancún).
III. ÉCHANGE DE VUES
A. Relations extérieures
Mme Daphné Dumery (Chambre, N-VA) se demande comment se déroulent les relations entre les États-Unis et le SEAE. Les États-Unis sont en effet le principal partenaire de l'Union dans le domaine de la sécurité, et on connaît toute l'importance à cet égard de relations de travail fructueuses et d'une bonne entente.
M. David O'Sullivan, Directeur général administratif du SEAE, répond que la collaboration entre les États-Unis et l'Union européenne a toujours été excellente. Le fait que l'Europe soit capable aujourd'hui d'adopter une position claire et uniforme ne peut qu'être accueilli positivement. Il est évident que les bonnes relations avec les différents États membres de l'UE se poursuivent elles aussi et peuvent de temps à autre être prioritaires.
Mme Juliette Boulet (Chambre, Écolo-Groen!) demande s'il y a eu, dans le cadre des Nations unies, des contacts avec d'autres organisations régionales à la suite du dépôt de la résolution demandant que l'Union européenne et le SEAE disposent d'un statut spécial. Est-il possible que ces organisations formulent à leur tour la même demande à l'avenir ?
L'intervenante estime par ailleurs que si l'Union européenne veut continuer à jouer un rôle sur la scène internationale à côté de pays comme la Chine et le Brésil, elle devra collaborer avec d'autres acteurs. Ne serait-il pas opportun d'établir des contacts avec d'autres organisations régionales ?
Enfin, l'intervenante se demande ce qu'il en est de l'idée de créer une force d'intervention de l'Union européenne, composée de casques blancs. L'existence d'une telle force ne serait-elle pas susceptible d'améliorer l'efficacité de l'aide européenne lors de la gestion d'une crise, comme celle d'Haïti, par exemple ?
M. David O'Sullivan répond que le fonctionnement à l'intérieur des Nations unies fera l'objet d'une nouvelle évaluation l'année prochaine. L'Union européenne est occupée à rechercher des paramètres qui lui permettront de se distinguer d'autres organisations régionales. Il ne faut pas oublier que l'Union européenne n'est pas une institution internationale, comme le Conseil de l'Europe par exemple, mais qu'elle a une structure hybride qui présente de nombreuses similitudes avec la structure d'un État.
S'agissant de l'idée de créer une force d'intervention composée de casques blancs, il ne faut pas perdre de vue que le but de toute aide humanitaire est de venir en aide à des personnes. Il serait évidemment très positif que les opérations menées par l'Union européenne acquièrent davantage de visibilité, mais il y a des situations où l'efficacité de l'opération pourrait s'en trouver compromise. C'est le cas en Côte d'Ivoire, où l'Union européenne est perçue comme l'un des acteurs impliqués. Une plus grande visibilité ne ferait sans doute que compliquer les choses sur le plan de l'aide humanitaire.
B. Défis administratifs
M. François-Xavier de Donnea (Chambre, MR), président de la commission des Relations extérieures de la Chambre des représentants, fait remarquer que le SEAE se voit attribuer des missions aussi bien par la Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité que par le président de la Commission européenne, le président du Conseil européen et d'autres membres de la Commission européenne. Comment faire pour mener toutes ces missions à bien et éviter les conflits ?
L'intervenant demande par ailleurs quelle est l'autonomie réelle du SEAE vis-à-vis, par exemple, du Commissaire européen au Développement, M. Andris Piebalgs. Comment gère-t-on les éventuels conflits et des procédures existent-elles dans ce domaine ?
M. David O'Sullivan répond que les missions confiées au SEAE ne sont pas aussi souvent contradictoires qu'on le croit. De surcroît, il faut savoir qu'il y a plusieurs personnes responsables des contacts avec les différents services et institutions. Jusqu'à présent, il n'y a pas eu de problèmes, car l'on s'efforce de travailler autant que possible de manière interactive.
De plus, une certaine répartition des tâches s'est mise en place. Les services de la Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité s'emploient surtout à élaborer la politique générale tandis que les unités du SEAE qui dépendent davantage de la Commission européenne se consacrent plutôt à la mise en uvre concrète de celle-ci. Dans la pratique, il faudra une collaboration de part et d'autre. Actuellement, on s'attèle à la mise au point de systèmes destinés à faciliter la coordination et la consultation.
Concernant la remarque relative au commissaire européen Piebalgs, il est clair que celui-ci joue également un rôle important dans l'élaboration de la politique générale, même si ses services relèvent toujours actuellement de la politique étrangère européenne dans sa globalité. On peut considérer que sa fonction est parfaitement complémentaire à celle de la Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, celle-ci pouvant en effet être difficilement tenue pour responsable de la politique étrangère globale de l'Union européenne.
Mme Juliette Boulet (Chambre, Écolo-Groen!) fait remarquer que la visite de la commission des Relations extérieures de la Chambre des représentants aux Nations unies a été organisée par la Représentation permanente de la Belgique auprès des Nations unies. Comment les choses seront-elles réglées à l'avenir ? De nombreux changements sont en effet prévus.
D'autre part, pour quand peut-on s'attendre à une évaluation de la collaboration entre les différents services du SEAE ? Et qu'en est-il du contrôle démocratique du SEAE ? Est-il exercé par le Parlement européen ?
Enfin, il y a encore une question au sujet du budget. La situation financière et économique actuelle n'est pas de nature à favoriser le déblocage de fonds supplémentaires pour le SEAE et son fonctionnement, ce qui paraît pourtant nécessaire. Le SEAE est-il bien en mesure d'accomplir correctement les missions qui sont les siennes à l'heure actuelle, sans parler des compétences supplémentaires qui pourraient lui être attribuées à l'avenir ?
M. David O'Sullivan répond qu'il faut éviter que des États membres exposent un point de vue qui diverge d'une vision européenne commune, car ce serait néfaste pour la crédibilité européenne. En l'état actuel des choses, ce principe est généralement accepté.
Auparavant, la collaboration entre les différents services, instances et institutions était réglée par la présidence tournante. Désormais, c'est le SEAE qui devra s'en charger, mais il pourra utiliser les mêmes automatismes et les mêmes dispositifs.
Il convient cependant d'ajouter que dans certaines circonstances exceptionnelles, il sera possible de ne pas adopter de position européenne commune. Dans une situation sensible et politiquement complexe, l'Union européenne préférera ne pas prendre position et laisser les différents États membres s'exprimer.
Le SEAE ne souffre absolument pas d'un déficit démocratique. La Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité donne régulièrement des explications tant en séance plénière qu'au sein des diverses commissions du Parlement européen. Il y a en outre le contrôle budgétaire classique exercé par le Parlement européen. Enfin, le Conseil joue également un rôle majeur dans la détermination des orientations du SEAE.
M. Philippe Mahoux (Sénat, PS), président du Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes, aimerait savoir quelles règles président à l'adoption d'une position au nom de l'Union européenne au sein des représentations dans des pays tiers. Existe-t-il à cet effet une structure dans le cadre de laquelle les États membres peuvent aussi jouer un rôle à titre individuel ?
On a dit que le SEAE ne fonctionnait pas selon la méthode communautaire ni selon la méthode intergouvernementale. Il faut donc toujours dégager un consensus entre les États membres. Est-ce réaliste ? Et qu'advient-il si un point de vue européen diffère d'une position adoptée par un ou plusieurs États membres ?
Enfin, la question se pose de savoir si les délégations européennes à l'étranger auront des compétences consulaires, par exemple dans le cadre de l'octroi d'une aide au citoyen européen.
M. David O'Sullivan répond qu'il est difficile de recourir à la méthode communautaire dans le cadre de la politique étrangère de l'Union européenne. On fonctionne actuellement selon un système de consensus, mais on est suffisamment pragmatique pour éviter des conflits. Si des décisions étaient prises à la majorité qualifiée, cela impliquerait une contrainte inacceptable pour certains États membres. Des événements récents tels que ceux qui se sont déroulés en Libye, par exemple, montrent que cela n'est pas une option. Dans le futur, il faudra toutefois en arriver à une nouvelle méthode sui generis en matière de politique étrangère.
L'exécution de tâches consulaires requiert une certaine expertise dont le SEAE ne dispose pas encore actuellement. Les restrictions budgétaires ne facilitent pas non plus le développement d'une telle expertise. Toutefois, rien n'est exclu à l'avenir.
M. Jacky Morael (Sénat, Écolo-Groen !) affirme que la situation et la position de l'Union européenne aux Nations unies sont à la fois très complexes et extrêmement importantes. C'est le droit de parole de l'Union européenne qui est en jeu. Y a-t-il, à cet égard, des contacts (in)formels par exemple avec la représentation de la France, qui est membre permanent du Conseil de sécurité ? Ce pays agit-il seul dans certains cas ou y a-t-il une coordination avec la représentation européenne ?
M. David O'Sullivan répond que la collaboration est bonne non seulement avec la France mais aussi avec d'autres pays européens. Il y a actuellement beaucoup de bonne volonté; les choses peuvent se compliquer dans certaines situations exceptionnelles, mais l'on parvient généralement à adopter des positions communes.
M. Karl Vanlouwe (Sénat, N-VA), président de la commission des Relations extérieures et de la Défense du Sénat, souligne que, si le SEAE est entré en fonction cette année, cela ne signifie pas encore qu'il soit opérationnel à 100 %. Quand le sera-t-il ?
Il s'interroge par ailleurs sur les relations entre le SEAE et la diplomatie nationale lors d'événements qui, comme ceux qui se sont déroulés en Afrique du Nord, nécessitent le rapatriement de compatriotes. Cette question relèvera-t-elle entièrement de la compétence de l'Union européenne à l'avenir ?
M. David O'Sullivan répond que son service sera opérationnel à 100 % en juin 2012. Quoi qu'il en soit, il faudra encore veiller attentivement à la cohésion de ce service pendant 3 ou 4 ans. Le fonctionnement du service ne pourra faire l'objet d'une véritable évaluation qu'après 10 ans.
Le SEAE ne remplacera en aucun cas la diplomatie nationale. Cela n'est nullement à l'ordre du jour. Par contre, il faut apporter de la cohérence au sein de l'Union européenne elle-même et dans son action extérieure. Il est évident qu'une collaboration peut toujours être envisagée lorsque cela facilite les choses. On pourra par exemple envisager d'installer, à l'avenir, une Maison européenne là où, sans cela, certains États membres ne disposeraient d'aucune représentation diplomatique.
Les présidents-rapporteurs, |
Karl VANLOUWE (S) François-Xavier de DONNEA (CH) |
Philippe MAHOUX (S) André FLAHAUT (CH) |
LE SERVICE EUROPÉEN POUR L'ACTION EXTÉRIEURE
Le traité de Lisbonne prévoit que la Haute représentante pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité s'appuie sur un Service européen pour l'action extérieure. Il s'agira d'un véritable service diplomatique européen, composé de fonctionnaires européens et de diplomates nationaux. La Présidence belge veillera à ce que les instruments juridiques nécessaires pour établir ce service, ainsi que les mesures concrètes pour sa mise en place, soient rapidement adoptés, afin de le rendre pleinement opérationnel dans les meilleurs délais possibles.
L'action extérieure de l'Union suite au traité de Lisbonne
Le traité de Lisbonne a introduit des réformes très importantes afin de renforcer l'action extérieure de l'Union européenne. En effet, il est essentiel que le pouvoir d'attraction de l'Union comme organisation régionale la plus importante au monde et comme acteur de paix et de prospérité reste intact.
Certes, les différences entre les règles et procédures applicables à la politique extérieure et de sécurité commune (PESC) d'une part, et celles applicables aux autres politiques de l'Union d'autre part, ont été en partie maintenues. Néanmoins, le traité a prévu les mécanismes nécessaires afin d'éviter que ces différences aient des conséquences néfastes sur la conduite de l'action extérieure de l'Union.
En effet, l'objectif principal de ces réformes institutionnelles est d'assurer à la fois la cohérence entre les différents domaines de l'action extérieure de l'Union (notamment entre la politique extérieure et de sécurité, la politique commerciale et la politique de développement) et la cohérence entre ceux-ci et les politiques internes de l'Union (telles que la politique agricole, la politique des transports, le marché intérieur, etc.).
Cet objectif s'est traduit en particulier par des règles claires sur la représentation de l'Union et la négociation internationale au nom de l'Union.
— Au niveau des chefs d'État et de gouvernement, l'Union est représentée par le président de la Commission ou, en matière de PESC, par le président du Conseil européen.
— Dans tous les autres contacts au niveau politique et pour la négociation d'accords internationaux, l'Union est représentée par la Commission européenne, sauf dans le domaine de la PESC, où l'Union est représentée par la Haute représentante pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité (Haute représentante). Toutefois, comme cette dernière est également vice-présidente de la Commission chargée des relations extérieures et en même temps présidente du Conseil Affaires étrangères, elle pourra incarner l'unicité de la représentation externe de l'Union et en assurer la continuité et l'efficacité.
— Dans les pays tiers et auprès des organisations internationales, la représentation de l'Union sera assurée par des délégations de l'Union, qui sont toutes placées sous l'autorité de la Haute représentante.
Le Service européen pour l'action extérieure
Pour permettre à la Haute représentante d'accomplir ses diverses tâches, le traité a prévu la création d'un Service européen pour l'action extérieure (SEAE), un véritable service diplomatique européen, qui devra travailler en collaboration avec les services diplomatiques des États membres.
Le SEAE sera notamment responsable de l'élaboration des propositions que la Haute représentante fera au Conseil en matière de PESC, et du suivi des décisions du Conseil. De même, la Haute représentante s'appuiera sur ce service pour les tâches qui lui incombent en tant que vice-présidente de la Commission, responsable pour les relations extérieures, notamment pour ce qui concerne la représentation et les négociations internationales, ou encore pour l'élaboration de la programmation des instruments financiers de l'Union orientés vers les pays tiers.
Les délégations de l'Union dans les pays tiers et auprès des organisations internationales feront partie du SEAE.
Composé de fonctionnaires européens et de diplomates nationaux
Conformément au traité de Lisbonne, le Service européen pour l'action extérieure sera composé de fonctionnaires des services compétents du secrétariat général du Conseil et de la Commission ainsi que du personnel détaché des services diplomatiques nationaux. Ainsi, le traité ne prévoit pas uniquement que les différents services des institutions européennes qui étaient chargés jusqu'ici des relations extérieures devront être intégrés dans un seul service, mais y ajoute une troisième composante, également essentielle: les diplomates nationaux.
En effet, des diplomates nationaux seront détachés quelques années pour travailler dans le SEAE, soit à Bruxelles, soit dans une des délégations de l'Union, avant de poursuivre leur carrière dans les services diplomatiques nationaux et d'être remplacés au SEAE par d'autres diplomates nationaux. Il est envisagé que les diplomates nationaux forment ainsi à terme un tiers des membres du SEAE.
Une telle composition est une innovation qui renforcera certainement l'action extérieure de l'Union. Il sera en effet important pour le SEAE de pouvoir bénéficier de l'expertise et de la compétence des différents services diplomatiques nationaux. Mais il sera également important pour les services diplomatiques nationaux de compter parmi leur personnel des diplomates avec une connaissance approfondie et concrète de l'action extérieure de l'Union et une expérience professionnelle avec des collègues provenant des autres États membres ou des institutions européennes.
La mise en place du Service européen pour l'action extérieure
La mise en place du SEAE est une opération de grande complexité, qu'il faudra néanmoins faire aboutir aussi vite que possible, afin de garantir la cohérence de l'action extérieure de l'Union.
Une première étape sera l'adoption unanime par le Conseil d'une décision fixant l'organisation et le fonctionnement de ce service, sur proposition de la Haute représentante, et après consultation du Parlement européen et approbation de la Commission. La mise en place du SEAE nécessite également des modifications du règlement financier de l'Union et du statut des fonctionnaires européens, qui devront intervenir par la procédure législative ordinaire. La Présidence belge fera tout ce qui est en son pouvoir pour que ces instruments juridiques soient adoptés dans les meilleurs délais.
Ensuite viendra la phase de la mise en place effective du SEAE. Celle-ci relèvera en premier lieu de la Haute représentante, qui devra prendre les décisions concrètes sur l'organisation et le fonctionnement du service, mais requerra également une étroite collaboration entre la Haute représentante, les services du Conseil et de la Commission et les services diplomatiques nationaux. La Présidence belge soutiendra la Haute représentante afin que le Service européen pour l'action extérieure puisse être pleinement opérationnel dans les meilleurs délais possibles.