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De voorzitter. - De heer Carl Devlies, staatssecretaris voor de Coördinatie van de Fraudebestrijding en staatssecretaris, toegevoegd aan de minister van Justitie, antwoordt.
Mme Marie Arena (PS). - Le collège pour la lutte contre la fraude fiscale et sociale créé par l'arrêté royal du 29 avril 2008 a rédigé une note finale le 3 décembre 2010 reprenant les conclusions du groupe de travail « Una Via ». Ce document met en lumière, entre autres, les causes qui entravent actuellement l'efficacité des poursuites en matière de grande fraude fiscale.
Je mentionnerai ce qui relève des compétences du ministre de la Justice puisque j'ai posé mes questions portant sur les compétences de la police dans ce domaine la semaine dernière, et que Mme Turtelboom m'a apporté certaines réponses, surtout en matière de lutte contre la fraude à la TVA.
En ce qui concerne les enquêtes, le collège attire l'attention sur le manque de traitement spécifique des dossiers fiscaux ; le manque de corps d'enquêteurs spécifiques pour les dossiers fiscaux, si ce n'est les assistants fiscaux mis par le SPF Finances à la disposition de la police fédérale et des parquets ; les lenteurs importantes avant de pouvoir ouvrir un dossier et le fait qu'il faut souvent plusieurs années pour le boucler.
S'agissant des poursuites, le collège signale qu'il n'y a aucune obligation légale d'assumer réellement la fonction spécifique de substitut du procureur du Roi spécialisé en matière fiscale ou de ne traiter que de dossiers fiscaux ; l'absence de formation continuée systématique alors que la matière traitée est très technique et évolutive ; le dépassement fréquent des délais raisonnables dû au manque de moyens et qu'il s'agit finalement d'une réelle incitation à la fraude étant donné l'absence de sanction in fine. Je crois cependant que ce que nous avons décidé en matière de transaction répond en partie à cette préoccupation.
Au sujet de l'instruction, le collège formule les constitutions suivantes. Le code judiciaire ne connaît pas la fonction de juge d'instruction spécialisé en matière fiscale alors que ce sont des dossiers très complexes qui sont mis à l'instruction pour que des perquisitions soient effectuées. Aucune compétence particulière en droit fiscal n'est requise dans le chef du juge d'instruction pour traiter les dossiers fiscaux complexes. Les dossiers fiscaux sont généralement noyés dans des dossiers de droit commun. Certains juges d'instruction ne comprennent parfois pas les mécanismes sophistiqués mis en oeuvre dans les dossiers de fraude fiscale qu'ils doivent traiter. Il n'y a pas de cadre de fonctionnaires du SPF finances mis à disposition des juges d'instruction et j'en passe. Les mêmes griefs sont formulés à l'égard de la juridiction d'instruction.
En ce qui concerne la juridiction du fond, le collège pointe qu'il apparaît que des juges ou des conseillers suppléants siègent pour juger des faits similaires à des mécanismes frauduleux visés dans des dossiers où ils interviennent comme avocat conseil, ce qui pose problème dans le traitement de ces dossiers.
De tout cela - je cite le collège -, « il en résulte des délais très longs avant qu'un dossier n'aboutisse à une décision définitive et la prescription ou le dépassement du délai raisonnable a pour effet qu'il n'y a pas de sanction pénale, ce qui donne un sentiment d'impunité aux auteurs d'infractions fiscales voire suscite un attrait pour ce type de criminalité. »
La plupart de ces constats avaient été formulés au printemps 2009 dans les 108 recommandations de la commission d'enquête « lutte contre la grande fraude fiscale » et que pour une bonne partie des faiblesses de notre système stigmatisées par le collège, il ne s'agit pas de modifications de textes législatifs à mettre en oeuvre mais de priorités à définir et d'organisation et de moyens à affecter aux services concernés et demandeurs.
L'avocate Martine Bourmanne a dit récemment : « Au nom du principe d'égalité des délinquants devant la loi, on ne peut accepter l'impunité de la criminalité en col blanc ». Or à la lecture du rapport du collège il apparaît que le chemin à parcourir est encore long puisque ses auteurs constatent « deux poids deux mesures », à savoir une criminalité de pauvres et une criminalité de riches.
Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous me dire ce qui a été mis concrètement en oeuvre depuis le printemps 2009 pour lutter contre la grande fraude fiscale et remédier aux faiblesses détectées par le collège ?
M. Carl Devlies, secrétaire d'État à la Coordination de la lutte contre la fraude et secrétaire d'État, adjoint au ministre de la Justice. - Je lis la réponse du ministre.
Vous citez des passages de la note « Una Via », plus précisément de son introduction, où sont évoquées les causes qui entravent actuellement l'efficacité des poursuites pénales fiscales. En effet, pour pouvoir apporter une solution à un problème, il faut d'abord en connaître les causes - c'est le point de départ de la note.
Le groupe de travail « Una Via » composé de quatre experts qui représentaient les plus importants acteurs de la justice, du fisc et de la police dans la lutte contre la fraude fiscale grave et organisée, a été mis en place à la suite d'une décision du Conseil des ministres du 30 octobre 2009, afin d'examiner comment la recommandation numéro 7 de la commission d'enquête parlementaire sur les grands dossiers de fraude fiscale pourrait être mise en oeuvre et de formuler au pouvoir politique une proposition de méthode pragmatique et juridiquement correcte. Le but est de s'attaquer de manière effective et efficace aux dossiers de fraude fiscale grave et organisée.
Le Collège pour la lutte contre la fraude fiscale et sociale au sein duquel le groupe de travail « Una Via » a été mis en place est chargé, entre autres, d'élaborer des projets de plans d'action annuels - on en compte deux jusqu'à présent - et de veiller à leur exécution coordonnée.
C'est à l'initiative des membres du Collège des procureurs généraux, qui sont membres du Collège pour la lutte contre la fraude fiscale et sociale, que certains points d'action ont été repris dans les plans d'action.
Le point d'action 30 du plan d'action 2008-2009 prévoit la mise en place d'un cadre restreint de substituts spécialisés dans les affaires commerciales, à l'image des substituts spécialisés dans les affaires fiscales. En effet, bien que l'article 58bis, 1er, du Code judiciaire prévoit la désignation de substituts spécialisés dans les affaires commerciales et que l'article 151 du même code prévoit que le procureur du Roi est assisté par un ou plusieurs substituts spécialisés dans les affaires commerciales, aucun cadre n'avait été mis en place pour de tels substituts.
Entre-temps, en exécution de ce point d'action, un projet de décision a été élaboré et l'avis du Conseil Supérieur de la Justice a été obtenu.
Le point d'action 31 du plan d'action 2008-2009 vise à créer la possibilité de désigner des juges d'instruction spécialisés en fraude fiscale et sociale.
Il existe déjà des juges d'instruction spécialisés en terrorisme et certains substituts sont également spécialisés en affaires fiscales. Cependant, la loi ne prévoit pas de juges d'instruction spécialisés en fraude fiscale et sociale.
Dans certains grands arrondissements, l'attribution de nouvelles affaires est organisée de manière que certains juges d'instruction se voient attribuer, en priorité, des affaires de fraude fiscale et sociale. Cela ne se fait que sur une base volontaire, de manière non systématique, et peut donc être remis en cause, en fonction des besoins ou du point de vue du chef de corps, quant à la nécessité de disposer ou non de juges d'instruction spécialisés en fraude fiscale et sociale.
À l'image des règles en matière de terrorisme, le premier président de la Cour d'Appel devrait être tenu par la loi de désigner un ou plusieurs juges d'instruction pour traiter exclusivement ou principalement les dossiers de fraude fiscale et sociale.
Après concertation avec les doyens des juges d'instruction, un texte modifiant l'article 79 du Code judiciaire a été préparé par le service du droit judiciaire.
Le point d'action 27 du plan d'action 2009-2010 visait la création d'un cadre spécifique de fonctionnaires du SPF Finances qui peuvent être détachés auprès des juges d'instruction, à l'image du cadre mis en place par l'arrêté royal du 21 janvier pour la mise de fonctionnaires fiscaux à la disposition des procureurs du Roi et des auditeurs du travail.
Les projets ont été suspendus pour pouvoir être intégrés dans le projet final de réforme du paysage judiciaire. La concertation Atomium et la poursuite de la concertation entre les partis du gouvernement en affaires courantes ont finalement débouché sur l'accord politique relatif à la réforme du paysage judiciaire, obtenu par le ministre de la justice en Conseil des ministres restreint. Toutefois, étant donné la chute prématurée du gouvernement fédéral, le ministre de la Justice n'a pu présenter au Parlement cet accord qui est donc resté inexécuté à ce jour.
Malgré la situation politique, on constate aujourd'hui sur le terrain que certains groupements de coopération existent au sein du ministère public et y ont été développés. Ils peuvent être considérés comme des projets pilotes en la matière.
Cependant, en l'absence d'un nouveau gouvernement fédéral et d'un accord de gouvernement bien défini et vu les propositions très différentes qui ont déjà été mises sur la table, on ne sait pas encore exactement dans quelle mesure l'accord obtenu pourra être exécuté. En situation d'affaires courantes, le gouvernement ne peut pas prendre de nouvelle initiative politique telle que l'instauration d'une nouvelle catégorie de juges d'instruction spécialisés, qui implique une extension de l'article 79 du Code judiciaire ou la création d'un cadre de substituts spécialisés en affaires commerciales, conformément à l'article 58bis, 1er du même code.
Mme Marie Arena (PS). - Donc, en résumé, depuis 2008, un certain nombre de projets sont sur la table. Ils répondent à la fois aux recommandations formulées par les membres de la Chambre et aux remarques émises par le Collège en matière de lutte contre la fraude. Par ailleurs, le gouvernement étant actuellement en affaires courantes, il ne peut mettre en application un certain nombre de textes, surtout en ce qui concerne les modifications légales. Dans cette situation d'affaires courantes, le parlement aura peut-être un pouvoir d'initiative, comme cela a été le cas dans le cadre du secret bancaire, par exemple. Un travail en commun pourra peut-être être réalisé, avec l'expertise que vous avez dégagée dans les différents groupes de travail et les propositions que nous pourrons formuler au niveau des Chambres en la matière.
M. Carl Devlies, secrétaire d'État à la Coordination de la lutte contre la fraude et secrétaire d'État, adjoint au ministre de la Justice. - Le travail préparatoire a été réalisé et les propositions ont été intégrées dans la réforme globale. Si des initiatives étaient prises au niveau du parlement, je m'en réjouirais.
(De vergadering wordt gesloten om 16.50 uur.)