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Mme Dominique Tilmans (MR). - La garde de médecine générale est toujours au centre de mes préoccupations. Il est indéniable qu'elle est au coeur de la problématique de la pénurie et de l'attractivité de la médecine générale. Je vous ai déjà beaucoup interrogée sur le sujet et m'abstiendrai donc de longs préambules.
Le Forum des associations de généralistes (FAG) a récemment proposé que des mesures exceptionnelles soient appliquées afin d'assurer une garde correcte pour les médecins généralistes et leurs patients. L'une de ces mesures consisterait à renvoyer les patients aux urgences, en priorité pendant la nuit de 21 heures à 8 heures.
Cette proposition va incontestablement dans le sens de l'idée de la « nuit noire », souhaitée par certains médecins, rejetée par d'autres.
Madame la ministre, j'ai plusieurs questions à vous poser. Ce type de « mesure exceptionnelle » a-t-il déjà été étudié par vos services ? Envisagez-vous d'y recourir ? Cette mesure est-elle concrètement applicable ? Les services d'urgence des hôpitaux, qui connaissent une pénurie de médecins urgentistes et des gardes répétitives, pourraient-ils supporter un tel surcroît de travail ?
Le Forum des associations de généralistes a publié récemment une note de synthèse proposant douze réformes en vue remédier aux conditions difficiles, voire intenables, dans lesquelles une proportion croissante de médecins généralistes doivent pratiquer. Parmi celles-ci, il est entre autres soutenu qu'une réforme et une rénovation en profondeur de la garde pourraient « attirer des médecins généralistes venus d'autres cercles, ou inciter des généralistes du cercle à prester plus qu'à leur tour ».
Madame la ministre, dans cette optique et face à la pénurie de médecins généralistes à laquelle nous sommes confrontés dans certaines régions rurales, une professionnalisation de la garde pourrait voir le jour et des médecins gardistes pourraient apparaître dans le paysage médical belge. Certains jeunes médecins sont intéressés par cette profession.
Cette possibilité a-t-elle ou va-t-elle être étudiée par vos services ? Serait-il envisageable de créer un statut réservé uniquement aux médecins gardistes ?
Mme Laurette Onkelinx, vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, chargée de l'Intégration sociale. - Je remettrai une note à Mme Tilmans qui reprend toute une série de données statistiques que je ne citerai pas ici. Cela concerne le nombre de généralistes agréés ces dernières années, les résultats de l'étude du SPF sur la base du cadastre, le nombre de médecins généralistes en formation, le nombre de spécialistes pour 2007 à 2009, les quotas de contingentement et l'augmentation du revenu des généralistes entre 2004 et 2009.
Par ailleurs, si Mme Tilmans le souhaite, je joindrai par courrier séparé l'évolution du projet 1733, que nous sommes en train de le mettre en oeuvre en province du Luxembourg. Je sais en effet que ce sujet l'intéresse particulièrement.
Pour le reste, nous avons effectivement déjà parlé souvent des médecins de garde et de leur situation. Il s'agit d'un des problèmes les plus urgents à résoudre. Si nous avons la chance de pouvoir constituer un gouvernement de plein exercice, il faudra régler cette question en priorité.
La majorité des mesures proposées par le Forum des associations de généralistes sont dans la ligne ce qui a déjà été fait ces dernières années. J'épinglerai le soutien massif aux postes de garde dont le budget a été triplé en deux ans ou encore l'élaboration du projet 1733 de dispatching central. L'organisation de la garde passe également par un renforcement des cercles de médecins généralistes. Notons à cet effet l'indexation récente des subsides aux cercles ou encore l'adaptation du fonds « Impulseo I » pour coller davantage à la réalité de terrain.
En ce qui concerne ce que vous appelez les médecins gardistes, je voudrais d'abord noter que certains cercles font déjà appel depuis plusieurs années à des médecins extérieurs, qui sont des généralistes agréés et par conséquent parfaitement formés à cette tâche. Ces cercles proposent parfois une rémunération complémentaire en utilisant comme ressources les honoraires de disponibilité, les cotisations et les subsides au cercle.
Une autre solution envisageable est le recours aux généralistes en formation pour autant qu'ils soient supervisés par un des médecins de la zone, maître de stage Santé publique. Une formation particulière, voire un statut spécifique pour ces médecins effectuant des gardes en dehors de leur zone n'est pas à l'ordre du jour ; par contre les mesures de planification mises en place pour augmenter le nombre de généralistes et les mesures d'incitation à s'installer dans des zones à faible densité vont devoir être renforcées.
L'autre problème délicat reste l'obligation de la garde de nuit, liée partiellement à l'obligation de déplacement ; l'idée de remplacer la garde de nuit durant les week-ends par un recours aux urgences hospitalières mérite d'être étudiée, en particulier dans les régions à faible densité médicale. Toutefois, et vous le rappelez dans votre question, l'unanimité est loin d'être faite autour de cette problématique au sein même des acteurs de terrain, sans compter l'avis négatif émis récemment par l'Ordre des médecins. Il va de soi qu'il faut évaluer l'impact sur la continuité et la qualité des soins, et même l'impact budgétaire.
Le projet 1733, via l'enregistrement systématique des appels, permettra certainement une approche rigoureuse et scientifique ; tout porte à croire que dans la plupart des zones, le nombre d'appels nocturnes est faible et que dans une majorité des cas, ils aboutissent justement à une hospitalisation.
Si le projet pilote confirme que l'impact sur la qualité des soins est favorable et que le nombre de cas supplémentaires qui devraient être gérés par les services d'urgence hospitaliers reste très limité, il faudrait entamer alors un débat avec l'ensemble des acteurs impliqués afin d'envisager un changement législatif sur l'obligation de déplacement et sur l'organisation éventuelle de ce que l'on appelle les nuits noires.
Afin de préparer au mieux ce débat, nous avons demandé dès le départ aux représentants des cercles des médecins généralistes de faire partie du comité de pilotage du projet 1733 et nous l'avons élargi récemment à des représentants de l'Ordre des médecins.
Enfin, une éventuelle réforme passera également par un renforcement des services d'urgence hospitaliers. L'arrêté de planification instaurant un quota minimal annuel d'urgentistes est une première réponse. Je voudrais vraiment m'atteler à cette réforme structurelle qui est absolument nécessaire. Vous voyez que nous sommes très proactifs en la matière.
Mme Dominique Tilmans (MR). - Je remercie la ministre. Effectivement, il faut vraiment s'atteler au sujet de la garde ; c'est la raison pour laquelle nous avons déposé une proposition pour qu'il soit examiné au sein de la commission.
Concernant les médecins gardistes, vous me dites que l'idée d'un statut n'est pas à l'ordre du jour. Il serait utile d'y penser, car de plus en plus de jeunes sont intéressés à travailler les week-ends ou en garde parce qu'ils gagnent mieux leur vie ou ont plus de disponibilité pendant la semaine.
Les avis du monde médical sur la nuit noire sont partagés. Est-ce une solution ? Je partage votre avis selon lequel elle n'est pas parfaite.
Enfin, le 1733, sera-t-il opérationnel dans le Luxembourg au deuxième semestre de cette année ?
Mme Laurette Onkelinx, vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, chargée de l'Intégration sociale. - Pour le Luxembourg, il est prévu de proposer d'emblée une solution 1733 pour l'ensemble de la province et un dispatching des appels à partir du Centre 100. Le projet est en discussion avec les cercles de médecine générale et le Centre 100. Dès que tout est opérationnel, on lance le système.
Je vais vous envoyer la note et vous donnerai dès que possible les informations pour le Luxembourg.