5-736/1

5-736/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 2010-2011

28 JANVIER 2011


Proposition de loi modifiant le Code de la nationalité belge

(Déposée par M. Alain Courtois et consorts)


DÉVELOPPEMENTS


1. Cadre général

Depuis l'adoption du Code de la nationalité belge, en 1984 (1) , les réformes qui y ont été apportées s'inscrivent dans un mouvement de balancier, tantôt vers l'ouverture et l'assouplissement des conditions d'accès à la nationalité, tantôt vers la restriction des conditions d'accès. Cette évolution saccadée s'explique par le fait que la politique en matière de nationalité présente un lien de plus en plus évident avec les politiques de migration et d'accès au séjour sur le territoire belge.

D'une part, l'accès et la possession de la nationalité d'un pays favorisent le sentiment d'appartenance à une communauté, l'accès à l'emploi et l'exercice complet des droits civiques. La politique d'octroi de la nationalité constitue dans ce sens un outil d'encouragement pour les autorités, dans le cadre de leur politique d'intégration des étrangers.

D'autre part, il faut également être conscient que, lorsque les possibilités d'accès au territoire sont limitées et que la politique de migration est restrictive, la pression migratoire s'exerce sur d'autres « portes d'entrée », comme les procédures d'asile, mais aussi, sans doute dans une moindre mesure, sur l'accès à la nationalité.

On peut dès lors considérer que, par certains aspects, la nationalité est « instrumentalisée » dans le cadre de la politique migratoire de l'État.

La cohérence des législations en matière d'octroi de la nationalité et en matière d'immigration et d'accès au territoire est indispensable, à la fois pour la mise en œuvre d'une politique efficace et logique de gestion des migrations et de l'accès au territoire et pour l'application claire et équitable de conditions et procédures d'accès à la nationalité.

Si la cohérence est indispensable, chacune de ces législations doit cependant conserver ses particularités puisque, il faut le rappeler, leur objectif est fondamentalement différent et qu'il faut éviter tout amalgame entre les différentes situations, en effet:

1. la politique migratoire établit les règles selon lesquelles des ressortissants étrangers peuvent séjourner légalement dans notre pays; dans cette matière, les réglementations européennes et internationales revêtent une grande importance;

2. la politique de nationalité participe de la question de la citoyenneté belge et des valeurs que notre société reconnaît sous ce vocable.

L'étranger qui fait la démarche d'obtenir la nationalité belge le fait par choix personnel, il ne doit pas le faire pour renforcer un statut administratif précaire ou illégal. L'étranger vivant légalement en Belgique doit pouvoir disposer du choix de continuer à garder des liens avec son pays d'origine, notamment en conservant sa nationalité de départ tout en étant autorisé, sous des conditions clairement établies par la loi, à résider en Belgique. Autrement dit, il ne doit pas être contraint d'abandonner sa nationalité d'origine pour des questions de droit de séjour en Belgique. On peut penser, dès lors, que la différence entre ces deux démarches réside dans la volonté d'intégration dans le pays de résidence de la personne concernée et l'octroi final de la nationalité dans la « réussite » de cette intégration.

Or, précisément, la réforme du Code de la Nationalité intervenue en 2000 a supprimé le critère de volonté d'intégration qu'il fallait démontrer dans le cadre de la naturalisation. Le législateur de l'époque estimait que ce critère était présumé dans le chef du demandeur et qu'il revêtait un caractère artificiel dans la mesure où il était, selon lui, assez facile d'abuser de la volonté d'intégration. Les auteurs de la présente proposition de loi estiment au contraire que cette volonté d'intégration constitue un élément important de la démarche du « demandeur » de nationalité et qu'il doit être réintroduit et défini, dans la loi.

Mme Bernadette Renauld (2) exprime clairement le raisonnement qui a guidé la rédaction du présent texte. Pour elle:

« L'accès à la nationalité ne devrait être un substitut ni au visa si difficile à obtenir, ni au droit de séjour improbable. Mais la nationalité ne devrait pas être non plus, dans le chef des gouvernants, un outil au service de la gestion des flux migratoires. La nationalité mérite plus que de servir de contrepoids, dans les débats politiques, aux moyens, toujours plus stricts, de faire respecter l'arrêt de l'immigration décrété il y a plus de trente ans. Elle mérite une vraie réflexion sur le lien qui doit être retissé entre la possession ou l'acquisition de la nationalité d'un pays et la communauté nationale qui fonde celui-ci.

Si ce véritable travail de réflexion politique était mené l'on s'apercevrait probablement qu'il y a peu de sens à acquérir la nationalité d'un pays avec lequel on n'a construit ni passé ni projet d'avenir. Mais cela ne peut advenir qu'au prix d'un découplage, dans l'agenda politique, de la nationalité et de la réglementation de l'accès au territoire. Et cela ne peut être réalisé qu'à la condition que cette dernière soit humaine et juste, de sorte que la « pression migratoire » sur l'acquisition de la nationalité s'évanouisse d'elle-même, faute d'intérêt (3) . ».

S'il ne faut pas perdre de vue la nécessaire interaction avec la politique de migration, la nationalité demeure une politique à part entière qui mérite que le législateur se penche d'une manière rationnelle et logique sur les réformes à y apporter. C'est ce que les auteurs de la présente proposition de loi entendent réaliser.

2. Principes généraux de la réforme envisagée en matière d'acquisition de la nationalité

2.1. L'acquisition de la nationalité doit être neutre du point de vue migratoire

Les auteurs de la présente proposition de loi entendent, en priorité, s'assurer que la législation en matière de nationalité soit neutre du point de vue de l'immigration. Il ne peut être plus aisé d'obtenir la nationalité que d'obtenir un droit de séjour. Les dispositions de chacune de ces réglementations doivent être lues en parallèle afin de ne plus aboutir à des effets pervers, comme avec l'ancien article 10 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers (4) .

En d'autres termes, les auteurs de la présente proposition de loi entendent ne pas utiliser cette réglementation comme outil d'accès au territoire mais plutôt en aval de celui-ci, après que la réglementation sur l'accès au territoire ait sorti ses effets, comme instrument appelé à ancrer et stabiliser un séjour légal et d'une certaine durée.

2.2. Retour au critère de la volonté d'intégration

La nationalité belge ne peut être « bradée » et doit s'accompagner d'une démonstration d'une certaine « intégration » ou « attache » à la Belgique, notamment par la connaissance d'une des langues nationales.

L'octroi de la nationalité vient dans cette optique couronner, parfaire ou encourager le parcours d'intégration de l'étranger. Elle ne doit pas constituer une démarche obligée dans le chef de certains par crainte quant à la sécurité de leur titre de séjour, même de durée illimitée. En d'autres termes, les personnes disposant d'un titre de séjour de durée illimitée ne doivent entreprendre une demande d'acquisition de la nationalité que par démarche personnelle, lorsqu'elle devient pour eux plus qu'une question de mobilité ou de droits politiques et qu'elle constitue une étape importante dans l'histoire d'un individu, symbolisant les choix de ce dernier.

Pour le MR et pour les auteurs, l'acquisition de la nationalité doit garder un caractère solennel, dans le sens où elle ne doit pas constituer une démarche administrative afin de rester dans un territoire donné mais doit partir de la volonté ferme d'une personne d'adhérer à un pays, de jouir des droits qu'il offre et également d'être soumis aux obligations imposées aux nationaux. Comme précisé plus haut, c'est de la notion même de « Belge » avec un grand B dont il est question: qu'est ce que cela signifie aujourd'hui encore ? Cette question ne doit pas se poser uniquement dans le cadre des querelles de clochers communautaires, elle mérite une réflexion sociétale profonde.

Il faut préciser ici qu'il est de la responsabilité des autorités belges d'offrir le cadre clair de cette citoyenneté et les conditions adéquates à cette intégration.

Lorsque la loi belge ouvre les frontières de l'État et que les conditions de cette réglementation sont suivies, il faut également instaurer le contexte propice à l'intégration des personnes séjournant depuis suffisamment longtemps sur notre territoire. Il s'agit d'une matière morcelée car l'accompagnement des étrangers et leur intégration et l'aide aux personnes relèvent des Communautés.

Si la Communauté flamande s'est dotée d'une procédure d'« inburgering », passage obligé de tout étranger désirant résider sur son territoire, au stade actuel des choses, il ne semble pas que la Communauté française ait adopté un quelconque outil et opté pour une procédure favorisant l'intégration des populations étrangères.

Pourtant, il est évident que, tant l'étranger que la société belge, ont tout intérêt à travailler à l'intégration des nouveaux venus. Il ne faut donc pas voir dans l'exigence de la connaissance de la langue un obstacle à l'acquisition de la nationalité mais plutôt un moyen de faciliter l'intégration.

Cette exigence suppose également que les pouvoirs publics mettent à disposition de l'étranger les outils lui permettant de développer des connaissances linguistiques suffisantes.

La responsabilité de l'État ne s'arrête pas au seuil de la porte, il doit:

— pourvoir au séjour, dans des conditions décentes, pour l'immigré;

— lui laisser le choix de s'intégrer pleinement ou de continuer à garder un lien national avec son pays d'origine;

— imposer, au minimum, le respect des valeurs universelles défendues dans notre pays.

Mener une politique de porte ouverte sur l'accès au territoire sans cohérence constitue une irresponsabilité et une hypocrisie flagrantes.

Il n'est pas admissible de permettre à des personnes d'entrer sur le territoire sans leur garantir la possibilité d'une vie décente, et en les laissant espérer qu'il leur sera possible, d'une façon ou d'une autre, de se faire régulariser. Cela revient à tromper les attentes légitimes de ces personnes. Cette politique constitue un des fondements des abus que l'on peut connaître en matière d'accès au territoire ou de demande de nationalité.

Au contraire, les auteurs de la présente proposition de loi entendent être parfaitement clairs: les étrangers dont le statut administratif est parfaitement en ordre et qui résident dans ce cadre depuis une certaine durée en Belgique doivent pouvoir choisir de s'intégrer au-delà de la simple adhésion au socle des valeurs universelles et demander la nationalité belge.

Ils doivent pouvoir poser le choix d'une demande de nationalité, et voir la garantie que cette nationalité viendra bien ceindre leur parcours particulier et non être bradée par des mécanismes incohérents. Bref, il faut redonner un vrai sens à la démarche de demande de la nationalité belge.

3. La nationalité ne doit pas être accordée aux personnes ayant commis des infractions d'une certaine gravité

Le message doit être clair, des personnes qui ont été condamnées pour des infractions telles que crime contre l'État, terrorisme, traite des être humains, trafic de drogues, ainsi que celles condamnées à des peines de 5 ans de prison ferme, ou plus, ne peuvent pas prétendre à demander la nationalité. Le critère choisi dans la présente proposition est double, il vise à la fois la peine de 5 ans ferme, qui démontre une certaine gravité de l'infraction commise et des infractions heurtant l'ordre public belge.

3.1. Droit de séjour et résidence principale en Belgique au moment de l'introduction d'une demande d'acquisition de la nationalité

Lors de la réforme de 2006, l'article 7bis nouveau du Code de la nationalité belge a introduit l'exigence d'un titre de séjour de longue durée (à l'exclusion des séjours de courtes durées de maximum 3 mois) avant de pouvoir procéder à une demande ou à une déclaration de nationalité (acquisition de la nationalité). Ce titre de séjour pouvait être limité ou illimité.

Les termes choisis en 2006 portent à confusion puisqu'il est fait état d'un séjour légal, dans un sens particulier et propre qui couvre des réalités administratives différentes de celles que l'on entend habituellement par ces termes, notamment au regard de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. Les auteurs de la présente proposition choisissent de rendre la condition de séjour préalable plus claire et de la définir.

Il est précisé que l'étranger qui fait sa demande ou déclaration doit disposer d'un droit de séjour de longue durée. Le texte prévoit également que le demandeur doit avoir sa résidence principale en Belgique, couverte par un droit de séjour légal, au moment de la demande ou déclaration. Ces deux notions sont également définies dans le texte.

3.2. Exigence de durée de résidence principale en Belgique couverte par un séjour légal et allongement des durées de résidence requises

Dans plusieurs voies d'acquisition de la nationalité belge, il est exigé que la personne qui introduit la demande ait sa résidence principale en Belgique depuis un certain nombre d'années:

1. acquisition par déclaration, pour les étrangers justifiant d'une résidence principale en Belgique depuis au moins 7 ans (article 12bis, § 1, 3º);

2. acquisition par option (articles 13 et 14): douze mois;

3. acquisition par mariage (article 16): 3 ans ou 6 mois;

4. naturalisation (article 19): 3 ans.

Une controverse subsiste sur l'interprétation à donner à cette notion de résidence principale. Plus spécifiquement, la question se pose de savoir si cette résidence doit être couverte par un titre de séjour légal, et de quel type. La présente proposition de loi précise que la résidence principale doit être couverte dans ces cas par un séjour légal de longue durée (soit tout séjour légal), à l'exception des courts séjours et que cette résidence principale et ce droit de séjour doivent être ininterrompus.

La proposition allonge la durée des périodes de résidences principales requises, selon les cas:

1. acquisition pour résidence principale en Belgique de plus de 7 ans (article 12bis, § 1er, 3º), ce délai passe à 10 ans;

2. acquisition par option, allonger le délai de douze mois (articles 13 et 14), à 3 ans;

3. acquisition de la nationalité par mariage (article 16), allongement, selon le cas, des délais de vie commune, qui passent soit à 5 ans, soit à 2 ans en cas de délai réduit. La condition de résidence principale commune sur le territoire belge, exigée préalablement à l'introduction de la déclaration, est de trois ans mais peut être réduite à six mois si le conjoint étranger a, avant de contracter mariage, fixé sa résidence principale en Belgique sur la base d'un séjour légal ininterrompu depuis au moins trois ans;

4. naturalisation suite à un délai de 3 ans (article 19), le délai de résidence principale est porté à 7 ans et à 3 ans et demi pour les réfugiés et apatrides au sens des conventions internationales.

Enfin, une condition de 3 ans de résidence principale en Belgique, couverte par un séjour légal ininterrompu, est ajoutée à l'article 12bis, § 1er, 2º: il s'agit de l'étranger majeur qui peut faire déclaration de nationalité en vertu d'une filiation avec un auteur belge; à l'heure actuelle une telle condition n'existe pas.

3.3. Supprimer autant que possible les possibilités de demande ou de déclaration de nationalité depuis l'étranger

Ce qu'il faut éviter, ce sont les situations où une personne, sans aucun contact avec la Belgique, introduit une demande de nationalité belge.

Le cas le plus flagrant, la possibilité d'obtention à supprimer, concerne l'article 12bis, § 1er, 2º, permettant à des étrangers majeurs de faire la demande d'acquisition de la nationalité belge par déclaration depuis l'étranger sans autre condition de lien avec la Belgique que la démonstration de liens d'affection avec un ou des auteurs belges. En effet, cette situation ne s'inscrit pas dans l'objectif de neutralité de la législation sur la nationalité, en termes d'immigration. Le risque existe de réouvrir la porte à une forme indésirable de regroupement familial pour majeurs.

Le même raisonnement pourrait être tenu en ce qui concerne la demande de naturalisation. Il faut avoir un intérêt certain pour la Belgique afin de mériter cette naturalisation, et l'exigence d'y vivre de manière légale et principale semble tout à fait justifiée à cet égard.

3.4. Volonté d'intégration en matière de naturalisation

La naturalisation est une voie d'accès à la nationalité tout à fait spécifique. Elle résulte de l'exercice du pouvoir souverain que la Constitution attribue en la matière à la Chambre des représentants. Elle n'est pas un droit mais une faveur. D'aucuns estiment que cette caractéristique de la naturalisation doit être conservée. Il s'agit d'un geste de reconnaissance par la Nation (ses élus) des mérites de certains étrangers qui sont gratifiés par l'attribution de la nationalité belge.

Les auteurs de la proposition de loi peuvent s'inscrire dans cette ligne pour autant que la naturalisation retrouve son caractère réellement exceptionnel. Il n'est pas sain qu'une partie importante des acquisitions de la nationalité (2e voie d'acquisition de la nationalité après la déclaration (5) ), intervienne par une procédure ni transparente, ni motivée et pratiquée au cas par cas. Le rôle premier du législateur est d'établir le cadre légal de l'attribution de la nationalité et non d'intervenir dans des dossiers particuliers, au risque de verser dans le clientélisme politique.

Il faut consacrer ce caractère exceptionnel, les critères d'accès à cette procédure doivent être renforcés et une véritable démonstration de la volonté d'intégration doit être exigée de la part du candidat à la naturalisation.

Il est également essentiel que l'application et le respect des critères édictés, tant en matière de durée de résidence principale et de séjour légal qu'en matière de volonté d'intégration, demeurent stables, quelle que soit la composition politique de la commission des naturalisations.

Renforcer les critères d'accessibilité à la naturalisation et les conditions de recevabilité de la demande de naturalisation n'aurait d'effet que si ces critères et conditions étaient effectivement respectés et appliqués par les membres de la Commission de naturalisation de la Chambre. Cela dépend évidemment grandement des sensibilités politiques des députés qui composent cette Commission.

Les critères pris en compte dans le chef du candidat à la naturalisation seraient les suivants:

1. établir une durée de résidence principale de 7 ans, préalablement à la demande;

2. établir qu'il a la connaissance de l'une des langues nationales;

3. établir qu'il a une connaissance suffisante des valeurs universelles, des institutions et de l'histoire de la Belgique; la preuve de ces connaissances pourrait être apportée par toutes voies de droit;

4. ne pas avoir été condamné pénalement pour avoir commis certaines infractions.

Par ailleurs, il n'est pas cohérent que les candidats à la nationalité, pour lesquels un avis négatif a été rendu dans le cadre d'une déclaration ou d'une option de nationalité, puissent automatiquement transformer leur demande en demande de naturalisation. Cela ne correspond pas au caractère de faveur à attribuer à quelqu'un de particulièrement méritant puisque, par définition, il s'agit de « mauvais » dossiers.

À cet égard, il faut supprimer cette possibilité de transformer la déclaration ou l'option de nationalité en demande de naturalisation. Il faut réserver la naturalisation à des cas tout à fait spécifiques. Donc, les personnes qui peuvent prétendre à la nationalité en vertu d'autres voies, comme la déclaration ou l'option, devraient également introduire obligatoirement leur demande par ces voies.

Rien n'empêche, bien entendu, toutes ces personnes, une fois leur déclaration ou option rejetée, d'introduire en bonne et due forme une demande de naturalisation, mais la saisine ne doit plus être automatique.

Enfin, le paiement d'une redevance pour introduire un dossier de demande de naturalisation, condition qui avait cours avant la réforme de 2000, doit être exigé. Ce montant pourrait être fixé à 200 euros par dossier, les modalités de cette redevance seraient fixées par le Roi.

3.5. Modifications procédurales

Enfin, la proposition allonge le délai dans lequel les différents services, et notamment le Parquet, doivent rendre un avis. Le délai est porté à 6 mois au lieu de 4 et son point de départ est clairement fixé.

Les procédures de déclaration de nationalité et d'option de nationalité ont été rassemblées dans un seul article, par souci de cohérence.

Alain COURTOIS
François BELLOT
Christine DEFRAIGNE.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

Dans le Code de la nationalité belge, institué par la loi du 28 juin 1984, l'article 7bis, inséré par la loi du 27 décembre 2006, est remplacé comme suit:

« Art. 7bis. § 1er. Pour pouvoir introduire une demande ou une déclaration visant à l'obtention de la nationalité belge, l'étranger doit être en séjour légal de durée illimitée au moment de l'introduction de cette demande ou de cette déclaration.

Il faut entendre par séjour légal visé au précédent alinéa, la situation de l'étranger admis ou autorisé à séjourner pour une durée illimitée dans le Royaume, conformément aux dispositions de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers.

§ 2. Lorsqu'il est prévu dans le présent Code que l'étranger doit avoir fixé sa résidence principale en Belgique sur la base d'un séjour légal durant une période déterminée précédant immédiatement sa demande ou sa déclaration, tant le séjour légal que la résidence principale doivent être ininterrompus.

Il faut entendre par séjour légal visé au précédant alinéa, tout séjour au sens de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers à l'exception du court séjour tel que visé aux articles 6, 40, § 3, et 40bis, § 3, de ladite loi ainsi que le séjour au sens de la loi du 22 décembre 1999 relative à la régularisation de séjour de certaines catégories d'étrangers séjournant sur le territoire du Royaume.

§ 3. On entend par résidence principale, au sens du présent Code, le lieu où la personne s'est établie à titre principal et où elle a fixé le centre de ses intérêts socio-économiques.

Pour déterminer ce lieu, il est tenu compte, en particulier, de circonstances de nature personnelle ou professionnelle qui révèlent des liens durables avec ce lieu. ».

Art. 3

Dans le même Code, l'article 12bis, inséré par la loi du 13 juin 1991, est remplacé comme suit:

« Art. 12bis. Peuvent acquérir la nationalité belge en faisant une déclaration conformément à l'article 15, s'ils ont atteint l'âge de dix-huit ans:

1. l'étranger né en Belgique et y ayant sa résidence principale depuis sa naissance de manière ininterrompue et qui, au moment de la déclaration, a été admis ou autorisé au séjour pour une durée illimitée au sens de l'article 7bis, § 1er;

2. l'étranger qui a fixé sa résidence principale en Belgique sur la base d'un séjour légal ininterrompu au sens de l'article 7bis, § 2, depuis au moins cinq années et dont l'un des auteurs ou adoptants possède la nationalité belge au moment de la déclaration, pour autant que l'adoption ait produit ses effets avant que l'adopté atteigne l'âge de dix-huit ans, ou de l'émancipation s'il a été émancipé avant cet âge;

3. l'étranger qui a fixé sa résidence principale en Belgique sur la base d'un séjour légal ininterrompu, au sens de l'article 7bis, § 2, depuis au moins 10 années et qui, au moment de la déclaration, a été admis ou autorisé au séjour pour une durée illimitée au sens de l'article 7bis, § 1er. ».

Art. 4

Dans le même Code, l'article 14 est remplacé comme suit:

« Art. 14. § 1er. Celui qui fait une déclaration d'option doit, au moment de celle-ci:

1. être âgé de dix-huit ans et avoir moins de vingt-quatre ans;

2. avoir eu sa résidence principale en Belgique sur la base d'un séjour légal ininterrompu, au sens de l'article 7bis, § 2, depuis au moins trois ans;

3. avoir eu sa résidence principale en Belgique depuis, au plus tard, l'âge de quatorze ans jusqu'à l'âge de dix-huit ans, ou pendant neuf ans au moins.

§ 2. Peut être assimilée à la résidence en Belgique, la résidence en pays étranger, lorsque le déclarant prouve qu'il a conservé des attaches véritables avec la Belgique durant la ou les périodes légalement requises.

La preuve des attaches véritables au sens de l'alinéa précédent ne peut être apportée que sur la base de certains des éléments suivants:

1. la connaissance d'une des langues nationales;

2. des séjours en Belgique;

3. des contacts réguliers avec des personnes résidant en Belgique;

4. le fait d'avoir accompli sa scolarité dans l'une des langues nationales;

5. le fait d'être titulaire de droits réels immobiliers en Belgique;

6. des liens étroits avec la Belgique sur le plan social ou professionnel.

La preuve des éléments visés à l'alinéa précédent peut être apportée par toutes voies de droit.

L'assimilation de résidence, telle que prévue au § 2, s'applique uniquement à l'étranger qui remplit les conditions fixées aux points 2º et 3º de l'article 13. ».

Art. 5

Dans le même Code, l'article 15 est remplacé comme suit:

« Art. 15. § 1er. La déclaration est faite contre accusé de réception devant l'officier de l'état civil du lieu où le déclarant a sa résidence principale. L'officier de l'état civil délivre l'accusé de réception lorsque les pièces qui doivent être jointes aux déclarations ont été déposées. Le Roi, sur la proposition du ministre de la Justice, détermine les actes et justificatifs à joindre à la déclaration.

Au plus tard dans les cinq jours ouvrables de la délivrance de l'accusé de réception, une copie de la déclaration et des pièces justificatives, ainsi qu'une copie de l'accusé de réception sont communiqués pour avis par l'officier de l'état civil au parquet du tribunal de première instance du ressort.

Le procureur du Roi en accuse réception sans délai.

En même temps qu'il communique au procureur du Roi copie du dossier, l'officier de l'état civil en transmet également copie à l'Office des étrangers et à la Sûreté de l'État.

§ 2. Dans un délai de six mois à compter de la date de l'accusé de réception de la déclaration visée au § 1er, le procureur du Roi peut émettre un avis négatif sur l'acquisition de la nationalité belge lorsqu'il y a un empêchement résultant de faits personnels graves, qu'il doit préciser dans les motifs de son avis, ou lorsque les conditions de base, qu'il doit indiquer, ne sont pas remplies.

Lorsque le procureur du Roi estime ne pas devoir émettre d'avis négatif, il envoie à l'officier de l'état civil une attestation signifiant l'absence d'avis négatif. La déclaration est immédiatement inscrite et mentionnée, conformément à l'article 22, § 4.

À l'expiration du délai de six mois et à défaut d'avis négatif du procureur du Roi ou de transmission d'une attestation signifiant l'absence d'avis négatif, la déclaration est inscrite d'office et mentionnée conformément à l'article 22, § 4.

Notification de l'inscription est faite à l'intéressé par l'officier de l'état civil.

La déclaration a effet à compter de l'inscription.

§ 3. L'avis négatif du procureur du Roi doit être motivé. Il est notifié à l'officier de l'état civil et, par lettre recommandée, au déclarant par les soins du procureur du Roi.

§ 4. Dans les quinze jours suivant la date de réception de l'avis négatif visé au § 2, l'intéressé peut inviter l'officier de l'état civil, par lettre recommandée, à transmettre son dossier au tribunal de première instance.

Après avoir entendu ou appelé l'intéressé, le tribunal de première instance statue suite à l'avis négatif.

La décision est notifiée à l'intéressé par les soins du procureur du Roi. Dans les quinze jours de la notification, l'intéressé et le procureur du Roi peuvent interjeter appel de la décision, par requête adressée à la cour d'appel. La prorogation des délais suite aux vacances judiciaires a lieu conformément à l'article 50, alinéa 2, du Code judiciaire.

La cour statue, après avis du procureur général, et après avoir entendu ou appelé l'intéressé.

Les citations ou notifications se font par la voie administrative.

Le dispositif de la décision définitive par laquelle l'avis négatif n'est pas pris en compte est envoyé à l'officier de l'état civil par les soins du ministère public. La déclaration est immédiatement inscrite et mentionnée, conformément aux dispositions de l'article 22, § 4. »

Art. 6

Dans le même Code, l'article 16 est remplacé comme suit:

« Art. 16. § 1er. Le mariage n'exerce de plein droit aucun effet sur la nationalité.

§ 2. L'étranger qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité belge ou dont le conjoint acquiert la nationalité belge au cours du mariage, peut, si les époux ont résidé ensemble en Belgique sur la base d'un séjour légal ininterrompu au sens de l'article 7bis, § 2, pendant au moins cinq ans et tant que dure la vie commune en Belgique, acquérir la nationalité belge par déclaration faite conformément à l'article 15, à condition que, au moment de cette déclaration, il ait été admis ou autorisé au séjour pour une durée illimitée au sens de l'article 7bis, § 1er.

La durée de résidence commune de cinq ans exigée préalablement à l'introduction de la déclaration est réduite à deux ans si le conjoint étranger a, avant de contracter mariage, fixé sa résidence principale en Belgique sur la base d'un droit de séjour légal ininterrompu au sens de l'article 7bis, § 2, depuis au moins cinq ans.

Peut être assimilée à la vie commune en Belgique la vie commune en pays étranger lorsque le déclarant prouve qu'il a acquis durant la période requise des attaches véritables avec la Belgique.

La preuve des attaches véritables au sens de l'alinéa précédent ne peut être apportée que sur la base de certains des éléments suivants:

— la connaissance d'une des langues nationales;

— des séjours en Belgique;

— des contacts réguliers avec des personnes résidant en Belgique;

— le fait d'avoir accompli sa scolarité dans l'une des langues nationales;

— le fait d'être titulaire de droits réels immobiliers en Belgique;

— des liens étroits avec la Belgique, sur le plan social ou professionnel.

La preuve des éléments visés à l'alinéa précédent peut être apportée par toutes voies de droit. ».

Art. 7

Dans le même Code, l'article 19 est remplacé comme suit:

« Art. 19. Pour pouvoir demander la naturalisation, l'étranger doit, au moment de la demande:

1. être âgé de dix-huit ans accomplis;

2. avoir été admis ou autorisé au séjour illimité au sens de l'article 7bis, § 1er;

3. avoir fixé sa résidence principale en Belgique depuis sept ans au moins sur la base d'un séjour légal ininterrompu au sens de l'article 7bis, § 2; ce délai est réduit de moitié pour celui dont la qualité de réfugié ou d'apatride a été reconnue en Belgique en vertu des conventions internationales qui y sont en vigueur;

4. établir qu'il a la connaissance de l'une des langues nationales et la connaissance suffisante des valeurs universelles, des institutions et de l'histoire de la Belgique; la preuve de ces connaissances peut être apportée par toutes voies de droit;

5. sans préjudice du contrôle effectué par le Parquet, conformément à l'article 21, ne pas avoir été condamné de manière définitive comme auteur, co-auteur ou complice à une peine d'emprisonnement d'au moins cinq ans, sans sursis, pour les infractions visées aux articles 101 à 112, 113 à 120bis, 120quater, 120sexies, 121 à 123, 123quater, alinéa 2, 124 à 134, 136bis, 136ter, 136quater, 136sexies et 136septies, 137, 140, 141, 331bis, 433quinquies à 433octies, 477 à 477sexies et 488bis du Code pénal et aux articles 77bis, 77ter, 77quater et 77quinquies de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers.

Si le demandeur de naturalisation se trouve dans les conditions permettant d'obtenir la nationalité par une autre voie définie par le présent Code, il doit au préalable demander la nationalité par ces voies.

La Chambre publie annuellement un rapport d'activités relatif à l'examen et aux critères des demandes de naturalisation. ».

Art. 8

Dans le même Code, à l'article 21, modifié en dernier lieu par la loi du 27 décembre 2006, sont apportées les modifications suivantes:

1. le § 1er est complété par l'alinéa suivant:

« La demande de naturalisation n'est recevable que si la quittance délivrée par le receveur de l'enregistrement établissant le paiement du droit d'enregistrement applicable y est jointe. »;

2. au § 1er, la première phrase de l'alinéa 2 est abrogée;

3. au § 1er, alinéa 2, in fine, les mots « ou dans chaque mission diplomatique ou poste consulaires de carrière belges » sont abrogés;

4. au § 2, alinéa 1er, les mots « ou perd les attaches visées à l'article 19, deuxième alinéa » sont abrogés;

5. au § 3, alinéa 2, in fine, la dernière phrase est abrogée;

6. au § 3, l'alinéa 3 est abrogé;

7. au § 3, à l'alinéa 4, les mots « dans les quatre mois » sont remplacés par les mots « dans les six mois »;

8. le § 4 est remplacé comme suit:

« § 4. La Chambre des représentants requiert la production par le demandeur de la preuve visée à l'article 19, alinéa 1er, 4º. »;

9. le § 5 est abrogé.

29 novembre 2010.

Alain COURTOIS
François BELLOT
Christine DEFRAIGNE.

(1) Loi du 28 juin 1984 relative à certains aspects de la condition des étrangers et instituant le Code de la nationalité belge.

(2) Référendaire à la Cour constitutionnelle et Maître de conférences aux FUCaM.

(3) Contribution au rapport annuel 2009 du Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme.

(4) En 2000, le législateur a introduit dans le Code de la nationalité belge la possibilité pour tout étranger dont un des auteurs est belge au moment de la demande, quel que soit l'âge ou le lieu de résidence de cet étranger, de demander la nationalité belge par déclaration. Parallèlement, l'article 10 de la loi du 15 décembre 1980 stipulait que tout étranger se trouvant dans les conditions pour obtenir la nationalité belge, notamment par déclaration, était de plein droit admis au séjour en Belgique. En pratique, toute personne majeure étrangère résidant à l'étranger, dont un des auteurs devenait belge pouvait jouir immédiatement d'un droit de séjour illimité: on instituait ainsi une sorte de regroupement familial pour majeur non prévu. Cet article 10 a été modifié pour pallier ce problème par la loi du 15 septembre 2006 qui n'admet plus au séjour que les étrangers qui remplissent les conditions pour obtenir la nationalité par option en vertu des articles 13 et 14 du Code de la nationalité belge.

(5) Cf. chiffres du rapport annuel 2009 MIGRATION du Centre pour l'égalité des chances: en 2007 on comptait 11 543 dossiers de nationalité octroyée par déclaration et 8 372 dossiers de nationalité octroyée par naturalisation.