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M. le président. - M. Bernard Clerfayt, secrétaire d'État à la Modernisation du Service public fédéral Finances, à la Fiscalité environnementale et à la Lutte contre la fraude fiscale, répondra.
Mme Olga Zrihen (PS). - La crise de l'endettement des États est actuellement au coeur de toutes les préoccupations économiques européennes. La discussion portant sur la création d'un mécanisme intergouvernemental de solidarité financière pour la zone euro a donc été rendue possible par la fragilité financière de certains États membres de l'Union monétaire.
Lors de la tenue de son dernier sommet européen en décembre 2010, la Présidence belge de l'Union européenne avait estimé possible que la zone euro finisse un jour par se doter d'euro obligations.
Par la suite, cette idée a été défendue par le Premier ministre luxembourgeois et président de l'Eurogroupe, M. Jean-Claude Juncker. Selon ce dernier, ces obligations seraient garanties par plusieurs États européens et pourraient financer en partie les déficits des États.
Cette idée d'émission d'obligations européennes est cependant vivement combattue par l'Allemagne, car ces « eurobonds » porteraient sans doute un taux d'intérêt plus élevé que les obligations allemandes. En d'autres termes, pour se financer, l'Allemagne paierait plus cher qu'actuellement.
Quel est le suivi accordé à cette proposition de création d' « eurobonds » ? Des avancées sont-elles perceptibles dans ce dossier ?
Ces « eurobonds » peuvent-ils être perçus comme des emprunts obligataires en commun ? Si oui, quelle est la marge de manoeuvre offerte à chacun des États les contractant ?
L'actuel « Fonds de secours » pour les pays membres de l'Union monétaire en difficulté constitue-t-il en soi une première étape vers la constitution de ces « eurobonds » ?
M. Bernard Clerfayt, secrétaire d'État à la Modernisation du Service public fédéral Finances, à la Fiscalité environnementale et à la Lutte contre la fraude fiscale. - Je vous lis la réponse du ministre des Finances.
Une proposition comme celle formulée publiquement par M. Juncker - et d'autres, d'ailleurs - fait évidemment l'objet de discussions au sein d'Écofin mais à ce stade, la proposition de création d' « eurobonds » n'a pas fait l'objet d'avancées particulières ou d'examen technique approfondi, en raison du manque de consensus politique quant au principe même. Vous avez d'ailleurs exprimé les réticences que peuvent avoir quelques grands États.
L'émission d' « eurobonds » reposerait en effet sur une mise en commun des emprunts. Les modalités de mise en oeuvre pourraient théoriquement varier, selon ce qui est réellement mis en commun. Il serait dès lors envisageable de moduler les conditions d'admission et de participation des États. Cela reste assez flou. L'idée peut sembler intéressante à étudier mais elle est encore très loin d'avoir atteint un degré de maturité suffisant.
Le mécanisme actuel, dit European Financial Stability Facility - EFSF - en faveur de l'Irlande n'est pas assimilable à l'émission d' « eurobonds ». Les emprunts émis par l'EFSF sont couverts à la fois par la garantie des États membres de la zone euro ainsi que par des « coussins » financiers, en vue de leur permettre d'obtenir la notation triple A. Les prêts sont octroyés par l'EFSF moyennant le respect d'une conditionnalité stricte, négociée conjointement avec le FMI - qui par ailleurs consent des ouvertures de crédit à l'Irlande - ; ils sont assortis de taux d'intérêt incorporant des spreads par rapport au coût réel des emprunts.
Le prêt à la Grèce délivré quelques mois plus tôt repose sur une mise en commun d'emprunts effectués séparément par les divers pays membres de la zone euro, moyennant également le respect des mêmes principes, à savoir une conditionnalité stricte et un taux d'intérêt assorti de spreads. La Grèce bénéficie également d'un prêt conjoint du FMI.
Jusqu'à présent, tant pour la Grèce que pour l'Irlande, il s'agit de solutions ad hoc mises en place dans l'urgence et qui fonctionnent. Les réflexions émises actuellement par certaines personnes sont intéressantes mais il est beaucoup trop tôt pour qu'elles fassent l'objet d'un consensus politique. L'un des problèmes réside dans la distinction entre la zone euro et l'Union européenne. Tous les pays de l'Union ne participent pas à la zone euro. La devise dans laquelle on dénomme les emprunts a évidemment un impact sur le risque que chacun des emprunteurs ou des prêteurs a sur cette monnaie. La manière dont les pays peuvent se prononcer par rapport à cette solution dépendra de l'existence ou non d'un risque des changes. Cela modifie radicalement la perception que chaque pays peut avoir par rapport à ce processus, sans entrer dans le débat amené par l'Allemagne. En effet, une mise en commun des bons européens assis sur la capacité financière de remboursement de chacun des pays entraînerait la détermination d'une moyenne quant à la faculté d'emprunt des pays. Pour certains d'entre eux, elle serait sans doute moindre que la qualité supérieure qu'ils atteignent sur leurs propres emprunts, ce qui équivaudrait, pour eux, à un renchérissement du crédit.
Mme Olga Zrihen (PS). - Nous savons qu'il faut parfois beaucoup de temps pour prendre des décisions. La grande inquiétude est de savoir quel serait le dispositif qui nous permettrait de répondre très rapidement à une autre situation d'urgence. Quelle serait la formule retenue ? Une formule irlandaise ? Une formule grecque ?
M. Bernard Clerfayt, secrétaire d'État à la Modernisation du Service public fédéral Finances, à la Fiscalité environnementale et à la Lutte contre la fraude fiscale. - Je n'ai pas de boule de cristal mais les deux expériences précédentes m'ont appris qu'une solution ad hoc a chaque fois été trouvée. Dans le cas de la Grèce, la solution a consisté en une somme de prêts distincts des pays de la zone euro. Dans le cas de l'Irlande, la solution retenue a été le prêt collectif, garanti collectivement. Vous pouvez l'interpréter comme une amélioration de l'idée européenne.
(La séance est levée à 14 h.55)