5-38COM

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Commission des Affaires sociales

Annales

MARDI 15 FÉVRIER 2011 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Demande d'explications de Mme Fatiha Saïdi à la vice-première ministre et ministre de l'Emploi et de l'Égalité des chances, chargée de la Politique de migration et d'asile sur «les besoins spécifiques des garçons et des hommes d'origine étrangère dans le cadre de la problématique des mariages forcés et arrangés» (nº 5-451)

Mme Fatiha Saïdi (PS). - Je me demande pourquoi ma question écrite a été transformée en demande d'explications...

Quoi qu'il en soit, je m'interroge à propos des choix stratégiques à envisager en vue d'harmoniser la prévention et l'assistance aux garçons et aux hommes d'origine étrangère impliqués dans la problématique des mariages forcés et arrangés.

Le volet opérationnel du plan d'action national 2010-2014 contre les violences entre partenaires étendu aux mariages forcés et arrangés prévoyait que l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes formule des recommandations basées sur deux études universitaires dans le courant de l'année 2010.

La première étude a été menée par le Centre pour l'Islam en Europe de l'université de Gand de 2005 à 2007. Elle portait sur les facteurs limitant la liberté du choix d'un partenaire dans les groupes de populations d'origine étrangère en Belgique. La deuxième, publiée à la fin de l'année 2009 en complément de la première, était une analyse statistique et qualitative du choix de la conjointe et du mariage des hommes marocains, turcs et sikhs effectuée par le Centre pour les Migrations et Études interculturelles de l'université d'Anvers.

Les résultats de ces deux études ont-ils été analysés ? L'analyse a-t-elle permis à l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes de formuler des recommandations ? Dans l'affirmative, lesquelles ?

(M. Rik Torfs prend place au fauteuil présidentiel.)

Mme Joëlle Milquet, vice-première ministre et ministre de l'Emploi et de l'Égalité des chances, chargée de la Politique de migration et d'asile. - L'étude citée met en lumière les éléments qui déterminent le choix de partenaire par les hommes d'origine étrangère - qu'ils soient marocains, turcs ou sikhs - de la deuxième génération vivant en Belgique. Elle ne se limite pas à la seule problématique des mariages forcés et arrangés. Mais elle revêt effectivement à la fois un aspect quantitatif et qualitatif, notamment grâce aux nombreuses interviews réalisées auprès des personnes issues des trois cultures que j'ai évoquées.

Il ressort des premières analyses que l'intervention de tiers dans la conclusion d'un mariage est vraiment omniprésente et largement acceptée au sein de ces différentes communautés.

L'étude démontre aussi qu'il n'est pas toujours simple d'établir la distinction entre mariage forcé et mariage arrangé. En fonction des circonstances, des personnalités et des relations, un mariage arrangé peut devenir un mariage forcé. Par ailleurs, en dépit de premières rencontres exercées sous la pression, le mariage forcé peut se transformer en mariage arrangé.

Nous avons vraiment un problème de détermination des définitions et donc des mesures adéquates pour éviter ce genre de situations.

L'équipe de recherche de l'université d'Anvers a mis en exergue une série de mesures et de recommandations : la mise en place de points d'information pour les jeunes et les hommes allochtones, la création de matériel de sensibilisation destiné à toutes les minorités ethnoculturelles afin d'éviter les stigmatisations à l'encontre de ces dernières, l'intensification de l'information via les écoles et maisons de jeunes, le recours aux sites internet pour une sensibilisation à cette problématique. Une autre mesure est le maintien de cours de langue et d'intégration pour les arrivants, mais elle s'éloigne davantage du sujet qui nous occupe. Citons encore la rédaction de brochures présentant les expériences de quelques hommes appartenant à différentes minorités ethnoculturelles.

Le nouveau plan d'action contre les violences adopté en novembre par les différents niveaux de pouvoir et qui doit être appliqué au cours des quatre prochaines années comprend un volet vraiment très spécifique sur les crimes d'honneur et sur les mesures relatives aux mariages forcés, qui relèvent des compétences régionales, communautaires et - très partiellement - fédérales.

Je voudrais ajouter qu'une disposition française me paraît particulièrement intéressante en ce qui concerne les mariages forcés. Il s'agit, dans l'hypothèse où l'on emmène une jeune fille en vacances pour la marier, dans son pays d'origine, à un cousin éloigné, de permettre à cette jeune fille de bénéficier d'une interdiction de visa de sortie. L'idée me paraît excellente. On vise toujours la maîtrise des visas d'entrée, sans envisager celle des visas de sortie. Or, en évoquant cette interdiction, la jeune fille pourra rester dans le pays européen dans lequel elle vit. J'espère que ce nouveau plan pourra faire ses preuves.

Mme Fatiha Saïdi (PS). - Il y a lieu, sur le plan législatif, de réfléchir à d'autres modes opératoires visant à empêcher ces mariages forcés mais aussi les séquestrations des femmes à l'étranger. Mais j'interpellerai prochainement le ministre des Affaires étrangères concernant cette thématique qui doit aussi être prise en considération car il s'agit également de violence faite aux femmes et notre souci est de combattre toutes les formes de violence, y compris celle exercée à l'encontre d'une Belge d'origine étrangère qui se rend dans son pays d'origine.