5-723/1 (Sénat) 53-1222/001 (Chambre) | 5-723/1 (Sénat) 53-1222/001 (Chambre) |
28 JANVIER 2011
I. INTRODUCTION
Le Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes s'est réuni le 25 janvier 2011 sous la présidence de M. Herman De Croo, député, pour écouter un exposé sur la présidence hongroise du Conseil de l'Union européenne (UE).
Il est de coutume que le Comité d'avis fédéral invite, au début de chaque présidence, un représentant du pays concerné à exposer les priorités de la présidence.
C'est Mme Enikõ Gyõri, ministre hongroise des Affaires européennes, qui est venue exposer les priorités de la Présidence hongroise.
II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE MME ENIKÕ GYÕRI, MINISTRE HONGROISE DES AFFAIRES EUROPÉENNES
Mme Enikõ Gyõri, ministre hongroise des Affaires européennes, évoque le slogan éloquent du programme de la présidence hongroise: « A strong Europe », « Une Europe forte ». Le renforcement de l'Europe concerne aussi bien les États membres que les institutions européennes et la zone euro. L'objectif d'une Europe forte a aussi une dimension humaine. L'Europe doit être au service du citoyen.
Dans cette optique, les mesures en matière de gouvernance économique, de politique environnementale et de politique agricole commune doivent toujours tenir compte de l'intérêt du citoyen.
La Présidence hongroise garantit la continuité du travail fourni par les présidences espagnole et belge. Dans ce cadre, la ministre hongroise des Affaires européennes entretient de bons contacts avec ses homologues espagnol et belge.
La ministre hongroise des Affaires européennes présente brièvement les objectifs prioritaires suivants:
A. La gouvernance économique
La politique qui était menée avant la crise économique et financière n'est plus tenable. L'Europe a besoin de budgets étatiques stables, d'une discipline fiscale rigoureuse et d'une stimulation de la croissance économique.
La présidence hongroise espère pouvoir clôturer la discussion concernant les six propositions législatives en matière de gouvernance économique d'ici à la fin juin 2011. Les notions essentielles de ces propositions sont une meilleure discipline fiscale, un contrôle budgétaire accru, l'approfondissement de la coopération, le renforcement des institutions et l'instauration d'un mécanisme européen de stabilité d'ici à la mi-2013. Le Parlement européen est, lui aussi, un acteur important dans le cadre de ces discussions.
Si la stabilité financière de certains États membres est compromise, il sera nécessaire de prendre des mesures visant à leur apporter une aide assortie de conditions strictes.
La présidence hongroise plaide également pour un euro fort et souhaite lever les obstacles à la réalisation du marché unique.
B. La stratégie Europe 2020
La stratégie Europe 2020 est l'instrument commun qui doit permettre de créer plus d'emplois, d'augmenter la croissance et d'améliorer l'inclusion sociale.
C. La politique agricole commune et la politique de cohésion
La présidence entend conserver les valeurs fondamentales de la politique agricole tout en tenant compte des nouveaux défis en la matière. Les parlements nationaux doivent être associés à la discussion à ce sujet.
D. La politique énergétique
Le développement d'une politique énergétique commune efficace fait partie des priorités de la présidence hongroise. Un Conseil sur la sécurité énergétique aura lieu le 4 février 2011. La présidence souhaite que des décisions stratégiques soient prises à cette occasion. La ministre hongroise des Affaires européennes fait référence notamment à la récente « Communication de la Commission européenne concernant les priorités en matière d'infrastructures énergétiques pour 2020 et au-delà ».
E. Environnement et développement durable
La présidence hongroise s'engage à ce que l'Union européenne poursuive la mise en uvre des décisions prises à Cancún en décembre 2010. Elle prépare également le Sommet sur les changements climatiques, qui aura lieu en Afrique du Sud. La présidence souhaite mettre l'accent sur une gestion de l'eau durable.
F. La communauté rom
La présidence hongroise entend améliorer la situation de la communauté rom en termes de formation, de logement et d'emploi. Elle préconise une meilleure coordination de ces aspects et une mise en perspective dans un cadre politique global. Un accord à cet égard devrait être conclu d'ici à la fin de la présidence.
G. Liberté, sécurité et justice
La présidence hongroise met l'accent sur la diversité culturelle qui existe au sein de l'Union européenne.
Une meilleure gestion des flux migratoires contribue au maintien de la stabilité, de la sécurité et du bien-être dans l'Union européenne.
La présidence s'efforcera de faire adhérer la Roumanie et la Bulgarie à l'espace Schengen dès que ces pays auront rempli les conditions requises. L'admission dans l'espace Schengen requiert un vote unanime.
H. L'élargissement de l'Union européenne
L'Union européenne est ouverte aux États qui satisfont aux critères et qui sont prêts à mener des réformes respectueuses des valeurs européennes, des droits de l'homme et du principe de l'État de droit.
Les négociations d'adhésion avec la Croatie approchent de leur terme. Il est important de montrer aux États des Balkans que l'Union européenne n'est pas un club fermé. Le Monténégro a obtenu le statut de pays candidat à l'adhésion. Par ailleurs, l'Union prépare un avis sur la demande de candidature de la Serbie.
En ce qui concerne la candidature de la Turquie et de la Macédoine, la ministre hongroise des Affaires européennes évoque des problèmes de nature bilatérale qui interfèrent avec la candidature.
III. ÉCHANGE DE VUES
A. Liberté, sécurité et justice
À la question, posée par M. Karl Vanlouwe, sénateur, de savoir si la Hongrie est réellement convaincue que la Roumanie et la Bulgarie sont prêtes à adhérer à l'espace Schengen, la ministre hongroise des Affaires européennes répond que tout dépend du rapport de la commission d'évaluation. S'il ressortait de ce rapport que les deux États membres satisfont aux exigences techniques, il serait difficile de leur refuser l'adhésion. L'intervenante ajoute que le problème de la lutte contre la corruption dans les deux pays précités doit être envisagé à la lumière du respect des conditions d'adhésion à l'Union européenne, indépendamment du dossier « espace Schengen ».
B. La lutte contre la pauvreté
Mme Olga Zrihen, Sénatrice, rappelle que l'Union européenne avait choisi de faire de l'année 2010 l'année de la lutte contre la pauvreté, tout particulièrement à l'égard des enfants.
Malgré les initiatives prises et les efforts déployés, il semble que les résultats n'aient pas été à la hauteur des attentes. La présidence hongroise compte-t-elle procéder à une évaluation générale de la situation ?
La ministre hongroise des Affaires européennes répond qu'une rencontre est prévue sous peu avec Mme Viviane Reding, vice-présidente de la Commission et commissaire à la Justice, aux Droits fondamentaux et à la Citoyenneté. Ce sera l'occasion de procéder à une évaluation, sur la base des rapports des États membres et de la Commission européenne.
La question de la pauvreté continuera en tout cas d'être suivie avec la plus grande attention, en raison de son importance pour le mieux-être des citoyens de l'UE.
C. Eurobonds, euro-obligations et gouvernance économique
Mme Olga Zrihen, Sénatrice, relève que les eurobonds ont donné matière à débats au cours de la crise économico-financière que l'UE et la zone euro ont traversé. Certains États membres ont exprimé des résistances, qu'il y aura lieu de gérer en fonction des processus définis par le Traité de Lisbonne, afin de revenir à une situation d'équilibre.
Mme Zrihen demande si la présidence hongroise envisage d'autres pistes ou instruments à cet effet.
La ministre hongroise des Affaires européennes est d'avis que la proposition mérite d'être prise en considération et renvoie au rapport du Parlement européen de la députée européenne Mme Sylvie Goulard sur la gouvernance économique.
Le processus législatif n'en est encore qu'à ses débuts. Si les États membres sont divisés sur la question, cela ne devrait pas pour autant les empêcher de prendre les mesures appropriées pour améliorer leur propre situation.
D. La législation hongroise sur les médias
Mme Olga Zrihen, Sénatrice, fait état de commentaires selon lesquels la nécessité se fait sentir de modifier la législation hongroise sur les médias.
Elle estime qu'il sera important de voir comment la charte des droits fondamentaux de l'Union sera mise en uvre par la Hongrie. Elle suivra avec intérêt les développements en la matière.
M. Richard Miller, Sénateur, se rallie à l'intervention précédente sur la question de la liberté de la presse et des médias.
M. Denis Ducarme, Député, s'associe aux propos tenus par M. Miller et Mme Zrihen sur l'attitude prise par le gouvernement hongrois à l'égard des médias.
Il exprime le sentiment selon lequel la Hongrie part avec une image quelque peu fragilisée eu égard à sa politique dans les domaines de la presse et des affaires étrangères. Plusieurs voix ont exprimé des inquiétudes du même ordre, ce que l'orateur déplore.
La ministre hongroise des Affaires européennes rappelle que la Hongrie a lutté pour sa démocratie et ses libertés fondamentales; l'engagement de la Hongrie en ce domaine ne peut être mis en doute.
La ministre invite tout le monde à prendre connaissance de la législation sur les médias, et à mieux se représenter le contexte dans lequel la législation en question a été adoptée. Cette loi date de la période communiste, en 1986. Elle a été réformée sur la base de l'expérience de plusieurs États membres.
La vice-présidente de la Commission et commissaire à la Société numérique, Mme Neelie Kroes, a soulevé trois points problématiques, à savoir les questions transfrontalières, l'équilbre de l'information, et l'obligation d'enregistrement des médias.
Dans cette procédure, la Commission joue son rôle de gardienne des Traités et la Hongrie apportera dans la quinzaine les réponses aux questions ainsi pointées. Le dossier suit donc normalement son cours.
E. L'Europe et les citoyens
M. Richard Miller, Sénateur, estime qu'une autre question, toujours d'actualité, mérite l'attention de toutes les parties concernées: comment l'Union européenne peut-elle davantage susciter l'intérêt de la part de ses citoyens ?
L'audio-visuel a certainement un rôle important à jouer à cet effet. Aussi, l'orateur suivra-t-il l'évolution de cette question avec un intérêt tout particulier.
F. L'élargissement de l'Union européenne et le partenariat oriëntal
M. Richard Miller, Sénateur, réfère au programme de la présidence qui fait part de la volonté de faire progresser les négociations d'accès à l'UE avec la Turquie, quand toutes les conditions requises seront remplies. L'intervenant note toutefois que Mme Enikõ Gyõri a semblé moins affirmative que ne l'est ce document.
De même, la volonté de promouvoir le partenariat euro-méditerranéen ressort clairement des intentions de la présidence hongroise, alors que des critiques ont été exprimées ça et là à l'encontre de ce partenariat créé par l'UE. M. Miller partage cette volonté de développer le partenariat existant, mais estime qu'une auto-critique doit d'abord avoir lieu.
La ministre hongroise des Affaires européennes exprime sa conviction que la Turquie fait partie de l'Europe. La Turquie est un État ami de l'Union européenne, à la périphérie de celle-ci. Elle joue un rôle-clé dans des domaines tels que la sécurité ou l'énergie. La plupart des chapitres relatifs à sa candidature son bloqués. Des progrès devraient être réalisés. Ceci étant, il appartient à l'État qui assure la présidence tournante au Conseil de l'UE de considérer la position de l'ensemble des États membres.
La politique de voisinage constitue une compétence partagée entre la Commission européenne et la haute représentante pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité. La présidence tournante au Conseil de l'UE a une compétence limitée en la matière.
Il y a lieu de tenir compte des efforts et mérites réalisés tout en assurant une consultation permanente, car l'Union europénne doit s'exprimer d'une seule et même voix. Le premier ministre hongrois rencontrera le président du Conseil européen, M. Van Rompuy, la semaine prochaine.
Le sommet euro-méditerranéen n'a pas été convoqué à cause des troubles survenus en Tunisie. La Hongrie suit le dossier de près, en attendant plus ample information de la part de la haute représentante pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité.
M. Hassan Bousetta, Sénateur, fait observer que la voix de l'Union européenne devrait être entendue au regard des événements qui secouent la Tunisie et les États voisins, tels l'Algérie. Il estime que les accords d'association qui ont été conclus devraient être mis en uvre de façon équilibrée. Le fait est qu'on n'a pas donné suffisamment de poids à ces instruments.
L'orateur estime que l'UE doit faire preuve de vigilance, tant sur sa façade méridionale qu'orientale. Quant à la situation en Europe de l'Est, quelle sera précisément l'attitude de la présidence hongroise à l'égard de la Biélorussie ?
La ministre hongroise des Affaires européennes se rallie à l'opinion de M. Boussetta qui estime que les projets de développement de l'UE devraient s'intéresser davantage aux aspects culturels et politiques.
À la question de savoir si l'Union doit encore apporter son aide à la Biélorussie, compte tenu de la situation politique dans ce pays, elle répond que la population serait la première victime si l'Union décidait de suspendre son aide. C'est la raison pour laquelle elle propose de développer un « pool de projets » d'assistance technique.
Chaque État sera invité à proposer une aide dans le domaine qui lui semble approprié. La Hongrie fournirait ainsi pour sa part une aide phytosanitaire.
La situation à l'égard de la Biélorussie sera à l'ordre du jour du Conseil Affaires étrangères du 31 janvier 2011.
G. Liberté de culte
À la question, posée par M. Denis Ducarme, député, de savoir si la présidence hongroise compte inscrire la liberté de culte à l'ordre du jour, la ministre hongroise des Affaires européennes répond que cette problématique sera l'un des points à l'ordre du jour de la réunion informelle des ministres des Affaires étrangères de l'UE.
Les présidents-rapporteurs, |
Philippe MAHOUX (S.) André FLAHAUT (K.) |