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Mme Marie Arena (PS). - La Commission européenne a présenté, le 25 novembre, un projet de réglementation de l'utilisation de certains crédits carbone issus des projets du Mécanisme de développement propre et de la Mise en oeuvre conjointe. Le projet prévoit qu'à partir de 2013, les crédits obtenus pour des projets de destruction des gaz hydrofluorocarbures - HFC - et du protoxyde d'azote N2O ne seront plus vendables sur le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre. L'interdiction concerne aussi bien les crédits qui pourraient être obtenus après 2012 que ceux qui sont acquis actuellement. Une certaine forme de rétroactivité est donc prévue.
On ne peut que se réjouir de cette décision compte tenu de certains dérives en la matière. En effet, certains droits de polluer ont notamment été acquis par des industriels européens grâce à des investissements en Chine dans des entreprises chinoises détruisant des gaz HFC-23 bien plus nocifs pour le climat que le CO2 ! En juillet, des ONG avaient d'ailleurs ouvertement accusé certains industriels européens de produire du HCF-23 uniquement pour obtenir les crédits liés à sa destruction. Ces quotas d'émission feraient donc l'objet de mécanismes mafieux.
Fin juillet, la conférence-cadre des Nations unies pour les changements climatiques a donc ouvert une enquête sur le sujet, laquelle est encore en cours.
Voici mes trois questions.
Des entreprises belges sont-elles concernées par ces abus ?
Quelles sont les conséquences d'une décision pour la Belgique et pour les acteurs concernés soit par des abus, soit par la production du HFC-23 ?
Que met-on en oeuvre en Belgique pour faire émerger de vrais projets durables en matière de crédits carbone ?
M. Paul Magnette, ministre du Climat et de l'Énergie. - Tout d'abord, je me réjouis que la Commission européenne ait déposé cette proposition d'exclure de la troisième phase du système ETS l'utilisation de crédits carbone issus de projets HFC-23 ou de projets d'acide adipique. Cela doit permettre de stimuler le développement de projets ayant une plus grande contribution au développement durable, tels que des projets d'énergies renouvelables, d'efficacité énergétique, etc., et d'éviter des effets pervers comme ceux que vous citez, madame.
Cette décision contribuera également à une meilleure distribution régionale des projets de clean development mechanism ou mécanisme de développement propre, puisqu'à l'heure actuelle ce sont principalement des pays émergents, comme la Chine et l'Inde, qui ont bénéficié du système et beaucoup moins des pays en développement.
Lors de déplacements que j'ai effectués dans des pays en développement ou moins émergés que la Chine ou l'Inde, comme l'Afrique du Nord, j'ai pu constater qu'il n'y avait pas de projets reconnus par l'Agence de Bonn, apte à les valider. Cela explique, hélas, qu'ils soient concentrés dans les pays émergents et qu'ils ne puissent pas s'inscrire pleinement dans les objectifs de notre politique de coopération au développement.
J'espère donc que les États membres accepteront cette proposition.
Aucune entreprise belge n'est concernée par la production de HFC-23 et d'acide adipique. Des crédits carbone de ce type n'ont donc pas été générés en Belgique par ce genre de production.
L'utilisation des crédits carbone par les entreprises belges couvertes par le système européen d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre est réglementée, pour ce qui concerne la quantité utilisable, par les plans d'allocation régionaux. Je me permets donc de vous renvoyer aux Régions à cet égard.
Dès sa création, le programme fédéral d'achat de crédits carbone a appliqué des critères de durabilité stricts, basés sur ceux de la Gold Standard Foundation, pour définir l'éligibilité des projets. C'est ainsi que le programme fédéral d'achat a toujours exclu l'achat des crédits visés par votre question, notamment ceux liés à des productions de gaz HFC-23, et a uniquement contracté des projets d'énergies renouvelables, d'efficacité énergétique ou évitant l'émission de méthane.
Rien ne change donc pour la Belgique, mais il s'agit d'une question importante à l'échelle européenne et internationale.
Mme Marie Arena (PS). - Je suis rassurée d'apprendre qu'au plan fédéral, des mécanismes de protection empêchent ce type de dérives. Il serait peut-être intéressant de veiller à ce que des dérives ne se produisent pas non plus sur le plan européen. Quand on parle d'environnement, les frontières ne sont malheureusement pas territoriales et il serait, me semble-t-il, judicieux de prévoir, au niveau européen, des mécanismes de prudence semblables à ceux que s'impose la Belgique.
(La séance est levée à 16 h 45.)