5-12COM

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Commission des Finances et des Affaires économiques

Annales

MERCREDI 8 DÉCEMBRE 2010 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Demande d'explications de M. François Bellot à la ministre de la Fonction publique et des Entreprises publiques et au secrétaire d'État à la Mobilité sur «le non-financement européen de deux projets de réseau transeuropéen de transport concernant la Belgique» (nº 5-101)

M. François Bellot (MR). - Le 27 octobre dernier, la Commission européenne, sous la plume de son vice-président, a présenté un rapport d'évaluation à mi-parcours des projets prioritaires du réseau transeuropéen de transport qu'elle cofinance pour la période 2007-2013.

Ce rapport de quelque 150 pages prévoit un certain nombre de modifications concernant des projets belges. Je m'attacherai plus particulièrement à deux d'entre eux.

Le Rhin d'acier, qui permet le transfert des marchandises entre le port d'Anvers et l'Allemagne, voit son cofinancement réduit de 2 833 519 euros sous la rubrique « Projets partiellement ou totalement abandonnés ».

Le projet Bruxelles-Luxembourg-Strasbourg, quant à lui, présente deux aspects. Pour l'aspect belge, dans la rubrique « Projets dont la durée d'exécution est portée à 2015 », le cofinancement européen prévu de 30 180 000 euros est réduit de 8 800 000 euros.

Monsieur le secrétaire d'État, avez-vous reçu des explications complémentaires de la part de la Commission européenne sur le caractère « pas crédible » et dès lors la révision de ces deux projets belges ?

Quelle fut la position de la délégation belge lors de la réunion du comité préparatoire à l'élaboration de ce schéma de révision ?

Qui était responsable de la confection d'un dossier exempt de tout reproche afin d'obtenir à 100% les financements européens ? Y a-t-il une voie de recours contre ces deux décisions ?

Pour la ligne Bruxelles-Luxembourg-Strasbourg, l'aide européenne au Grand-Duché de Luxembourg passe de 27 millions d'euros à 3,5 millions d'euros. Quelles sont les raisons de la diminution des aides sur le territoire tant belge que luxembourgeois ?

Quelles conséquences ces décisions auront-elles sur l'exécution des projets en question ? La SNCB a-t-elle l'intention de modifier sa programmation de travaux pour entrer dans l'épure de la Commission européenne de 2013 ?

Enfin, quelles sont les démarches que le gouvernement belge compte entreprendre pour maintenir le niveau d'aide européenne et, en tout cas, pour garantir la bonne exécution des travaux des deux lignes précitées, dont nous avons déjà souvent eu l'occasion de parler ?

M. Etienne Schouppe, secrétaire d'État à la Mobilité, adjoint au premier ministre. - Je répondrai à la première question relative à la possibilité d'utiliser les crédits pour une période de deux ans supplémentaires que, conformément aux résultats du Mid-Term Review des projets multiannuels TEN-T 2007-2013 (MAP), la Commission européenne a décidé de reporter de deux ans les dates finales des décisions, soit jusqu'au 31 décembre 2015. Des motifs de nature politique, financière et technique conditionnent ce report d'échéance.

Certains projets ont été purement et simplement supprimés, car jugés non crédibles par la Commission européenne, tandis que d'autres ont vu leur financement réduit.

Deux projets belges sont visés.

Primo, l'extension conditionnée et l'annulation partielle post 2015 : la modernisation d'une ligne ferroviaire Bruxelles-Strasbourg. Le financement européen qui avait été prévu à hauteur de 30,18 millions d'euros a été réduit de 8,8 millions d'euros.

Secundo, l'annulation partielle de la ligne ferroviaire qui relie le port d'Anvers à l'Allemagne. Le financement européen prévu à hauteur de 7,285 millions d'euros a été réduit de 4,451 millions d'euros.

Quant à votre deuxième question, je puis vous dire que dès 2007, les États membres, participant à des appels à proposition dans le cadre du programme financier 2007-2013, étaient informés qu'en 2010, la Commission européenne procéderait à un Mid-Term Review des projets pour la période 2007-2009. L'objectif était une réaffectation éventuelle permettant à certains projets suffisamment avancés de venir à terme de l'échéance fixée, à savoir 2013.

En effet, dès 2011 de nouveaux appels à propositions seront lancés pour le financement de projets, l'objectif étant que l'enveloppe financière de la Commission pour le TEN-T soit totalement consommée.

Le 22 octobre dernier, les États membres ont reçu de la Commission européenne par voie électronique le MAP project portfolio review.

Lors de la réunion du TEN-T Financial Assistance Committee (FAC) du 29 octobre dernier, les États membres ont été informés oralement des résultats de cette révision à mi-terme et quelques documents furent distribués en séance. Au cours de cette réunion, la délégation belge a demandé de plus amples informations, notamment des explications sur les arguments avancés dans le cadre de la révision qui ne sont pas liés directement à la décision de financement.

Les résultats du Mid-Term Review donnent une estimation des réductions du soutien européen. Ces estimations ne sont pas finales et doivent faire l'objet d'une discussion avec l'Agence, comme cela a été précisé lors du FAC du 29 octobre dernier. À cette fin, le SPF Mobilité et Transports a invité la Commission européenne, l'Agence exécutive TEN-T et Infrabel à une réunion, qui aura lieu le 14 décembre prochain. L'objectif de cette réunion est de détailler les activités du projet qui seront effectivement réalisées à fin 2015. Ces activités une fois définies seront à la base de l'adaptation de la décision de soutien européen qui devra être rédigée pour la fin janvier 2011. Cette décision adaptée intégrera notamment l'extension de la période à fin 2015 ainsi que les budgets relatifs aux activités effectivement réalisées à fin 2015, ce qui permettra de dégager le montant final de la réduction du soutien européen.

Dans le cadre de cette décision de soutien modifiée, Infrabel devra également définir des étapes précises qui permettront à l'Agence de mesurer efficacement l'achèvement des activités au terme de l'année 2015.

Il est important de préciser que la crédibilité des deux projets que vous avez mentionnés n'est pas remise en cause, contrairement à celle du planning initialement prévu. En effet, les délais d'exécution annoncés par Infrabel, auteur des projets et bénéficiaire des subsides, n'ont pas pu être respectés pour diverses raisons. Dès le lancement du MAP 2007-2013 et les appels à propositions y relatifs, il était pourtant clair que la Commission européenne prêterait, plus que dans le passé, une attention particulière au respect des plannings et des estimations budgétaires des projets prioritaires du réseau TEN-T.

Par ailleurs, nous n'avons pas connaissance d'une réunion du Comité des infrastructures de transport, préparatoire à la décision finale de la Commission. L'Agence et la Commission ont pris cette décision sur la base des éléments que je viens de citer et des avis d'experts indépendants.

Comme je l'ai déjà indiqué, aucun dossier n'a dû être présenté dans le cadre du Mid-Term Review, mais des informations complémentaires relatives aux budgets et plannings ont bien été fournies en complément des Action Status Reports (ASR) de l'année 2010, relatifs à l'année de travail 2009.

Nous pouvons considérer que les dossiers initiaux introduits en 2007 pour obtenir les financements dans le cadre du MAP 2007-2013 étaient exempts de tout reproche puisque la Commission européenne les a acceptés et qu'elle a octroyé les subsides sollicités. Ces derniers concernent le projet classique - donc, gares non comprises -, l'électrification 25 kV, le Pendolino et la courbe de Mirwart. L'estimation de réduction du soutien européen reprend des activités - électrification 25 kV, courbe de Mirwart - qui doivent encore faire l'objet d'une décision d'Infrabel et qui seront réalisées en grande partie après 2015. Ces activités doivent donc être extraites de la base du calcul de déduction.

Il est à noter que les sous-projets 25 kV et Pendolino sur l'axe 3 pourraient faire l'objet d'une nouvelle demande de subsides sur le programme pluriannuel de la Commission européenne 2014-2018, voire dès 2011, s'il est démontré que les activités pour lesquelles un soutien est demandé sont nécessaires à la poursuite du projet global.

Les dossiers de demande de subsides sont toujours introduits par l'État et en son nom. L'administration procède, dans les limites de ses moyens, à un contrôle préalable de complétude et de qualité des dossiers qui lui sont soumis par les candidats bénéficiaires, en l'occurrence Infrabel.

La confection proprement dite des dossiers relève de la responsabilité des candidats bénéficiaires et donc, dans le cas présent, d'Infrabel. Cette dernière dispose de l'expérience, de l'expertise technique et des moyens nécessaires pour élaborer de grands projets d'investissement et elle assure la maîtrise d'oeuvre de leur réalisation. Elle devrait être en mesure de proposer à l'avenir des projets dont le planning et l'estimation initiaux sont plus réalistes.

De son côté, l'administration devra se doter de l'expertise et des moyens lui permettant de mieux juger de la qualité d'un projet, en ce compris son efficacité, et les moyens proposés pour le réaliser.

La Cour des comptes a, lors d'audits successifs en 2001, 2008 et 2010, pointé du doigt le manque de moyens dont l'administration chargée du monitoring des projets d'investissements ferroviaires dispose. Malgré les restrictions budgétaires, cette situation mérite toute notre attention.

Vous demandez quelles sont les voies de recours contre ces deux décisions. Les résultats du Mid-Term Review sont une estimation des réductions qui doivent faire l'objet de discussions avec l'Agence, comme ce fut précisé lors de la réunion du FAC du 29 octobre dernier. La réunion du 14 décembre prochain vise à discuter dans les détails des activités qui seront réellement éligibles à la fin 2015 ; le but étant de dégager le montant final de la réduction du soutien européen.

Vous m'interrogez sur les raisons de la diminution des aides pour la liaison Bruxelles-Luxembourg-Strasbourg et sur l'aide européenne au Grand-Duché passant de 27 millions d'euros à 3,5 millions.

Concernant la réduction belge, les raisons suivantes sont alléguées, en anglais : « The Mid-Term evaluation took note that the project has undergone some modifications to the initial plans and that in line with the revised implementation plans it is expected to be completed after 2015. Given the delays, it will not be possible to maintain the EU support for the part of the works to be undertaken after 2015. This entails a reduction to the TEN-T contribution of approximately 8.9 million euros.

The updated completion of the remaining activities by the end of 2015 is feasible, provided that the following conditions are met : electrification works start by the end of 2010 ; complementary studies for the selected `Pendolino' option start in 2010. It is also necessary for the beneficiary to ensure that additional funding is made available to cover the significant increased cost of the project. »

En ce qui concerne le Grand-Duché de Luxembourg, je ne m'exprimerai pas à la place de mon homologue grand-ducal.

Quant aux conséquences que vont avoir ces décisions de la Commission européenne et les modifications éventuelles de la programmation des travaux de la SNCB en fonction de ces décisions, la réunion de concertation entre la Commission européenne, l'Agence exécutive TEN-T, Infrabel et l'administration qui aura lieu le 14 décembre prochain, devra fournir des éléments de réponse.

Ensuite et sur la base des conclusions de cette réunion, Infrabel devra élaborer et communiquer en toute transparence et sans ambiguïté aucune, le calendrier et l'estimation révisée pour l'ensemble du projet jusqu'à son achèvement complet et, pour la sauvegarde des subsides européens, jusqu'à fin 2015.

En ce qui concerne la réalisation du projet sur le territoire belge, les travaux de renouvellement ou de modernisation des ouvrages d'art suivent leur cours selon le calendrier prévu. Les travaux de voie (donc la modernisation de l'infrastructure ferroviaire - rails, traverses, ballast - et l'assainissement de la plate-forme) se poursuivent également selon le calendrier et dans le respect des budgets.

Par contre, les travaux de réélectrification en caténaires mixtes subissent des retards importants. Ces retards, six mois pour l'instant, semblent principalement dus aux intempéries hivernales et aux manquements de l'entreprise chargée des travaux pour les tronçons Arlon-Sterpenich et Hatrival-Libramont.

Il apparaît clairement que la date de fin de projet renseignée dans le dernier dossier dont dispose l'administration, à savoir 2015, ne sera pas respectée, d'autant plus qu'Infrabel étudie d'autres améliorations infrastructurelles de la performance de la ligne, qui pourront faire l'objet du futur plan d'investissement pluriannuel et qui auront un impact certain sur la date de fin de projet et sur son coût global.

En ce qui concerne les démarches entreprises par le gouvernement belge, la réunion du 14 décembre 2010 fournira de plus amples informations en ce qui concerne la réduction du subside. Dès 2011, lors des prochains appels à propositions, Infrabel pourra soumettre de nouvelles demandes de soutien européen, sur la base de plannings et d'estimations budgétaires plus pertinents. Si l'administration pouvait disposer de moyens appropriés complémentaires, elle pourrait davantage veiller à la complétude, l'opportunité, l'efficacité, l'efficience et l'opportunité des projets proposés au financement public européen.