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6 OCTOBRE 2010
La présente proposition de résolution reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 17 juillet 2007 (doc. Sénat, nº 4-94/1 - SE 2007).
(Sources: Actes du colloque Grande Région — mars 2004 — Habay-la-Neuve — Château de Pont d'Oye)
La médecine moderne est extrêmement performante dans de nombreux domaines. Ses succès et son efficacité sont incontestables, notamment dans les domaines de l'urgence, de la médecine périnatale, chirurgicale, de greffe et des maladies infectieuses.
Toutefois, dans nos pays industrialisés, on observe, depuis une vingtaine d'années, une grave progression de maladies chroniques d'étiologie inconnue (maladies rhumatismales, dégénératives, psychosomatiques, allergies, maladies auto-immunes, fibromyalgie, syndrome de fatigue chronique, sensibilité multiple aux produits chimiques, ...) contre lesquelles la médecine a actuellement peu de prise et de moyens et qui alourdissent de manière significative les dépenses de santé des pays occidentaux.
Aujourd'hui, les effets néfastes sur la santé d'un environnement pollué (air, eau, nourriture, habitat, vêtements, produits cosmétiques, métaux lourds, ...) sont admis et reconnus de manière officielle au travers de conférences internationales des ministres de l'Environnement et de la Santé et de nombreux congrès scientifiques, organisés par des sociétés médicales.
Dès 1997, la Commission européenne retenait d'ailleurs les maladies liées à la pollution comme domaine prioritaire de l'action communautaire en matière de santé publique. Six ans plus tard, en juin 2003, elle publiait une communication relative à une stratégie « Environnement — Santé » par plans d'actions successifs qui aboutit, le 9 juin 2004, à la ratification du premier Plan d'action européen 2004-2010 en faveur de l'environnement et de la santé.
De même, dès 1989, les États membres de la région européenne de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ont tenu des conférences sur l'environnement et la santé, qui ont abouti en juin 2004 à Budapest, lors de la 4e Conférence ministérielle environnement et santé, à l'adoption d'un Plan d'action pour l'environnement et la santé des enfants en Europe (CEHAPE).
La notion d'exposition chronique, durable, à faibles doses à des substances nocives, agissant souvent de façon synergique, la notion de bio-accumulation de ces substances dans l'organisme et la notion de susceptibilité individuelle sont essentielles dans cette nouvelle approche médicale holistique et interdisciplinaire, dite « médecine de l'environnement », vers laquelle certains pays comme l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse, la Suède, le Grand-Duché de Luxembourg ou encore le Canada, ont investi et font œuvre pionnière.
Dans ce domaine important, il convient d'adopter une démarche conforme à celle prônée par Claude Bernard, à savoir une démarche scientifique qui permet d'identifier des symptômes, d'en répertorier la répétition, d'en identifier l'étiologie, afin de tenter une catégorisation non figée permettant de proposer des traitements spécifiques et efficaces.
Ce n'est qu'à travers cette démarche que l'on peut tenter effectivement de considérer que la maladie, son étiologie et éventuellement sa prise en charge thérapeutique peuvent être codifiées.
Il faut, dans ce dossier extrêmement sensible, poursuivre à la fois la recherche basée sur une démarche scientifique et savoir faire preuve d'un empirisme avisé. C'est essentiel également pour les malades, car la prise en charge ne peut pas être exclusivement liée à tout ce qui est avéré. Sinon, de trop nombreuses pathologies ne seraient jamais prises en charge.
Philippe MAHOUX. |
Le Sénat,
A. considérant que parmi les droits de l'homme, la santé, au sens large des définitions les plus larges qui lui sont données par l'OMS, occupe une place particulière et doit être considérée comme une valeur essentielle pour l'ensemble de la population;
B. considérant que la Commission européenne a retenu dès 1997 les maladies liées à la pollution comme domaine de l'action communautaire en matière de santé publique;
C. considérant qu'en juin 2003, ladite Commission publiait une communication relative à une stratégie « Environnement — Santé » par plans d'actions successifs qui aboutit, le 9 juin 2004 à la ratification d'un premier Plan d'action européen 2004-2010 en faveur de l'environnement et de la santé;
D. considérant les engagements des différentes conférences européennes relatives à l'environnement et à la santé qui insistent notamment sur l'élaboration de plans nationaux visant à rencontrer la problématique des maladies environnementales et la mise en œuvre de ces programmes, afin d'améliorer l'environnement et la santé au XXIe siècle;
E. considérant plus particulièrement l'adoption du Children's Environment and Health Action Plan Europe (CEHAPE) par la 4e Conférence ministérielle environnement et santé en juin 2004 à Budapest;
F. considérant l'accord de coopération entre les différents intervenants de la santé et de l'environnement dans notre pays;
G. considérant les engagements pris par la Conférence interministérielle de l'environnement élargie à la santé (CIMES) dans le cadre du Plan national d'action environnement-santé, reprenant les principales données fédérales, régionales et communautaires en ce qui concerne les relations entre l'environnement et la santé et les plans et actions menés par les autorités concernées (NEHAP) et du Children's Environment and Health Action Plan for Europe (CEHAPE);
H. considérant les actes du Colloque international du 13 mars 2004 « Les maladies de l'environnement: un défi pour les professionnels de la santé », organisé par l'association « Stop Poisons Santé », porte-parole et groupe d'entraide et de défense des malades de l'environnement;
I. considérant les exemples étrangers en matière de moyens diagnostiques et thérapeutiques démontrant une dynamique de médecine environnementale incluant la formation des médecins, le développement d'instruments et d'équipements analytiques spécifiques, la création d'unités hospitalières de médecine de l'environnement;
J. considérant les résultats positifs enregistrés par les modèles de pays voisins tentant de rencontrer efficacement les problèmes de patients souffrant de maladies environnementales;
K. considérant que la connaissance de ces maladies environnementales et la prise en charge adéquate des patients permettrait d'épargner bon nombre d'analyses lourdes et inutiles à notre système de sécurité sociale,
Demande au gouvernement, en partenariat avec tous les niveaux de pouvoir et compte tenu de l'accord de coopération formalisé entre les différents intervenants de la santé et de l'environnement du pays:
1. d'insister sur l'importance de l'environnement et de ses répercussions sur la santé de nos concitoyens, en démontrant que les maladies environnementales sont admises et reconnues par les autorités scientifiques tant nationales qu'internationales;
2. de lancer des pistes de réflexions et d'actions pour une politique cohérente et intégrée en matière de maladies environnementales dans notre pays telles que:
a) la mise en œuvre de formations en médecine de l'environnement à destination des médecins généralistes (formation continuée);
b) la mise en place d'unités hospitalières de l'environnement, de laboratoires spécialisés dans le diagnostic des maladies environnementales;
c) la mise en circulation, sur l'ensemble du territoire belge, d'ambulances de l'environnement à l'instar de celles qui existent déjà, afin de mener des investigations dans des habitations privées et d'étendre leur domaine d'action aux écoles, aux crèches ou encore aux bâtiments publics, en effectuant soit des mesures directes, soit des prélèvements qui seront examinés en laboratoire;
d) l'élargissement du dossier médical aux déterminants environnementaux;
e) le développement et la gestion des bases de données relatives à tous les aspects des maladies environnementales avec une collaboration, se traduisant par des échanges de données dans l'ensemble de notre pays;
f) le soutien d'une politique de recherche scientifique en matière de maladies environnementales et la détermination de priorités en la matière;
3. d'instaurer, en collaboration avec l'Institut national d'assurance maladie-invalidité (INAMI), les organismes-assureurs, les acteurs de la médecine du travail, des mesures devant aboutir à la reconnaissance et à la prise en charge des maladies environnementales, et cela dans le cadre des diverses expériences des pays de l'Union européenne.
20 juillet 2010.
Philippe MAHOUX. |