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Mme Christiane Vienne (PS). - Aujourd'hui, Internet est un outil quasi incontournable dans toute une série de démarches. Le travailleur ne peut plus s'en passer pour la gestion optimale de son travail ; celui qui cherche un emploi consulte les offres sur la toile ou met en ligne son curriculum vitae ; la personne à mobilité réduite peut, grâce à cet outil, réduire sa dépendance à autrui et gagner en autonomie ; l'étudiant y a recours pour effectuer des recherches ou communiquer avec le corps professoral ; l'administration fiscale favorise désormais les personnes qui remplissent leur déclaration en ligne ; bon nombre d'interlocuteurs - mutuelles, banques, etc. - offrent des facilités via le Net ; enfin, le Moniteur Belge est publié exclusivement sur Internet, alors que nul n'est censé ignorer la loi.
Une connexion Internet représente malheureusement un coût non négligeable pour le budget d'un ménage. Dès lors, un autre phénomène apparaît, la fracture numérique.
Où en est le tarif social pour l'accès à Internet ? D'autres mesures sont-elles envisagées pour assurer la baisse du coût pour le consommateur ?
Pouvez-vous commenter les chiffres communiqués récemment par l'INS relatifs aux ménages belges disposant d'Internet ?
Disposez-vous d'informations complémentaires sur l'étude Jeunes off line mettant en évidence une nouvelle forme de fracture numérique ?
Où en est le Plan national de lutte contre la fracture numérique ?
M. Philippe Courard, secrétaire d'État à l'Intégration sociale et à la Lutte contre la pauvreté. - Je vous lis d'abord la réponse du ministre Van Quickenborne.
Aujourd'hui, le service universel prévoit la fourniture d'un service de base téléphonique qui comprend un accès fonctionnel à Internet mais pas l'abonnement proprement dit à Internet. À ma connaissance, seul Telenet a pris l'initiative de proposer un accès à Internet à un tarif social ; toutefois, l'utilisateur doit répondre aux conditions pour bénéficier du tarif social.
Une proposition de loi du 15 juin 2009, référence 2048, vise à modifier la loi du 13 juin 2005 relative aux communications électroniques en ce qui concerne le tarif téléphonique social. L'IBPT a remis un avis au ministre sur la proposition de loi, le 6 juillet 2009. Plusieurs amendements ont ensuite été proposés.
Une modification importante de cette loi est l'élargissement du concept d'opérateur susceptible d'offrir un tarif social aux prestataires de services en communications électroniques, y compris l'accès à Internet.
J'ai demandé à l'IBPT de consulter le secteur sur cette proposition de loi et sur ses amendements. Nous disposerons ainsi d'une référence sur les souhaits du secteur et du marché concernant la composante sociale du service universel, à la suite des évolutions technologiques, dont Internet n'est pas la moindre.
L'introduction de l'accès à Internet comme composante sociale du service universel est un sujet de grande actualité au niveau européen depuis le vote, fin 2009, du nouveau paquet réglementaire « télécom ». Dès sa publication, cette loi remplacera la loi sur les communications électroniques actuellement en vigueur.
La Commission européenne organise actuellement une consultation publique sur l'évolution du service universel, en particulier d'Internet. Cette consultation a lieu jusqu'au 7 mai 2010.
S'agissant d'autres initiatives visant à faire baisser les prix, je me réfère à mon plan numérique dont l'objectif est de stimuler les investissements et la concurrence sur le marché des télécommunications. Ce plan peut être consulté sur le site www.quickonomie.be. et comprend trente points d'action.
L'enquête TIC 2009 de la Direction générale Statistique et Information économique a été réalisée auprès de plus de 6 400 Belges. Les principaux résultats de cette enquête sont les suivants : 71% des ménages belges possèdent un PC ; 67% ont accès à Internet ; l'utilisation de l'ordinateur et d'Internet sont fortement liées à l'âge ; l'e-commerce a décollé en 2009.
Posséder un ordinateur est entré dans les moeurs depuis longtemps en Belgique. Cette année, le nombre de ménages disposant d'un PC a encore progressé, à savoir 71% en 2009 contre 70% en 2008 et 67% en 2007 contre 57% en 2006. Cette modeste avancée se réalise entièrement en Wallonie et à Bruxelles. Il existe toutefois d'importantes disparités en fonction des régions.
Ainsi, 75% des ménages disposaient d'au moins un ordinateur en Flandre en 2008 et en 2009, contre 63% en 2008 et 65% en 2009 en Wallonie, et 67% en 2008 et 69% en 2009 à Bruxelles. Il convient néanmoins de faire preuve d'une certaine réserve étant donné le peu de personnes interrogées.
En outre, cette question est très étroitement liée à l'âge de la personne interrogée. Au moins neuf personnes sur dix, dans les catégories d'âge les moins élevées, ont surfé sur Internet au cours des trois mois qui ont précédé l'enquête. Trois quarts environ ont surfé presque quotidiennement. Ces pourcentages diminuent progressivement dans les classes d'âges supérieures pour finalement atteindre moins de 46% dans le groupe d'âge le plus élevé en ce qui concerne les personnes qui ont surfé sur Internet au cours des trois mois qui ont précédé l'enquête, et à 29% en ce qui concerne les personnes qui ont utilisé quotidiennement Internet.
La Belgique enregistre un score moyen par rapport aux autres pays de l'Union européenne. Par exemple, le pourcentage des ménages ayant accès à Internet se situe dans la moyenne européenne : devant la France, mais derrière l'Allemagne et les Pays-Bas qui sont en tête du peloton européen.
En 2009, 67% des familles belges étaient connectées à Internet contre 79% en Allemagne, 63% en France et 90% aux Pays-Bas. La moyenne de l'Union européenne des Quinze s'élève à 68%.
L'e-commerce enregistre une hausse spectaculaire. L'une des applications phares d'Internet est incontestablement le commerce électronique, l'achat de biens et de services sur Internet, qui a connu une véritable percée en 2009 dans notre pays.
Alors que le pourcentage d'internautes ayant effectué des achats en ligne au cours des trois mois ayant précédé l'enquête était de 15%, nous atteignons à présent les 25%, soit une hausse de plus de 75% - 78,5% pour être précis - par rapport à 2008. Nous accusons néanmoins toujours un retard par rapport aux principaux pays voisins et à la moyenne européenne.
J'en viens à ma réponse.
Je partage votre avis concernant le coût de la connexion à Internet. Celui-ci pèse encore beaucoup trop lourd dans le budget des ménages à faibles revenus. Il constitue un véritable frein pour toute une tranche de la population.
Si l'on se base sur les chiffres de l'INS, on peut se dire que cette fracture numérique concernant l'accès à Internet est en train de se réduire d'année en année. On ne peut que s'en réjouir. Cependant, selon ces mêmes chiffres, l'écart reste encore bien présent pour plus d'un Belge sur quatre.
Par ailleurs, des calculs effectués récemment par la Fondation Travail-Université démontrent très clairement que les personnes à faibles revenus ne sont pas venues grossir le nombre d'utilisateurs d'Internet au cours des dernières années. Entre 2007 et 2009, les écarts par rapport à la moyenne entre les différentes catégories de revenus se sont en effet accrus.
Si nous voulons réellement combattre la fracture numérique dans toutes ses composantes, il faut donc pouvoir assurer à tous l'accès à Internet. La Suisse, l'Estonie et la Finlande ont déjà garanti légalement ce droit à tous leurs citoyens, en l'instituant comme service universel. Je plaide pour que la Belgique suive cette voie.
Pour des précisions supplémentaires concernant cette question, je vous renvoie à la réponse de mon collègue, Vincent Van Quickenborne.
Les inégalités numériques ne se limitent pas à la seule question de l'accès. L'étude réalisée à la demande de mes services, par la Fondation Travail-Université, sur les Jeunes off-line en montre une des facettes.
La fracture numérique a en effet évolué ces dernières années et on parle de plus en plus d'une fracture numérique de second degré, qui porte sur les usages numériques.
Ainsi, l'étude a démontré que si les jeunes « totalement off-line » étaient très peu nombreux, il existe par contre un décalage entre l'expérience des jeunes sur Internet et les attentes de la société à leur égard en matière d'usages des technologies de l'information et de la communication, dans la sphère socio-économique.
Cela concerne l'utilisation de logiciels, la recherche et le traitement d'informations en ligne, la maîtrise d'applications financières et commerciales, le recours aux services publics en ligne. Ce décalage peut être source de problèmes d'autonomie et d'insertion socio-économique.
Pour les jeunes défavorisés qui sont dans des situations de quasi-déconnexion, le décalage est encore plus grand, car ils n'ont pas la possibilité de développer les compétences numériques nécessaires à leur insertion dans le travail, la formation et la vie autonome en société.
À la suite de cette étude, j'ai lancé cette semaine un appel à projets à destination des pouvoirs locaux et des associations, afin de soutenir financièrement le développement de projets pilotes qui auront pour objectif de permettre aux jeunes défavorisés en situation de quasi-déconnexion, de dépasser progressivement les limites de leur univers numérique pour devenir des utilisateurs avertis de la société de l'information.
J'espère que les projets pilotes retenus pourront par ailleurs servir d'exemples par rapport à cette problématique.
Enfin, la première phase du Plan national de lutte contre la fracture numérique arrive à échéance fin de cette année. Lors de l'adoption du plan, en 2005, il avait été prévu qu'une deuxième phase de cinq ans suivrait. Je vais donc très prochainement entamer le travail de préparation de cette deuxième phase avec les différents ministres concernés.
Au niveau d'un premier bilan, nous savons déjà que le plan a été à la fois un cap et un catalyseur : un cap parce que le plan a permis de structurer les actions et les politiques des différents pouvoirs publics par rapport à un enjeu social majeur et des objectifs communs ; un catalyseur parce que, bien que déjà actives dans le champ de la fracture numérique, les entités fédérales et fédérées ont su profiter de ce plan pour donner une nouvelle impulsion à leurs politiques respectives.
Aussi, sur la base d'une évaluation de la première phase, mon objectif est de pouvoir amplifier le travail mené précédemment en matière de lutte contre la fracture numérique, par l'adoption d'un plan 2011-2015 qui soit le fruit d'une collaboration étroite des entités fédérales et fédérées.
Mme Christiane Vienne (PS). - Je remercie le secrétaire d'État et le ministre de leur réponse extrêmement détaillée et intéressante, que je relirai avec attention car je crains que certains éléments ne m'aient échappé.
Je déposerai pour ma part une proposition de loi visant à instaurer un tarif social sur l'Internet à haut débit.