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M. Philippe Monfils (MR). - La presse nous a appris ce mardi qu'une note interne du service du personnel du SPF Justice avait récemment été adressée au ministre concernant l'externalisation des signes religieux.
Cette note évoquerait trois possibilités, à savoir une interdiction générale de tout signe religieux, une autorisation partielle - les signes religieux ne seraient alors interdits qu'aux agents de première ligne ayant un rapport d'autorité ou de pouvoir avec le public ou exerçant des fonctions sensibles, comme les magistrats - ou une autorisation générale.
La dernière option semble avoir les faveurs de la cellule diversité du ministère qui prône « une réelle ouverture des pratiques » affirmant que « la neutralité des agents n'est pas garantie par leur apparence ».
Cette note clairement orientée, puisqu'elle propose la troisième solution, remet en question les principes fondamentaux de la Constitution belge qui garantit de plein droit la neutralité de l'État et l'autonomie des églises.
Elle est également contraire aux dispositions prévues par l'arrêté royal du 14 juin 2007 qui mentionne en son article 8 que « Lorsqu'il est, dans le cadre de ses fonctions, en contact avec le public, l'agent de l'État évite toute parole, toute attitude, toute présentation qui pourraient être de nature à ébranler la confiance du public en sa totale neutralité, en sa compétence ou en sa dignité ».
Je ne tiens pas à entrer dans le débat de fond qui agite depuis quelques jours l'opinion publique. Cependant, certaines questions doivent être posées au ministre et il est essentiel que celui-ci prenne position assez rapidement.
Monsieur le ministre, étiez-vous au courant de cette note ? Qui l'a demandée ? Comment est-elle arrivée ? Estimez-vous judicieuse la rédaction d'une telle note ? S'il y a bien un département administratif qui doit être au-dessus de tout soupçon en ce qui concerne le respect de la hiérarchie - l'administration est quand même soumise au ministre - et la nécessaire prudence dans certaines situations, c'est bien évidemment le SPF Justice. On pourrait éventuellement admettre que dans d'autres SPF, des galopins croient utiles d'exprimer dans les médias leur sentiment sur l'un ou l'autre sujet, mais dans le cas dont je parle, cela pose problème.
Je ne crois pas aux coïncidences politiques. Il est tout de même assez étonnant que cette note sorte précisément au moment où se déroule un débat assez difficile concernant le port du voile au parlement ou ailleurs. Pourquoi cette note sort-elle maintenant ? Que se passe-t-il ?
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire de cette note ? Êtes-vous d'accord avec son contenu ? Quelle attitude comptez-vous adopter ? Comptez-vous déposer un projet de modification de la réglementation ? Bref, partagez-vous l'une des trois conclusions de cette note et laquelle ?
Je ne puis accepter qu'une administration fasse ainsi connaître ses pensées profondes par le biais de la presse sans y avoir été invitée par qui que ce soit. Je crois encore, peut-être parce que je suis juriste et que je n'ai plus vingt-cinq ans, à une certaine hiérarchisation. Le ministre est à la tête du pouvoir exécutif ; il est secondé par son administration qui exécute, même si elle peut lui donner certaines idées. Je ne crois pas à ces fuites dans la presse qui sont manifestement orchestrées et qui causent le plus grand tort dans l'opinion publique pour un débat qui devrait être beaucoup plus serein. D'ailleurs, tout le monde s'accorde à dire que ce débat devrait être renvoyé à plus tard, quand les esprits seront apaisés.
M. Stefaan De Clerck, ministre de la Justice. - Mon prédécesseur, le ministre Vandeurzen, a approuvé en 2008 le plan d'action « diversité », tel que présenté par le comité de direction de la Justice. Ce plan détermine de nombreuses actions afin de favoriser l'intégration d'allochtones dans le circuit de travail de la Justice.
En accord avec tous les directeurs généraux et les représentants du Collège des procureurs généraux, mon prédécesseur a signé la Chartre de diversité. Celle-ci stipule explicitement que la Justice accomplira des efforts supplémentaires pour éliminer toute forme de discrimination, que ce soit au niveau du sexe, de l'origine ou de l'orientation sexuelle ou autre.
À l'instar de la police fédérale, la Justice est à la recherche de candidats potentiels d'origine allochtone qui puissent répondre à certaines exigences, comme la connaissance des langues étrangères utilisées par les détenus.
La présence d'allochtones sur le lieu de travail soulève automatiquement la question de savoir ce qu'il convient de faire quand se présente une personne portant le foulard. L'administration a remis une première proposition à ce sujet à la ministre Onkelinx, mais elle est restée sans suite jusqu'à ce jour.
Je n'ai pas encore reçu de nouvelle proposition de mon administration. J'ai appris par les médias que le service du personnel était en train de rédiger une note juridique sur ce point.
En outre, les médias diffusent un document contenant les différentes pistes juridiques élaborées par mon administration. Il est actuellement soumis pour avis à la commission d'accompagnement en matière de diversité. Il doit encore être transposé à un niveau opérationnel dans différents champs d'activité de la Justice - greffe, prison, tribunal - et soumis pour accord au comité de direction. Ce n'est qu'après l'accord de ce dernier que je pourrai prendre clairement position à ce sujet.
J'ai d'ailleurs demandé au président du comité de direction de prendre contact avec les responsables de la Fonction publique. En effet, j'estime que ces propositions concernent potentiellement tous les fonctionnaires et pas uniquement ceux de la Justice. Une concertation est donc indispensable.
Lorsque je disposerai d'une proposition concrète, je l'étudierai en détail.
J'ai déjà contacté le ministre de la Fonction publique, M. Vanackere, et des questions lui ont été posées aujourd'hui même à la Chambre. Je me permets d'ailleurs, avec son autorisation, de vous lire le texte de sa réponse en néerlandais, qui fait référence au « statut Camus » datant de 1937.
`Wanneer hij bij zijn ambtsuitoefening in contact komt met het publiek, vermijdt de rijksambtenaar elk woord, elke houding, elk voorkomen die van die aard zouden kunnen zijn dat ze het vertrouwen van het publiek in zijn volledige neutraliteit, in zijn bekwaamheid of in zijn waardigheid in het gedrang zouden kunnen brengen.' Het standpunt van collega Vanackere is dus dat men in elke situatie wil vermijden dat een ambtenaar een voorkomen heeft dat het vertrouwen in zijn neutraliteit kan aantasten.
Dit onderwerp werd, zoals gezegd, daarnet ook in de Kamer behandeld en ik wacht op de nota.
Je n'ai pas encore vu cette note. Lorsqu'elle sera disponible, je demanderai au département de la Fonction publique de rendre un avis sur la façon de traiter cette question.
M. Philippe Monfils (MR). - Je retiens de sa réponse que le ministre ne connaissait pas la note publiée dans les médias. Si un ministre doit lire les quotidiens pour savoir ce qui se passe dans son administration, un problème se pose. Je ne vous jette pas la pierre, monsieur le ministre, mais je souligne le manque de déontologie du fonctionnaire concerné qui n'a pas à communiquer ces informations à la presse.
En outre, cette divulgation a lieu au cours d'une période troublée et difficile. La note, qui ne compte que quelques lignes, peut être interprétée de toutes sortes de manières. Nous savons en effet très bien que des problèmes se sont posés voici quelques jours.
Enfin, le texte de votre collègue de l'Intérieur est connu. Il s'agit de l'arrêté royal du 14 juin 2007 relatif au statut des agents de l'État. Il modifie en effet celui du 2 octobre 1937 mais prévoit que « l'agent de l'État évite toute parole, toute attitude, toute présentation qui pourraient être de nature à ébranler la confiance du public en sa totale neutralité, en sa compétence ou en sa dignité ». Ou bien on en reste là - je n'ai d'ailleurs entendu personne souhaiter aller plus loin - ou bien on remet ce principe en cause. Dans ce cas, ce doit être fait sérieusement et donc pas par le biais d'une note qui atterrit dans un journal et qui prend des proportions d'autant plus fortes que cette question fait actuellement l'objet d'un débat.
Peut-être pourriez-vous, monsieur le ministre, demander à votre administration de se montrer plus calme et de ne pas exprimer sa profonde pensée dans la presse. J'attendrai les résultats de l'analyse que vous ne manquerez pas de faire des propositions de l'administration.