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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 20 NOVEMBER 2008 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van de heer Josy Dubié aan de minister van Buitenlandse Zaken over «de politieke en militaire situatie in Afghanistan» (nr. 4-476)

M. Josy Dubié (Ecolo). - La semaine qui vient de s'écouler a apporté un lot d'informations, pour le moins surréalistes, sur l'évolution politique en Afghanistan.

C'est ainsi que le président Hamid Karzaï a affirmé publiquement que le chef des talibans, le mollah Omar, dont la tête est mise à prix pour 25 millions de dollars par les Américains, est son « frère » et qu'il s'engage à le protéger contre quiconque, s'il vient discuter à Kaboul !

Dès lors la question se pose. Pour qui et pourquoi nos troupes présentes sur place luttent-elles au péril de leur vie ?

Pour ramener au pouvoir, peu ou prou, le mollah Omar, un fanatique islamiste qui, non seulement a abrité Al-Qaida et protégé son chef Oussama ben Laden, mais en plus a installé sous sa férule un régime abominable et rétrograde, coupable des plus atroces violations des droits de l'homme et en particulier de la femme pendant les années où il a gouverné jusqu'à son renversement en 2001 ?

Alors que tout le monde aujourd'hui - y compris les commandants en chef des forces américaines et britanniques, dont le général Petraeus - affirme, comme je le fais depuis des années, qu'il n'y a pas de solution militaire en Afghanistan, pourquoi notre gouvernement projette-t-il d'y envoyer encore plus de soldats ?

Le président Karzaï vient également, à nouveau, de « supplier » (sic) les forces étrangères d'éviter des bavures aériennes dont deux d'entre elles, cette semaine encore, ont fait des dizaines de victimes civiles (et tué aussi des militaires réguliers afghans). Ce fut notamment le cas d'un nouveau bombardement sur un mariage pachtoune !

Quelles assurances avons-nous que nos avions F16 ne sont pas impliqués dans ces drames ?

M. Karel De Gucht, ministre des Affaires étrangères. - Le gouvernement belge est favorable, comme les autres gouvernements qui participent à l'ISAF (International Security Assistance Force), à un processus de réconciliation en Afghanistan, de manière à mettre fin au conflit armé. Bien sûr, des critères devraient être établis pour cette réconciliation. Au minimum, les talibans et autres insurgés souhaitant rejoindre le processus politique devraient s'engager à déposer les armes et accepter la Constitution afghane. Il me semble également impossible d'envisager une réconciliation avec ceux qui entretiennent des liens avec Al-Qaida.

Les éventuelles négociations en vue d'une réconciliation sont du ressort du gouvernement afghan : elles ne peuvent être menées que par lui, et la communauté internationale ne peut agir qu'en appui, en le poussant à établir des objectifs, des limites et des modalités claires à ces éventuels pourparlers.

Je ne pense pas que des négociations soient possibles ni souhaitables, en tout cas à l'heure actuelle, avec le leadership des talibans (c'est-à-dire le mollah Omar et son entourage). Le mollah Omar a d'ailleurs immédiatement rejeté l'offre de pourparlers à laquelle vous vous référez. Par contre, il me paraît souhaitable de continuer à inviter certains cadres inférieurs ou intermédiaires des talibans, ceux qui ne combattent pas pour des raisons très idéologiques, à rejoindre le processus politique et à se porter candidats aux prochaines élections plutôt que de continuer à faire la guerre.

Pour répondre à vos questions concernant l'engagement belge, je dirai que le dialogue politique et la reconstruction de l'État ne seront possibles que si un minimum de sécurité est assuré. Je crois donc que notre engagement militaire reste nécessaire à l'heure actuelle.

Le gouvernement belge étudie les modalités de cet engagement en 2009. Une décision définitive est imminente. Outre la prolongation de nos activités actuelles, la Belgique envisage de prendre en charge une « OMLT » (Operational Mentoring and Liaison Team). L'objectif n'est pas de s'éterniser sur place. Il s'agit au contraire de contribuer à former et d'encadrer l'armée afghane, de manière à ce qu'elle puisse dès que possible assurer elle-même la sécurité du territoire, sans appui extérieur.

Les règles d'engagement de nos appareils F 16 sont claires. En Afghanistan, la Belgique ne participe pas à l'Operation Enduring Freedom mais uniquement à l'ISAF, sous mandat des Nations unies. Si nécessaire, mon collègue de la Défense pourra vous donner de plus amples détails.

M. Josy Dubié (Ecolo). - Le ministre a raison de dire qu'il faut un dialogue politique mais pas avec n'importe qui. Comme cela a été souligné en commission, aujourd'hui le problème en Afghanistan est le manque de représentation de la minorité pachtoune, qui représente 40% de la population Afghane. Je voudrais souligner un fait important : si pratiquement tous les talibans sont des Pachtounes, les insurgés pachtounes ne sont pas tous des talibans. Ce n'est pas avec les talibans qu'il faut discuter mais avec les insurgés pachtounes, qui ne se sentent pas représentés, pour leur proposer d'entrer dans les instances gouvernementales.

Cependant, le ministre a dit qu'il appartient au gouvernement afghan de choisir. Je serais curieux de voir ce qui se passera le jour où le mollah Omar acceptera une invitation. Quelle sera la réaction des Américains, qui ont mis sa tête à prix pour 25 millions de dollars, en le voyant arriver à l'aéroport de Kaboul ? Je pense que cela poserait un problème. Il faut donc discuter mais pas avec n'importe qui et essayer de trouver une solution politique et non miliaire.

Mme Anne-Marie Lizin (PS). - Je demande au ministre de ne pas oublier les femmes afghanes.

M. Karel De Gucht, ministre des Affaires étrangères. - En quoi aurais-je oublié les femmes afghanes ?

Mme Anne-Marie Lizin (PS). - Je dis simplement que la position du mollah Omar à l'égard du droit des femmes en Afghanistan est catastrophique.

M. Karel De Gucht, ministre des Affaires étrangères. - En effet.

M. Josy Dubié (Ecolo). - Le ministre a dit que ceux avec lesquels nous discuterions doivent accepter la Constitution afghane. Je rappelle que celle-ci précise en son article 2 qu'aucune loi afghane ne peut être contraire à la loi sacrée du saint Coran, c'est-à-dire la charia. Nous nous battons là-bas pour que la charia puisse être appliquée. Il faut le savoir.