4-658/1 | 4-658/1 |
19 MARS 2008
Introduction
La présente proposition de loi vise à renforcer le congé de paternité de trois façons.
Elle vise tout d'abord à étendre le nombre de jours du congé de paternité. Elle propose en outre une prolongation du nombre de jours du congé de paternité en cas de naissances multiples. Enfin, elle vise à offrir une protection légale aux pères qui souhaitent faire usage de leur droit au congé de paternité, en limitant aux motifs impérieux les possibilités pour l'employeur de procéder à un licenciement.
Depuis le 1er juillet 2002, le congé que les travailleurs masculins peuvent prendre à l'occasion de la naissance d'un enfant a été porté de trois à dix jours. Ces dix jours de congé de paternité peuvent être pris librement durant une période de trente jours à dater du jour de l'accouchement.
Au cours des dernières années, le rôle des pères dans la prise en charge des tâches familiales et dans l'éducation de leurs enfants a gagné en importance sociale. Aujourd'hui, les pères remplissent un rôle plus large. D'autre part, la conciliation de la vie de famille et de la vie professionnelle bénéficie d'une attention accrue. L'allongement du congé de paternité s'inscrit dans le prolongement de ces tendances sociales. La proposition de loi vise à associer davantage les hommes à la venue d'un nouveau-né et à les inciter à assumer des responsabilités au sein de la famille.
Les pères eux-mêmes manifestent de plus en plus souvent leur souhait d'assumer une partie des soins. Une étude a démontré qu'il est nécessaire que les pères puissent passer suffisamment de temps avec la mère et la famille lors de la naissance d'un enfant.
Au cours des dernières années, le rôle des hommes est aussi devenu prioritaire dans le débat sur l'égalité entre les femmes et les hommes. Dans la déclaration adoptée lors de la séance de clôture de la Quatrième conférence mondiale des Nations unies sur les femmes (Pékin, 4-15 septembre 1995), la communauté internationale a déjà souligné le rôle des hommes dans la lutte pour l'égalité. Lors de la 48e session de la commission des Nations unies sur la Condition de la femme (1-12 mars 2004), le rôle des hommes et des garçons est apparu comme déterminant pour parvenir à l'égalité entre les hommes et les femmes.
Dans la « Feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010 », la Commission européenne affirme également que « les hommes devraient être encouragés à assumer des responsabilités familiales, notamment par des mesures les incitant à prendre un congé parental et de paternité et à profiter des mêmes droits à des congés que les femmes ».
En 2005-2006, l'Institut belge pour l'égalité des femmes et des hommes a organisé trois conférences sur les hommes et le changement et sur le rôle des hommes dans l'égalité, avec notamment une contribution intitulée « Garantir l'égalité de genre via le congé de paternité ».
Prolongation du congé de paternité
Pour ces raisons, nous proposons de prolonger le congé de paternité de cinq jours, pour le porter ainsi à 15 jours. Grâce à cette modification, la Belgique se situera dans la moyenne européenne.
En effet, plusieurs pays européens accordent un congé de paternité de plus longue durée que ne le fait la Belgique. En Norvège, les pères ont le droit de prendre un congé de paternité de six semaines. En Finlande, le congé de paternité permet aux pères d'arrêter de travailler pendant dix-huit jours, et en Slovénie, pendant quinze jours.
En Belgique aussi, il y a des précédents, et certaines instances accordent un congé de paternité de quinze jours, notamment une quinzaine de communes wallonnes, le ministère de la Région wallonne et le ministère de la Région de Bruxelles-Capitale.
La proposition a pour conséquence que l'allocation de congé parental supportée par l'Institut national d'assurance maladie-invalidité devra également être versée durant les cinq jours de congé supplémentaire.
Prolongation du congé de paternité en cas de naissances multiples
Étant donné que les naissances multiples provoquent un bouleversement encore plus important dans la vie des deux parents et qu'il y a davantage de soins à prodiguer, nous proposons d'étendre dans ce cas le congé de paternité en accordant cinq jours supplémentaires par enfant supplémentaire. Après une grossesse plus lourde sur le plan tant physique que moral, la mère pourra ainsi, grâce à l'aide du père, se remettre plus facilement des efforts éprouvants que sont la grossesse et les soins à accorder à plusieurs nourrissons durant le repos postnatal.
La France a également mis en place un régime qui étend le congé de paternité pour le porter de 11 à 18 jours en cas de naissances multiples.
Protection légale du congé de paternité
Le 23 septembre 2002, l'Union européenne a adopté la directive 2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil, modifiant la directive 76/207/CEE du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail.
Cette directive prévoit explicitement que les hommes qui prennent un congé de paternité ont droit, tout comme les femmes qui bénéficient d'un congé de maternité, à retrouver ensuite leur emploi ou un emploi équivalent. La directive prévoit en effet que « les États membres qui reconnaissent de tels droits prennent les mesures nécessaires pour protéger les travailleurs et travailleuses du licenciement résultant de l'exercice de ces droits et pour veiller à ce que, à l'issue de ce congé, ils aient le droit de retrouver leur emploi ou un emploi équivalent à des conditions qui ne leur soient pas moins favorables et de bénéficier de toute amélioration des conditions de travail à laquelle ils auraient eu droit durant leur absence. »
Bien que la Belgique se soit dotée d'une protection contre le licenciement dans le cadre du congé de maternité et d'adoption, elle n'a pas prévu de protection légale pour les hommes prenant un congé de paternité. La Belgique reste en défaut étant donné qu'elle aurait dû transposer la directive européenne pour le 5 octobre 2005. Il s'impose dès lors d'adapter la législation.
Si le législateur opte pour la prolongation du congé de paternité, une protection contre le licenciement est plus qu'indiquée. La proposition de loi vise dès lors à protéger du licenciement le travailleur qui souhaite faire usage de son droit au congé de paternité, à l'instar de ce qui est prévu pour le congé de maternité ou d'adoption. L'employeur ne pourra pas résilier unilatéralement le contrat de travail pendant une période qui commence deux mois avant la prise de cours du congé de paternité et qui finit un mois après la fin de celui-ci. Les possibilités pour l'employeur de procéder à un licenciement sont limitées aux raisons impérieuses.
Article 2
Cet article modifie l'article 30, § 2, de la loi du 3 juillet 1978 relatif aux contrats de travail en portant la durée du congé de paternité à 15 jours. Le régime de rémunération n'est pas modifié sur le fond. Pendant les trois premiers jours d'absence, le travailleur bénéficie du maintien de sa rémunération. Pendant les jours suivants, dont le nombre passe de sept à douze du fait de la prolongation de la durée du congé de paternité, le travailleur bénéficie d'une allocation dont le montant est déterminé par le Roi et qui lui est payée dans le cadre de l'assurance soins de santé et indemnités.
En cas de naissances multiples, la durée du congé de paternité est augmentée de cinq jours par enfant supplémentaire.
L'ajout d'un quatrième paragraphe à l'article 30 permet d'empêcher l'employeur de licencier le travailleur en raison de l'exercice de son droit au congé de paternité. Cette disposition offre aux pères qui font usage de leur congé de paternité une protection équivalente à celle dont bénéficient les mères et les adoptants pendant leur congé de maternité ou d'adoption. L'on a repris ici la protection qui existe pour les travailleurs qui font usage de leur congé d'adoption (article 30ter, § 4, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail).
Article 3
L'article 25quinquies, § 2, de la loi du 1er avril 1936 sur les contrats d'engagement pour le service des bâtiments de navigation intérieure, prévoit le même régime que l'article 30, § 2, de la loi relative aux contrats de travail.
La proposition de loi veut également étendre le congé de paternité dans ce cas de figure et modifie l'article 25quinquies, § 2, en reprenant le même texte que celui proposé à l'article 2.
Sabine de BETHUNE. Nahima LANJRI. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
À l'article 30 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, modifié en dernier lieu par la loi du 10 août 2001, sont apportées les modifications suivantes:
A. au § 2, alinéa 1er, le mot « dix » est remplacé par le mot « quinze »;
B. l'alinéa 1er du § 2 est complété par la disposition suivante:
« Lorsqu'il s'agit de naissances multiples, il a droit à cinq jours supplémentaires par enfant supplémentaire. »;
C. au § 2, troisième alinéa, les mots « sept jours suivants » sont remplacés par les mots « douze jours suivants, augmentés des jours supplémentaires en cas de naissances multiples, »;
D. il est inséré un § 4, rédigé comme suit:
« § 4. L'employeur ne peut faire un acte tendant à mettre fin unilatéralement au contrat de travail du travailleur qui a fait usage de son droit au congé de paternité pendant une période qui commence deux mois avant la prise de cours de ce congé et qui finit un mois après la fin de celui-ci, sauf pour des motifs étrangers à la prise de ce congé de paternité.
La charge de la preuve de ces motifs incombe à l'employeur.
Si le motif invoqué à l'appui du licenciement ne répond pas aux prescriptions de l'alinéa 1er ou à défaut de motif, l'employeur est tenu de payer une indemnité forfaitaire égale à la rémunération de trois mois, sans préjudice des indemnités dues au travailleur en cas de rupture du contrat de travail.
Cette indemnité ne peut toutefois être cumulée avec d'autres indemnités qui sont prévues dans le cadre d'une procédure de protection particulière contre le licenciement. »
Art. 3
À l'article 25quinquies, § 2, de la loi du 1er avril 1936 sur les contrats d'engagement pour le service des bâtiments de navigation intérieure, inséré par la loi du 10 décembre 1962 et modifié par la loi du 10 août 2001, sont apportées les modifications suivantes:
A. au § 2, alinéa 1er, le mot « dix » est remplacé par le mot « quinze »;
B. l'alinéa 1er du § 2 est complété par la disposition suivante:
« Lorsqu'il s'agit de naissances multiples, il a droit à cinq jours supplémentaires par enfant supplémentaire. »;
C. au § 2, troisième alinéa, les mots « sept jours suivants » sont remplacés par les mots « douze jours suivants, augmentés des jours supplémentaires en cas de naissances multiples, »;
D. il est inséré un § 4, rédigé comme suit:
« § 4. L'employeur ne peut faire un acte tendant à mettre fin unilatéralement au contrat de travail du travailleur qui a fait usage de son droit au congé de paternité pendant une période qui commence deux mois avant la prise de cours de ce congé et qui finit un mois après la fin de celui-ci, sauf pour des motifs étrangers à la prise de ce congé de paternité.
La charge de la preuve de ces motifs incombe à l'employeur.
Si le motif invoqué à l'appui du licenciement ne répond pas aux prescriptions de l'alinéa 1er ou à défaut de motif, l'employeur est tenu de payer une indemnité forfaitaire égale à la rémunération de trois mois, sans préjudice des indemnités dues au travailleur en cas de rupture du contrat de travail.
Cette indemnité ne peut toutefois être cumulée avec d'autres indemnités qui sont prévues dans le cadre d'une procédure de protection particulière contre le licenciement. »
Sabine de BETHUNE. Nahima LANJRI. |