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26 FÉVRIER 2008
Sous la législature 1999-2003, un nouvel article 22bis visant à garantir à chaque enfant le droit au respect de son intégrité morale, physique, psychique et sexuelle a été inséré dans la Constitution. Des travaux parlementaires ayant eu lieu dans le cadre de cette modification constitutionnelle avait émergé la volonté quasi unanime des sénateurs d'aller plus loin et d'intégrer la Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant, adoptée à New York, dans la Constitution.
En effet, cette convention n'étant pas, suivant une doctrine et une jurisprudence majoritaire (1) , directement applicable dans notre ordre juridique belge, cette intégration aurait été une belle avancée dans les droits reconnus aux enfants.
Cependant, le prescrit de la déclaration de révision de la Constitution publiée le 5 mai 1999 ne permettait pas une telle modification.
C'est la raison pour laquelle la déclaration de révision publiée dans le Moniteur belge du 10 avril 2003 a soumis l'article 22bis à révision « en vue d'y ajouter un alinéa concernant la protection de droits supplémentaires de l'enfant ». La proposition de révision(doc. Sénat, nº 3-265/1) de Madame la sénatrice Nathalie de T' Serclaes, déposée le 20 octobre 2003, visait, dès lors, dans la continuité des travaux entamés sous la législature précédente, à intégrer les grands principes de la Convention des droits de l'enfant dans la Constitution.
Cette proposition a été largement débattue au Sénat et a donné lieu à l'audition d'experts en date du 28 octobre 2004 (2) . Un groupe de travail a ensuite été institué par la commission des Affaires institutionnelles, composé de l'auteur de la proposition de révision (Madame Nathalie de T' Serclaes) et des deux rapporteurs (Madame Sabine de Bethune et Monsieur Francis Delpérée), sur la base de l'audition des professeurs Van Drooghenbroeck, Lemmens et Meulders-Klein et de l'échange de vues qui a suivi (3) . Ce groupe de travail a abouti à la rédaction d'un « amendement de consensus » (amendement nº l, doc. Sénat, nº 3-265/2, pp. l et 2).
Cet amendement de consensus, déposé le 17 novembre 2004, remplaçait l'article unique, suggéré dans la proposition de révision déposée initialement par Madame Nathalie de T' Serclaes, par ce qui suit:
« Article unique. — L'article 22bis, deuxième alinéa, de la Constitution est remplacé par les dispositions suivantes:
« Il a le droit de s'exprimer sur toute question qui le concerne; son opinion est prise en considération, eu égard à son âge et à son discernement.
Il a le droit de bénéficier des mesures et services qui concourent à son développement.
Dans toute décision qui le concerne, l'intérêt de l'enfant doit être une considération primordiale.
La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent les droits de l'enfant. ». ».
Un sous-amendement, déposé par Monsieur Francis Delpérée, proposait de remplacer le quatrième alinéa ci-dessus par la disposition suivante: « Dans toute décision qui le concerne, l'intérêt de l'enfant est pris en considération de manière primordiale » (amendement nº 2, doc. Sénat, nº 3-265/2, p. 2).
Composé de ces deux amendements, le texte, élargissant l'article 22bis de la Constitution aux principes de base de la Convention relative aux droits de l'enfant, a été adopté à la quasi-unanimité par le Sénat le 9 décembre 2004.
Bien que le projet ait été transmis le lendemain à la Chambre des Représentants (projet nº 51-1501/001), ce n'est qu'un an plus tard, soit en décembre 2005, que le texte voté par le Sénat a finalement été transmis par la commission de Révision de la Constitution et de la Réforme des Institutions de la Chambre au groupe de travail chargé de l'examen du Titre II de la Constitution, afin d'examiner les questions soulevées par les députés au sujet de la disposition constitutionnelle adoptée par les sénateurs.
Le groupe de travail « Titre II » a remis un rapport en mars 2006 (4) . Il conclut:
« — que le projet de révision de la Constitution à l'examen ne viole pas la déclaration du pouvoir législatif publiée au Moniteur belge le 10 avril 2003;
— que les dispositions en projet ne seraient pas directement applicables;
— qu'il appartient à la commission de Révision de la Constitution et de la Réforme des Institutions de se prononcer sur l'opportunité politique de l'adoption du projet de révision de la Constitution à l'examen et de l'anticipation d'une éventuelle codification à venir du titre II de la Constitution » (p. 6).
Le rapport levait donc toutes les difficultés techniques soumises et concluait n'avoir aucune objection à formuler à l'encontre de la modification proposée de l'article 22bis, qui « bien qu'elle ne soit pas porteuse d'avancées juridiques significatives, (...) véhicule un message symbolique important, concernant la place attribuée aux enfants et à leurs droits au sein de la société belge » (extrait de la seconde note des experts Velaers et Van Drooghenbroeck, p. 24).
Malgré la parution de ce rapport en mars 2006, le texte n'a été soumis à la commission de Révision de la Constitution de la Chambre qu'à la toute fin de législature.
Il a en effet fallu attendre les deux dernières semaines de la législature pour voir le texte remis à l'ordre du jour de la commission de Révision de la Constitution et de la Réforme des Institutions. On a dû constater que faute de véritable volonté politique, le texte n'a pas pu être pris en considération par la commission pour un vote. On doit aussi regretter que ce texte est le seul texte constitutionnel voté par le Sénat et transmis à la Chambre à ne pas avoir abouti sous la législature 2003-2007 !
La déclaration de révision de la Constitution du 2 mai 2007 permet heureusement de remettre l'ouvrage sur le métier. Pour étayer sur le fond la proposition ci-après et répondre aux arguments évoqués par les uns et les autres lors des discussions menées au Sénat et à la Chambre sous la précédente législature, les auteurs de la présente proposition se réfèrent aux documents publiés par la Chambre et le Sénat et en particulier le rapport fait au nom de la commission institutionnelle du Sénat par Mme de Béthune et Monsieur Delpérée (doc. Sénat, nº 3, 2004-2005) et le rapport sous forme d'épreuve du groupe de travail « Titre II » de la Chambre des représentants suite à l'envoi par la commission de la Révision de la Constitution à ce groupe de travail pour avis du texte adopté par le Sénat.
Afin de pouvoir reprendre la discussion en vue de l'adoption d'un texte relatif aux droits de l'enfant, élargissant l'actuel article 22bis de la Constitution conformément à la déclaration de révision de la Constitution, les auteurs de la présente proposition de révision déposent un texte parfaitement similaire à celui émanant du consensus obtenu au Sénat sous la précédente législature.
Sabine de BETHUNE. Armand DE DECKER. Martine TAELMAN. Anne-Marie LIZIN. Myriam VANLERBERGHE. Francis DELPÉRÉE. Isabelle DURANT. Marie-Hélène CROMBÉ-BERTON. Hugo VANDENBERGHE. |
Article unique
L'article 22bis de la Constitution est complété par les dispositions suivantes:
« Il a le droit de s'exprimer sur toute question qui le concerne; son opinion est prise en considération, eu égard à son âge et à son discernement.
Il a le droit de bénéficier des mesures et services qui concourent à son développement.
Dans toute décision qui le concerne, l'intérêt de l'enfant est pris en considération de manière primordiale.
La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent les droits de l'enfant. ».
1er février 2008.
Sabine de BETHUNE. Armand DE DECKER. Martine TAELMAN. Anne-Marie LIZIN. Myriam VANLERBERGHE. Francis DELPÉRÉE. Isabelle DURANT. Marie-Hélène CROMBÉ-BERTON. Hugo VANDENBERGHE. |
(1) Cf. avis du professeur Paul Lemmens dans le rapport relatif à la révision du Titre II de la Constitution en vue d'y insérer des dispositions nouvelles permettant d'assurer la protection des droits de l'enfant à l'intégrité morale, physique, mentale et sexuelle (doc. Sénat, no 2-21/4, 1999/2000, pp. 63-64).
(2) Cf. rapport fait au nom de la commission des Affaires institutionnelles par Mme de Bethune et M. Delpérée, doc. Sénat, no 3-265/3, 2004/2005, pp. 9-45.
(3) Cf. rapport fait au nom de la commission des Affaires institutionnelles par Mme de Bethune et M. Delpérée, doc. Sénat, no 3-265/3, 2004/2005, pp. 52-58.
(4) Ce rapport de 25 pages rendu en mars 2006 existe sous forme d'épreuve et n'a pas été coulé dans un document officiel. (Doc no 51-1501/000).