4-397/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2007-2008

19 NOVEMBRE 2007


Proposition de loi modifiant le Code des impôts sur les revenus 1992, afin de mieux prendre en compte la dépendance de nos aînés au niveau fiscal

(Déposée par M. Georges Dallemagne)


DÉVELOPPEMENTS


La présente proposition de loi reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 19 février 2004 (doc. Sénat, nº 3-520/1 - 2003/2004).

Le vieillissement de la population de nos sociétés occidentales est un fait statistique incontestable: l'espérance de vie s'est, en effet, sensiblement élevée. De 62 ans pour les hommes et 67 ans pour les femmes en 1950, elle est passée à 75 et 81 ans en 2000 selon l'étude consacrée à l'espérance de vie en Belgique par l'Institut national de Statistique. Et cette tendance ne fera que se confirmer à l'avenir avec une espérance de 82 et 88 ans en 2050.

La population belge compte désormais un nombre croissant de sexagénaires, septuagénaires, voire octogénaires en pleine possession de leurs moyens physiques, et dont, pour beaucoup d'entre eux, la pension suffit à l'épanouissement, pour autant que la santé soit de la partie. C'est ainsi qu'avec l'augmentation de l'âge, vient également l'augmentation des problèmes liés à la santé et le recours accru aux services médicaux et sociaux.

La santé des aînés

Il ne faut pas déduire du vieillissement de la population que la majorité des personnes âgées sont des individus dépendants et fragiles. En réalité, la plupart d'entre elles jouissent d'une bonne santé.

À l'âge de 60 ans, les femmes de la Communauté européenne ont une espérance de vie moyenne de 22,1 années et les hommes de 17,8 années.

Néanmoins, les études les plus récentes montrent que les personnes âgées souffrent principalement de maladies chroniques, dont le nombre croît avec l'avancée en âge et qui affectent davantage les femmes que les hommes.

La morbidité des personnes âgées se caractérise par une multi-pathologie. Les personnes de plus de 65 ans souffrent en moyenne de 2,5 maladies exigeant un traitement médical. Du point de vue du diagnostic clinique, seulement 15 % des 75-80 ans seraient en bonne santé.

D'un point de vue subjectif, deux tiers des personnes de 60 ans et plus se déclarent en « bonne santé » et plus de la moitié des personnes de 80 ans ne semblent pas restreintes dans leurs activités.

La dépendance ne doit pas être analysée qu'au niveau physique et corporel. La situation relationnelle, familiale et sociale de la personne âgée intervient également dans son état d'autonomie et de dépendance.

Dans cette optique, l'analyse de la dépendance se fera par une évaluation du fonctionnement tant psychique que mental ou social de la personne.

Le prix de la dépendance

Le coût de la dépendance n'est pas toujours en phase avec le revenu des personnes âgées. En vérité, nos aînés sont bien souvent inégaux face à l'âge.

Pour les personnes âgées vivant à domicile, les parties non remboursées des soins, des médicaments et des aides divers peuvent, en se cumulant, constituer des sommes qui grèvent lourdement la pension. En outre, il peut y avoir opportunité ou même nécessité pour la personne âgée de compenser la perte de revenu d'un membre valide de la famille qui renonce à un travail extérieur rémunéré pour s'occuper d'elle.

Les personnes hébergées en maison de repos doivent payer l'hébergement qui est distinct des soins. Alors que ces derniers sont financés par l'assurance maladie, l'hébergement est à charge de la personne âgée. Le montant actuel moyen d'une pension de retraite est de 790 euros, ce qui implique qu'une proportion importante de retraités ne disposent que d'une pension inférieure à leurs frais d'hébergement.

Le plus souvent, le degré ultime de la dépendance, à savoir la nécessité d'un placement en institution (maison de repos ou maison de repos et de soins) a lieu alors que la personne est seule et perçoit, par là même, un revenu d'isolé (ou de survie). Or, le prix moyen pour le secteur public (1) (CPAS et intercommunales), maison de repos et maisons de repos et de soins confondues, est de quelque 868 euros par mois. À ce montant, il convient d'ajouter immanquablement divers suppléments comme les médicaments, le médecin, la coiffure et la pédicure et, bien entendu, l'argent de poche. L'inadéquation est donc flagrante.

Plus largement, la difficulté qu'éprouvent de nombreuses personnes âgées à assumer financièrement leur hébergement apparaît à la lumière de l'intervention des CPAS. Le Courrier économique et financier de la KBC révèle que, en 1997, 36 % des pensionnaires des maisons de repos ont reçu une aide financière à charge d'un CPAS, contre 30 % en 1993 (2) . À politique inchangée, cette proportion ne pourra que s'accentuer à l'avenir.

La capacité des aînés à assumer plus ou moins confortablement le coût de leur hébergement ou plus largement de leur dépendance, dépend inévitablement d'autres facteurs: leur patrimoine, au sens large, la propriété de leur habitation ou encore la possibilité de compter sur l'aide de leurs enfants pour compléter le coût de l'hébergement. Au bout du compte, les différences de confort et de qualité de vie entre les aînés sont trop souvent le fatal corollaire des différences de niveau de vie entre les personnes actives.

Face à cette inadéquation entre coût et ressources, le recours supplétif au CPAS, au patrimoine ou à l'intervention des enfants ne peut empêcher que bien des personnes dépendantes restent précarisées et, dans le meilleur des cas, à la limite d'un niveau d'existence acceptable.

Objectifs de la proposition de loi

La présente proposition de loi vise à revoir la notion de personne handicapée prévue à l'article 135 du Code des impôts sur les revenus 1992 qui limite actuellement la notion de handicapé à celui qui établit que son handicap est causé en raison de faits survenus et constatés avant l'âge de 65 ans.

Notre législation ne prend donc pas en compte le handicap causé par des faits survenus et constatés après 65 ans. Ceci a pour conséquence que malgré leur dépendance, ces personnes ne peuvent bénéficier des dispositions fiscales existantes pour les personnes handicapées.

Il convient, dès lors, de prendre en compte cette situation en considérant comme handicapée la personne qui bénéficie d'une allocation pour l'aide aux personnes âgées attribuée sur base de la loi du 27 février 1987 (Moniteur belge du 1er avril 1987) relative aux allocations aux personnes handicapées.

La référence au mécanisme de l'allocation pour l'aide aux personnes âgées (APA) nous paraît la plus opportune, afin d'apprécier si la dépendance d'une personne âgée de plus de 65 ans, en fonction de son degré d'autonomie, est établie.

La dépendance des personnes âgées est, en effet, partiellement prise en charge par l'APA qui est accordée aux personnes de plus de 65 ans pour lesquelles un manque d'autonomie ou une autonomie réduite est établie.

Cette allocation est prévue par la législation sur les allocations aux handicapés. Il s'agit d'une prestation d'aide sociale après enquête sur les revenus.

Le montant de l'allocation est un montant forfaitaire qui varie selon le degré d'autonomie calculé suivant une échelle médico-sociale. Ce montant est diminué de celui des revenus de la personne handicapée, de son conjoint ou de la personne avec qui elle forme un ménage et ce à concurrence de certains plafonds.

Jusqu'au 31 décembre 2002, 81 578 personnes ont bénéficié de l'APA. Il faut y ajouter 14 223 personnes. Il s'agit soit de personnes bénéficiant d'allocations complémentaires, soit de tiers indemnisés pour l'aide apportée. La dépense annuelle pour l'APA est de 190,6 millions d'euros. Elle n'est que de 13,5 millions d'euros pour les autres allocations dont bénéficient aussi les aînés. Le montant mensuel moyen est de 194,3 euros.

Depuis le 1er janvier 2003, le montant immunisé a été relevé au niveau de la pension minimale garantie dans le régime général. Ceci devrait permettre à 33 000 personnes supplémentaires de bénéficier de cette allocation.

La présente proposition de loi vise à compléter l'APA de certains avantages fiscaux accordés aux personnes handicapées. En outre, la notion de handicapé ainsi révisée devrait permettre aussi de consentir au contribuable, qui héberge à son domicile un parent âgé dépendant, un certain nombre d'avantages fiscaux, dont notamment la majoration de la quotité exemptée d'impôt, la réduction du précompte immobilier et la majoration d'abattement du revenu cadastral.

Georges DALLEMAGNE.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

L'article 135, alinéa 1er, du Code des impôts sur les revenus 1992, est complété comme suit:

« 3º la personne qui bénéficie d'une allocation pour l'aide aux personnes âgées attribuée sur base de la loi du 27 février 1987 relative aux allocations aux personnes handicapées. »

14 novembre 2007.

Georges DALLEMAGNE.

(1) Union des villes et communes de Wallonie, CPAS Plus, nº 6-7, juin-juillet 2001.

(2) KBC, Courrier économique et financier, nº 4, 20 avril 2001, p. 7.