4-311/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2007-2008

18 OCTOBRE 2007


RÉVISION DE LA CONSTITUTION


Révision de l'article 23 de la Constitution, en vue d'y ajouter un alinéa concernant le droit du citoyen à un service universel en matière de poste, de communication et de mobilité

(Déclaration du pouvoir législatif, voir le Moniteur belge nº 131, deuxième édition, du 2 mai 2007)


Révision de l'article 23, alinéa 3, de la Constitution, en vue de le compléter par un 6º garantissant la liberté de commerce et d'industrie

(Déposée par MM. Paul Wille et Jean-Jacques De Gucht et Mme Nele Lijnen)


DÉVELOPPEMENTS


La présente proposition reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 21 novembre 2006 (doc. Sénat, nº 3-1930/1 - 2006/2007).

1. Introduction: la liberté d'entreprendre; origine et validité

1.1. Le décret d'Allarde des 2 et 17 mars 1791

Le décret prévoit, en son article 7, qu'à compter de sa promulgation, « il sera libre à toute personne de faire tel négoce ou d'exercer telle profession, art ou métier qu'elle trouvera bon ».

L'un des principaux mobiles de la Révolution française de 1789 résidait dans le fait qu'en raison du régime corporatif sclérosant, la libre entreprise était noyée sous le poids des réglementations. Aussi n'est-ce pas un hasard si l'une des principales décisions prise à l'époque fut la promulgation du décret d'Allarde qui proclamait la liberté économique et abolissait le régime corporatif.

Selon diverses sources doctrinales, il existe indéniablement une étroite parenté entre la liberté du travail sensu stricto consacrée au dix-neuvième siècle et la liberté de commerce et d'industrie.

En effet, ces deux libertés furent les leviers juridiques qui permirent la transformation d'une économie féodale de type corporatiste en un système libéral d'économie de marché.

À la suite de l'annexion de nos régions à la France, la disposition en question fut incorporée dans le droit belge en 1795. Dans le texte initial élaboré par les révolutionnaires français, l'alinéa 1er de l'article 7 se terminait par le membre de phrase suivant: « mais elle sera tenue de se conformer aux règlements de police qui sont ou pourront être faits ».

Cette disposition n'est jamais entrée en vigueur en Belgique (1) .

Dans notre droit, le principe de la liberté de commerce n'avait à l'origine que la valeur d'une loi ordinaire, si bien que, dans la Belgique unitaire de l'époque, il n'était pas possible de vérifier que la législation était conforme à ce principe. Les lois qui suivirent pouvaient toujours déroger à ce principe.

1.2. Loi du 8 août 1980 de réformes institutionnelles

À la suite de la réforme de l'État de 1988, la liberté de commerce et d'industrie fut consacrée dans notre droit comme l'un des principes dont les Régions doivent tenir compte dans l'exercice de leurs compétences en matière économique (2) .

L'article en question dispose qu'en matière économique, les Régions exercent leurs compétences dans le respect des principes de la liberté de commerce et d'industrie (3) .

Le respect de ce principe n'est donc pas imposé expressément au législateur national, lequel fixe le cadre normatif général. Par contre, toute personne ayant un intérêt peut évaluer les décrets et les ordonnances à la lumière de ce principe.

La liberté de commerce et d'industrie peut donc être considérée aujourd'hui comme une véritable maxime du droit économique (4) .

Toutefois, le législateur fédéral peut parfaitement prendre des dispositions légales qui pourraient parfois s'avérer contraires à la liberté de commerce et d'industrie. Dans un chapitre ultérieur, on examinera quelles sont dans le droit actuel les limites à l'intervention des pouvoirs publics en matière de liberté d'entreprendre. En effet, la jurisprudence est particulièrement abondante dans ce domaine.

2. La liberté de commerce et d'industrie: portée de la disposition actuelle

2.1. Contre les obstacles de nature corporatiste

Le premier objectif du décret d'Allarde était (et est) de lever les obstacles de nature corporatiste qui entravent le libre exercice du commerce et de l'industrie. En effet, en ses autres articles, le décret prévoit explicitement l'abolition des privilèges corporatistes.

La liberté d'entreprendre constitue le fondement de base du droit économique.

Concernant le décret d'Allarde et le corporatisme, M. Dassesse a déclaré: « La portée historique du Décret est de protéger le commerce contre les obstacles d'ordre administratif et corporatif. » (5) . Bref, il s'agit de la clause anti-Kafka par excellence !

Cette clause est le fondement — d'où son importance — des droits que les citoyens peuvent faire valoir vis-à-vis de l'administration dans le cadre de l'exercice d'activités économiques.

Cette liberté implique un droit, celui de faire du commerce, en ce qui concerne à la fois le choix de l'activité et la manière de l'exercer.

À ce droit accordé aux particuliers correspondent des obligations pour les pouvoirs publics, comme celle qui contraint à ne pas agir et implique un engagement négatif des pouvoirs publics. Le justiciable dispose d'un droit subjectif d'exercer librement et sans entraves des activités industrielles et commerciales. Il peut exiger que les pouvoirs publics respectent ces droits.

2.2. Contre les barrières administratives

Les révolutionnaires de 1789 considéraient la liberté économique comme le prolongement logique de la liberté individuelle. Pour les auteurs de la présente proposition, cette thèse est toujours d'actualité.

Bon nombre de juristes voient en ce principe la pierre d'angle de notre système juridique. Le Liégeois Herbiet, de l'Université de Liège, a formulé cette conviction en ces termes: « La liberté du commerce et de l'industrie demeure encore le principe fondateur de notre droit. ».

La liberté de commerce et d'industrie, confirmée par une norme ayant force de loi, à savoir l'article 7 du décret d'Allarde, ne peut être limitée que par une loi ou par un règlement pris en vertu de la loi.

La liberté de commerce et d'industrie constitue, du point de vue de l'administré, un droit subjectif qu'il peut faire valoir à l'égard de l'administration.

Ce droit suppose la liberté d'établissement et la liberté d'exercer des activités professionnelles. Le décret d'Allarde consacre la liberté d'exercer une activité professionnelle et implique la faculté d'organiser une activité commerciale avec les moyens et suivant les méthodes de son choix.

Pour illustrer l'importance de ce principe, passons en revue les diverses décisions judiciaires rendues à ce propos. Les points 2.2.1 et 2.2.2 ci-après évoquent et commentent la jurisprudence pertinente en la matière.

2.2.1. En ce qui concerne les mesures administratives relatives à l'ordre public et à la sécurité

— Pour ce qui est des heures d'ouverture, la justice a déjà plus d'une fois rappelé à l'ordre les pouvoirs publics pour leur « réglementite », en précisant notamment que la liberté de commerce est entamée de manière illégitime par l'interdiction générale faite aux exploitants d'exercer leur activité commerciale durant la nuit, sauf à disposer d'une autorisation spéciale, en particulier lorsqu'il s'agit d'une activité qui, par nature, tend à s'exercer la nuit (6) .

— Les discothèques peuvent, elles aussi, invoquer le décret d'Allarde lorsqu'elles sont confrontées à des règlements communaux en matière d'heures de fermeture (7) .

— La loi sur le commerce ambulant oblige le titulaire d'un emplacement sur un marché public à cesser toute activité ambulante en cas de cession de son emplacement. Mais elle reste muette quant aux activités que le cédant peut encore exercer à l'avenir. Le Conseil d'État a déclaré à ce propos qu'on peut d'ailleurs se demander si, en l'absence de fondement légal, une interdiction illimitée d'encore exercer des activités ambulantes est bien compatible avec le principe de liberté économique consacré par l'article 7 du décret d'Allarde (8) .

— Notre système économique est fondé sur le décret d'Allarde, d'où est issue la libre concurrence. Cela implique la liberté de copie, à laquelle seul un droit d'exclusivité permet de déroger (9) .

— En matière de taxations abusives également, le décret d'Allarde peut être d'un grand secours: Dans un de ses arrêts, la Cour de cassation juge que la taxe sur les quantités de bois coupés produites sur le territoire de la province de Luxembourg est un octroi et qu'une telle taxation est contraire au décret d'Allarde et viole les principes de l'union économique (10) .

— Il est illicite d'exclure totalement ou de rendre totalement impossible l'exercice d'une activité professionnelle pour les particuliers. Dans l'arrêt Verbeke, le Conseil d'État a jugé que la commune pouvait, à des fins de contrôle, imposer certaines obligations à des imprimeurs de cartes d'accès, mais que lorsque le nombre d'imprimeurs est limité sous prétexte de faciliter le contrôle, et ce, sans autorisation légale, il y a atteinte à la liberté de commerce et d'industrie (11) . Dans un autre cas, le Conseil a annulé un règlement communal qui interdisait la circulation dans une rue où était située une société de transport, cette entreprise ne pouvant plus poursuivre ses activités (12) .

— L'exercice du pouvoir réglementaire ne peut pas donner lieu à l'octroi d'un monopole lorsque d'autres commerçants sont prêts également à se soumettre aux conditions objectivement justifiées qui sont prévues par le règlement général (13) .

— Les restrictions à la liberté d'industrie et de commerce ne sont autorisées que pour autant que les mesures en question aient été prises en vue de garantir la sécurité, la tranquillité et la salubrité publiques. Par conséquent, un règlement de police qui vise exclusivement ou principalement à réglementer les rapports de marché est contraire à ce principe.

— Dans le cadre du maintien de l'ordre public, les pouvoirs publics ne peuvent pas imposer d'entraves au commerce qui seraient sans commune mesure avec l'objectif de la mesure, à savoir le maintien de l'ordre et de la sécurité.

2.2.2. En ce qui concerne les mesures administratives résultant de dispositions légales

Selon le professeur Peeters, il n'est pas simple, en l'espèce, de dégager de la jurisprudence des lignes de force claires (14) .

Dans cette matière, le législateur laisse souvent une large marge d'appréciation aux administrations chargées de prendre des dispositions d'exécution. Le recours fréquent aux lois-cadres et aux pouvoirs spéciaux entraîne parfois de grandes réticences en cas de contrôle de légalité.

Les auteurs considèrent dès lors que la consécration du principe de la liberté du commerce et de l'industrie par la Constitution incitera les juridictions à veiller plus strictement au respect de ces libertés fondamentales.

Un premier pas a déjà été fait dans cette direction lorsque le législateur a inscrit la liberté du commerce et de l'industrie dans la loi spéciale du 8 août 1980. D'après Peeters, on pourra désormais examiner si la législation octroyant une compétence réglementaire dans le domaine économique est conforme au principe de la liberté du commerce et de l'industrie.

Les présents développements n'examinent pas plus avant l'impact que pourraient avoir le décret d'Allarde et son insertion proposée dans la Constitution sur la liberté d'entreprendre des pouvoirs publics, étant donné que cette question sort du cadre de la présente proposition.

2.3. Contre les entraves causées par d'autres citoyens (effet horizontal)

S'agissant des relations des citoyens entre eux, la liberté du commerce et de l'industrie présente un double aspect qui était et est encore intimement lié à la liberté individuelle:

— tout d'abord, il y a la liberté de l'individu de choisir son occupation professionnelle et, une fois ce choix effectué, d'exercer cette profession;

— ensuite, cette liberté suppose aussi la liberté contractuelle dont l'entrepreneur a inévitablement besoin pour pouvoir se procurer les facteurs de production nécessaires.

La jurisprudence a résumé la situation décrite ci-dessus par le principe suivant:

« La liberté du commerce et de l'industrie de chacun est limitée par celle d'autrui. Il s'ensuit que quand la liberté du commerce et de l'industrie peut s'exercer de deux manières différentes avec la même utilité, il n'est pas autorisé de choisir celle qui occasionne un préjudice à autrui. »

La liberté d'entreprendre a donc un impact direct sur la validité de certaines clauses de non-concurrence.

Le principe de la liberté économique formulé dans le décret d'Allarde a également gagné en importance ces dernières années dans le contexte du droit de grève et du « lock-out ».

La liberté d'entreprendre et le droit au travail impliquent qu'une entreprise a le droit de se consacrer à ses activités et qu'elle peut exiger que ses cadres et son personnel puissent pénétrer librement dans ses locaux (15) .

La jurisprudence a déclaré en 2001 à ce propos que le droit de grève n'est pas absolu et est limité par les droits des tiers. Le blocage d'un terrain portuaire viole la liberté d'entreprendre et cause un dommage économique considérable. » (16) .

3. Conclusion: la liberté du commerce et de l'industrie doit être inscrite dans la Constitution

3.1. Cette liberté est un élément essentiel de notre société actuelle et de sa Constitution

Le point 2.2. a mis en évidence le lien puissant et la parenté étroite qui unissent la liberté économique et la liberté individuelle. La liberté du commerce et de l'industrie était considérée par les révolutionnaires de 1789 comme le prolongement logique de la liberté individuelle. Ces deux libertés ont été les leviers juridiques qui ont permis la transformation d'une économie féodale aux structures corporatistes en un système libéral d'économie de libre marché.

« La liberté du commerce et de l'industrie est un principe en parfaite conformité avec la philosophie de la Constituante belge de 1831. » (17)

La Constituante entendait en effet protéger l'individu contre l'arbitraire du pouvoir et considérait, à juste titre, le citoyen comme le détenteur d'un « faisceau de libertés » dans lesquelles l'État ne peut pas s'immiscer.

La Constitution occupe la position la plus élevée dans la hiérarchie des normes. Elle est le reflet des valeurs et libertés fondamentales de notre société.

Les auteurs de la présente proposition sont plutôt par principe réticents à l'idée de « toucher à » la Constitution. À leur avis, le rôle de la Constitution dans la protection du « faisceau de libertés » du citoyen doit revêtir la forme d'un engagement de ne pas faire quelque chose (engagement négatif).

Durant les années 70 et 80, de plus en plus de voix se sont élevées pour réclamer l'inscription de droits socioéconomiques fondamentaux dans la Constitution.

Cela représente un revirement fondamental dans le rôle de l'État. Consécutivement aux droits sociaux, culturels et économiques et à l'inscription de certains de ces droits dans la Constitution, l'État ne doit plus s'abstenir d'intervenir. Il doit même au contraire préciser les modalités de son intervention.

C'est ainsi que la protection d'un environnement sain est inscrite aujourd'hui dans la Constitution. La garantie de ce droit est formulée principalement comme une mission qui est assignée aux législateurs compétents.

L'insertion dans la Constitution de ces droits et d'autres droits fondamentaux à caractère social, culturel et économique s'est opérée de manière sélective. Le droit économique le plus important, c'est-à-dire la liberté du commerce et de l'industrie définie par le décret d'Allarde, n'y a curieusement pas été inscrit.

Cela n'est pas sans conséquences.

La doctrine a étudié de manière circonstanciée l'impact de l'insertion de certaines normes socioéconomiques dans la Constitution.

Des études spécifiques très circonstanciées portant sur la liberté du commerce et de l'industrie montrent qu'un nouveau conflit est apparu entre ces deux normes (18) .

La jurisprudence donnait traditionnellement une interprétation restrictive des dispositions contraires à la liberté du commerce et de l'industrie.

Selon la doctrine précitée, la plupart des normes environnementales, pour ne pas dire toutes, sont, à des degrés divers, susceptibles d'entraver la liberté du commerce et de l'industrie et compte tenu du nouvel article 23 de la Constitution, la jurisprudence ne pourra plus interpréter ces normes environnementales de manière restrictive lorsque la liberté économique est invoquée. En effet, c'est la disposition constitutionnelle qui prime (in dubio pro natura) (19) .

Tel ne saurait être l'objectif poursuivi, et les auteurs considèrent que l'équilibre doit être rétabli.

3.2. La liberté d'entreprendre est la clause anti-Kafka par excellence

Le point de vue précité de M. Dassesse parle de lui-même: « La portée historique du Décret est de protéger le commerce contre les obstacles d'ordre administratif et corporatif. » (20) .

Traduit librement: le principe de la liberté du commerce et de l'industrie est la clause anti-Kafka par excellence.

Cette clause est le fondement — au sens plein du terme — des droits dont les citoyens peuvent se prévaloir face à l'administration dans le cadre de l'exercice de leurs activités économiques. Cette liberté induit un droit, le droit de commercer, qui porte tant sur le choix de l'activité que sur la manière de l'exercer.

L'aperçu de la jurisprudence qui a été présenté au point 2.2.1 est éloquent à cet égard. Le principe de la liberté d'entreprendre est l'instrument par excellence pour se prémunir contre toute immixtion illégale de la part de l'État.

3.3. La liberté d'entreprendre et le droit du travail vont de pair

Lors de la discussion qui précéda l'inscription dans la Constituante de quelques droits fondamentaux sociaux, culturels et économiques, le groupe de travail chargé d'examiner la question avait déjà voulu insérer le droit d'entreprendre à côté du droit au travail.

Le professeur Delpérée, qui participait au groupe de travail chargé de préparer l'insertion des droits économiques, culturels et sociaux fondamentaux dans la Constitution, déclarait que:

« Premièrement, quand on parle du droit au travail, on pense essentiellement au droit du travail salarié ou indépendant, mais un des droits économiques qui manquent est la liberté du commerce et de l'industrie, c'est-à-dire le droit à l'exercice d'une activité commerciale et industrielle. » (21)

Le groupe de travail n'a toutefois pas réussi à sortir de la contradiction présumée entre les limitations résultant de la réglementation sur le chômage et le libre choix de l'activité professionnelle; la pression subie par le groupe de travail pour qu'il accouche d'un texte fut telle que l'on passa à côté d'une chance historique.

La liberté d'entreprendre est une valeur fondamentale qui participe d'une vision libérale et progressiste conséquente de la société.

L'État doit justement s'abstenir de toute immixtion dans la libre entreprise et c'est précisément à l'individu qu'il appartient d'appliquer concrètement cette liberté.

En exigeant que l'État intervienne dans toutes sortes de matières (logement décent, droit au travail et à la sécurité sociale, pour ne citer que quelques dispositions constitutionnelles), on va à l'encontre de la liberté individuelle, étant donné que celle-ci ne tolère précisément qu'un minimum d'immixtion.

Comme l'a dit un constitutionnaliste en utilisant une formule choc: « Ce qui est fondamental est nécessairement rare: si tous les droits subjectifs deviennent fondamentaux, aucun d'eux ne l'est vraiment. » (22) .

Les auteurs considèrent que l'insertion de la liberté du commerce et de l'industrie rétablira le lien naturel entre les deux libertés (travail et choix de la profession).

Ils craignent la prédominance d'un « État fort » et une « mise sous tutelle » de la société.

Dès lors que les révolutionnaires français, qui furent à l'origine notamment de notre Constitution, reconnaissaient l'importance de la liberté du commerce et de l'industrie, comme le fit d'ailleurs aussi notre Constituante, et compte tenu des nombreux « droits » qui ont été inscrits dans la Constitution et qui risquent, à ce titre, de primer ce droit économique fondamental, les auteurs recommandent d'inscrire également la liberté du commerce et de l'industrie dans la Constitution.

La liberté d'entreprendre est un droit fondamental de la première génération.

La prolifération des droits fondamentaux de la deuxième génération, qui visent non pas à protéger des libertés, mais plutôt à forcer l'État à légiférer (droit à un logement décent, à un environnement sain, à l'épanouissement culturel et social), a pour effet que les véritables libertés fondamentales se délaient dans un climat quelque peu moralisateur.

Cette banalisation risque d'affecter les droits humains de la première génération, de les amputer ainsi de leur « caractère opérationnel » et de les réduire au statut de slogan.

Par l'inscription dans la Constitution de ce droit fondamental essentiel pour notre économie, les auteurs entendent restaurer l'importance des libertés fondamentales et individuelles: la prise en main des rênes de l'économie est le prolongement de la liberté individuelle.

Paul WILLE.
Nele LIJNEN.
Jean-Jacques DE GUCHT.

PROPOSITION


Article unique

L'article 23, alinéa 3, de la Constitution est complété par un 6º, rédigé comme suit:

« 6º le droit d'entreprendre. »

27 septembre 2007.

Paul WILLE.
Nele LIJNEN.
Jean-Jacques DE GUCHT.

(1) Peeters, B., « Grondslagen Decreet d'Allarde », in OHER, fascicule 3 (avril 1991), p. 3, et Gotzen, M. Vrijheid van beroep en bedrijf en onrechtmatige mededinging, Bruxelles, Larcier, 1963, 2 vol.

(2) Article 6, § 1er, VI, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

(3) Van Boven, R., « Niet-concurrentie als bestuurder of aandeelhouder », Accountancy & Tax, numéro 3/2002.

(4) Peeters, B., « Grondslagen Decreet d'Allarde », in OHER, fascicule 3 (avril 1991), p. 4.

(5) Dassesse, J., « Organisation de la concurrence et intérêt général », note Cassation, 2 juin 1960, R.C.J.B., 1964, p. 218.

(6) Conseil d'État, no 43795, 12 juillet 1993, JLMB, 1993, 1442, note de Neuray, J.

(7) Neuray, S., « Le Décret d'Allarde au secours des noctambules, ou faut-il danser comme les communes sifflent ? », JLMB, 1447-1452.

(8) Conseil d'État, no 99725, 12 octobre 2001, http://raadvst-consetat.be

(9) Prés. Comm. Courtrai, 20 mai 1996, Jaarboek Handelspraktijken & Mededinging, 1996, 867.

(10) Cass. 10 novembre 1994, http://www.cass.be, A.J.T., 1994-95, 433.

(11) Conseil d'État, Verbeke, no 2806, 12 octobre 1953.

(12) Conseil d'État, S.P.R.L. Ets. Calmein et Cie, no 5884, 21 novembre 1957.

(13) Gand, 16 mars 1962, R.W., 1962-63, 1588.

(14) Peeters, B., « Grondslagen Decreet d'Allarde », in OHER, fascicule 3 (avril 1991), p. 10.

(15) Réf. Civ. Verviers, 2 décembre 1999, JLMB, 1829.

(16) Prés. Civ. Bruges, 7 février 2001, Eur. Vervoerr. 2001, 207.

(17) Ergec, R. Introduction au droit public. Les droits et libertés, t II., 1995, p. 157.

(18) Neuray, J-F, « Le droit à l'environnement et la liberté du commerce et de l'industrie », Revue de Droit, ULB, no 12, 1995.

(19) Neuray, J-F, o.c., p. 69.

(20) Dassesse, J., « Organisation de la concurrence et intérêt général », note Cassation, 2 juin 1960, R.C.J.B., 1964, p. 218.

(21) Sénat, SE 1991-1993, doc. 100-2/4, session 1993-1994, 2 décembre 1993.

(22) Rigaux, Fr., cité par M. Verdussen et Noël A., « Les droits fondamenteaux et leur réforme constitutionnelle de 1993 », A.P.T., 1974, p. 349.