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17 JUILLET 2007
La présente proposition de loi reprend le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 18 février 2005 (doc. Sénat, nº 3-1044/1 — 2004/2005).
Les nouvelles technologies sont omniprésentes et en constante évolution tant dans notre environnement de travail que dans notre vie privée.
Dans la mesure où ces technologies permettent de suivre de manière systématique et à leur insu des travailleurs et qu'en outre des données peuvent être récoltées et même stockées, il convient que l'introduction d'une telle méthode de contrôle fasse, à tout le moins, l'objet d'une négociation préalable avec les travailleurs et leurs représentants au sein des organes ad hoc de l'entreprise.
À cet égard, les instruments suivants peuvent déjà être mentionnés:
— la convention nº 108 du Conseil de l'Europe du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, ratifiée par la Belgique par la loi du 17 juin 1991;
— la recommandation nº R(89)2 du Conseil de l'Europe relative à la protection des données à caractère personnel utilisées à des fins d'emploi.
Plus récemment encore, les textes suivants ont été adoptés:
— la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données;
— le recueil de directives pratiques sur la protection des données personnelles des travailleurs, que le conseil d'administration de l'OIT a adopté lors de la 267e session en novembre 1996 et auquel le Conseil national du travail a apporté sa contribution dès la phase préparatoire en émettant l'avis 1160 du 23 juillet 1996.
En outre, il convient également de préciser que, sur le plan des droits fondamentaux de l'individu, le droit au respect de la vie privée a été inscrit explicitement dans l'article 22 de la Constitution belge, lors de la révision de celle-ci en 1993.
À l'heure actuelle, la question de l'utilisation de systèmes de navigation tels que les GPS est également examinée au niveau européen. Nous sommes donc dans l'attente d'une éventuelle directive en la matière.
Certes, on admettra volontiers que le système de navigation GPS permet d'organiser la répartition du travail sur la base de la position géographique des travailleurs et de contrôler l'exécution de leurs tâches, ainsi que l'utilisation des véhicules.
Par ailleurs, si d'une part, tous les travailleurs sont suivis de manière systématique et que, d'autre part, les données récoltées à ce sujet sont stockées par un sous-traitant, au sens de l'article 1, § 5, de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée, pour le compte de l'entreprise, certaines dispositions légales sont directement d'application.
Un avis de la Commission de la protection de la vie privée l'a précisé en rappelant que l'article 4, § 1er, de la loi précitée de 1992, stipule clairement:
— que tout traitement de données à caractère personnel, tel qu'un système permettant de rechercher la localisation précise des membres du personnel, doit répondre à des finalités bien déterminées, explicites et légitimes qui en justifient l'installation (principe de finalité);
— que les données collectées à cet effet doivent être adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont obtenues ou pour lesquelles elles sont traitées ultérieurement (principe de proportionnalité).
Le principe de proportionnalité est d'une importance capitale. En effet, il résulte de ce principe que le système ne peut en aucun cas être activé en dehors du temps de travail effectif des travailleurs concernés. De même, il est impensable que l'on puisse procéder à l'enregistrement des données en question en dehors des heures de travail.
Enfin, si l'employeur a le souci de respecter ce principe de proportionnalité, il doit agir uniquement sur la base d'un motif bien précis chaque fois qu'il prend connaissance des données enregistrées.
Un contrôle permanent, avec lecture systématique des données enregistrées, est évidement disproportionné au regard de l'objectif visé. On admettra également que surveiller de manière constante les travailleurs concernés est incompatible avec le respect de la dignité humaine. Ce principe de « surveillance constante » a d'ailleurs été mentionné dans la convention collective de travail nº 68 du 16 juin 1998 relative à la protection de la vie privée des travailleurs à l'égard de la surveillance par caméras sur le lieu de travail, convention qui a été rendue obligatoire par l'arrêté royal du 20 septembre 1998 (Moniteur belge du 2 octobre 1998).
La présente proposition de loi s'inspire de l'esprit de cette convention collective et entend fixer les bases d'une utilisation appropriée des systèmes de monitoring associés aux systèmes de navigation GPS installés sur les véhicules de service, tant dans les entreprises privées, que dans les entreprises publiques autonomes et le secteur public.
Le respect de la vie privée des travailleurs est un élément essentiel pour préserver des relations saines dans les différents milieux de travail. C'est la raison pour laquelle un accord entre les partenaires sociaux est indispensable pour mettre en œuvre l'installation et l'utilisation du système évoqué précédemment.
La mise en œuvre d'une telle surveillance des travailleurs devra préalablement faire l'objet d'un accord des organes compétents en vertu du régime des relations collectives du travail (commission paritaire ad hoc, comité commun à l'ensemble des services publics, ...)
Philippe MAHOUX. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
Les dispositions de la présente loi sont applicables au secteur privé, aux entreprises publiques autonomes et au secteur public.
Art. 3
La surveillance par un système de monitoring associé à un système de navigation GPS dans un véhicule de service utilisé par les travailleurs, ne peut être mise en œuvre qu'après accord des commissions paritaires ad hoc, du comité commun à l'ensemble des services publics, ou des organes compétents en vertu du régime des relations collectives de travail.
Art. 4
Les infractions à la présente loi seront sanctionnées conformément aux dispositions pénales prévues au chapitre VIII de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée.
12 juillet 2007.
Philippe MAHOUX. |