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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 12 APRIL 2007 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Mondelinge vraag van mevrouw Sfia Bouarfa aan de vice-eersteminister en minister van Financiën over «de geldtransfers van migranten» (nr. 3-1485)

Mme Sfia Bouarfa (PS). - Une récente étude de la Banque européenne d'investissement (BEI) indique que près de 13 milliards d'euros sont envoyés chaque année par les immigrés originaires des pays de la Méditerranée, mais également d'autres pays, depuis l'Europe vers leurs pays d'origine.

Ces envois, en augmentation constante, représentent jusqu'à 20% du PIB des pays concernés, participant ainsi au développement de l'économie locale.

Les transferts se font soit de manière officielle via des agences spécialisées ayant pignon sur rue, soit plus informelle, par exemple lors du retour de proches au pays.

L'étude de la BEI déplore que ces transferts soient peu efficaces et peu transparents. On sait en effet que la commission réclamée par les sociétés de transfert peut représenter 10 à 15% de la somme, soit parfois 15 euros pour un petit mandat de 100 euros. Cela explique le recours à des filières informelles, non contrôlées, qui peuvent servir au blanchiment d'argent.

La réduction de ces commissions augmenterait l'épargne des travailleurs immigrés et les inciterait à envoyer plus d'argent, tout en diminuant l'importance du circuit informel.

La BEI recommande donc une action politique visant à instaurer une réelle concurrence entre les sociétés de transfert en vue de réduire les frais, mais aussi une plus grande implication des réseaux bancaires dans les pays d'accueil et d'origine.

Étant donné l'importance de ces transferts d'argent pour les familles des travailleurs migrants, quelles mesures envisagez-vous de prendre, monsieur le ministre, afin de rendre ces transferts plus efficaces et plus transparents ?

M. Didier Reynders, vice-premier ministre et ministre des Finances. - L'étude financée par la BEI montre que la tarification des frais d'envoi de fonds de travailleurs migrants vers les pays d'origine est élevée lorsque les montants sont peu élevés.

Il convient toutefois de noter que ces tarifs sont différents en fonction du lieu de destination. Par exemple, pour un transfert de 400 euros, le Maroc est deux fois moins cher que les autres pays méditerranéens. Ces tarifs sont également dégressifs en fonction de l'importance de la somme transférée, à savoir 26 euros pour un transfert modeste d'une centaine d'euros et 77 euros pour un transfert de 2500 euros vers l'Afrique. Des réductions sont progressivement mises en place en fonction du lieu de destination des sommes envoyées (tarifications préférentielles par pays). Enfin, des programmes de fidélité par accumulation de points sont mis en place en vue d'octroyer des réductions de frais à ceux qui utilisent fréquemment ces services. Chaque transaction donne droit à des points en fonction de son importance et le client obtient cinq euros de réduction de frais par tranche de 50 points accumulés.

La tarification des opérations inclut la faculté, pour le bénéficiaire de l'envoi, de disposer immédiatement de l'argent qui lui a été transféré contre remise du mot de passe qui lui a été remis par l'expéditeur, alors que les banques prennent plusieurs jours avant de créditer cette même somme sur le compte du bénéficiaire et exigent un supplément pour une mise à disposition plus rapide. Ce service a un coût. La tarification est aussi basée sur la fréquence d'utilisation du réseau et sur son étendue : plus le réseau est vaste, plus les clients sont nombreux, plus les frais diminuent.

Il n'en reste pas moins, comme vous le soulignez, que le prix de la transaction constitue un sérieux obstacle pour les personnes qui transfèrent des sommes modestes. Depuis peu, le problème des envois de fonds des travailleurs migrants est de plus en plus suivi par la communauté internationale, tant à la Banque mondiale qu'à la Banque européenne d'investissement et à la Banque interaméricaine de développement.

De plus, des conférences sont régulièrement organisées afin de réduire ou tenter de réduire ces coûts de transaction.

La Belgique organisera prochainement une conférence sur le thème des migrations et du développement : les questions des transferts de fonds des travailleurs migrants y seront abordées. Je vous invite d'ailleurs, madame Bouarfa, à prendre contact avec mon collègue de la Coopération à ce sujet.

La réduction des coûts de transfert de fonds des travailleurs migrants peut être abordée par l'accroissement de la concurrence entre agences spécialisées et par une réglementation visant à ne permettre qu'aux intermédiaires crédibles d'opérer ce type de transaction.

La réduction peut aussi être opérée en concertation avec les autorités des pays partenaires car la tarification des agences est liée aux coûts de fonctionnement de celles-ci dans les pays destinataires des fonds.

On peut également faciliter l'accès des populations destinataires des fonds et des migrants dans les autres pays au système bancaire afin de réduire le recours à des intermédiaires douteux.

Des mesures coercitives de baisse des tarifs me paraissent peu indiquées, si tant est qu'elles soient possibles. Il me paraît préférable d'agir en concertation avec les pays membres de l'Union européenne et les pays partenaires en fonction des conclusions des diverses enceintes où cette question a été abordée et suivie de près comme je l'ai rappelé aujourd'hui.

Je peux en tout cas vous assurer que la Belgique est favorable à un travail concerté en vue d'une réduction de frais et qu'elle s'attellera à faire entrer en vigueur l'ensemble des décisions prises aux niveaux européen et international.

Nous avons déjà tenté de multiplier les contacts avec les pays partenaires pour faire baisser les coûts en faveur d'un certain nombre de personnes qui paient aujourd'hui des montants très élevés pour des transferts modestes.

Mme Sfia Bouarfa (PS). - Je remercie le ministre de sa réponse complète.

Je ne plaide pas pour que les travailleurs migrants envoient de l'argent dans leur pays d'origine, mais parfois ils n'ont d'autre solution pour soutenir leurs parents nécessiteux ou leurs enfants restés au pays.

S'agissant de la Belgique, le terme « migrant » est dépassé car les personnes en question ont souvent acquis la nationalité belge. Cependant, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, il conviendrait que nous oeuvrions en faveur d'une plus grande transparence et que nous luttions contre l'exploitation de ces personnes. En effet, bon nombre de banques ayant pignon sur rue traitent essentiellement le transfert d'avoirs de la population étrangère vers le pays d'origine. On aurait pu mettre sur pied des structures pour accueillir cette population étrangère dans notre pays. Certaines personnes d'origine étrangère sont particulièrement exploitées par leur pays d'origine. Elles ne sont pas toujours bien accueillies et rencontrent parfois de nombreuses difficultés lorsqu'elles veulent rentrer dans leur pays.

Je pense également, monsieur le ministre, qu'il serait intéressant de mettre en place, avec votre collègue de la coopération, un système dans lequel interviendraient nos investisseurs belges, système visant à contribuer au développement de ces pays, car les fonds transférés représentent une part importante du PIB de ces pays. On pourrait ainsi remédier au manque de transparence et lutter contre l'exploitation des travailleurs étrangers, qui peut parfois dériver vers le blanchiment d'argent et autres pratiques douteuses en matière financière.