3-1956/3

3-1956/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2006-2007

20 MARS 2007


Proposition de loi complétant l'article 45 de la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, en vue de renforcer la participation démocratique


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE L'INTÉRIEUR ET DES AFFAIRES ADMINISTRATIVES PAR

M. HAPPART


I. INTRODUCTION

La proposition de loi à l'examen a été déposée le 29 novembre 2006 et envoyée à la commission de l'Intérieur et des Affaires administratives.

Celle-ci l'a examinée au cours de ses réunions des 13 et 20 mars 2007.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE L'AUTEUR PRINCIPAL DE LA PROPOSITION DE LOI, M. JAN STEVERLYNCK

Le sénateur Steverlynck explique que l'objectif de la réforme des polices, qui est de mieux garantir la sécurité du citoyen en partant de la communauté locale, en prévoyant dès lors un ancrage local, échoue parfois dans les zones de police pluricommunales.

Dans les zones de police pluricommunales, le conseil communal et le collège échevinal voient leurs compétences exercées par le conseil de police et par le collège de police. De ce fait, l'ancrage local n'est pas toujours réalisé de manière optimale.

Les membres du conseil communal ne peuvent pas toujours répondre correctement aux questions que les citoyens leur posent à propos du fonctionnement de la police locale.

En fait, le problème est double.

Le chef de corps n'est pas toujours au fait de la manière de voir du conseil communal par rapport au fonctionnement de la police locale. Dans certaines zones, les chefs de corps sont déjà invités à assister aux conseils communaux, alors que dans d'autres zones, ils ne bénéficient pas de cette possibilité et ne peuvent donc pas discuter de leur politique avec les conseillers communaux. Certains voudraient avoir la possibilité d'un échange de vues avec le conseil communal.

Quant aux conseillers communaux, ils perçoivent souvent une certaine distance par rapport à la politique de sécurité proprement dite et à la police. Quand ils essaient d'évoquer ces points lors d'une réunion du conseil communal, le bourgmestre doit souvent leur rappeler qu'il s'agit d'une compétence du conseil de police. Et lorsqu'un tel point est inscrit à l'ordre du jour d'un conseil de police, il est souvent souligné qu'il s'agit d'un cas propre à une commune donnée, si bien que là aussi, aucun débat de fond n'est organisé.

Il en résulte que des demandes légitimes ne sont pas ou pas suffisamment satisfaites.

La proposition de loi vise à permettre aux conseils communaux de recevoir, par l'intermédiaire du bourgmestre, une réponse aux questions qui s'y posent. Le but poursuivi n'est donc certainement pas de remettre en cause la réglementation des compétences prévue par la loi pour ce qui est des conseils et collèges de police. Le corollaire ne peut pas être de permettre à un conseiller communal d'interroger directement un chef de corps, les questions devant être posées par l'intermédiaire du bourgmestre, qui est membre du collège de police.

La proposition de loi vise également à permettre au chef de corps de la zone locale d'assister, au moins une fois par an, à un conseil communal. À cet égard, le but est non pas d'interroger le chef de corps ou de l'évaluer, mais d'instaurer un dialogue constructif. À cette occasion, les deux parties pourront faire part de leurs attentes et de leur conception de la politique en matière de police. Dans certaines communes, ce dialogue est déjà instauré.

En modifiant l'article 45 de la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, la proposition de loi tente de réaliser ces deux objectifs.

III. DISCUSSION GÉNÉRALE

Fort de son expérience personnelle dans une zone de police pluricommunale, le sénateur Noreilde, cosignataire de la proposition, est convaincu de l'importance de celle-ci pour un bon fonctionnement de la police dans les zones visées. Il est essentiel d'informer les conseillers communaux au sujet de la politique policière locale et de pouvoir organiser une fois par an un échange de vues à ce propos.

M. Collas s'est également associé à cette proposition de loi. Les deux chefs de zone qu'il connaît le mieux se sont déclarés favorable à une telle initiative. Selon eux il est important de rencontrer les conseillers communaux pour favoriser leur intérêt pour la sécurité des zones. La solution proposée associera tous les responsables politiques au niveau local à cette question. Comme le fonctionnement actuel des zones de police lui semble se dérouler de façon satisfaisante, la proposition de loi ne doit pas être considérée comme une critique, mais plutôt comme un complément qui démocratise davantage les structures existantes. L'échange de vues annuel entre chefs de corps et conseillers communaux sera, pour toutes les parties concernées, une expérience enrichissante.

Le sénateur Vandenhove estime que la réunion annuelle proposée avec le conseil communal ne devrait poser aucun problème. De nombreux chefs de zones organisent déjà un tel échange de vues; c'est notamment le cas dans la zone de police dont fait partie la ville de Saint-Trond. Une telle réunion est l'occasion, pour le chef de corps, de commenter le rapport annuel de la zone. Il renvoie à cet égard à la proposition de loi complétant la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, en vue d'assurer la publicité des données relatives à la criminalité dans les zones de police (doc. Sénat 3-133) qui a été votée par le Sénat et qui doit être actuellement examinée par la Chambre des représentants. Il y est prévu que le chef de corps doit rédiger un rapport annuel.

Toutefois, l'intervenant est d'avis que le premier volet de la proposition de loi pose problème. En permettant aux conseillers communaux d'interroger le chef de corps, on revient sur les structures prévues dans la loi actuelle, qui attribue une compétence spécifique au conseil de police.

La représentante du ministre de l'Intérieur partage l'analyse du sénateur Vandenhove. La disposition qui permet d'organiser une réunion annuelle entre le chef de corps et le conseil communal, pour discuter de l'éventuel rapport annuel et commenter la politique, complète avantageusement la loi actuelle. Elle souligne toutefois que la politique est déterminée par le conseil zonal de sécurité et qu'il faut veiller à ne pas opérer un glissement vers le conseil communal. C'est le danger inhérent à l'alinéa 1er de l'article 2 de la proposition de loi, qui risque, s'il est adopté, de remettre en cause la philosophie de la réforme des polices. Il faut aussi veiller à ne pas multiplier les tâches administratives incombant au chef de corps, qui ne sont déjà pas négligeables. Le chef de corps doit rendre compte à différentes instances, mais avant tout au bourgmestre-président du conseil zonal de sécurité. Le risque que le chef de corps soit sollicité à l'excès est réel. D'ailleurs, dans la plupart des zones de police, la communication avec les instances communales est excellente. Le ministre n'émet donc qu'une seule réserve, laquelle concerne le premier volet de la proposition de loi.

Le sénateur Steverlynck se réjouit de la bonne communication qui existe dans la plupart des zones de police. Mais il sait par expérience qu'elle n'est pas optimale partout. Certains chefs de corps aimeraient pouvoir défendre leur politique au conseil communal, mais on ne leur en donne pas la possibilité. C'est la raison pour laquelle il trouve judicieux d'inscrire pareille possibilité dans la loi.

En ce qui concerne l'alinéa 1er, le ministre et le sénateur Vandenhove craignent une érosion des compétences du conseil et du collège de police, ainsi qu'un alourdissement de la charge administrative du chef de corps. En tout cas, l'objectif n'est pas de vider les compétences du conseil de police de leur substance. Les questions doivent être transmises par les canaux appropriés, c'est-à-dire par l'intermédiaire du bourgmestre, qui siège au collège de police.

L'objectif n'est pas d'adresser directement ces questions au chef de corps par l'intermédiaire du conseil communal ou du conseil de police. Pour être sûr que le conseil communal sera correctement informé, la proposition prévoit que le chef de corps doit répondre par écrit. L'intervenant ne partage pas la crainte que la proposition de loi alourdisse les tâches administratives du chef de corps. Il est néanmoins ouvert à d'autres solutions pour mieux informer le conseil communal.

Le sénateur Vandenhove souligne que le conseil communal exerce encore un certain nombre de compétences policières. Si une question porte sur l'une de ces compétences, le bourgmestre doit y répondre. Si le bourgmestre ne peut pas répondre immédiatement, il peut le faire ultérieurement par écrit. Mais si la question porte sur une compétence du conseil de police, elle doit être posée par son intermédiaire. On ne peut en effet mélanger les compétences.

Le sénateur Beke fait remarquer que tous les groupes qui siègent au conseil communal ne sont pas représentés au sein du conseil de police. Il estime que ces groupes devraient également pouvoir exercer leur droit de contrôle démocratique.

Le sénateur Vandenhove répond que c'est l'électeur qui, lors des élections, détermine la taille d'un parti. La représentation ou non d'un parti au sein du conseil communal et du conseil de police est liée à l'application du système Dhondt. C'est le mode de fonctionnement de la démocratie. En suivant le même raisonnement, on pourrait donner à des partis non représentés au conseil communal le droit de poser des questions.

Le sénateur Beke estime que cela n'est pas comparable.

Le sénateur Vandenhove répond que le système de la démocratie représentative est ainsi fait. Du fait de l'application du « système Dhondt », les partis qui n'obtiennent pas suffisamment de voix n'auront pas d'élu au conseil communal, et d'autres partis n'auront aucun représentant au sein du conseil de police.

Le sénateur Beke fait remarquer qu'il avait été dit, lors de la réforme des polices, que les compétences du conseil communal seraient transférées vers le conseil de police. Or, du fait de la double application du « système Dhondt », certains partis n'ont aucun représentant au sein du conseil de police, perdant ainsi le pouvoir de contrôle dont ils disposaient auparavant du fait de leur présence au conseil communal.

M. Collas croit pouvoir constater un consensus en ce qui concerne le deuxième point de la proposition. En ce qui concerne la première partie de la proposition, qui démocratise l'accès à l'information en matière de police, il souligne que la proposition ne veut pas porter atteinte aux compétences du conseil ou du collège de police.

La sénatrice Leduc souligne que certains membres du conseil communal siègent au conseil de police. Mais lorsqu'un parti obtient trop peu de voix, il n'est plus représenté au sein du conseil de police. Ses membres peuvent alors poser leurs questions au bourgmestre, qui est le représentant de leur commune au collège de police. Toutefois, les questions posées doivent être à caractère général. Il ne faut pas non plus ignorer les questions des citoyens sur le fonctionnement de la police locale. Dans toute commune qui fonctionne bien, les citoyens ont la possibilité de poser des questions à l'administration communale, à charge pour la commune de veiller à ce qu'une réponse soit apportée à ces questions dans un délai raisonnable.

L'intervenante estime dès lors que le fonctionnement actuel des administrations communales permet déjà de remédier aux problèmes évoqués dans la première partie de la proposition.

Le sénateur Vandenhove pense pouvoir conclure que la commission est clairement d'accord sur le principe d'une réunion annuelle du conseil communal en présence du chef de corps de la zone locale. En revanche, il n'y a manifestement pas unanimité sur la possibilité, pour les membres du conseil communal, d'interroger le chef de corps.

Le sénateur Steverlynck partage cette analyse et est disposé à accepter un amendement en la matière.

Enfin, la représentante du ministre fait remarquer que l'expression « l'action de la police locale », dans le dernier alinéa, est plutôt vague. Ne faudrait-il pas préciser davantage le sujet de la discussion annuelle avec le conseil communal ? La commission pourrait indiquer que l'échange de vues doit porter sur la politique et les chiffres en matière de criminalité.

Les sénateurs Beke et Steverlynck peuvent admettre que l'on précise le sujet de l'échange de vues à condition qu'on ne se limite pas, par exemple, à une discussion sur les chiffres en matière de criminalité.

IV. DISCUSSION DES ARTICLES ET VOTES

Article 1er

Cet article est adopté sans discussion à l'unanimité des 10 membres présents.

Article 2

Amendement nº 1

M. Vandenhove et consorts déposent un amendement (amendement nº 1, doc. Sénat nº 3-1956/2) tendant à supprimer l'alinéa 1er de la disposition proposée dans cet article.

Cet amendement est adopté par 9 voix et 1 abstention.

Amendement nº 2

M. Steverlynck et consorts déposent un amendement (amendement nº 2, doc. Sénat nº 3-1956/2) tendant à préciser l'alinéa 2 de la disposition proposée dans cet article. Ils proposent de remplacer les mots « l'action de la police locale » par les mots « la politique en matière de police locale et le fonctionnement de cette police ».

Cet amendement est adopté à l'unanimité des 10 membres présents.

L'ensemble de l'article ainsi amendé est également adopté à l'unanimité des 10 membres présents.

L'ensemble de la proposition de loi amendée a également été adopté à l'unanimité des 10 membres présents.


Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 11 membres présents.

Le rapporteur, Le président,
Jean-Marie HAPPART. Ludwig VANDENHOVE.