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29 NOVEMBRE 2006
Avis sur l'avant-projet de loi sur la formation judiciaire et portant création d'un Institut de formation judiciaire
Approuvé par l'assemblée générale le 27 septembre 2006
Table des matières
1. INTRODUCTION
2. LIGNES DE FORCE DE L'AVIS
2.1. Un Institut pour la formation des magistrats
2.2. La place de l'Institut
2.3. Le budget
2.4. La répartition des responsabilités
3. CONTENU DE L'AVANT-PROJET DE LOI
4. AVIS DU CONSEIL SUPERIEUR DE LA JUSTICE
4.1. Situation de la question
4.1.1. Un Institut de formation des magistrats
4.1.2. Un Institut fédéral de formation des magistrats
4.1.3. Un Institut fédéral de formation, autonome des pouvoirs exécutif et législatif
4.1.3.1. Pour le CSJ
4.1.3.2. Position de la ministre de la Justice
4.1.3.3. Au niveau du Conseil de l'Europe
4.1.3.4. Dans d'autres pays européens
4.2. Positions de principe du Conseil supérieur de la Justice
4.2.1. Position prioritaire du CSJ: un Institut fédéral pour la formation des magistrats
4.2.1.1. Un Institut pour la formation des magistrats
4.2.1.2. Un Institut lié au Conseil supérieur de la Justice
4.2.2. Position subsidiaire du CSJ: un Institut de formation judiciaire
4.2.3. Un budget pour la formation des magistrats
4.2.4. Le rôle du CSJ si un Institut est créé en dehors du CSJ
4.3. Avis sur certaines dispositions de l'avant-projet de loi
4.3.1. En ce qui concerne le principe de la formation judiciaire (art. 3 et 4)
4.3.2. En ce qui concerne les missions (art. 7, § 2)
4.3.3. En ce qui concerne la direction de l'Institut
4.3.4. En ce qui concerne le personnel de l'Institut
4.3.5. En ce qui concerne le financement et le contrôle financier de l'Institut
1. INTRODUCTION
Par courrier du 13 juin 2006, la ministre de la Justice a sollicité l'avis du Conseil supérieur de la Justice sur l'avant-projet de loi sur la formation judiciaire et portant création de l'Institut de formation judiciaire (1) .
Lors de son assemblée générale du 27 septembre 2006, le Conseil supérieur de la Justice a émis l'avis suivant.
2. LIGNES DE FORCE DE L'AVIS
Depuis sa création, le Conseil supérieur de la Justice a régulièrement demandé la création en Belgique d'un Institut de formation des magistrats.
2.1. Un Institut pour la formation des magistrats
Par priorité, le CSJ est favorable à la constitution d'un Institut de formation des magistrats.
Le Conseil supérieur de la Justice n'est donc pas favorable à la création d'un Institut de formation commun pour les magistrats et pour les autres catégories de personnels de l'ordre judiciaire.
À titre subsidiaire, s'il est décidé de créer un seul Institut de formation pour les magistrats et les autres catégories de personnels de l'ordre judiciaire, le CSJ est favorable à la création de deux sections distinctes en son sein:
— la section « magistrature », compétente pour les magistrats et les stagiaires judiciaires;
— la section « autres catégories », compétente pour les personnels des greffes et secrétariats de parquet ainsi que pour les juristes de parquet et les référendaires.
Ces deux sections autonomes doivent pouvoir développer des programmes de formation spécifiques en fonction du public visé, tout en ouvrant la possibilité d'organiser des programmes communs aux magistrats et aux autres personnels de l'ordre judiciaire, ainsi qu'à d'autres professions judiciaires, tels que les avocats et les huissiers de justice.
2.2. La place de l'Institut
Par priorité, l'Institut doit être constitué auprès du CSJ:
— section autonome au sein du CSJ et autonome par rapport au CSJ;
— missions déléguées à l'Institut par le CSJ pour la formation des magistrats et par le ministre de la Justice pour la formation des autres catégories de personnel.
En ordre subsidiaire, l'Institut peut être constitué en organisme d'intérêt public, pour autant que celui-ci réponde aux recommandations internationales relatives aux conditions de garantie de l'indépendance de la magistrature.
2.3. Le budget
Soit il y a un Institut pour la formation des magistrats au sein ou auprès du CSJ: le budget actuel doit être transféré au CSJ;
Soit il y a un Institut commun pour l'ensemble des personnels de l'ordre judiciaire: la loi doit fixer des critères permettant de stabiliser l'enveloppe minimale affectée à la formation des magistrats, sur la base des montants actuellement affectés.
En tout état de cause, le CSJ se réjouit de la volonté du gouvernement d'inscrire dans la loi les modalités de calcul du budget affecté à la formation judiciaire (en termes de pourcentage par rapport à la masse salariale du personnel de l'ordre judiciaire) et ainsi, de garantir une certaine pérennité des moyens budgétaires.
2.4. La répartition des responsabilités
Si l'Institut est constitué en dehors du CSJ, la répartition des responsabilités entre les différents partenaires à la formation devrait être la suivante:
— les directives pour la formation initiale et la formation permanente de magistrats ainsi que les profils de formation, sont fixés par le CSJ;
— la préparation, l'exécution (y compris les modalités concrètes d'organisation de la formation) et l'évaluation permanente des programmes sont de la compétence de l'Institut;
— l'évaluation de la mise en œuvre des directives et de l'incidence de l'exécution des missions sur le fonctionnement de l'ordre judiciaire, doit relever du CSJ.
3. CONTENU DE L'AVANT-PROJET DE LOI
Cet avant-projet se situe dans la ligne des options que le Conseil supérieur de la Justice a, à plusieurs reprises depuis sa création en 2000, déjà avancées.
En effet, dès qu'il a commencé à exercer ses compétences, le Conseil supérieur de la Justice s'est rendu compte de l'absolue nécessité de doter notre pays d'une institution capable de compléter l'arsenal des réformes de 1998, en regroupant les compétences en matière de formation des magistrats, réparties entre le SPF Justice et le CSJ. Les changements attendus dans la justice nécessitaient en outre une plus grande professionnalisation de la formation des magistrats.
Des contacts exploratoires ont ainsi été organisés par le CSJ avec l'ensemble des interlocuteurs intéressés par cette question, dont les universités et les barreaux.
Le CSJ se réjouit que la ministre de la Justice et le gouvernement, aient décidé de mener à bien ce nouveau chantier de réforme de la justice — déjà repris dans les accord « Octopus » —, en déposant un projet de loi portant création d'un Institut chargé de la formation de l'ensemble du personnel de l'ordre judiciaire.
Voici les principaux aspects de cet avant-projet:
— public visé: les magistrats professionnels et suppléants, les stagiaires judiciaires et les autres catégories de personnel de l'ordre judiciaire;
— concerne la formation initiale, la formation continue, l'accompagnement de la carrière, l'échange d'expériences professionnelles et les relations internationales;
— droit reconnu aux magistrats à la formation permanente d'au moins 5 jours par an;
— création d'un Institut fédéral, jouissant de la personnalité juridique;
— 2 ailes: magistrats et autres personnes assistant l'ordre judiciaire;
— reprend les tâches du SPF Justice et du CSJ;
— trois organes: un conseil d'administration, un comité d'accompagnement et une direction;
— le conseil d'administration, organe de contrôle, composé de 10 membres désignés pour un mandat de 4 ans, renouvelable: les présidents des CND, le directeur de l'Institut, un représentant de l'Institut de Formation de l'Administration fédérale, 2 juges et 2 magistrats du ministère public, présentés par le CSJ et 2 membres des greffes et secrétariats de parquet;
— le comité scientifique, cellule de réflexion, composé de 17 membres: le directeur, 2 juges et 2 officiers du MP présentés par le CSJ, 2 greffiers, 2 secrétaires de parquet, 2 avocats (OBFG et OVB), 2 membres de l'Institut de Formation de l'Administration fédérale et 4 membres représentant les universités (CREF et VLIR);
— une direction, chargée de l'administration journalière, de la préparation et de l'exécution des programmes dans le cadre des directives fixées par le CSJ (pour les magistrats) et par le ministre (pour les autres catégories de personnel) et moteur de l'Institut, composée de 1 directeur et de 2 directeurs adjoints, dont le mandat est de 6 ans, renouvelable;
— un personnel recruté directement, ou détaché ou délégué;
— un budget administratif inscrit dans le budget du SPF Justice (1e année, 0,9 % de la masse salariale du personnel de l'ordre judiciaire, pour atteindre, après 4 ans, 1,9 %) et 2 commissaires du gouvernement désignés par le ministre de la Justice et le ministre du Budget;
— les commissions d'évaluation du stage judiciaire, prévues dans le projet de loi relatif à l'accès à la magistrature, sont déplacées du CSJ à l'Institut;
— les formations pour les mandats spécifiques deviennent toutes obligatoires (à l'instar de la formation pour juge d'instruction).
4. AVIS DU CONSEIL SUPERIEUR DE LA JUSTICE
4.1. Situation de la question
4.1.1. Un Institut de formation des magistrats
L'ordre judiciaire a besoin d'une modernisation radicale. Cette transformation passe notamment par la formation des magistrats. De plus, la formation représente un outil important pour une utilisation efficace des ressources humaines disponibles et pour l'optimalisation de celles-ci.
Le 21 mars 2001, l'assemblée générale du CSJ approuvait une motion en faveur d'une part du transfert au CSJ de la compétence d'exécution des programmes de formation et d'autre part, de la constitution d'un institut national de formation des magistrats: « Dans un souci de cohérence et d'efficacité, il convient de confier au CSJ le pouvoir d'exécuter les programmes de formation qu'il adopte ainsi que les moyens nécessaires à leur mise en œuvre. Il y a lieu d'envisager la création d'une institution nationale distincte spécialement chargée de l'exécution de cette mission [NDR: la formation des magistrats] avec la participation des universités sous le contrôle du CSJ. La possibilité d'associer d'autres partenaires sera examinée. »
Il faut en effet faire le constat suivant: le problème du partage de compétence -entre le Conseil supérieur et le SPF Justice — n'a pas permis le développement harmonieux d'une réelle politique globale et cohérente de formation.
En effet, dans la pratique, la scission des compétences génère un faisceau de difficultés et d'incohérences à tous les stades de l'organisation des formations. Des problèmes se présentent régulièrement, entraînant des conséquences regrettables et empêchant toute politique véritablement cohérente.
Les modalités de collaboration sont cependant régulièrement revues et évaluées, sans qu'apparaisse la perspective d'un mode optimal, le problème étant essentiellement de nature structurelle.
C'est pourquoi, depuis sa création, le Conseil supérieur de la Justice a régulièrement demandé la création en Belgique d'un Institut de formation des magistrats.
Déjà dans son premier rapport annuel 2000, il est précisé:
« La formation ne peut être réduite à des critères d'enseignement, elle doit être axée sur la pratique et son caractère national doit être conservé. Il est donc indispensable de créer au plan national, certes en collaboration avec les universités mais en dehors des structures de celles-ci, et sous la responsabilité directe du Conseil supérieur de la Justice un institut spécifique dont la mission serait d'assurer la formation des magistrats. »
Ce constat du Conseil supérieur correspond à celui qu'a formulé la ministre de la Justice, lorsqu'elle a répondu à la question que lui a posée Mme de T' Serclaes en séance plénière du Sénat, le 8 janvier 2004, à savoir que « toute l'organisation de la formation devrait faire l'objet d'une structure cohérente et de simplifications en termes de procédures ».
Ces propos ont été récemment confirmés: dans sa déclaration du 11 octobre 2005, le gouvernement fédéral précise que: « Ces changements profonds rendent encore plus indispensable la formation de l'ensemble des membres du personnel de l'organisation judiciaire. C'est pourquoi le gouvernement proposera au Parlement la création d'un institut de formation pour l'Ordre judiciaire. »
4.1.2. Un Institut fédéral de formation des magistrats
Il peut être affirmé que la création d'écoles de la magistrature par communauté (tel qu'envisagé dans les accords « Octopus ») se heurte à un certain nombre d'objections légales (et constitutionnelles) de sorte que leur utilité pourrait être mise en question.
Les compétences en matière d'accès à la fonction de magistrat, de stage et de formation continue étant, en effet, des compétences fédérales principalement attribuées au Conseil supérieur de la Justice, il est indiqué de prévoir la création d'un Institut fédéral de formation de la magistrature.
Cependant, cela n'empêche pas que les communautés et les universités, le cas échéant dans un cadre interuniversitaire, peuvent contribuer à la formation des magistrats, d'une part, en prévoyant dans le cadre de la formation académique de base, des enseignements spécifiques aux professions judiciaires, et d'autre part, en collaborant dans le cadre d'un Institut fédéral de formation des magistrats, avec le Conseil supérieur de la Justice chargé de la formation initiale et permanente des magistrats.
4.1.3. Un Institut fédéral de formation, autonome des pouvoirs exécutif et législatif
4.1.3.1. Pour le CSJ
Pour éviter de disperser les efforts qui pourraient être utilement investis dans une amélioration constante du système de formation, le Conseil supérieur de la Justice continue à plaider pour la réunion des compétences en matière de formation entre les mains d'un seul organe, indépendant des pouvoirs législatifs et exécutifs. Il s'agit d'un atout pour une efficacité optimale du système de formation.
4.1.3.2. Position de la ministre de la Justice
La ministre a confirmé sa position et semblait partager la vision du Conseil supérieur en ce qu'il prône la création d'un institut de formation autonome, lorsqu'elle a répondu, en commission de la justice de la Chambre des représentants, aux questions de MM. De Groote et Laeremans, en affirmant:
« Les accords octopartites prévoyaient la création d'une école de la magistrature par Communauté. Mais le Conseil supérieur de la Justice a entre-temps été mis en place. La formation est l'une de ses compétences constitutionnelles. L'article qui règle les compétences du Conseil supérieur n'est pas soumis à révision et ne peut donc pas être modifié. La formation professionnelle de l'ordre judiciaire doit être organisée par l'employeur. Le département de la Justice doit donc veiller à former un personnel indépendant et compétent. Pour éviter toute ingérence du pouvoir exécutif, je défends la création d'un institut autonome, ne dépendant pas du département et du SPF Justice, chargé d'organiser la formation continuée des magistrats et des stagiaires judiciaires. »
Dans sa note de politique générale du 19 novembre 2004, la ministre de la Justice évoque, parmi les mesures à entreprendre pour la modernisation de l'appareil judiciaire, la création d'un Institut de Formation de l'Ordre Judiciaire, qui pourrait fonctionner dès 2006:
« La modernisation de l'appareil judiciaire nécessite un personnel judiciaire présentant des qualifications professionnelles spécifiques et de grande qualité. Il est indispensable d'offrir à la magistrature et au personnel qui l'assiste dans sa mission juridictionnelle une formation professionnelle continue. Depuis l'installation du Conseil supérieur de la Justice, on a assisté à une professionnalisation de la formation. Je ne peux que me réjouir de cette évolution bénéfique pour la magistrature. Je crois cependant qu'il faut aller plus loin encore dans la professionnalisation et c'est pourquoi je souhaite qu'un Institut de Formation de l'Ordre Judiciaire soit créé; il sera compétent pour l'ensemble du personnel de l'appareil judiciaire. Je suis favorable à un Institut indépendant, présentant une structure fédérale, composée de deux directions (magistrats — non magistrats). Un avant-projet de loi sera présenté au gouvernement au début de l'année 2005, j'espère que l'Institut pourra fonctionner dès 2006. »
4.1.3.3. Au niveau du Conseil de l'Europe
Dans son avis nº 4 du 27 novembre 2003 à l'attention du Comité des ministres du Conseil de l'Europe sur la formation initiale et continue appropriée des juges au niveau national et européen, le Conseil consultatif des Juges européens déclare:
« Le pouvoir judiciaire devrait jouer un rôle majeur ou être lui-même chargé d'organiser et de contrôler la formation. À cette fin, dans la continuité des dispositions de la Charte européenne sur le statut des juges, le CCJE préconise que dans chaque État membre ces attributions soient confiées, non au ministère de la justice ou à une autre autorité relevant des pouvoirs législatif ou exécutif, mais au pouvoir judiciaire lui-même ou à un autre organe indépendant (y compris un Conseil supérieur de la magistrature). [...]
Il importe cependant, pour clarifier les attributions de chacun, de ne pas confier directement à la même autorité la charge de la formation et de la discipline des magistrats. Dans cette perspective, le CCJE recommande que, sous la responsabilité générale du pouvoir judiciaire ou d'un autre organe indépendant, la formation soit assurée par un établissement particulier bénéficiant d'un statut d'autonomie et doté de son propre budget, lui permettant de définir lui- même, en concertation avec les juges, les programmes de formation et d'en assurer la mise en œuvre. [...] »
4.1.3.4. Dans d'autres pays européens
Dans le domaine de la formation des magistrats, la Belgique n'est pas particulièrement à la pointe.
En effet, dans la plupart des pays européens — et c'est encore plus le cas dans les États qui ont adhéré récemment à l'Union européenne —, la formation des magistrats fait l'objet d'une attention particulière. Dans plusieurs pays, un centre particulier et spécialisé dans cette matière, a été mis sur pied.
Dans le respect des recommandations européennes, ces Centres sont souvent constitués auprès de l'institution chargée des questions de la magistrature, indépendante du pouvoir politique, tels que les Conseils supérieurs de la Magistrature.
En Italie, le Conseil Supérieur de la Magistrature, vénérable organisme indépendant au sein duquel les juges et les procureurs sont largement représentés, se dote lui-même des compétences nécessaires pour assurer tous les types de formations des juges et des procureurs. La IX Commissione du Conseil est spécifiquement compétente pour la formation, mais elle l'est également en matière de recrutement. La session plénière du Conseil (également compétente pour les promotions des juges et y compris pour les magistrats siégeant au Tribunal disciplinaire — une section autonome du Conseil siégeant en tant qu'autorité judiciaire et sans interférence de la part de la session plénière du Conseil) statue sur les propositions faites par la commission de la formation. Aucun rôle consultatif formel n'a été décrit pour les associations judiciaires. Une récente loi vient de modifier la situation de la formation des magistrats qui serait plus dépendante du pouvoir exécutif.
En Roumanie, co-existent deux « écoles », à savoir l'Institut de formation des magistrats et l'École nationale des greffiers, lesquelles ressortent de la compétence du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM). Une loi de 2004 a mis un terme à la subordination de l'Institut au ministère de la Justice et a confié au CSM la charge de coordonner les activités de l'Institut. Le budget de l'Institut constitue une partie distincte du budget du Conseil Supérieur. Il en va de même pour l'École Nationale des Greffiers. Le CSM a d'importants pouvoirs: il désigne les membres-magistrats du Conseil Scientifique (environ Conseil d'Administration) de l'Institut, et, sur proposition de ce dernier, fixe le programme de formation initiale et continue, désigne le directeur et les directeurs adjoints de l'Institut et approuve la structure organisationnelle et le cadre du personnel de l'Institut.
La Bulgarie connaît une structure comparable, dans la mesure où la formation des magistrats est confiée à un Institut National de la Justice, dont la stratégie et politique générale est soumise à la coordination et au contrôle du Conseil Suprême de la Justice (CSJ).
Aux Pays-Bas, le « Studiecentrum Rechtspleging » (SSR) assure la formation aux magistrats, ainsi qu'aux autres collaborateurs de l'ordre judiciaire. Depuis le 1er janvier 2002, il a le statut d'une « agence », dont la gestion formelle est de la responsabilité finale du « Raad voor de Rechtspraak » (Raad) et plus du ministre de la Justice. Le « Raad » est considéré comme le « propriétaire » de SSR, dans le sens que le financement du SSR passe via le « Raad » et que les comptes annuels du SSR sont consolidés dans ceux du « Raad ». SSR a un propriétaire, le « Raad », mais il a deux « donneurs d'ordre », le « Raad » pour les magistrats du siège et le Collège des Procureurs généraux pour ceux du ministère public. Ces deux organes sont d'ailleurs les seuls membres d'un organe au sein de SSR appelé « Conseil des donneurs d'ordre » et qui est chargé du contrôle sur l'administration de SSR.
En Espagne, la formation et la sélection des juges sont les compétences du Consejo General del Poder Judicial (CGPJ), organe constitutionnel comparable au Conseil supérieur de la Justice, et les formations initiales et permanentes des magistrats sont organisées par l'Escuela Judicial, qui est un organe technique du CGPJ. Son budget et son personnel font partie du CGPJ. Au sein du CGPJ il existe une Comisión de la Escuela Judicial et plusieurs de ses membres, dont le président et le secrétaire général, font partie du conseil de pilotage de l'Escuela. Les officiers du ministère public n'étant pas considérés comme appartenant au pouvoir judiciaire en Espagne, leur formation, ainsi que celle du personnel de l'administration judiciaire, est assurée par le Centro de Estudios Juridicos de la Administratión de Justitia (CEJAJ), qui dépend du ministère de la Justice. L'Escuela Judicial a un Conseil de pilotage qui prend les décisions éducatives et budgétaires. Il est présidé par le président du CGPJ. L'Escuela est dirigée par un directeur, qui est un juge, et un directeur adjoint. Il y a deux services: un pour la formation initiale et un pour la formation continue. Le directeur et les chefs du service formation initiale et continue siègent, sans droit de vote, dans le conseil de pilotage.
Le service de formation initiale est divisé en deux sections: l'une fait la sélection des « stagiaires » et l'autre organise la formation initiale. Le service de formation continue est également divisé en deux sections: une section « formations nationales » et une section « formations décentralisées ». Les deux services sont accompagnés par une commission pédagogique, composée de magistrats.
Les programmes de formation sont préparés par l'Escuela, en collaboration avec le corps de professeurs permanents et avec la commission pédagogique. La Comisión de l'Escuela Judicial du CGPJ approuve les premiers projets et finalement le conseil de pilotage de l'Escuela donne son autorisation de présenter les programmes définitifs pour approbation à l'assemblée générale du CGPJ.
En France, l'École Nationale de la Magistrature offre depuis longtemps un enseignement de qualité pour la formation à la fois initiale et continue des juges et des procureurs. Elle est placée sous la double tutelle du ministère de la Justice et du ministère du Budget, et dispose d'une certaine autonomie que lui confère son statut d'« établissement public ». Le directeur de l'école est nommé par décret du Conseil des ministres sur proposition du ministre de la Justice. Pour l'essentiel, les personnels de l'École, magistrats ou non magistrats, dépendent de la direction des Services Judiciaires (DSJ) du ministère de la Justice, qui nomme ces personnels. Cette école n'est pas autonome en termes de budget. Le budget de l'École est préparé par le Directeur et présenté au Conseil d'Administration, qui le vote. Ce budget est principalement alimenté par une subvention du ministère de la Justice, dont le montant est établi au cours d'un « dialogue de gestion » avec l'ENM et le ministère du Budget. Les opérations budgétaires sont soumises au visa du contrôleur financier, qui est un agent du Trésor, conformément au principe français de séparation de l'ordonnateur et du comptable.
4.2. Positions de principe du Conseil supérieur de la Justice
4.2.1. Position prioritaire du CSJ: un Institut fédéral pour la formation des magistrats
4.2.1.1. Un Institut pour la formation des magistrats
Le Conseil supérieur de la Justice plaide depuis longtemps pour la création d'un institut de formation spécifique aux magistrats, comme cela existe dans la plupart des pays européens.
En effet, comme il est recommandé par les instances européennes compétentes, l'indépendance de la magistrature implique que l'organe chargé de sa formation soit lui-même indépendant.
Même s'il est évident que des liens doivent être créés et développés avec la formation des autres acteurs de la Justice, les personnels des greffes et des secrétariats de parquet, les juristes de parquet et les référendaires, mais aussi les avocats, il est fondamental de conserver la spécificité de la fonction de magistrat tant du siège que du parquet, ce qui implique une vision spécifique de la formation initiale et continue des magistrats.
La formation des magistrats est une matière très spécifique et exige entre autres un apport de la part des universités et autres institutions de formation de haut niveau. Par contre, la formation des autres membres du personnel de l'ordre judiciaire est principalement d'ordre administratif: le management du greffe, les formations relatives à la connaissance et aux aptitudes nécessaires pour exercer les fonctions ...: en ce qui concerne le contenu, elle est à rapprocher de la formation des autres membres du personnel administratif des services publics.
Cette vision de la formation inclut également des développements propres à l'accompagnement dans l'évolution de la carrière des magistrats, notamment lorsqu'il s'agira de permettre les réorientations dans la carrière (par exemple, candidature pour un mandat spécifique, passage du siège au parquet, ...).
Pour toutes ces raisons, le Conseil supérieur de la Justice n'est pas favorable à la création d'un Institut de formation commun pour les magistrats et pour les autres catégories de personnels de l'ordre judiciaire.
4.2.1.2. Un Institut lié au Conseil supérieur de la Justice
Le CSJ est particulièrement attaché à garantir l'indépendance de la nouvelle structure chargée de la formation, par rapport aux pouvoirs législatifs et exécutifs, ainsi que cela est recommandé, non seulement par la doctrine et par des organismes compétents internationaux, mais aussi sur la base des modèles existants à l'étranger. À cet égard, il est renvoyé aux développements ci-avant.
Le Conseil supérieur de la Justice a été voulu et conçu par le Constituant comme institution indépendante des trois pouvoirs.
De même, l'article 151, § 2, de la Constitution, prévoit explicitement que le Conseil supérieur de la Justice exerce ses compétences dans la matière de la formation des magistrats. Cette volonté du Constituant a été traduite par le législateur qui a précisé les compétences du Conseil supérieur en matière de formation des magistrats: la préparation des directives et des programmes de formation des magistrats et du stage judiciaire, ainsi que leur exécution en collaboration avec le service formation de l'ordre judiciaire du SPF Justice.
De cette disposition constitutionnelle et des nombreuses recommandations internationales ou de la doctrine, l'on pourrait conclure à la nécessité de regrouper au CSJ, les compétences aujourd'hui partagées entre le SPF et le CSJ et à la création auprès du Conseil supérieur d'une entité distincte, l'Institut de formation des magistrats.
Cet Institut au sein du CSJ ou « auprès du CSJ », comporte les avantages suivants:
— l'indépendance de la structure est garantie;
— le respect de la volonté du Constituant de 1998 et du législateur;
— elle peut fonctionner rapidement, car l'infrastructure et le personnel sont directement identifiables;
— le budget affecté aujourd'hui à la formation des magistrats peut être aisément mis à la disposition du CSJ;
— elle maintient des liens « directs » avec les « clients » (magistrats);
— elle évite de reproduire les dysfonctionnements constatés dans l'exécution de la politique de formation en supprimant la coexistence de deux structures concernées, le Conseil supérieur et le service administratif du SPF Justice;
— elle contribue au développement d'une politique de la formation des magistrats ouverte et non corporatiste, par la présence de membres non-magistrats tant au Conseil qu'au sein de la sous-commission formation.
Par priorité, le CSJ est favorable à la constitution d'un Institut de formation des magistrats au sein ou auprès du Conseil supérieur de la Justice.
Dans cette hypothèse, il va de soi que la structure de direction de l'Institut doit être adaptée: un comité de direction et un comité scientifique.
En outre, vu la position de l'Institut par rapport au Conseil supérieur, le statut des membres du comité de direction devrait, dans cette même hypothèse, être similaire à celui des membres du Bureau du Conseil supérieur.
4.2.2. Position subsidiaire du CSJ: un Institut de formation judiciaire
La ministre de la Justice a, à plusieurs reprises, manifesté son option préférentielle pour la création d'un Institut compétent pour l'ensemble des membres du personnel de l'ordre judiciaire, à savoir, non seulement les magistrats du siège et du parquet, mais aussi, les greffiers en chef, les greffiers et les membres du personnel des greffes, les secrétaires de parquet et les membres du personnel des secrétariats, sans oublier les juristes de parquet et les référendaires.
Pour le Conseil supérieur, cette option ne pourrait se concrétiser qu'aux conditions suivantes:
— la spécificité de la formation d'une part des magistrats et, d'autre part, des autres personnels est concrétisée dans l'organisation interne de l'Institut en deux sections autonomes (une section pour les magistrats et une section pour les autres catégories de personnel de l'ordre judiciaire);
— les moyens budgétaires affectés actuellement à la formation des magistrats dans le budget du SPF Justice ne sont pas diminués; les moyens budgétaires pour la formation des autres personnels de l'ordre judiciaire doivent être dégagés par ailleurs;
— la constitution d'un tel Institut ne doit pas devenir un projet à ce point démesuré et difficile à mener à son terme (notamment en raison du nombre de personnes concernées) qu'il handicaperait lourdement la mise sur pied d'un institut chargé de la formation des magistrats, lequel est une urgence vu le contexte existant à la suite du partage actuel de compétences.
À titre subsidiaire, s'il est décidé de créer un seul Institut de formation pour les magistrats et les autres catégories de personnels de l'ordre judiciaire, le CSJ est favorable à la création de deux sections distinctes en son sein:
— la section « magistrature », compétente pour les magistrats et les stagiaires judiciaires;
— la section « autres catégories », compétente pour les personnels des greffes et secrétariats de parquet ainsi que pour les juristes de parquet et les référendaires.
Pour le CSJ, dans cette hypothèse, l'Institut peut être constitué:
— soit auprès du CSJ: section autonome au sein et par rapport au CSJ et missions déléguées à l'Institut par le CSJ pour la formation des magistrats et par le ministre de la Justice pour la formation des autres catégories de personnel;
— soit en organisme d'intérêt public, pour autant que celui-ci réponde aux recommandations internationales relatives aux conditions de garantie de l'indépendance de la magistrature.
Ces deux sections autonomes doivent pouvoir développer des programmes de formation spécifiques en fonction du public visé, tout en ouvrant la possibilité d'organiser des programmes communs aux magistrats et aux autres personnels de l'ordre judiciaire, ainsi qu'à d'autres professions judiciaires, tels que les avocats et les huissiers de justice.
4.2.3. Un budget pour la formation des magistrats
Le budget affecté aujourd'hui à la formation des magistrats dans le budget du SPF Justice (évalué à 2 000 000 d'euros sans compter les moyens pour le personnel et pour les locaux, difficilement évaluables) — sans oublier les moyens humains et matériels affectés par le CSJ à la formation des magistrats — devrait constituer le budget minimal absolu affecté à la formation des magistrats dans le budget de l'Institut, et ce d'autant plus qu'il faut prendre en considération les demandes en formations spécifiques des juges consulaires et juges sociaux (actuellement embryonnaires).
Le budget affecté aujourd'hui à la formation des autres catégories de personnel de l'ordre judiciaire dans le budget du SPF (évalué à 600 000 euros), devrait également constituer le budget minimal absolu affecté à la formation de ces catégories. En effet, la formation de ces personnels est également une priorité pour améliorer le fonctionnement de la justice.
Si l'on conçoit que des programmes de formation soient organisés en commun pour les différentes catégories de personnels, il faut absolument veiller à ce que les budgets affectés à l'une ou à l'autre catégorie leur restent affectés.
Pour le CSJ:
— soit il y a un Institut pour la formation des magistrats au sein ou auprès du CSJ: le budget actuel doit être transféré au CSJ;
— soit il y a un Institut commun pour l'ensemble des personnels de l'ordre judiciaire: la loi doit fixer des critères permettant de stabiliser l'enveloppe minimale affectée à la formation des magistrats, sur la base des montants actuellement affectés.
En tout état de cause, le CSJ se réjouit de la volonté du gouvernement d'inscrire dans la loi les modalités de calcul du budget affecté à la formation judiciaire (en termes de pourcentage par rapport à la masse salariale du personnel de l'ordre judiciaire) et ainsi, de garantir une certaine pérennité des moyens budgétaires.
4.2.4. Le rôle du CSJ si un Institut est créé en dehors du CSJ
Pour le CSJ, la création d'un Institut de formation en dehors du CSJ ne peut porter préjudice à la compétence fondamentale du Conseil supérieur, de déterminer les grandes lignes de la politique de formation pour les magistrats.
Il s'agit d'une volonté claire du Constituant qui a été traduite dans la loi sur le Conseil supérieur de la Justice et qui doit être renouvelée (notamment dans les travaux préparatoires) dans la nouvelle loi.
Pour le CSJ, la répartition des rôles et responsabilités entre les différents partenaires à la formation devrait être la suivante:
— les directives pour la formation initiale et la formation permanente de magistrats ainsi que les profils de formation, sont fixés par le CSJ;
— la préparation, l'exécution (y compris les modalités concrètes d'organisation de la formation) et l'évaluation permanente des programmes sont de la compétence de l'Institut;
— l'évaluation de la mise en œuvre des directives et de l'incidence de l'exécution des missions sur le fonctionnement de l'ordre judiciaire, doit relever du CSJ.
4.3. Avis sur certaines dispositions de l'avant-projet de loi
4.3.1. En ce qui concerne le principe de la formation judiciaire (art. 3 et 4)
La nouvelle loi sur la formation des membres des personnels de l'ordre judiciaire devrait fixer les principes généraux de la formation à respecter par les organes chargés de définir et de mettre en œuvre la politique de formation.
En effet, même si une certaine souplesse est recommandée afin de tenir compte au mieux des besoins des personnes concernées ainsi que des évolutions législatives, il est important de fixer dans la loi quelques règles générales à respecter.
Le CSJ propose d'insérer les principes suivants:
— la formation doit contribuer à l'évolution et à l'amélioration du fonctionnement de l'ordre judiciaire;
— la formation est un droit et un devoir: chacun se voit reconnaître un droit à la formation continue, ce qui implique qu'un temps minimum puisse être dégagé en vue de la formation, et qu'un crédit formation (d'au moins cinq jours par an) soit garanti.
En outre, chaque chef de corps dispose d'un « capital formation » qu'il gère en fonction des priorités qu'il identifie, en faveur des personnes sous son autorité.
Par ailleurs, pour exercer un mandat spécifique ou une fonction particulière, un magistrat ou un membre du personnel de l'ordre judiciaire doit participer à des programmes de formation en vue de l'obtention d'un brevet.
L'inscription à un programme de formation oblige, sauf cas de force majeure, à la participation à ce programme.
4.3.2. En ce qui concerne les missions (art. 7, § 2)
L'avant-projet de loi prévoit que la coopération internationale en matière de formation judiciaire et d'échange de l'expérience professionnelle doit relever de la compétence de l'Institut.
C'est ainsi que, conformément aux statuts du Réseau européen de formation judiciaire, c'est le futur Institut qui doit en être membre et remplacer le Conseil supérieur de la Justice, actuellement membre du Réseau.
Cependant, la Constitution attribue toujours au Conseil supérieur de la Justice des compétences en matière de formation, compétences exercées dorénavant, dans l'avant-projet, au moyen des directives pour la formation judiciaire.
Pour le CSJ, la loi devrait mentionner que le rôle de l'Institut au niveau international s'exerce dans la limite ses compétences, le CSJ restant acteur au niveau international pour ce qui relève des compétences que lui attribue la Constitution.
Par ailleurs, la compétence attribuée à l'Institut en matière de coopération au niveau national pour ce qui concerne la formation des magistrats, ne peut en tout cas pas porter préjudice à la capacité du CSJ de coopérer avec toutes instances en Belgique chargées notamment de la formation, notamment pour la préparation des directives.
4.3.3. En ce qui concerne la direction de l'Institut
Le CSJ considère que l'efficacité de la formation implique qu'une organisation la plus efficace possible soit mise sur pied.
C'est pourquoi, compte tenu des différents acteurs intervenants (CSJ, ministre et Institut), il faut absolument éviter de créer de nouveaux conflits de compétence.
De plus, il est important que l'Institut dispose d'organes lui permettant d'agir en toute autonomie.
Après avoir examiné les avantages et les inconvénients de la co-existence de deux organes de gestion au sein de l'Institut (une équipe de direction et un conseil d'administration), le CSJ estime que l'efficacité requiert la simplification dans le management.
Cette limitation du nombre d'organes de gestion ne doit pas s'opposer à l'installation, à côté de l'équipe de direction, d'un comité scientifique (ou comité d'accompagnement) dont le rôle essentiel serait de conseiller, de donner des avis en matière de politique de formation, de méthodes pédagogiques, de programmes de formation, de recherche en matière de formation ...
Pour le CSJ, l'Institut doit être dirigé par un Comité de direction, assisté par un Comité scientifique.
Le Comité de direction est l'organe qui dirige l'Institut. En application du principe d'autonomie et de responsabilisation, il devrait disposer des pouvoirs pour mettre en œuvre les directives qui lui ont été fixées et administrer l'Institut, tels qu'ils sont prévus dans l'avant-projet de loi.
Pour le CSJ, le Comité de direction devrait comprendre 4 membres, afin de respecter les grands équilibres linguistiques propres à notre pays: deux membres seraient francophones et deux membres seraient néerlandophones:
— un directeur, désigné par le CSJ sur avis du ministre de la Justice;
— un directeur adjoint, chef de la section « magistrature », désigné par le CSJ;
— un directeur adjoint, chef de la section « autres catégories », désigné par le ministre de la Justice;
— un directeur adjoint, chef de section « relations extérieures et logistique », désigné par le CSJ.
Il est également important de régler le statut administratif des magistrats qui seraient en mission à l'Institut.
Le CSJ est favorable à la désignation des membres du Comité de direction pour un mandat de six ans, renouvelable, après évaluation.
Cependant, même s'il est souhaitable que les membres de l'équipe de direction dont l'évaluation est favorable puissent voir le terme de leur mandat renouvelé, il n'est pas indiqué, notamment pour les membres du personnel de l'ordre judiciaire, magistrats et non magistrats, qu'ils soient absents de leur fonction d'origine pour une trop longue période,. De plus, dans la plupart des fonctions comparables, le nombre de renouvellements est limité.
C'est pourquoi, le CSJ est favorable à limiter le nombre de mandats successifs de directeur et de directeur adjoint et donc, à prévoir un seul renouvellement immédiat.
On pourrait également prévoir que les directeurs adjoints participent également aux réunions du Comité d'accompagnement avec voix consultative.
Enfin, pour que l'Institut soit en mesure d'exercer ses missions le plus efficacement possible, il serait souhaitable que le directeur ait la compétence de trancher en cas de parité au sein du Comité de direction. C'est pourquoi, le CSJ propose que les décisions du Comité de direction soient prises à la majorité absolue, avec voix prépondérante du directeur de l'Institut en cas de parité.
4.3.4. En ce qui concerne le personnel de l'Institut
Le CSJ comprend bien qu'afin de rendre l'Institut opérationnel le plus rapidement possible, il faille lui permettre de faire appel à du personnel externe, magistrats, membres du personnel de l'ordre judiciaire ou fonctionnaires.
L'exposé des motifs annonce qu'à terme, le personnel de l'Institut jouira d'un statut propre. Dans l'attente de ce statut, il bénéficie du statut du personnel de l'ordre judiciaire, sauf dérogation contraire approuvée par arrêté royal.
Pour le CSJ, il faudrait inscrire dans la loi le principe d'un statut spécifique pour le personnel de l'Institut. La loi devra également préciser l'autorité chargée de ratifier le nouveau statut (le Roi ou le ministre de la Justice).
Par ailleurs, l'avant-projet de loi semble avoir oublié la possibilité pour l'Institut de pouvoir charger des membres du personnel du Conseil supérieur de la Justice d'une mission auprès de l'Institut, alors qu'actuellement, une cellule composée de 8 membres du personnel est affectée à la formation des magistrats au sein des services administratifs du CSJ.
Pour le CSJ, les services administratifs du CSJ devraient être ajoutés à la liste des services dont les membres du personnel peuvent être chargés d'une mission auprès de l'Institut.
4.3.5. En ce qui concerne le financement et le contrôle financier de l'Institut
Le financement proposé pour l'Institut est assuré par des recettes budgétaires inscrites dans une section distincte du budget administratif du SPF Justice.
Le calcul du montant serait fixé dans la loi (voir avis du CSJ ci-avant, point 4.2.3.).
Cette modalité n'est cependant pas satisfaisante, car elle fait dépendre formellement le budget de l'Institut d'un acte du pouvoir exécutif (l'inscription formelle du budget dans une section du budget du SPF Justice).
En outre, les modalités de contrôle financier du ministre de la justice et du ministre du budget, telles que prévues dans l'avant-projet de loi, illustrent à nouveau les limites apportées à l'indépendance de l'Institut par rapport au pouvoir exécutif.
Ces modalités sont en effet intimement liées au choix opéré en faveur d'un organisme d'intérêt public (tel que les organismes repris dans la loi du 16 mars 1954 relative au contrôle de certains organismes d'intérêt public), même si cela n'est pas expressément prévu dans le projet.
On remarque d'ailleurs que le texte de ces dispositions est une copie des articles 9 et 10 de la loi du 16 mars 1954 dont question ci-avant.
Le CSJ est soucieux de garantir une indépendance réelle de l'Institut par rapport au pouvoir exécutif.
C'est pourquoi, à titre principal, le budget des recettes de l'Institut devrait relever du budget des Dotations, voté par la Chambre des représentants et dans ce cadre, le contrôle des recettes et des dépenses devrait être assuré par la Commission de la Comptabilité de la Chambre suivant les modalités prévues pour d'autres organismes tels que les Comités P et R ou le Collège des Médiateurs fédéraux.
À titre subsidiaire — c'est-à-dire, dans l'hypothèse où les crédits sont inscrits au budget du SPF Justice comme il est prévu dans l'avant-projet de loi —, le pouvoir de contrôle financier devrait être limité au respect de l'enveloppe budgétaire totale allouée à l'Institut, sans immixtion dans les choix d'opportunité d'affectation des crédits.
Par conséquent, pour le CSJ, il faudrait supprimer la possibilité pour les commissaires de prendre recours lorsqu'ils estiment une décision contraire à l'« intérêt général ». Sans cela, il s'agirait d'une possibilité pour les représentants de l'exécutif de disposer d'une influence sur les choix stratégiques et opérationnels assurés par les autorités de l'Institut.
(1) Le texte de l'avis a été rédigé en français.