3-1986/7

3-1986/7

Sénat de Belgique

SESSION DE 2006-2007

21 DÉCEMBRE 2006


Projet de loi-programme (I)

Projet de loi-programme (II)

Proposition de loi relative à la liaison des salaires et prestations sociales à l'évolution des prix à la consommation

Proposition de loi modifiant, en vue de lutter contre le phénomène des faux indépendants travaillant à domicile, la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail

Proposition de loi modifiant le Code des impôts sur les revenus 1992 afin d'accorder une réduction d'impôt lors de l'acquisition d'un véhicule équipé d'un moteur diesel à faible émission de particules polluantes

Proposition de loi modifiant la loi du 3 mai 2003 instituant le conseil fédéral de lutte contre le travail illégal et la fraude sociale, le Comité fédéral de coordination et les Cellules d'arrondissement, en vue de lutter contre la fraude aux allocations

Proposition de loi relative à la lutte contre le travail clandestin et instaurant une solidarité financière entre les donneurs d'ordres et les entrepreneurs ou sous-traitants

Proposition de loi harmonisant les montants de l'allocation de naissance accordés aux travailleurs salariés et aux travailleurs indépendants, quel que soit le rang de l'enfant

Proposition de loi visant à créer un Fonds pour l'indemnisation des victimes de l'amiante


Procédure d'évocation


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE L'INTÉRIEUR ET DES AFFAIRES ADMINISTRATIVES PAR

MME LIJNEN


I. Introduction

Le présent projet de loi, qui relève de la procédure facultativement bicamérale (article 78 de la Constitution) et qui a été déposé par le gouvernement à la Chambre des représentants le 27 novembre 2006 (doc. Chambre, nos 51-2773/1 et 2), a été adopté par cette dernière le 20 décembre 2006 et transmis au Sénat le même jour.

Le Sénat l'a évoqué le 20 décembre 2006.

La commission de l'Intérieur et des Affaires administratives a été saisie des articles 262 à 269 qu'elle a examinés lors de ses réunions des 12 et 21 décembre 2006, en présence du vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur.

II. Exposé introductif de M. Patrick Dewael, vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur

Dans la présente loi-programme, 5 dispositions sont proposées qui ont toutes un lien direct avec le budget et son exécution.

Dans le chapitre « Sécurité et Prévention », il s'agit d'abord — dans l'article 262 du projet de loi-programme — de la modification proposée de l'article 69, alinéa premier, de la loi du 30 mars 1994 portant des dispositions sociales.

Cette adaptation est nécessaire afin de porter les délais d'exécution des contrats de sécurité d'un an à quatre ans. Elle exécute une décision prise lors d'un conclave budgétaire précédent (2006), à propos de laquelle le Conseil d'État avait fait observer, dans son avis sur les mesures d'exécution requises, qu'il fallait d'abord procéder à une modification de la loi.

En second lieu, il y a la modification de l'article 66 de la loi-programme du 2 janvier 2001, proposée dans l'article 263 du projet de loi-programme. Cette disposition donne exécution à la décision du conclave budgétaire (2007) pour limiter la transmission de ces moyens et — afin d'éviter la création de trop grandes réserves — pour financer une partie des dépenses (20 millions d'euros) depuis les réserves existantes.

Le chapitre II modifiant la loi du 8 juin 1998 relative aux radiocommunications des services de secours et de sécurité contient un article (article 265) qui prévoit de mettre les frais liés aux appareils Astrid nécessaires pour de nouvelles constructions à la charge du maître de l'ouvrage. On évite ainsi que le contribuable ne doive y aller de sa poche pour financer les appareils Astrid nécessaires dans des constructions réalisées par des tiers.

L'article 264 du projet de loi-programme vise à modifier l'article 18 de la loi du 8 juin 1998 relative aux radiocommunications des services de secours et de sécurité. À la suite de cette modification, le collège des commissaires, qui est chargé, au sein de la société anonyme de droit public Astrid, d'assurer le contrôle de la situation financière, des comptes annuels et de la régularité, au regard de la loi et du statut organique, des opérations à constater dans les comptes annuels, ne comptera plus que deux membres. L'un sera nommé par la Cour des comptes parmi ses membres et l'autre, qui doit être membre de l'Institut des réviseurs d'entreprises, par l'assemblée générale des actionnaires.

Le ministre précise que cette rationalisation trouve son origine dans la réduction de 3,2 millions d'euros de la dotation de gestion de la société anonyme de droit public Astrid, d'une part, et dans une demande formulée par son assemblée générale, d'autre part.

Dans le chapitre portant sur la police fédérale, les articles 267 et 268 réalisent une modification de la loi-programme du 22 décembre 2003. Cette modification de loi est nécessaire pour adapter — à partir du 1er janvier 2007 — le « Fonds de solidarité fédéral pour la police locale » à la nouvelle structure budgétaire de la police fédérale.

Enfin, l'article 269 du projet de loi-programme modifie la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux. II s'agit en l'espèce de mettre la législation en concordance avec plusieurs cavaliers budgétaires. Ces adaptations sont nécessaires, eu égard aux observations formulées par la Cour des comptes lors de la confection du budget 2006.

III. Discussion

Questions et observations des membres

M. Moureaux insiste sur le fait que, depuis deux à trois ans, les ministres des Affaires intérieures et de la Justice, ont confié aux zones de police beaucoup de tâches nouvelles. Dans certains cas, les zones de police remplacent même le parquet. Il y a aussi par exemple, la circulaire récente du ministre de l'Intérieur sur les relations entre la police et les écoles (1) .

M. Moureaux se rallie à cette initiative à condition qu'il existe un contrat très clair qui ne mélange pas les rôles.

Pour beaucoup de grandes zones de police, il y a des augmentations continuelles de la part communale, tandis que la part de l'état fédéral reste inchangée.

M. Moureaux constate que l'État fédéral ne traîne pas uniquement quand il doit payer ses fournisseurs, mais aussi quand il doit verser de l'argent à d'autres autorités, p.e. les autorités locales: tel est le cas pour la partie « sommet européen » qui doit être payée aux zones de police bruxelloises et aux communes bruxelloises. Ceci pour mieux assurer la sécurité publique. Les communes sont alors obligées d'avancer l'argent. Pour les communes qui se trouvent sous plan d'assainissement, cette situation est catastrophique.

En plus, en lisant l'article 269 en projet, M. Moureaux constate que si l'État paie de plus en plus en retard, il ne permet pas aux autres de le faire. L'article en question prévoit qu'il est permis de reprendre de l'argent des zones s'ils ont un retard de remboursement. Le mauvais payeur n'accepte pas que les autres ne le soient.

Pour ce qui concerne les contrats de sécurité, M. Moureaux veut savoir du ministre comment il va exécuter la rationalisation prévue concrètement. Est-ce que ceci impliquerait que certaines activités cesseraient ? M. Moureaux plaide auprès du ministre de ne pas rompre des actions qui sont menées parfois depuis plusieurs années avec un certain succès.

Tout en comprenant le pragmatisme d'un bourgmestre, Madame Bouarfa ne partage pas tout à fait l'opinion de M. Moureaux concernant la circulaire ministérielle PLP 41.

Les problèmes que veut résoudre cette circulaire, font déjà l'objet des activités dans le cadre des contrats de sécurité. Le volet « prévention » est bien élaboré dans ces contrats. Mme Bouarfa ne retrouve pas ce volet dans la nouvelle circulaire; elle regrette surtout la disparition de la concertation communale.

L'intervenante regrette que, depuis la création des zones de police, le travail de proximité est devenu invisible.

En plus, ce n'est pas à la police de lutter contre l'échec scolaire, ce sont d'autres instances (les pédagogues, les PMS, les médiateurs sociaux, ...) qui doivent remplir ce rôle. Mme Bouarfa ne souhaite pas la présence de la police dans les écoles. Ceci va à l'encontre des dispositions du Décret de la Communauté française du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l'Enseignement Fondamental et de l'Enseignement Secondaire et organisant les structures propres à les atteindre.

M. Moureaux estime que la circulaire ministérielle PLP 41 indique qu'il faut un point de contact par rapport aux problèmes liés à la criminalité juvénile dans les services de police. Ces points de contact existent déjà dans certaines zones de police, par exemple appariés à la brigade judiciaire qui s'occupe des problèmes « jeunesse ». Depuis des années, il y a une excellente collaboration entre ce service et les écoles. Cette collaboration permet d'intervenir rapidement en cas d'intrusions brutales dans les écoles.

Toutes les actions qui peuvent être faites, sont volontaires: les écoles sont libres de collaborer ou pas.

De plus les élèves peuvent ainsi avoir un premier contact avec des policiers tout à fait neutres.

Réponse du ministre et répliques

En ce qui concerne l'observation faite par M. Moureaux au sujet de l'attribution de nouvelles tâches aux zones de police, laquelle provoque des charges financières supplémentaires, le ministre répond que le problème du financement des zones de police est connu. Le système de financement actuel des zones de police, basé sur la norme dite de la KUL, est actuellement reconsidéré.

Au sein de la Commission de l'accompagnement de la police locale, on est en train de chercher une nouvelle formule. Pour beaucoup de zones, la norme existante ne pose pas de problèmes. Mais il y a en effet des zones de police qui connaissent des problèmes de financement.

Une révision est tout de même soumise à une condition: si les moyens budgétaires restent les mêmes pour le ministre de l'Intérieur et pour le gouvernement fédéral, le ministre ne veut pas se lancer dans un débat dont l'objet est de partager à nouveau les budgets existants sur les différentes zones de police.

Il faut d'abord un débat politique sur la loi spéciale relative au financement des communautés et des régions.

Le ministre ne partage pas entièrement l'analyse de M. Moureaux, lequel prétend que des nouvelles tâches seraient imposées aux zones de police.

Les fonctionnalités de base actuelles sont connues, mais certaines tâches sont actuellement précisées au travers de plusieurs circulaires ministérielles.

En ce qui concerne le point de contact pour les écoles, le ministre estime qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle tâche imposée aux zones de police.

Beaucoup de zones de police assument déjà ces tâches.

Mais il est vrai que dans certaines zones de police, ces tâches préventives ont été négligées. Force est de constater que pour ces zones de police, il n'est pas évident d'assurer la fonction de police de proximité. Les mécanismes élaborés par l'autorité fédérale pour remédier au problème sont peut-être insuffisants, mais le corps de sécurité qui sera constitué par la ministre de la Justice permettra de ne plus devoir solliciter le personnel de police, par exemple pour le transport de détenus de la prison et vers la prison.

Pour la police fédérale, on prévoit pour le printemps 2007 un deuxième groupe de 150 policiers venant renforcer le corps d'intervention.

Conjointement avec le ministre de la Défense, le ministre s'est efforcé de mettre des militaires à la disposition des zones de police. Ces militaires assumeront davantage de tâches logistiques et administratives.

Cela permet d'affecter à nouveau les effectifs de police plus exclusivement à des tâches policières. L'objectif toujours à l'esprit est que ceux qui ont suivi les coûteuses formations de police soient effectivement assignés à des tâches purement policières. D'autres tâches peuvent éventuellement être confiées au personnel Calog ou à des militaires.

Le ministre rappelle les efforts qui ont été accomplis jadis par l'intermédiaire du Fonds de la sécurité routière, pour les effectifs préposés aux CIC, ...

En résumé, il est possible que la loi actuelle de financement de la police soit insuffisante. Il faudrait relancer le débat à ce sujet sur la base des propositions de la commission de suivi de la police locale. Le ministre est toutefois convaincu que cette discussion ne pourra aboutir que si la masse budgétaire globale augmente.

En ce qui concerne la poursuite des contrats de prévention et de sécurité, le ministre souligne qu'il n'a pas l'intention d'y mettre un terme.

Mais dans le cadre de la concertation qui a eu lieu entre l'État fédéral, les communautés et les régions suite au meurtre de Joe Van Holsbeek, il a été constaté que certaines des activités dans le cadre des contrats de prévention et de sécurité sont également financées par les communautés. Il est important d'atteindre une meilleure interaction entre les initiatives financées par les communautés et les initiatives financées par le gouvernement fédéral.

L'intention est de conclure des contrats de 4 ans.

Ainsi, le financement sera mieux garanti aux communes dans le cadre des grandes lignes directrices pour l'établissement d'un programme par les communes.

Il faut élaborer ces programmes sur la base d'un diagnostic de sécurité. De cette manière, les communes seront également responsabilisées et choisiront elles-mêmes leurs priorités en matière de sécurité.

Enfin, le ministre souligne que les montants qui seront accordés dans le cadre des contrats de prévention et de sécurité seront cette fois indexés.

Le ministre se déclare disposé à examiner, en concertation avec les communautés et les régions, les priorités des communes concernées.

M. Moureaux plaide dans ce cadre pour une rencontre gouvernement fédéral, communautés et régions et les communes. Cette rencontre s'est montrée très fructueuse dans le passé.

Enfin, concernant l'observation faite par M. Moureaux au sujet de la lenteur du financement de la part de l'autorité fédérale, le ministre souligne que cette question ne dépend pas simplement du ministre de l'Intérieur, mais qu'en tant que membre du gouvernement fédéral, il souscrit aux objectifs budgétaires du gouvernement.

En ce qui concerne les objections formulées par Mme Bouarfa à propos de la circulaire ministérielle PLP 41, le ministre souligne qu'il n'impose rien de nouveau.

Il ne faut pas donner l'impression que les écoles peuvent être utiles à la police, c'est justement le contraire. La police n'interviendra qu'à la demande formelle des écoles elles-mêmes. En effet, il ne s'agit pas ici de résoudre des problèmes pédagogiques, mais de lutter contre la délinquance juvénile, qui se manifeste également dans les écoles, comme le racket en groupe, etc. Il faut nommer ces problèmes par leur nom et ne pas faire comme s'ils n'existaient pas.

Dans ce cadre, la police intervient de façon préventive et non répressive.

Même avant que la circulaire ne fût élaborée, des policiers accomplissaient ce genre de tâches dans certaines zones de police.

De plus, le ministre souligne que la circulaire respecte en tout cas l'autonomie des communes, des écoles et des zones de police.

M. Collas demande plus de précisions sur les articles 264 à 266 de la loi-programme qui touchent le système ASTRID. L'intervenant sait qu'il y a encore quelques points faibles dans le système au niveau de la couverture de l'Est du pays. Est-ce qu'il est prévu d'installer environ 80 antennes sur tout le pays pour encore améliorer le réseau ?

Le ministre reconnaît pour finir que la couverture du système ASTRID n'est effectivement pas encore optimale dans certaines parties du pays. Pour des raisons géographiques, il s'agit avant tout d'un problème rencontré en Wallonie et qui est lié à la pose de mâts pour antennes et à la délivrance pour ce faire de permis de bâtir. La Région wallonne a été priée d'examiner avec la célérité requise les dossiers relatifs aux demandes de permis de bâtir concernant la pose de ces mâts.

Une centaine de mâts supplémentaires doivent encore être installés pour assurer une couverture maximale.

D'une manière générale, le ministre estime que ce dossier évolue dans le bon sens.

IV. VOTES

L'ensemble des articles envoyés à la commission de l'Intérieur et des Affaires administratives a été adopté sans modification par 10 voix contre 1.


Confiance a été faite à la rapporteuse pour la rédaction du présent rapport.

La rapporteuse, Le président,
Nele LIJNEN. Ludwig VANDENHOVE.

Le texte adopté par la commission (art. 262 à 269) est identique au texte du projet transmis par la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 51-2773/24 - 2006/2007)


(1) Circulaire ministérielle PLP 41 en vue du renforcement et/ou de l'ajustement de la politique de sécurité locale ainsi que de l'approche spécifique en matière de criminalité juvénile avec, en particulier, un point de contact pour les écoles.