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Mme la présidente. - Mme Els Van Weert, secrétaire d'État au Développement durable et à l'Économie sociale, adjointe au ministre du Budget et des Entreprises publiques, répondra.
M. Jacques Brotchi (MR). - Ma demande d'explications est liée à la proposition de loi que j'avais déposée en juillet dernier au sujet des auteurs d'agressions sexuelles graves ou criminelles. Cela concerne donc la mise à disposition du gouvernement de ces agresseurs à l'expiration de leur peine si celle-ci est supérieure à un an sans sursis.
Il est également prévu par divers articles de loi que ces personnes, si elles sont condamnées à nouveau à une peine de plus d'un an sans sursis pour des faits similaires, peuvent être mises à disposition du gouvernement pendant une période de maximum vingt ans.
L'article 25 de la loi de défense sociale précise qu'à l'expiration de leur peine, les condamnés mis à disposition du gouvernement sont placés sous la surveillance du ministre de la Justice qui a le choix entre deux options : la première est de les laisser en liberté sous les conditions qu'il détermine et après avoir obtenu l'avis d'un service spécialisé dans la guidance ou le traitement des délinquants sexuels ; la deuxième est d'ordonner leur internement lorsque la réintégration dans la société s'avère impossible et lorsque leur comportement en liberté implique un danger pour la société.
Le moment de la mise à disposition du gouvernement auquel se réfère l'article 25, c'est-à-dire « l'expiration de la peine », signifie que le condamné est à « fond de peine » : soit il a exécuté l'entièreté de sa peine en prison, soit il a bénéficié d'une libération conditionnelle ou d'un sursis probatoire, soit enfin il a exécuté l'entièreté de son délai d'épreuve.
Dans la pratique cependant, les personnes de terrain disent qu'il n'est jamais recouru à ce système de mise à disposition du gouvernement. Les spécialistes que j'ai eu l'occasion d'écouter disent que ce système n'est pas connu du pouvoir judiciaire.
Certes, ce procédé de mise à disposition du gouvernement concerne les délinquants qui sont sortis du circuit judiciaire parce qu'ils sont considérés comme ayant définitivement purgé leur peine. Mais quid après ? Il faut absolument établir un lien direct entre le prononcé de la peine, la libération conditionnelle et le sursis probatoire éventuels, et la réinsertion sociale de l'individu.
Le noeud du problème est là : nous avons affaire à des personnes qui ne répondent pas aux critères d'internement mais qui ne sont pas pour autant nécessairement aptes à réintégrer seuls la société du jour au lendemain sans suivi ni accompagnement.
La mise à disposition du gouvernement est un système efficace qui a été mis en place en 1998. Correctement mis en oeuvre, il peut nous aider à réinsérer dans de bonnes conditions les agresseurs sexuels connus de la justice tout en protégeant efficacement la population.
Pouvez-vous me renseigner sur le nombre de mises à disposition du gouvernement effectivement appliquées depuis l'introduction en 1998 de cette procédure dans la loi de défense sociale ?
Selon mes informations, ce système a été très peu mis en oeuvre ? Pouvez-vous me dire pourquoi ?
Mme Els Van Weert, secrétaire d'État au Développement durable et à l'Économie sociale, adjointe au ministre du Budget et des Entreprises publiques. - Contrairement à ce qu'affirme M. Brotchi, le système de mise à disposition est connu du pouvoir judiciaire. Ainsi, à la date du 1er novembre 2006, une mise à disposition avait été prononcée pour 110 personnes détenues et activée pour 27 personnes ; cela signifie que ces personnes étaient maintenues en prison au-delà de leur peine.
Mais il est exact que les principes actuels qui régissent la mise à disposition méritaient une réforme. C'est la raison pour laquelle le conseil des ministres du 1er décembre a approuvé l'avant-projet de loi de mise à disposition que je lui ai soumis. Cet avant-projet repose sur deux changements importants.
Premièrement, les catégories d'infractions qui peuvent entraîner une mise à disposition obligatoire ou facultative ont été élargies. Ainsi, non seulement pour les récidivistes condamnés à une peine criminelle alors qu'ils avaient déjà été condamnés auparavant à une première peine criminelle, mais aussi pour toute personne condamnée pour un attentat terroriste, un viol ou un attentat à la pudeur, un enlèvement de mineurs ou un acte de torture - pour autant que ces quatre infractions aient à chaque fois entraîné la mort de la victime -, la juridiction de jugement devra obligatoirement prononcer une mise à disposition.
La juridiction de jugement pourra également prononcer une mise à disposition pour d'autres catégories d'infraction, notamment les infractions à caractère sexuel autres que celle mentionnée dans la catégorie obligatoire.
Deuxièmement, la compétence de décision en la matière sera confiée aux tribunaux d'application des peines plutôt qu'au gouvernement, comme c'est le cas actuellement.
En proposant l'adoption de cette réforme, l'objectif du gouvernement est de permettre aux tribunaux d'application des peines de prendre les mesures de sécurité qui s'imposent à l'encontre des personnes qui représentent un danger pour la société en prolongeant la détention au-delà de la fin de leur peine si cela s'avère nécessaire.
Mais si l'analyse rigoureuse de chaque dossier individuel révèle que l'intéressé ne risque plus de commettre à nouveau des infractions portant atteinte à l'intégrité des personnes et qu'il est possible de lui accorder une libération sous surveillance en lui imposant des conditions particulières, les tribunaux d'application des peines pourront lui octroyer cette libération conditionnelle, comme le prévoit d'ailleurs la législation actuelle. Le ministre de la Justice peut aussi accorder une libération conditionnelle au condamné mis à disposition du gouvernement.