3-1707/5

3-1707/5

Sénat de Belgique

SESSION DE 2005-2006

10 JUILLET 2006


Projet de loi modifiant diverses dispositions du Code judiciaire concernant l'évaluation des magistrats et les mandats de chef de corps et modifiant la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE LA JUSTICE PAR

MME TALHAOUI


I. INTRODUCTION

Le présent projet de loi, qui relève de la procédure obligatoirement bicamérale, a été déposé au Sénat sous forme de projet de loi, le 11 mai 2006.

La commission de la Justice l'a examiné lors de ses réunions des 24 mai, 6, 7, 21 et 28 juin, 4 et 10 juillet 2006, en présence de la ministre de la Justice.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE LA MINISTRE DE LA JUSTICE

Le projet de loi à l'examen modifie sur certains points limités mais importants les dispositions du Code judiciaire concernant les mandats de chef de corps.

Ce projet s'inscrit dans une évolution qui remonte à 1998.

En parallèle à la modification alors apportée à l'article 151 de la Constitution, le législateur de l'époque a instauré un système de mandat pour les chefs de corps qui, jusque-là, étaient nommés à vie.

Ce mandat est de 7 ans. Il n'est pas immédiatement renouvelable au sein de la même juridiction ou du même parquet. Et il n'est pas soumis à évaluation.

Si aujourd'hui le principe du mandat est unanimement accepté, son organisation actuelle présente certains inconvénients.

L'un d'eux est qu'il n'est pas possible de prolonger au-delà de 7 ans le mandat des chefs de corps qui donnent satisfaction.

D'autre part, les chefs de corps sont à présent les seuls magistrats à n'être pas évalués, alors que tout le monde s'accorde à reconnaître qu'il s'agit là d'une fonction de plus en plus spécifique et complexe.

C'est pourquoi le gouvernement a déposé un projet de loi qui a pour objet de remplacer ces mandats de 7 ans par des mandats de 5 ans renouvelables une fois au sein de la même juridiction ou du même parquet et d'instaurer une évaluation qui se déroule en deux phases, au cours de la deuxième année et de la cinquième année de mandat.

L'évaluation dont il est question ne porte bien entendu que sur le contenu propre de la fonction de chef de corps, soit sur les compétences de gestion, d'organisation, de leadership dont il convient qu'un chef de corps fasse preuve.

Le gouvernement, en désaccord sur ce point avec l'avis rendu par le Conseil d'État, estime que l'article 151 de la Constitution ne s'oppose pas à ce que la loi soumette les chefs de corps à l'évaluation. Sans doute, le constituant de 1998 n'a-t-il pas instauré l'obligation d'évaluer les chefs de corps. Mais il n'a pas, pour autant, rendu cette évaluation impossible.

C'est parce que la question de l'utilité d'une évaluation dans le cadre d'un mandat non-renouvelable ne paraissait pas susceptible d'être clairement tranchée, dans un sens ou dans l'autre, que le Constituant s'est abstenu de prévoir une obligation d'évaluation pour les titulaires de ces mandats. De cette manière, il a laissé au législateur le soin de trancher la question.

Aujourd'hui, le gouvernement estime que l'évaluation des chefs de corps est une nécessité:

— pour permettre aux chefs de corps eux-mêmes de faire périodiquement le point sur leur action et, éventuellement, d'adapter leur plan de gestion autant que de besoin;

— pour fournir au Conseil supérieur de la Justice qui aura à se prononcer sur le renouvellement du mandat un ensemble étoffé d'éléments d'appréciation;

— en définitive, pour garantir la légitimité de cette fonction si cruciale pour le bon fonctionnement de la Justice.

Le présent projet ne remet donc en cause ni la mission du chef de corps, ni le caractère temporaire du mandat, ni le principe selon lequel les chefs de corps dont la nomination s'est vue transformer en une désignation par la mise en œuvre de la loi de 1998 sont en droit de postuler une fois le renouvellement, pour 7 ans, de leur mandat actuel.


Dans le régime projeté, le mandat de base du chef de corps a désormais une durée de 5 ans: une période au cours de laquelle il y a moyen, véritablement, de mener un travail de gestion, de déployer des formes particulières d'organisation de l'activité judiciaire, ou encore de développer une politique criminelle, en s'appuyant sur le plan de gestion tracé en vue de la procédure de désignation.

C'est l'effectivité et la qualité de l'implémentation de ce plan de gestion qu'il apparaît important d'évaluer.

Aussi une première phase d'évaluation interviendra-t-elle au bout de deux années d'exercice du mandat, stimulant ainsi le chef de corps à tirer un premier bilan de son action.

Lors de cette phase d'évaluation, le chef de corps pourra se voir attribuer les mentions « bon » ou « bon avec recommandations ».

Cette dernière mention n'a d'autre objectif que d'attirer l'attention du chef de corps sur les aspects perfectibles de son management et, éventuellement, de le conseiller à ce propos. Mais le chef de corps demeure entièrement libre de la manière dont il entend donner suite aux recommandations des évaluateurs et apporter les améliorations utiles.

La seconde phase d'évaluation, qui intervient vers la fin de la période de cinq ans, permettra de vérifier l'évolution du chef de corps.

Cette seconde phase d'évaluation peut déboucher sur les mentions « bon » ou « insuffisant ».

Au terme du premier mandat de cinq ans, le chef de corps peut, dans le système projeté, demander le renouvellement de celui-ci.

Le gouvernement traduit ainsi sa conviction qu'il serait contraire à l'intérêt général de renoncer à un chef de corps qui donne entière satisfaction et qui souhaite poursuivre son travail durant cinq années de plus.

Lorsqu'il pose sa candidature en vue du renouvellement de son mandat, l'évaluation figure dans le dossier de renouvellement transmis dans un premier temps à la commission de nomination et de désignation du Conseil supérieur de la Justice et, dans un second temps, au Roi.

Après avoir entendu l'intéressé, la commission de nomination et de désignation accepte ou refuse le renouvellement en motivant sa décision.

Le mandat n'est ouvert à d'autres candidats que si le chef de corps sortant n'en demande pas le renouvellement ou si ce renouvellement ne lui est pas accordé.

Si le chef de corps sortant ne sollicite pas la reconduction du mandat, l'évaluation garde néanmoins tout son intérêt et toute son utilité pour le cas où il postulerait une autre place de chef de corps (dans une autre juridiction ou un autre parquet).

Si le renouvellement du mandat est accordé, cette nouvelle période de cinq ans permettra au chef de corps d'envisager des réformes à plus long terme, lui laissera le temps de les mettre en place et de vérifier sur le terrain leur faisabilité et leur adéquation avec les objectifs fixés.

Conséquence de la nouvelle durée du mandat: pour pouvoir postuler un mandat de chef de corps, les magistrats devront désormais être éloignés de cinq ans de l'âge de la retraite (et non plus de six ans, comme c'est le cas aujourd'hui).


Dans un régime où elle acquiert pareille importance, l'évaluation doit nécessairement être confiée à un organe offrant toutes les garanties d'indépendance et de compétence.

Le projet de loi prévoit que l'évaluation sera assurée par un collège ad hoc, composé d'une chambre francophone et d'une chambre néerlandophone, chargées d'évaluer les chefs de corps de leur groupe linguistique respectif.

Les chambres de ce collège seront composées

— de deux chefs de corps issus du siège ou du parquet, selon que l'évalué appartient au siège ou au parquet,

— de deux magistrats membres des commissions d'avis et d'enquête du Conseil supérieur de la Justice,

— d'un magistrat de la Cour des comptes

— et d'un spécialiste en gestion des ressources humaines.

Par leur composition, les chambres du collège tendent à prendre en compte, et la spécificité du contexte juridictionnel du métier, et ses nouvelles dimensions managériales.

L'évaluation reposera sur quatre éléments:

— le rapport de fonctionnement remis par le chef de corps à la chambre compétente de la commission d'évaluation;

— selon le cas, l'avis de l'assemblée générale ou de l'assemblée de corps;

— l'avis du directeur général de la direction générale de l'organisation judiciaire;

— l'entretien d'évaluation entre le chef de corps et la chambre compétente du collège d'évaluation.


Le projet corrige un point de la législation actuelle qui est source de difficultés: il prévoit désormais que le mandat adjoint est suspendu pendant la durée du mandat de chef de corps. Le titulaire d'un mandat adjoint non définitif réintègre donc son mandat à la fin du mandat de chef de corps, à moins qu'il ne soit issu d'une autre juridiction et qu'il y ait eu transfert entre le parquet et le siège.

L'octroi de la rémunération, des augmentations et des avantages attribués aux chefs de corps pendant les deux ans qui suivent la fin de leur mandat est supprimé.

Le gouvernement a considéré que la limitation dans le temps de la fonction de chef de corps était suffisamment connue des candidats et qu'il ne se justifiait pas, par conséquent, de maintenir la rétribution d'un chef de corps pendant les deux ans qui suivent la fin de son mandat.

Cette disposition ne concerne toutefois pas les chefs de corps dont le mandat sera en cours au moment de l'entrée en vigueur de la loi: ces derniers conserveront cet avantage pécuniaire qui leur est déjà acquis.

D'autre part, ils garderont leur mandat de 7 ans. Cependant, ils seront évalués au cours de la septième année du mandat, pour autant que leur mandat se termine après le 31 août 2008. Un dossier d'évaluation pourra ainsi être communiqué au Conseil supérieur de la Justice en cas de postulation à un autre mandat de chef de corps par la suite.

Le Code judiciaire et la loi du 15 juin 1935 sont également modifiés pour soumettre l'auditeur du travail de Bruxelles aux mêmes règles d'équilibre et d'alternance linguistiques que les autres chefs de corps bruxellois.

Un dernier point concerne les chefs de corps: il s'agit de donner la possibilité au ministre de la Justice de confier des missions aux chefs de corps sortants qui ne souhaitent pas ou ne peuvent pas briguer un nouveau mandat de direction d'une juridiction.

Les chefs de corps ont, en effet, acquis une solide expérience et une expertise bénéfiques pour l'ordre judiciaire belge, pour une institution belge ou étrangère ou encore pour un département ministériel fédéral.

Il serait dommage dès lors de se priver de la possibilité de faire appel à cette expertise dans le cadre très souple d'une mission, qui pourrait être de soutien, de tutorat de nouveaux chefs de corps, d'appui à divers organes au sein de l'ordre judiciaire, de recherche, etc.


Enfin, outre les dispositions relatives aux chefs de corps, le présent projet de loi vise à insérer dans le Code judiciaire le contenu des articles 7 et 8 de l'arrêté royal du 20 juillet 2000 déterminant les modalités d'évaluation des magistrats, les critères d'évaluation et leur pondération, annulés par le Conseil d'État. Quelques adaptations ont été apportées au système contenu initialement dans l'arrêté royal annulé, et ce afin de rendre l'évaluation des magistrats plus conforme aux modèles d'évaluation actuellement utilisés, par exemple au sein de la fonction publique ou des services de police.

III. AUDITIONS (1)

1. Audition de:

— Mme C. Dekkers, procureur générale près la cour d'appel d'Anvers;

— M. J. Hubin, président du collège des premiers présidents des cours d'appel et des cours du travail

A. Exposé de Mme C. Dekkers

Mme Dekkers remercie la commission de donner à la magistrature l'occasion d'exprimer son point de vue sur le projet de loi à l'examen.

Elle souhaite présenter un bref exposé sur le projet de loi concernant l'évaluation des mandats de chef de corps, qui modifie également la législation linguistique; elle commentera les lignes de force et abordera les principales réflexions émises par la magistrature debout.

Il existe en la matière une légère divergence de vues entre la magistrature assise et la magistrature debout, mais toutes deux entendent rapprocher leurs points de vue. Une première tentative dans ce sens a déjà été entreprise dans le cadre de l'assemblée permanente des chefs de corps à la Cour de cassation. L'intervenante est d'avis que la vision quelque peu différente du ministère public s'explique par le fait que celui-ci a une mission différente.

M. Frank Schins l'a déjà dit à plusieurs reprises, non seulement lors de l'assemblée à la Cour de cassation, mais aussi dans une réponse à un questionnaire dressé à l'époque par le Conseil supérieur de la justice. Le ministère public a une toute autre mission que la magistrature assise.

En outre, il a une structure nettement plus hiérarchisée, ce qui lui confère un impact beaucoup plus grand sur toutes ses composantes, depuis le sommet jusqu'à la base.

De par son intégration verticale, le ministère public se caractérise aussi par une toute autre forme de collaboration. Le mot « collaboration » est d'ailleurs devenu le maître mot dans le cadre du processus d'amélioration de la qualité.

Quelles sont les principales remarques du ministère public sur le projet de loi à l'examen concernant l'évaluation des mandats de chef de corps ?

Le projet de loi prévoit un mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois. Le ministère public n'a aucune objection de principe en la matière, contrairement à la magistrature assise.

En revanche, il ne peut pas souscrire pleinement à la manière dont sera organisée l'évaluation, en particulier la première. Le projet prévoit en effet que l'évaluation a lieu durant le mandat de 5 ans, à raison d'une première évaluation après 18 mois d'exercice du mandat et d'une seconde au terme des 5 années d'exercice. D'après l'exposé des motifs, l'intention est de faire en sorte que la première évaluation puisse donner lieu à une mention « bon avec recommandation » de manière que des améliorations utiles puissent être apportées. La seconde évaluation est alors limitée à la mention « bon » ou « insuffisant ». Si le chef de corps reçoit une mention « bon », le Conseil supérieur de la justice en est immédiatement informé et peut, si le chef de corps en question sollicite un deuxième mandat, appuyer directement cette candidature. Si le chef de corps ne sollicite pas de prolongation de son mandat, l'évaluation n'en conserve pas moins toute son utilité au cas où l'intéressé souhaiterait se porter candidat à une autre fonction. En ce qui concerne la seconde évaluation, le ministère public n'a pas de remarques à formuler.

Le ministère public estime toutefois que la première évaluation, qui a lieu environ 18 mois après le début du mandat, est prématurée. En effet, le chef de corps a besoin d'un certain temps pour élaborer son plan de gestion. Avant d'entamer son mandat, il doit présenter un plan de gestion au Conseil supérieur de la justice. Si l'intéressé est nommé chef de corps, c'est donc que le Conseil supérieur de la justice a jugé qu'il disposait de la vision que cette fonction requiert.

Dès lors, pourquoi ne pas disposer qu'après un délai de 18 mois, le chef de corps doit faire rapport au Conseil supérieur de la justice et lui exposer de la sorte tout ce qu'il a déjà pu réaliser au cours de ces 18 mois ? Le ministère public propose donc une autre méthodologie, qui prévoirait de remplacer l'« évaluation » par une « obligation de faire rapport » au Conseil supérieur de la justice. Une évaluation serait tout de même prévue, dans ce cas, à la fin du mandat.

La remarque suivante concerne la commission d'évaluation. Il est logique qu'on ait créé une chambre francophone et une chambre néerlandophone. Le ministère public ne voit cependant pas d'un bon œil que la magistrature soit représentée par des pairs. Tant le Collège des procureurs généraux que le Conseil des auditeurs et le Conseil des procureurs du Roi demandent avec insistance que le président soit un supérieur hiérarchique et que le deuxième magistrat puisse se prévaloir d'une certaine expertise, qu'il aurait acquise, par exemple, en ayant lui-même exercé la fonction de chef de corps pendant au moins trois ans; les procureurs du Roi proposent que le deuxième magistrat ne soit pas nécessairement un auditeur du travail, mais qu'il puisse être également, par exemple, un procureur du Roi, c'est-à-dire quelqu'un du même niveau, mais de l'autre instance.

Une autre considération concerne les documents qui doivent être soumis utilement au collège d'évaluation. Rien ne s'oppose, évidemment, à l'idée d'un rapport de fonctionnement, qui équivaut en fait à une sorte de compte rendu. De même, l'avis de l'assemblée générale ne pose aucun problème.

L'entretien d'évaluation semble logique, lui aussi. Le ministère public n'a pas davantage d'objection à l'encontre du directeur général de l'ordre judiciaire du service public fédéral, mais il se demande si l'entrée en vigueur pourra avoir lieu avant la mise à exécution du plan Thémis. En effet, en l'état actuel des choses, le collège d'évaluation compterait parmi ses membres des personnes totalement dépourvues d'expérience et de savoir-faire sur le plan du fonctionnement du ministère public ou des améliorations à y apporter.

Une dernière remarque concerne la cohérence du texte et l'exposé des motifs.

De la lecture de cet exposé des motifs, l'intervenante pense pouvoir conclure que, selon la philosophie du projet, le chef de corps qui ne sollicite pas le renouvellement de son mandat réintègre le mandat adjoint qu'il exerçait auparavant. Si le mandat adjoint n'a pas encore atteint un stade définitif, il est suspendu durant la période où l'intéressé est chef de corps, et celui-ci le réintègre ensuite, avant de faire l'objet de l'évaluation, comme pour tout mandat adjoint. Le chef de corps qui ne sollicite pas de renouvellement n'a pas droit non plus aux deux années de prolongation de son traitement en tant que chef de corps.

Le texte du projet donne toutefois l'impression de mélanger ces deux aspects. Le ministère public peut souscrire entièrement au fait que le chef de corps reprend son mandat adjoint.

Il existe toutefois d'autres propositions. L'on pourrait dire par exemple que le chef de corps qui ne sollicite pas le renouvellement se retrouve de toute façon dans la position immédiatement inférieure à celle de chef de corps. Pour le ministère public, cela signifie premier substitut en première instance et premier avocat général en degré d'appel. La personne qui n'est pas issue du sérail devrait choisir librement si elle réintègre son institution d'origine ou si elle occupe la position immédiatement inférieure. Quelqu'un qui reviendrait du ministère public au siège serait donc vice-président en première instance et président de chambre à la cour d'appel.

B. Exposé de M. J. Hubin

L'orateur remercie la commission pour l'attention qu'elle réserve à l'analyse que les premiers présidents ont faite des deux projets fondamentaux en discussion.

Il souhaite mettre en évidence quelques accents particuliers des travaux qui ont réuni les procureurs généraux et les premiers présidents.

De manière très personnelle mais très convaincue, l'intervenant entend tout d'abord souligner deux aspects positifs des travaux réalisés par la ministre de la Justice dans la matière considérée.

Le premier est qu'il n'y a pas d'objection fondamentale à réfléchir à l'avenir de la fonction de chef de corps, en la liant à une évaluation.

Une rationalisation est souhaitée par le législateur et par le gouvernement. Il est logique que les voies dans lesquelles on s'engage fassent l'objet d'une évaluation des personnes à qui l'on a confié un mandat.

La question du mandat et celle de l'évaluation sont donc des éléments fondamentaux sur lesquelles il n'y a pas d'objection de principe, en tout cas au niveau de l'énoncé.

Le deuxième aspect concerne le fait qu'en raison de la multiplication des travaux du législateur en matière judiciaire, le livre II de la 2e partie du Code judiciaire se modifie de jour en jour, dans la logique qui vient d'être énoncée. Il en résulte toutefois qu'aujourd'hui déjà, le texte en devient difficilement lisible. Le texte du Code judiciaire devrait être réécrit, pour que les principes qui animent les réformes actuelles soient plus intelligibles.

Il semble que, dans les facultés de droit, il s'agit d'une matière que l'on hésite à enseigner. Ainsi, à l'heure actuelle, il n'est pas simple de déterminer qui va donner un avis dans la procédure de renouvellement des chefs de corps.

Ceci ne constitue une critique ni par rapport aux objectifs poursuivis ni par rapport au contenu du projet de loi.

En ce qui concerne les mandats et leur évaluation, il est logique que, dès l'instant où il y a mandat, un principe de responsabilité soit appliqué par le législateur en matière judiciaire.

Par contre, le fait que la question est insuffisamment posée suscite une certaine inquiétude.

En quoi consistera cette responsabilité ? Quel est le régime juridique qui va s'y appliquer ? Ne s'agira-t-il que d'une responsabilité-sanction, ou ne faut-il pas songer à un autre régime de responsabilité ?

Opérons une comparaison avec le choix du législateur belge de rendre davantage responsable la haute fonction publique.

En cette matière, le législateur a adapté le régime de responsabilité civile de droit commun.

Pourquoi ne pas songer à une solution similaire vis-à-vis des gestionnaires du judiciaire ?

On pourrait rétorquer que cela n'est pas comparable. Cependant, si l'objet du mandat à évaluer est tout sauf du judiciaire, mais relève de ce qui est visé par le projet de loi relatif au plan Thémis, par exemple la gestion des bâtiments, on peut imaginer qu'il y a là un régime de responsabilité qui se pose aussi sur le terrain du droit.

L'orateur cite le cas où les tuyaux qui acheminent le gaz doivent être remplacés.

Dans quel cadre juridique le chef de corps peut-il gérer cela ? Il doit gérer le bâtiment en respectant le bien-être des travailleurs et la sécurité des justiciables. S'il s'acquitte mal de sa tâche, il est normal que son mandat ne soit pas poursuivi. Mais quelle est, dans le même temps, sa responsabilité civile ?

Ce qui a été fait pour la haute fonction publique fédérale peut, selon l'orateur, être repris pour les gestionnaires de biens publics judiciaires puisqu'en aucun cas, on ne parle ici d'une responsabilité sur le terrain judiciaire.

Ceci n'est pas non plus, en définitive, une observation critique, mais une suggestion de complément.

Le point suivant concerne plus spécifiquement une préoccupation du siège.

À la lecture du projet, justifié dans son initiative, deux difficultés émergent clairement en droit pour le pouvoir judiciaire.

La première a été rapportée par le Conseil d'État, qui, après une analyse de la Constitution, conclut à une atteinte à l'indépendance du pouvoir judiciaire, et à l'impossibilité d'une évaluation du chef de corps en l'état actuel de la Constitution.

L'auteur du projet a entendu répondre à cette observation du Conseil d'État, en interprétant le texte de la Constitution. Le législateur est invité à se prononcer sur cette question délicate, qui ne laisse pas sans inquiétudes le pouvoir judiciaire, lequel n'est pas totalement convaincu par l'interprétation en question et estime qu'il existe à tout le moins un risque d'atteinte à son indépendance.

La seconde difficulté concerne le sort du chef de corps au terme de son mandat.

Faudra-t-il accepter n'importe quelle mobilité ? Sur ce second point, l'opinion des premiers présidents est partagée.

Chacun s'accorde à dire qu'il faut prévoir une mobilité. La traduction de celle-ci est double dans le projet. D'une part, on encourage une mobilité fonctionnelle. D'autre part, on prévoit des missions.

La mobilité fonctionnelle ne suscite, comme telle, aucune observation en droit. Sur le terrain, on verra ce qu'elle donnera. Veut-on organiser un jeu de chaises musicales au sein d'une population extrêmement réduite ? Si l'on considère les ressorts respectifs, en prenant en considération les réalités et les régimes linguistiques, la carte judiciaire est, d'un côté comme de l'autre, extrêmement réduite.

Cela pose en outre un problème par rapport à d'autres personnes, qui ont également droit à leur chance.

Par contre, si la mobilité fonctionnelle consiste à ouvrir les cadres, pour permettre par exemple à un procureur du Roi de poursuivre sa fonction judiciaire en qualité de juge de paix ou l'inverse, cela paraît assez cohérent.

Mais, comme l'a rappelé récemment l'Association syndicale des magistrats dans une réflexion sur le statut du magistrat, si l'on veut vraiment encourager la mobilité, il faut être plus attentif au statut social qu'on ne l'est actuellement.

Pour ce qui concerne les missions qui seraient confiées, notamment, par le pouvoir exécutif, la réserve demeure grande au sein du pouvoir judiciaire, dans la mesure où l'on aboutirait à des situations où un chef de corps du siège deviendrait un mandataire rémunéré, en définitive, par le pouvoir exécutif pour un certain nombre de missions.

Sans vouloir faire de procès d'intention, il reste que l'on ouvre ainsi une brèche dans ce que, jusqu'à présent, le législateur en matière judiciaire a entendu conserver et limiter pour garantir l'indépendance du pouvoir judiciaire. L'orateur reconnaît cependant que ce scepticisme ne fait pas l'unanimité.

C. Échange de vues

M. Mahoux demande confirmation de ce que Mme Dekkers souhaiterait voir siéger dans la commission d'évaluation l'avocat général à la Cour de cassation.

Mme Dekkers répond que le ministère public est d'avis que la commission d'évaluation ne peut pas être composée de magistrats de même niveau, sauf en qualité d'experts. Le ministère public — tant le Collège des procureurs généraux que le Conseil des procureurs du Roi et le Conseil des auditeurs du travail — estime que le collège d'évaluation devrait être présidé par un magistrat-chef de corps d'un niveau supérieur. Lorsque, par exemple, un auditeur du travail d'Anvers doit être évalué, le collège d'évaluation est composé du procureur général d'Anvers, d'un auditeur du travail du ressort d'Anvers et éventuellement aussi d'un procureur du Roi.

Cette vision n'est pas nouvelle et a déjà été défendue au sein d'un groupe de travail composé de membres du ministère public et de la magistrature assise.

Mme de T' Serclaes constate que les projets à l'examen sont complexes et procèdent d'une volonté, depuis 1998, de moderniser et de professionnaliser l'ordre judiciaire, et d'y faire prévaloir de meilleures méthodes de gestion.

Cela a débuté avec la notion de mandat de chef de corps. À l'époque déjà, la question était de savoir s'il fallait un mandat de 7 ans, ou deux mandats de 5 ans.

L'intervenante a toujours été favorable à la seconde solution. Le terme de 7 ans lui paraissait trop long, et ne permettait pas le renouvellement du mandat d'un bon chef de corps.

Le problème porte aujourd'hui sur l'évaluation. Aux yeux de l'oratrice, une évaluation après 18 mois n'a aucun sens: elle tombe à un mauvais moment, et, telle qu'elle est conçue, ne sert à rien.

Une autre formule serait préférable. Comme dans une entreprise, il faut que les responsables soient soutenus dans leur travail et qu'ils puissent très régulièrement faire le point sur leur plan de management.

On demande actuellement aux chefs de corps de déposer un tel plan, et c'est sur cette base qu'on les choisit.

Dans toutes les entreprises, il y a un comité de direction. On définit ensemble un plan global, chacun a ses objectifs et l'on fait le point tous les trimestres.

De même, il faut évaluer régulièrement la mise en œuvre du plan du chef de corps, par exemple tous les 6 mois.

La question est de savoir qui procède à cette évaluation. L'intervenante n'est satisfaite ni par la solution contenue dans le projet, ni par ce qu'on propose dans le plan Thémis.

En effet, elles font appel à de grands organes très lourds, qui ne sont pas impliqués dans la gestion quotidienne et qui ne pourront pas aider le chef de corps.

Cela vaut aussi, pour la même raison, pour la suggestion de faire appel à des personnes se situant à un niveau supérieur.

L'évaluation proposée par le projet paraît à l'oratrice quelque peu « scolaire ». Il serait plus intéressant de la concevoir comme un soutien à la mise en œuvre de son plan par le chef de corps. Cela constituerait une vraie modernisation et une véritable plus-value sur le plan du management de la Justice.

L'oratrice demande ensuite ce que M. Hubin visait exactement lorsqu'il suggérait une révision du « statut social » du magistrat, comme corollaire nécessaire d'une mobilité fonctionnelle.

M. Mahoux constate, à propos du problème de la responsabilité civile, que le mandat existe déjà, et que le problème n'est donc pas neuf. Pourquoi, dès lors, ce problème est-il soulevé maintenant ?

Si l'on songe, mutatis mutandis, à une administration communale, la responsabilité du pouvoir politique, c'est-à-dire du bourgmestre, est claire, y compris sur le plan pénal.

La responsabilité du secrétaire communal n'est pas nulle, mais elle reste très limitée par rapport à celle du politique.

Comment, en matière de bâtiments, envisager l'articulation entre la responsabilité du politique (d'ailleurs partagée sur le plan ministériel entre le ministre de la Justice et le responsable de la Régie des bâtiments) et celle du judiciaire ?

M. Hugo Vandenberghe estime qu'il est très difficile, pour un membre de l'opposition, de percevoir la finalité exacte du texte. L'intervenant est dans l'impossibilité absolue de connaître le statut des divers chefs de corps. Certains d'entre eux ont été nommés avant l'accord octopartite. Quel est leur statut s'ils demandent aujourd'hui un renouvellement de leur mandat ?

D'autres chefs de corps ont été nommés en vertu de l'accord octopartite, qui prévoyait un mandat de 7 ans.

Les autres forment la troisième catégorie de chefs de corps. Des membres du pouvoir judiciaire ont donc des statuts juridiques différents, en fonction du moment où ils ont été nommés. Comment cela se concilie-t-il avec le principe d'égalité ? Il y a un réel problème de transparence, qui ne sied pas à une démocratie.

L'intervenant évoque d'autre part la problématique de la responsabilité des magistrats.

Compte tenu de la distinction entre le ministère public et le juge, un chef de corps accomplit aussi parfois des actes administratifs parallèlement aux actes judiciaires qu'il pose. La jurisprudence de la Cour de cassation concernant la responsabilité des magistrats porte sur les actes à caractère judiciaire. Par contre, les actes administratifs sont soumis au droit commun. Applique-t-on dans ce cas la loi du 10 février 2002 qui contient un régime particulier pour les agents des services publics ? Si cette loi n'est pas applicable aux actes en question, le pouvoir judiciaire ne pourra pas invoquer l'immunité prévue par la loi. L'intention de la Cour de cassation n'est certainement pas de placer le pouvoir judiciaire dans une situation moins favorable qu'en cas d'application du droit commun en ce qui concerne le personnel des services publics.

Réponses des orateurs

M. Hubin observe qu'il résulte des questions posées que chacun s'interroge sur le plan de gestion.

Actuellement, les plans de gestion des mandataires que sont les chefs de corps sont largement liés à l'impératif du service public de la Justice. En définitive, le meilleur interlocuteur serait donc le Conseil Supérieur de la Justice, qui a connaissance de tous les plans, et qui a en quelque sorte une jurisprudence.

Ainsi, dans une juridiction souffrant d'un arriéré judiciaire important, le plan de gestion portera très logiquement sur ce point.

Le gouvernement constate qu'il y a des problèmes d'efficience, et en cite trois causes: la centralisation, la dispersion des entités, et les particularismes.

Mais on sort ainsi du domaine de l'arriéré. Le gouvernement cite du reste des exemples qui touchent à la gestion du personnel (et pas seulement des magistrats), à la finance et aux bâtiments.

Il s'agit alors d'une technique de management, qui complète un plan de gestion à finalité de service public de la Justice. Est-ce bien de cela qu'il s'agit ?

L'orateur trouve d'autant plus justifié que le gouvernement soumette le chef de corps à une évaluation qu'il est mandaté pour un certain nombre de choses.

Pourquoi soulever maintenant le problème de la responsabilité ? L'exemple des bâtiments est révélateur. Actuellement, cette question concerne exclusivement le siège, et non le ministère public, en raison d'un phénomène de délégation, de mandat, que le siège a à gérer avec l'administration. Les choses se passent bien. Cependant, s'il y avait un accident, la responsabilité civile est-elle bien couverte ? À l'heure actuelle, en tout cas, les chefs de corps se couvrent eux-mêmes, sur leurs deniers personnels, par une assurance responsabilité civile.

Le problème pourrait s'amplifier puisque le plan Thémis annonce des responsabilités gestionnaires complémentaires.

Par contre, s'il faut faire la césure entre les deux projets, et que le plan de gestion n'est pas ce qui vient d'être décrit, cela mérite des éclaircissements.

Le plan de l'un n'est pas celui de l'autre. Il faut en vérifier le contenu à la lumière de la jurisprudence du Conseil supérieur, qui les voit tous, et qui propose à la désignation du mandat tel ou tel plan de gestion.

Mais qu'est-ce donc que le plan de gestion ? S'agit-il de ce qui est déjà visé par l'article 340 du Code judiciaire avec les rapports de fonctionnement, par l'article 112 avec la maîtrise de l'arriéré, ou par l'article 259bis, ou encore de la régularité déjà contrôlée par le ministère public ? On risque de multiplier les formalités administratives ...

Ce n'est que lorsqu'on aura répondu à la question de savoir ce qu'est le plan de gestion que l'on pourra répondre à celle de savoir comment l'évaluer.

En ce qui concerne le statut de chef de corps qui est fonction du moment de la nomination, Mme Dekkers estime qu'il serait utile de définir les trois catégories. Il pourrait alors s'avérer nécessaire également de prendre des mesures transitoires spécifiques.

Sinon, il y a effectivement trois catégories de chefs de corps, ceux nommés avant 2000, ceux qui l'ont été entre 2000 et 2007 et ceux qui entreront en fonction à partir d'avril 2007. Idéalement, les mesures transitoires devraient régler du même coup la problématique du traitement (interruption ou poursuite du paiement) et la réintégration ou non du mandat adjoint qu'ils exerçaient précédemment.

L'intervenante répète qu'il serait, à son estime, prématuré de procéder à une évaluation couvrant une période de 18 mois. Elle ne voit pas d'objection à ce que le chef de corps ait éventuellement à répondre de son mandat ou à rendre des comptes à ce moment. Le terme « évaluation » n'est toutefois pas approprié. Si l'on insère une disposition prévoyant que le chef de corps se doit de rendre compte de son mandat, il faudra quand même préciser devant quelle instance. L'intervenante propose que les chefs de corps rendent des comptes devant le Conseil supérieur de la justice (commission CAER), puisque cette instance reçoit déjà tous les rapports annuels et pourra y joindre le rapport de fonctionnement.

M. Mahoux revient sur la question de l'appréciation du plan de gestion introduit par les candidats à un mandat de chef de corps. Il suppose que l'on apprécie non seulement la méthodologie qui est présentée mais aussi des formules variables suivant les problèmes spécifiques qui se posent à tel ou tel endroit. Les objectifs à atteindre sont en effet très variables selon la situation spécifique de chaque arrondissement.

Il n'est pas illégitime de prévoir, après une période de dix-huit mois, une évaluation du chef de corps par rapport au projet initial qu'il a introduit et à la situation spécifique de la juridiction qu'il dirige.

L'orateur rappelle que les évaluations ne sont pas de nature judiciaire, ce qui se heurterait d'ailleurs à des objections de nature constitutionnelle. Le but est d'apprécier la qualité de management dans une juridiction déterminée. Cela porte sur la gestion des ressources humaines, l'organisation de la juridiction, l'adaptation des locaux et bien évidemment sur la gestion des procédures et l'arriéré judiciaire.

Dès lors, l'intervenant se demande s'il est vraiment indispensable de confier cette évaluation à un supérieur hiérarchique car il ne dispose pas nécessairement des compétences pour évaluer un secteur qu'il ne connaît pas en termes de gestion. L'orateur reconnaît qu'il est toujours difficile d'être évalué par ses pairs. Force est cependant de constater que cela existe dans toute une série de structures.

M. Willems souhaite poser deux questions ponctuelles.

Il pense pouvoir affirmer que Mme Dekkers et M. Hubin n'ont aucune objection à formuler au délai de deux fois cinq ans, contrairement au Conseil supérieur de la justice, qui semble plaider pour le maintien d'un délai de 7 ans.

A-t-on également pris position à propos de l'exception en faveur du chef de corps qui se trouve à moins de 5 ans de l'âge de la retraite et ne peut donc plus se porter candidat ?

Mme de T' Serclaes rappelle sa question sur la mobilité et le statut social des magistrats.

En ce qui concerne l'évaluation après dix-huit mois, l'intervenante pense qu'il faudrait plutôt parler de suivi et de mise en place du plan de gestion.

La formule actuelle est incohérente: c'est le Conseil supérieur de la Justice qui sélectionne les chefs de corps au sein des juridictions et des parquets pour les présenter à la désignation par le Roi. Il opère sa sélection en se basant sur les différents plans de gestion. Une fois que le candidat est désigné, il doit mettre son plan de gestion en place. Prévoir un mandat d'une durée de cinq ans, sans évaluation intermédiaire, c'est long.

Elle plaide pour que l'on cherche une formule permettant de contrôler la manière dont le candidat met son plan de gestion en œuvre. Le plus cohérent serait de charger le Conseil supérieur de faire le point, par exemple sur une base annuelle, sur le plan de gestion.

L'intervenante craint que le système d'évaluation tel qu'il est proposé débouche sur quelque chose de purement formel. Ce n'est pas une approche moderne de l'évaluation. Il faut mettre en place un système qui aide le chef de corps dans la réalisation de son plan de gestion. Il faudrait confier cette tâche à un organe d'évaluation permanente. Cette démarche s'inscrirait dans une approche où l'on soutient beaucoup plus le chef de corps.

En ce qui concerne le régime dérogatoire pour les chefs de corps qui se trouvent à moins de 5 ans de l'âge de la retraite, l'oratrice répond que la question a été brièvement évoquée au sein de groupes restreints du ministère public.

Seules les personnes non susceptibles de bénéficier d'un second mandat en raison de leur âge y étaient réticentes; il s'agissait donc seulement de critiques à caractère personnel. L'intervenante estime que le ministère public n'avait pas d'objections fondamentales à formuler à cet égard.

À propos de la nécessité de faire présider un collège par un supérieur hiérarchique, l'intervenante souligne que le ministère public ne fonctionne pas de la même manière que le siège. Le collège d'évaluation se charge de vérifier si tout fonctionne convenablement. Le chef de corps invoquera souvent des effectifs insuffisants.

Il arrive très souvent, au sein du ministère public, que des tâches soient déléguées par l'intermédiaire du supérieur hiérarchique. Ce dernier peut également modifier la répartition des juristes de parquet et des stagiaires en fonction des besoins et nécessités spécifiques. C'est donc une bonne chose de faire présider le collège d'évaluation par ce supérieur hiérarchique, car cela garantit l'objectivité et la neutralité. Une évaluation par des pairs entraînera des querelles intestines sur la pénurie de personnel au sein de l'institution.

En ce qui concerne la question du statut social, M. Hubin précise que celle-ci s'est posée par rapport à la mobilité que le gouvernement souhaite encourager. L'intervenant est favorable à l'idée d'encourager la mobilité fonctionnelle. Il faut cependant organiser cette mobilité et réfléchir à des questions de statut qui parfois la freinent.

L'intervenant illustre sa remarque par les deux exemples suivants. L'article 100 du Code judiciaire permet la nomination simultanée à plusieurs sièges. La question qui se pose est de savoir si les déplacements des magistrats nommés simultanément dans différents tribunaux de première instance sont couverts. Le second exemple vise les statuts sociaux des chefs de corps qui sont différents selon qu'ils ont été nommés « avant octopus », selon le « régime octopus » ou selon le nouveau régime. C'est un facteur très sclérosant. En effet, le statut social donné au chef de corps n'étant pas particulièrement attractif, de nombreux magistrats ne se sentent pas de vocation.

Mme de T' Serclaes revient à la question des bâtiments. Elle rappelle que la gestion des bâtiments ne dépend pas du service public fédéral Justice mais de la Régie des bâtiments. Cette ancienne logique de répartition des compétences n'est pas remise en cause.

Si des problèmes de sécurité se posent, l'intervenante pense que c'est la responsabilité de la Régie des bâtiments, donc de l'État, qui est engagée, et pas celle du chef de corps.

M. Hugo Vandenberghe précise qu'il faut distinguer la responsabilité du propriétaire de celle du gardien qui sont réglées par des dispositions distinctes.

Mme de T' Serclaes pense que les choses bougent très peu quant à la gestion des bâtiments et la vétusté de ceux-ci. On ne peut mettre ce problème à charge des chefs de corps car ils n'ont pas les moyens de le gérer.


2. Audition de:

— M. I. Verougstraete, président à la Cour de cassation;

— M. M. De Swaef, procureur général près la Cour de cassation

A. Exposé de M. De Swaef

La première réflexion générale est une question quasi existentielle: quelle est la valeur ajoutée de la réforme proposée aujourd'hui et cette réforme répond-elle à une nécessité impérieuse ?

À la fin des années 90 du siècle passé, en 1998 pour être précis, on a instauré le système de mandats pour les chefs de corps de la magistrature. Depuis, quelques années se sont écoulées et des changements fondamentaux sont à nouveau à l'ordre du jour. L'ensemble fonctionne-t-il donc si mal à l'heure actuelle et a-t-on un recul suffisant pour pouvoir vraiment évaluer cette question ?

Je me réfère en la matière à l'avis du Conseil supérieur de la justice qui émet des critiques quant à l'opportunité même de la modification proposée. Il est rappelé que le système actuel du mandat de chef de corps d'une durée de sept ans, sans évaluation, traduit la volonté exprimée à l'époque d'un équilibre mûrement réfléchi entre un mandat limité dans le temps et l'impossibilité de le prolonger immédiatement. La Cour de cassation s'est également prononcée en faveur du maintien du système légal actuel du mandat de sept ans non renouvelable, sans évaluation.

La stabilité des institutions constitue également une garantie de leur bon fonctionnement.

La proposition actuelle revient pour l'essentiel à faire passer le mandat de 7 à 10 ans et à scinder cette période de 10 ans en deux, afin d'arriver ainsi, sur le plan purement formel, à un mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois et immédiatement. Sur cette modification vient se greffer une évaluation des chefs de corps des magistrats.

L'ambivalence du système proposé, qui assortit cette prorogation d'un raccourcissement de la durée du mandat, ressort clairement de la justification donnée: « qu'un mandat de cinq ans permet déjà aux chefs de corps de mener un véritable travail de gestion ou de développer une politique criminelle ». Si ce raisonnement vaut pour la prorogation, qui fait passer la durée totale de sept à dix ans, il est clair en revanche qu'il ne tient pas pour le raccourcissement de la durée du mandat à cinq ans.

En d'autres termes, sauf exception, la durée normale du mandat de chef de corps serait à l'avenir de 10 ans, mais moyennant des évaluations. Non pas une, mais plusieurs évaluations successives.

Or, on peut admettre que la manière d'exercer une fonction fasse l'objet d'une évaluation pour des mandats d'une durée illimitée ou en cas de mandats prolongeables pour une durée plus longue.

Mais tel n'est pas le cas dans la proposition examinée. Du reste, plus un mandat est long, plus il sera difficile pour le chef de corps sortant de quitter sa fonction.

La préoccupation qui préside à l'instauration d'une évaluation des chefs de corps, qui est d'assurer une bonne gestion de l'appareil judiciaire, trouve déjà en grande partie une réponse dans le système actuel au travers des éléments suivants:

1. l'évaluation périodique de chaque magistrat;

2. le plan de gestion qui doit être établi par le candidat chef de corps et qui est évalué par le Conseil supérieur de la justice;

3. le rapport de fonctionnement que toutes les instances judiciaires rédigent chaque année;

4. le contrôle disciplinaire par les autorités hiérarchiques.

Trois problèmes sont en outre à épingler en ce qui concerne l'évaluation proposée:

1. Il existe, selon le Conseil d'État, un sérieux problème de constitutionnalité à la lumière de l'article 151 de la Constitution. Il s'agit d'un argument de poids, et il appartient au législateur d'apprécier le bien-fondé de la réponse à cette objection que donne l'exposé des motifs.

2. Alors que tous les autres magistrats sont évalués par des pairs, les chefs de corps seront aussi évalués par des personnes extérieures. Pourquoi applique-t-on deux systèmes différents ?

3. Le problème de l'évaluation du chef de corps est indissociable d'une série d'obligations légales existantes et d'un certain nombre d'autres initiatives (législatives), comme le plan Thémis.

Actuellement, un chef de corps doit, dès l'instant où il pose sa candidature, rédiger un plan de gestion dans lequel la gestion du corps occupe une place centrale.

C'est sur ce point que portera l'évaluation ultérieure (article 3 de l'avant-projet). Toutefois, la structure du plan Thémis proposé prévoit une gestion collégiale des entités judiciaires du siège et du parquet.

L'idée selon laquelle les corps seraient cogérés à l'avenir, dans le cadre du plan Thémis, par un organe collégial compétent en matière de budget, d'équipement, de gestion du personnel et d'élaboration des profils de fonctions, paraît difficilement conciliable avec le système complexe d'évaluation individuelle prévu dans l'avant-projet.

J'en arrive pour terminer à la situation spécifique des chefs de corps de la Cour de cassation.

J'ai déjà indiqué que la Cour préconise le maintien du système actuel qui nous semble équilibré.

Le projet qui met tous les chefs de corps de la magistrature sur le même pied appelle pour la Cour de cassation en plus les remarques particulières suivantes:

1. comme les magistrats de la Cour de cassation, eu égard aux conditions légales d'ancienneté, ne rallient cette juridiction qu'après un long parcours judiciaire, il sera exceptionnel qu'un chef de corps à la Cour pourra terminer un mandat complet de 10 ans. Pendant les cinquante dernières années, la durée moyenne d'un mandat de premier président était d'un peu plus de 3 ans et celle d'un procureur général de 4 ans.

Même en tenant compte du rajeunissement des cadres, la nomination d'un successeur pour achever la durée légale du mandat sera dans la plupart des cas nécessaire. Pourquoi dès lors ne pas limiter la durée du mandat à 5 ans ?

2. les chefs de corps de la Cour seront nécessairement évalués par des magistrats hiérarchiquement inférieurs. Cela ne peut être qu'une situation inconfortable pour toutes les parties concernées.

C'est pour cela que nous avons proposé d'exclure les chefs de corps de la Cour de cassation de l'évaluation. Ils sont d'ailleurs en fin de carrière: à quoi une évaluation pourrait-elle encore être vraiment utile ?

Toutes ces observations ont déjà été formulées et transmises en temps utile.

Nous ne pouvons actuellement — vu la teneur du projet — que les réitérer.

B. Exposé de M. Verougstraete

Je souscris entièrement aux propos que le procureur général vient de tenir. Le maintien du système actuel cadre parfaitement, d'une part, avec le souci du législateur de limiter les mandats dans le temps et de ne les attribuer qu'après examen du dossier par le Conseil supérieur et, d'autre part, avec l'ordre constitutionnel.

Le projet, au contraire, s'écarte des intentions initiales et est en outre difficilement compatible avec l'avis pertinent du Conseil d'État.

Je voudrais seulement faire un bref examen de la solution proposée, et ce à titre subsidiaire, au cas où le législateur se sentirait séduit par le projet de loi.

Le chef de corps est désigné pour un mandat de cinq ans immédiatement renouvelable une seule fois (article 2). Un système complexe est prévu selon le cas où le chef de corps est candidat à sa propre succession ou non. S'il l'est, le Conseil supérieur de la justice est saisi et propose ou non le renouvellement du mandat.

Ce système est manifestement inspiré par le souci de tenter d'éviter le reproche d'anticonstitutionnalité formulé par le Conseil d'État. Cette tentative ne me semble pas réussie. Il serait beaucoup plus simple, si le gouvernement estime qu'un délai de cinq ans est approprié, de fixer le délai du mandat à cinq ans, renouvelable, et de laisser le Conseil supérieur de la justice apprécier après cinq ans si le chef de corps doit bénéficier d'un renouvellement.

Ceci aurait, outre l'avantage de la simplicité, celui de rendre l'évaluation superflue puisque le corps lui-même serait chargé de donner un avis lors de la reconduction du mandat.

Les évaluations prévues dans le projet sont contraires à la constitution (et feront d'ailleurs l'objet de recours relativement évidents) et n'ont, comme nous le savons tous, pas de portée pratique significative.

Les évaluations — j'aborde ici le deuxième point de mon exposé — n'ont en général qu'une utilité très limitée et prennent en outre énormément de temps.

L'article 3 du projet est caractéristique du casse-tête que représente cette évaluation. Sans doute suivra-t-on, sur le plan purement formel, toutes les étapes décrites dans cet article et utilisera-t-on les formulaires standard prévus à cet effet, mais je ne puis imaginer que cet article soit effectivement mis à exécution.

La tendance à mettre l'accent sur les rapports plutôt que sur le travail lui-même est un élément négatif qui détourne les magistrats et les chefs de corps de leur mission. Il faut récrire ce texte en profondeur afin, d'une part, de limiter la charge de travail qui pèse sur les corps et, d'autre part, d'accroître la possibilité d'une véritable évaluation. Dans la pratique, on procède encore à une évaluation, bien que l'arrêté royal qui réglait cette matière ait été annulé par le Conseil d'État; à ma connaissance, cette évaluation ne s'accompagne pas de nombreuses formalités mais elle est réalisée sérieusement sur le plan du contenu. Le nouveau texte pourrait avoir un effet négatif.

Alors que le projet décrit l'évaluation jusque dans les moindres détails, on ne peut que s'étonner que le texte reste muet quant aux voies de recours dont le magistrat dispose pour s'opposer à une évaluation. La doctrine propose que l'on accorde cette compétence à la Cour de cassation en élargissant le champ d'application de l'article 610 du Code judiciaire, dès lors que le Conseil d'État se déclare, à juste titre, incompétent en cette matière.

C'est en tout cas une raison supplémentaire pour soustraire les chefs de corps de la Cour de cassation à l'évaluation.

Une observation supplémentaire s'impose en ce qui concerne la Cour de cassation. Il n'est pas souhaitable que le chef de corps de la Cour de cassation reste aux commandes pendant dix ans, vu la nécessité de respecter l'alternance linguistique à la tête de la plus haute juridiction du pays. Il ne serait pas opportun, en effet, que la fonction de premier président ou de procureur général soit exercée pendant dix ans par un magistrat du même rôle linguistique. Ce n'est pas parce que le premier président et le procureur général sont de rôles linguistiques différents que l'équilibre est maintenu au sein du corps, car ils ont des missions très différentes.

La Cour de cassation souhaiterait que le régime prévu pour les magistrats bruxellois (article 2) ne lui soit pas applicable.

Une meilleure solution serait de prévoir une alternance linguistique tous les cinq ans pour le premier président, ce qui signifie que son mandat ne pourrait pas être renouvelé.

Dans la pratique, cela permettrait de choisir aussi le président de la Cour de cassation parmi les magistrats d'un rôle linguistique autre que celui du premier président, ce qui a toujours été le cas jusqu'à présent et contribue à la paix communautaire au sein de la Cour (ce modèle s'applique aussi au Conseil d'État et à la Cour d'arbitrage).

L'article 2 du projet devrait donc aussi être adapté dans ce sens.

Je n'ai par contre pas de remarques négatives significatives concernant l'article 2, 4º (retour aux anciennes fonctions), l'article 7 et l'article 13 du projet, dispositions qui concernent toutes le sort des chefs de corps non prolongés.

On se demande toutefois quelle est la portée de la disposition selon laquelle des missions particulières peuvent être confiées, dans le pouvoir judiciaire ou en dehors de celui-ci, aux chefs de corps qui ne sont pas renouvelés et qui quittent leurs fonctions. Cette disposition apparaît surabondante par rapport au Code judiciaire actuel et, comme le fait observer le Conseil d'État, si l'on poursuit un but précis, il faudrait peut-être préciser de quoi il s'agit exactement. Il est toujours problématique de voir un chef de corps du siège exercer des fonctions qui sont dépendantes du pouvoir exécutif.

En conclusion: le projet mérite une réflexion approfondie et il n'y a sans aucun doute aucune urgence à le voir adopté, étant donné que, pour l'instant, le système existant est satisfaisant et est conforme à la fois à ce que le législateur a voulu en 1998 et à l'ordre constitutionnel.

C. Échange de vues

M. Mahoux demande en quoi il y aurait discrimination dans les conditions d'évaluation prévues par la loi dans le cadre des mandats actuels de 7 ans, selon la date de fin du mandat.

La loi contient généralement des dispositions transitoires qui créent des différences de traitement.

En quoi y aurait-il ici discrimination au sens où l'entend la Cour d'arbitrage ?

M. Hugo Vandenberghe est d'avis qu'un problème se pose en ce qui concerne le principe d'égalité. En effet, le projet de loi à l'examen aura pour résultat de créer trois catégories de chefs de corps, à savoir les chefs de corps nommés avant 2000, ceux qui l'ont été dans le cadre de l'accord « Octopus » et ceux qui le seront après le 1er avril 2007. Le statut que le chef de corps se verra attribuer sera donc fonction de la date à laquelle il aura été nommé. L'intervenant a le sentiment que la date de nomination ne constitue pas en soi un critère objectif justifiant une différence de statut. Des mesures transitoires peuvent certes être prévues lors de l'introduction d'un nouveau statut. Mais, dans ce cas, il s'agit de savoir si l'instauration d'un tel système peut être considérée comme une disposition de droit transitoire.

M. Mahoux fait observer que le fait que les nominations se fassent par mandat, ce qui suppose une limite dans le temps, modifie peut-être les règles habituelles puisque, par définition, les personnes qui occupent les fonctions changent.

Répondant à la question de M. Mahoux sur l'existence d'une éventuelle discrimination, M. Verougstraete précise que le problème est celui qui vient d'être décrit par M. Hugo Vandenberghe.

En ce qui concerne la notion de discrimination au sens de la Cour d'arbitrage, chacun sait qu'il existe à cet égard une certaine flexibilité.

Le système du mandat, qui suppose par définition une durée limitée, est en soi peu compatible avec une évaluation, qui a dans ce cas une utilité beaucoup moins grande que dans un système à durée indéterminée.

En outre, le problème est que l'on crée des statuts différents en fonction de données adventices, à savoir la date de nomination dans la magistrature.

M. Mahoux observe que la solution proposée par les orateurs, et qui consiste à établir un statut unique à partir d'une date déterminée, a automatiquement pour conséquence que les engagements pris par l'État à l'égard des chefs de corps par rapport à la durée de leur mandat ne sont plus respectés.

M. Verougstraete répond qu'il appartient au législateur de fixer de telles limites. Il ne faut pas vouloir tout ménager et sauvegarder des droits acquis au détriment d'un système unique qui est plus simple et plus clair.

M. Hugo Vandenberghe fait observer que c'est là la question de la pertinence d'un argument et de la proportionnalité. Du reste, il n'y a pas de droit acquis sur le statut public.

M. Mahoux réplique qu'il y a par contre des engagements moraux.

M. Hugo Vandenberghe répond que de tels engagements ne priment pas le droit.

Mme de T' Serclaes rappelle qu'en 1998, une discussion avait déjà eu lieu sur la durée du mandat. Certains étaient partisans d'une durée de 7 ans, d'autres de 2 fois 5 ans. L'intervenante était plutôt favorable à la seconde solution, estimant que 7 ans était un terme trop long, surtout s'il s'avérait que le choix opéré n'était pas le bon.

Un mandat de 5 ans renouvelable permet à un bon chef de corps de poursuivre son travail, et favorise une meilleure dynamique.

Un problème se pose toutefois pour la Cour de cassation, où les équilibres linguistiques pourraient être rompus. L'introduction d'une limite pourrait être envisagée à ce niveau, pour autant que ce motif linguistique constitue une justification suffisante à un régime différent. Des impératifs linguistiques peuvent en effet aussi être invoqués dans d'autres cas, comme à Bruxelles, par exemple.

Quant à l'évaluation, elle peut sembler revêtir un caractère assez scolaire.

L'évaluation existe déjà à l'heure actuelle, mais peut-être faudrait-il en affiner le concept lorsqu'il s'agit des chefs de corps. Il paraît normal en soi que l'on évalue des personnes qui assument des mandats importants et d'une certaine durée.

Mais il serait plus adéquat de concevoir cette évaluation comme un soutien au chef de corps dans la mise en œuvre de son plan de gestion.

Dans aucune entreprise, aujourd'hui, on ne laisse un responsable travailler seul pendant 5 ans.

L'oratrice aimerait connaître le point de vue des orateurs à ce sujet.

Mme Nyssens demande, à propos du projet de loi relatif aux mandats et à l'évaluation des chefs de corps, si ce texte a fait l'objet d'une réelle concertation entre le ministre et la Cour de cassation et, dans l'affirmative, comment ces échanges ont eu lieu.

L'intervenante se rallie par ailleurs à l'idée que, plus les mandats sont courts, et moins une évaluation est nécessaire.

Comment concilier raccourcissement des mandats et évaluation ?

Par ailleurs, si l'on veut raccourcir la durée des mandats, la vraie question n'est-elle pas celle du reclassement ? N'est-ce pas le retour des magistrats à leur poste d'origine qui pose problème, même si, selon les orateurs, ce n'est pas le cas à leur niveau ?

Enfin, à l'occasion du présent projet et de celui instaurant la Commission de modernisation de l'Ordre judiciaire et le Conseil général des partenaires de l'Ordre judiciaire, voit-on émerger une vision nouvelle de la magistrature et de la séparation des pouvoirs ?

La ministre se demande, à propos du mandat de 5 ans et de la solution subsidiaire proposée par les orateurs, si, en introduisant une durée de mandat adaptée pour les deux mandats de chef de corps de la Cour de cassation (par exemple 5 ans non renouvelable), on ne crée pas, par rapport aux autres chefs de corps, une différence de traitement susceptible de constituer une discrimination.

En ce qui concerne l'évaluation, M. Hugo Vandenberghe souligne qu'il y a une différence entre le parquet et le siège. Il est d'avis que le parquet a davantage de moyens que le siège pour procéder à des évaluations. De quels moyens dispose véritablement le chef de corps pour répondre aux exigences posées ? Il est quand même tributaire de la bonne volonté des autres magistrats qui l'entourent.

L'intervenant souligne également que l'évaluation et l'appréciation de juristes varient selon que l'on est dans la région de langue néerlandaise ou de langue française. À Bruxelles, l'évaluation prendra facilement une tournure communautaire. Qui dit évaluation, dit bonne foi.

Par ailleurs, l'intervenant n'est pas favorable à la présence, lors de l'évaluation, du directeur général du ministère de la Justice. Cela pose le problème de l'influence indirecte. Dans notre pays, le pouvoir exécutif devient beaucoup trop puissant. C'est pourtant le Parlement qui est le premier garant des droits du citoyen.

L'intervenant estime que la séparation entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif doit être complète. Il n'y a pas lieu, selon lui, d'associer le gouvernement à l'évaluation de la magistrature du siège.

M. Mahoux fait observer qu'ici comme ailleurs, l'âge constitue un problème. L'âge de désignation à la fonction de chef de corps, plus particulièrement à la Cour de cassation, ne peut guère être inférieur à 65 ans. Dans cette juridiction, un élément spécifique de représentativité peut jouer, à côté des exigences liées à la gestion.

L'intervenant s'interroge sur l'opportunité d'un rajeunissement: de telles fonctions doivent-elles, de manière quasi-structurelle, être réservées à des personnes dont l'expérience est très grande ?

Par ailleurs, comment envisage-t-on de faire la distinction entre l'évaluation du travail judiciaire, et celle du travail de gestion du ressort ? À supposer que cette distinction soit possible, ce qui est la thèse du projet, ne pourrait-elle, par définition, être aussi appliquée à la Cour de cassation ?

Concernant les tâches du chef de corps, M. Verougstraete confirme que la tâche principale d'un chef de corps est de diriger le corps en question. Or, à l'heure actuelle, ce n'est que trop rarement le cas. Nombreux sont les chefs de corps qui n'ont plus le temps de siéger ni de prouver qu'ils sont les meilleurs. Il est capital qu'un chef de corps puisse passer une part substantielle de son temps à participer effectivement aux séances et à fournir des avis. Cela doit être vrai aussi pour la Cour de cassation. Tant le procureur général que l'intervenant et les autres membres du personnel dirigeant de la Cour participent effectivement aux séances.

La Cour de cassation se distingue des autres instances.

L'intervenant renvoie, à propos de la nécessité d'un régime spécifique pour la Cour de cassation, à l'avis du Conseil d'État, où l'on peut lire: « Compte tenu de la place particulière qu'occupe la Cour de cassation par rapport aux autres cours et tribunaux de l'ordre judiciaire ainsi que de son rôle d'autorité disciplinaire à l'égard des autres membres de la magistrature assise, en ce compris précisément les chefs de corps des cours et tribunaux, le Conseil d'État se demande, sous réserve des observations qui précèdent, si ces spécificités ne devraient pas conduire l'auteur de l'avant-projet de loi à s'interroger sur la pertinence de l'application aux chefs de corps de la Cour de cassation d'un système d'évaluation tel que celui envisagé par les dispositions en projet » (doc. Sénat, nº 3-1707/1, pp. 39 et 40).

Ceci constitue une réponse à la question de savoir s'il s'agit d'une différence de traitement justifiée, au regard des articles 10 et 11 de la Constitution.

La Cour de cassation a également des tâches spécifiques, comme la concertation avec la Cour d'arbitrage et le Conseil d'État, dans un souci de stabilité juridique.

C'est pourquoi il est proposé de prévoir pour elle un statut spécifique différent des deux mandats de 5 ans prévus pour les autres chefs de corps.

M. De Swaef déclare qu'en ce qui concerne la concertation avec le ministère, un groupe de travail a fait des propositions en son temps, propositions que l'on ne retrouve pas vraiment dans le projet de loi.

Quant au retour du chef de corps à la fin de son mandat, ce problème se posera toujours, quelle que soit la durée du mandat, dès lors que ce dernier est à durée limitée. Il est difficile, en cette matière, de trouver une solution satisfaisante pour toutes les parties.

En ce qui concerne l'évaluation, l'intervenant est d'avis que la philosophie qui la sous-tend dans le projet à l'examen est proche de ce que propose le projet Thémis. Or, le plan Thémis n'est pas encore devenu réalité. Aussi peut-on se demander s'il n'est pas prématuré de proposer dès maintenant un statut du chef de corps, assorti d'une évaluation.

M. Verougstraete ajoute, à propos du lien opéré par Mme de T' Serclaes entre le plan de gestion et l'évaluation, que dans tous les plans de gestion déposés récemment devant le Conseil supérieur de la Justice, pratiquement tous les candidats ont souligné le caractère provisoire de leur plan, et la nécessité de le confronter à l'avis du corps dans lequel ils seraient nommés, ce qui est tout à fait légitime. Les plans de gestion sont toujours modifiés en profondeur dans les semaines qui suivent la nomination du magistrat dans son corps.

Dans ces conditions, une évaluation ne peut consister en un exercice mathématique de comparaison avec le plan, qui est un élément incertain.

De plus, nul ne sait quel sera le rôle des chefs de corps dans l'avenir, une fois le plan Thémis en vigueur.

La magistrature est donc sceptique en ce qui concerne l'évaluation par rapport au plan de gestion conçu comme un programme.

L'idée des magistrats est que l'évaluation se fait au terme des 5 ans par une représentation par le Conseil supérieur de la Justice ou par une appréciation du corps lui-même.

Mme de T' Serclaes exprime sa perplexité, dans de telles conditions, sur le rôle du plan de gestion ainsi conçu. En quoi consiste en définitive un tel plan, et quel en est le contenu ?

M. Verougstraete souligne qu'un élément important réside dans le rôle du Conseil Supérieur de la Justice. Dans le système conçu par le constituant, il y avait une vérification annuelle par celui-ci. Peut-être est-ce ce dialogue entre les juridictions et le Conseil supérieur de la Justice qui ne fonctionne pas de manière adéquate.

Un autre point est perfectible: il s'agit de l'amélioration des performances quantitatives de certaines juridictions. Ce problème est bien connu, mais il est parfois très difficile d'y remédier. La situation s'améliore dans certaines juridictions. Il y a d'ailleurs des juridictions qui n'ont plus de problèmes.

Pour celles qui ont encore des difficultés, l'orateur ne croit pas que le système proposé ici soit la panacée. Il ne faut pas voir les choses de façon trop abstraite. Le chef de corps a ses idées, mais dans le système légal, l'assemblée générale a également de l'importance. Celle-ci exerce généralement un pouvoir positif. Le corps va critiquer le chef de corps s'il n'est pas assez performant sur certains points. Il faut encourager cette façon de travailler. C'est là que doit se faire l'évaluation. On ne peut donc vivre dans la fiction que, de nos jours, un chef de corps peut imposer de façon absolue ses propres volontés.

M. Mahoux a le sentiment qu'en dépit des déclarations unanimes favorables au principe de l'évaluation, il existe une assez forte résistance des magistrats à l'idée d'une évaluation dans l'exercice de leur fonction de gestion. Une telle résistance n'est du reste pas propre au monde judiciaire, mais s'observe dans d'autres secteurs de la société.

Mme de T' Serclaes estime que l'on n'a pas encore pris toute la mesure de ce qui est demandé aujourd'hui à un chef de corps: pendant une période déterminée, ici de 5 ans, on prend une responsabilité complémentaire à celle de juger, qui est d'animer et de gérer une juridiction, en étant exigeant avec ses collègues. C'est un travail à part entière, et temporaire.

Continuer simultanément à siéger n'est envisageable que dans des juridictions où la tâche de gestion n'est pas trop lourde.

M. Verougstraete fait observer que les juridictions où il y a le moins d'arriéré sont celles où le chef de corps exerce encore des fonctions juridictionnelles. L'impulsion, le dynamisme, la gestion vont de pair avec la direction intellectuelle d'un chef de corps.

La conception consistant à envisager ces deux fonctions comme exclusives l'une de l'autre est théorique et dépassée, bien qu'elle se retrouve quelque peu dans le plan Thémis.

La conception moderne du chef de corps est que ce dernier reste techniquement et juridiquement impliqué dans la vie juridictionnelle en assumant les affaires importantes, tout en étant assisté, en ce qui concerne le management, par une personne qui, sous sa supervision, gère les aspects pratiques. On a dit fréquemment qu'il fallait placer les managers sous l'autorité des chefs de corps: cela a été dit pour le greffier en chef (point qui fait l'objet d'un projet de loi), pour le « manager chef de corps » que prévoyait l'un des plans Thémis, ...

L'idée défendue ici par les magistrats est en tout cas qu'un chef de corps doit, outre sa mission de gestion, garder une partie importante de ses activités juridictionnelles. La pratique a montré que le contraire était contre-productif. En outre, le retour du chef de corps au terme de son mandat n'en serait que plus difficile.


3. Audition de M. P. Romijn, président du Conseil des procureurs du Roi

A. Exposé de M. P. Romijn

M. Romijn rappelle que la ministre a associé le Conseil des procureurs du Roi, dès 2004, à un groupe de travail pluridisciplinaire qui a planché sur la réforme des mandats des chefs de corps et l'évaluation des magistrats.

Le Conseil des procureurs du Roi a déjà pris position par rapport aux réformes envisagées. Il renvoie notamment aux réponses que le Conseil a données au questionnaire que lui avait adressé le Conseil supérieur de la justice ainsi qu'à l'avis qu'il a rendu en mars 2006 sur l'avant-projet de loi modifiant diverses dispositions du Code judiciaire concernant l'évaluation des magistrats (voir annexes 2 et 3 au présent rapport).

L'intervenant souhaite insister sur les quatre points suivants:

a) Durée des mandats

Alors que l'instauration des mandats pour les fonctions dirigeantes dans les services de police et dans la magistrature trouve une même origine dans les réformes « Octopus », votées par le Parlement en 1998, M. Romijn constate qu'en ce qui concerne les services de police, les titulaires de fonctions concernées par le système des mandats (chefs de zone, chefs de corps, directeurs judiciaires, directeurs de directions centrales, etc.) bénéficient, à la suite de l'adoption récente du projet de loi portant modification de divers textes relatifs à la police intégrée, de mandats de 5 ans renouvelables sans limitation dans le temps, moyennant une évaluation positive (voir doc. Sénat nº 3-1710).

Par contre, pour ce qui est des magistrats, le projet de loi fixe à 5 ans la durée du mandat de chef de corps dans les institutions judiciaires et prévoit un seul renouvellement possible. Cette différence d'approche est interpellante.

b) Les évaluations

Le projet de loi instaure deux évaluations au cours du premier mandat de 5 ans, la deuxième étant décisive dans la perspective du renouvellement. Le Collège des procureurs du Roi se demande si une seule évaluation avant le terme des 5 ans n'est pas suffisante.

Les chefs de corps vont devoir après deux ans investir dans de longs travaux préparatoires à leur première évaluation alors qu'ils viennent seulement de prendre place dans leur nouvelle fonction.

On peut se poser la question de la valeur ajoutée de cette première évaluation non décisive alors qu'il existe au sein de l'Ordre judiciaire une structure hiérarchique (procureurs généraux, premiers présidents). Si le démarrage d'un chef de corps devait s'avérer laborieux, des signaux d'alarmes peuvent être tirés par le chef de corps, sans formalisme excessif. Si nécessaire, un entretien fonctionnel peut être organisé.

Par comparaison, les mandataires au sein de la police locale et de la police fédérale n'ont pas d'évaluation intermédiaire alors que la durée du mandat (5 ans) est identique. Ils sont évalués au terme d'une période de cinq ans.

Le Conseil regrette l'absence du supérieur hiérarchique (procureur général en l'occurrence) au sein du Collège d'évaluation.

Il s'étonne de surcroît de l'absence d'avis obligatoire du supérieur hiérarchique dans la procédure d'évaluation alors qu'il est prévu que le directeur général de l'organisation judiciaire rend un avis écrit.

Le Conseil des procureurs du Roi doute également du caractère opérationnel ou réalisable d'un avis motivé rendu par l'assemblée de corps au collège d'évaluation. Il se pose aussi la question de sa pertinence. Comment une assemblée générale pourra-t-elle structurer un avis concernant le chef de corps en fonction ?

M. Romijn précise que des projets pilotes ont été lancés au sein du ministère public dans le cadre d'une démarche de recherche de qualité totale de l'organisation et de son fonctionnement. Des expériences pilotes d'auto-évaluation ont été mises en place au sein du parquet fédéral de même qu'au sein de quatre parquets d'instance (Termonde, Malines, Charleroi et Huy) et du parquet général de Bruxelles. L'intervenant pense que l'auto-évaluation est un exercice particulièrement dynamique car c'est le corps lui-même qui s'évalue mais qui évalue en même temps la fonction « leadership » et la fonction « ressources humaines ». Le ministère public, seul concerné par ces projets pilotes, a en son sein des outils d'auto-évaluation. Ce projet bénéficie d'un support universitaire et de l'aide du Service de politique criminelle du service public fédéral Justice.

L'intervenant précise enfin que l'évaluation des chefs de corps doit être organisée dans le cadre de référence suivant: appréciation de la personnalité du mandataire, atteinte des objectifs stratégiques et qualité de l'organisation du corps.

c) Mesures de droit transitoires

Dans le contexte particulier que représente la direction des juridictions ou institutions judiciaires, le législateur doit envisager des mesures transitoires en vue de répondre aux attentes légitimes des chefs de corps en place et pour garantir une application cohérente du système des mandats.

Ainsi, compte tenu de ce que la loi en projet n'entrera en vigueur qu'après le 1er avril 2007, il faut envisager et prendre en compte les différentes situations et notamment celle des chefs de corps désignés après le 1er avril 2000 et dont le mandat a pris cours avant le 1er avril 2007. Ces chefs de corps ne font pas partie de la catégorie des anciens (nommés à vie) ni des nouveaux (mandat de cinq ans renouvelable une fois) et ont un mandat de sept ans, non renouvelable.

Tout le monde reconnaît qu'une période de cinq ans est fort courte pour finaliser un plan de gestion et pour mener des réformes à moyen et long terme.

C'est pour cette raison que le gouvernement propose un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Une période de dix ans permet « d'envisager des réformes à plus long terme et de vérifier sur le terrain leur faisabilité et leur adéquation avec les objectifs fixés » (exposé des motifs p. 5).

Or, les magistrats nommés après le 1er avril 2000 et dont le mandat a pris cours avant le 1er avril 2007, ont également dû établir un plan de gestion pour une durée de sept ans. Il ne serait pas incohérent que le législateur décide de prolonger les mandats de ces chefs de corps qui ont pour l'instant un terme unique de sept ans.

d) Fin du mandat

La situation du mandataire sortant, à la fin de son mandat, est un facteur de frustrations pour les magistrats concernés.

Le Conseil des procureurs du Roi approuve la perspective de confier une mission spéciale au chef de corps sortant. De même, le retour au mandat adjoint comme le prévoit le projet est une bonne solution.

Le Conseil se rallie également aux suggestions formulées par le Conseil supérieur de la justice dans son avis du 22 février 2006 (p. 8 et 9), à savoir:

— le retour à la juridiction ou au parquet d'origine;

— l'attribution d'un mandat adjoint au rang immédiatement inférieur, dans la même juridiction.

L'intervenant est par contre plus réservé quant à l'idée de prévoir, comme régime de base, la réintégration dans la fonction d'origine. Pour ce qui est du ministère public, il rappelle que le chef de corps est confronté à une tâche pluridisciplinaire. Les tâches du parquet ont beaucoup évolué au cours des dix dernières années. Le retour à la fonction d'origine est difficile à réaliser car une coupure est intervenue par rapport à l'activité antérieure. Une des pistes de réflexion pourrait résider dans la désignation ou une nomination dans la juridiction supérieure (parquet général).

Enfin, M. Romijn rappelle qu'une revalorisation de la fonction de base a été réalisée sous la législature précédente mais que le statut financier des chefs de corps n'a toujours pas été revu. La différence sur le plan du statut financier entre le chef de corps et les mandats adjoints est très ténue. Il faudrait développer une vision globale pour que le statut du chef de corps prenne en compte l'engagement du candidat vers une prise de responsabilité. Cela peut se traduire en termes de durée du mandat, au niveau de la sortie du mandat ou de la rémunération.

B. Échange de vues

Mme de T' Serclaes pense que les auditions font apparaître une sensibilité différente entre le ministère public et le siège. Un procureur du Roi a des tâches très différentes de celles d'un président de tribunal de première instance, notamment en termes de relations avec la police, les bourgmestres, etc. La loi de 1998 et le projet de loi à l'examen ne prennent pas ces différences suffisamment en compte.

Les auditions montrent également que les contours de la fonction de chef de corps et que les notions de plan de gestion et d'organisation interne de la juridiction doivent encore être précisés.

Le candidat à une désignation doit présenter son plan de gestion au Conseil supérieur de la justice. Sur quoi portent ces plans ? Ces plans sont provisoires car ils doivent encore être discutés avec le personnel de la juridiction. Cela se fait en assemblée générale au sein du corps. À la suite de ces discussions, le plan de gestion évolue et est adapté.

L'intervenante pense que dans une telle perspective évolutive du plan de gestion, il est bon que le magistrat puisse avoir une instance avec laquelle il peut faire le point. Le délai pour cette « évaluation intermédiaire » serait à fixer, par exemple tous les ans. L'idée est d'avoir un instrument d'aide à la gestion pour le chef de corps en évitant de le laisser seul, pendant cinq ans, face à ses interrogations.

Lors de son exposé, M. Romijn a fait état d'une expérience pilote d'auto-évaluation. C'est une piste intéressante.

L'oratrice pense que les idées visant à améliorer le management dans les juridictions et les corps partent dans tous les sens et que cela crée une certaine confusion.

M. Romijn fait remarquer que tout le monde s'accorde sur le fait qu'assurer des responsabilités va de pair avec le fait de rendre des comptes. Assumer un mandat implique une évaluation si l'on envisage un renouvellement dudit mandat. Le Conseil des procureurs du Roi n'a jamais remis ce principe en cause. Il a simplement fait remarquer que l'évaluation intermédiaire, après deux ans, ne débouche sur rien de décisif alors que le processus mis en place est assez lourd. La question qui se pose est de savoir s'il est opportun d'investir dans une procédure aussi lourde après deux ans de mandat.

Il existe au sein du ministère public des réponses à ce besoin de rendre des comptes. Le ministère public est un corps hiérarchisé et le procureur général a pour mission de demander des comptes.

Un autre type de réponses est illustré par les programmes pilotes d'autoévaluation qui sont mis en place. Tant les entreprises privées que les services publics développent des démarches visant à rechercher la qualité totale. Cela fait partie des principes de bonne gestion. Pour atteindre cet objectif de quête de la qualité, il faut que tous les acteurs prennent conscience de leur rôle, connaissent les problèmes qu'ils peuvent rencontrer et les améliorations à y apporter. C'est l'objectif des projets pilotes.

Dans les parquets concernés, cinq magistrats ou stagiaires judiciaires ou juristes de parquet et cinq membres du personnel administratif participent à ces projets. Ces dix personnes, qui participent sur une base volontaire, se penchent sur des aspects aussi divers que le leadership du parquet, le volet judiciaire et le volet administratif.

En ce qui concerne le plan de gestion, M. Romijn reconnaît que celui-ci a toujours une dimension évolutive. Si le candidat chef de corps a établi son plan de gestion en se basant sur l'effectif théorique mais que le cadre n'est pas rempli, il devra impérativement adapter son plan. Il se peut également que les magistrats spécialisés dans certaines matières fassent défaut. Ainsi, la gestion du contentieux jeunesse au sein du ministère public représente un volume de travail en constante augmentation. À titre personnel, l'intervenant pense que la gestion de ce contentieux va nécessiter l'obligation de concevoir une autre organisation et un renforcement des effectifs. Il est probable qu'à terme on arrive à un équilibre entre la section « droit commun des adultes » et la section qui gère la « problématique jeunesse » au sens large. Si le plan de gestion a été établi en se basant sur la situation réelle à un moment donné, il est évident que de telles évolutions nécessitent une adaptation de l'organisation et du plan de gestion.

Le plan de gestion interne ne peut pas être confondu avec le plan de politique criminelle. L'organisation de la structure, l'organisation du travail, son suivi et son contrôle, la gestion des ressources humaines, le leadership, etc., doivent évoluer en fonction des situations que le parquet est amené à gérer.

En réponse à la réflexion concernant la différence qui existe entre une fonction de chef de corps au sein du ministère public et une fonction de chef de corps au sein de la magistrature assise, M. Romijn pense qu'il n'y a pas une quête de différence de statut. Les deux chefs de corps sont des magistrats. Il y a bien entendu une différence quant au contenu de la fonction.

Mme Nyssens demande si, à travers les outils proposés par les projets de loi actuellement en discussion (mise sur pied d'une Commission de modernisation, approche pluridisciplinaire, etc.), on constate une vision nouvelle du ministère public. Les projets se bornent-ils à proposer des mesures destinées à améliorer le fonctionnement interne de la justice ou y a-t-il une volonté de rapprochement du ministère public vers l'exécutif ?

M. Romijn répond que l'exercice de l'action publique, le développement et l'exécution d'une politique criminelle et la vision au plan local sont des points qui participent de la fonction de l'exercice de la justice et qui ne sont pas trop liés à l'exécutif. Il ne faut pas non plus nier la réalité. Plusieurs articles du Code judiciaire placent le ministère public sous la direction du ministre de la Justice. Le ministère public ne veut pas couper ce lien avec l'exécutif mais il souhaite garder sa place dans l'architecture judiciaire.

Ainsi, la compétence d'avis du ministère public dans de multiples matières contribue au bon fonctionnement de la juridiction. La pluridisciplinarité du ministère public est un grand avantage. C'est une fonction qui est exercée dans l'intérêt public.

Mme de T' Serclaes revient au rôle du procureur général dans la surveillance du travail des différents parquets. La situation n'est pas du tout comparable pour le siège. Si l'évaluation intermédiaire après deux ans ne semble pas nécessaire pour les parquets, en raison de la surveillance exercée par le procureur général, il n'y a pas d'équivalent au niveau du siège. Faut-il opérer une différence ?

L'évaluation telle qu'elle a été mise en place par le législateur de 1998 a un côté scolaire. Elle n'est pas pensée comme un soutien dans la manière dont la personne évaluée assume sa fonction. L'intervenante pense que laisser un chef de corps assumer seul sa fonction pendant cinq ans, sans qu'il bénéficie d'un soutien en cours de mandat, est très long. Il n'est pas nécessairement négatif d'avoir une confrontation sur ce que fait le chef de corps et sur la manière dont il gère son corps. L'intervenante demande s'il est anormal de prévoir une évaluation intermédiaire en cours de mandat, quitte à ce que les modalités en soient aménagées pour éviter que cette évaluation intermédiaire ne soit identique à l'évaluation prévue au moment du renouvellement du mandat.

M. Romijn n'a aucune difficulté avec le principe d'une évaluation en cours de mandat. Il a voulu attirer l'attention sur le fait que la procédure prévue était trop lourde et prendrait trop de temps en rapports et réunions.

Le chef de corps doit également assumer la gestion du quotidien. Il a d'autre part dû mener une réflexion de base en début de mandat lors de l'élaboration de son plan de gestion.

Au sein du ministère public, la mission des procureurs généraux est de veiller à la qualité et à l'appui des parquets de leur ressort. Par ailleurs, les expériences pilotes qui ont démarré à tous les niveaux du ministère public (procureurs généraux, procureur fédéral, procureurs du Roi, auditeurs du travail) laissent entrevoir la perspective de réaliser des auto-évaluations. Le but est de reproduire ces auto-évaluations tous les deux ans pour entrer dans un cycle de recherche permanente de la qualité. Ce processus n'empêche nullement qu'une évaluation « light » se déroule après deux ans de mandat et dans une dynamique d'appui.

Mme Talhaoui renvoie à l'exposé de Mme Dekkers, qui a exprimé sa préférence pour l'établissement de rapports plutôt que pour une première évaluation. Elle estime en effet qu'il est difficile de procéder à une évaluation au terme d'une période aussi courte. Ne faudrait-il pas réduire la première évaluation à une simple obligation de rédiger des rapports ? Il serait intéressant aussi de connaître les critères précis et la différence exacte entre l'évaluation et la rédaction de rapports.

M. Romijn répond que l'évaluation d'un magistrat pour une fonction de base implique un entretien de fonctionnement avec une dynamique de projet. Dans le cadre d'une évaluation provisoire après deux ans de mandat, il serait possible de prévoir un entretien de fonctionnement sans que cela nécessite la rédaction de rapports et autres documents. Il faut éviter d'imposer des obligations administratives lourdes mais qui n'ont pas de plus-value. Si le parlement décide de retenir le principe d'une évaluation intermédiaire, il faut que celle-ci soit souple. À titre personnel, l'intervenant pense que le dialogue singulier dans le cadre d'un entretien de fonctionnement pourrait être un appui intéressant pour soutenir le chef de corps.

M. Hugo Vandenberghe pense que la discussion en cours est fort théorique dans la mesure où la concrétisation du plan Thémis prendra encore beaucoup de temps. Comment parler de l'évaluation des chefs de corps alors que leur rôle n'est pas encore clairement défini ? Cela dépendra directement de la manière dont on mettra en œuvre le plan Thémis. Quels critères d'évaluation faut-il dès lors retenir pour l'évaluation des chefs de corps ? Il n'est pas possible pour le législateur d'anticiper aujourd'hui la question de l'évaluation du chef de corps et de son accompagnement sans connaître les autres volets de la réforme Thémis.

M. Romijn reconnaît la difficulté. Le collège des procureurs généraux avait suggéré que les critères d'évaluation soient fixés par arrêté royal, pour éviter que l'on ne doive modifier la loi en fonction de la façon dont le plan Thémis sera concrétisé.

IV. DISCUSSION GÉNÉRALE

Mme Nyssens formule les remarques suivantes à la suite des auditions:

— Le principe du mandat ne heurte personne.

— La durée du mandat peut être réduite à cinq ans mais il faut aménager les évaluations. Lorsqu'une personne est nommée pour une période de cinq ans, il n'est pas possible de la soumettre à deux évaluations au cours de son mandat. Il ne faudrait pas que les chefs de corps soient plus occupés par ces évaluations que par la gestion de leur corps. L'évaluation doit être conçue comme un moment d'accompagnement et pas comme une méthode de contrôle. Un mandat court nécessite selon l'intervenante moins d'évaluation qu'un mandat long.

— Faut-il limiter la fonction à deux mandats ? Il faut d'autre part justifier les raisons pour lesquelles le régime proposé pour les magistrats est plus strict que celui qui existe dans la police où le renouvellement n'est pas limité à une fois.

— Il faut tenir compte de la spécificité de la Cour de cassation au niveau de la procédure d'évaluation et de la durée des mandats. Est-il opportun que des magistrats de cassation soient évalués par des magistrats de rang inférieur ?

— La Cour de cassation insiste sur la place à donner au supérieur hiérarchique dans le collège d'évaluation. Il faut que celui-ci préside le collège ou, à tout le moins, que son avis soit pris en considération. Quelle place le projet réserve-t-il au supérieur hiérarchique au sein du collège d'évaluation ?

En ce qui concerne l'interprétation donnée par le gouvernement à l'article 151 de la Constitution, Mme Nyssens admet que deux lectures de cet article sont possibles. Elle n'est cependant pas certaine que la lecture que le gouvernement fait aujourd'hui de cette disposition correspond aux intentions du Constituant de 1999.

Le rapport entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire est une question très délicate et il est essentiel que l'on réponde de manière très précise aux remarques constitutionnelles soulevées par le Conseil d'État.

Par ailleurs, le projet a pour résultat de faire une évaluation de l'accord octopus. On avait opté à l'époque pour un mandat de sept ans, non renouvelable. Est-on certain qu'il faille déjà changer le système ? Mme Nyssens n'en est pas convaincue.

Enfin, l'intervenante renvoie à la remarque formulée lors des auditions sur la nécessité de prévoir un régime transitoire pour les magistrats qui sont dans le système actuel des mandats de sept ans, non renouvelables.

La ministre précise que le régime transitoire prévu ne touche pas aux mandats en cours. Les chefs de corps nommés pour sept ans restent dans le régime d'un mandat de sept ans, non renouvelable. Ceux qui entreront en fonction le 1er avril 2007 seront nommés pour un mandat de sept ans, non renouvelable. Le projet de loi, s'il est adopté en l'état, ne s'appliquera qu'aux mandats déclarés vacants après le 1er avril 2007.

Trois régimes coexisteront. Celui d'avant 2000, qui prévoyait la nomination du chef de corps à vie. Ces personnes sont devenues titulaires d'un mandat de sept ans avec maintien de la rémunération de chef de corps jusqu'à la fin de la carrière professionnelle.

La deuxième catégorie se compose des personnes nommées après 2000. Elles ont été nommées pour un mandat de sept ans, non renouvelable, avec maintien de la rémunération de chef de corps pour une période de deux ans au delà du mandat.

Enfin, le nouveau régime devrait être applicable aux chefs de corps qui entreront en fonction après le 1er avril 2007. Ils seront nommés pour une période de cinq ans, renouvelable une fois l'hypothèse du maintien de la rémunération de chef de corps après l'expiration du mandat a été supprimée.

L'intervenante précise que le régime transitoire prévu dans l'avant-projet de loi a été modifié car il portait atteinte à des droits acquis. Le régime a été redéfini.

Pour les candidats qui postulent à un mandat vacant au 1er avril 2007, ils connaissent les conditions de leur désignation: ce sont les conditions connues au moment où la vacance a été déclarée (mandat de sept ans, non renouvelable et maintien de la rémunération de chef de corps deux ans au-delà de la fin du mandat).

M. Hugo Vandenberghe demande des précisions sur le statut des chef de corps en ce qui concerne les emplois qui seront déclarés vacants après la publication de la loi à l'examen. Seront-ils nommés pour un terme de cinq ans, alors que les mandats en cours ont une durée de sept ans ? Les chefs de corps auront ainsi un statut qui différera en fonction de la date de publication de la vacance.

La ministre répond qu'il faut à un moment donné choisir un système pour l'entrée en vigueur du nouveau régime. La nouvelle loi entrera en vigueur après le 1er avril 2007. Tous les mandats déclarés vacants après cette date seront soumis au nouveau régime: les candidats postuleront à un mandat de cinq ans, renouvelable une fois.

M. Hugo Vandenberghe en déduit que le Parlement adopte une loi pour la prochaine législature.

L'intervenant rappelle qu'il y a actuellement des dizaines de fonctions vacantes. Seules celles déclarées vacantes après le 1er avril 2007 seront soumises au nouveau régime. A-t-on une idée du nombre de vacances qui seront publiées après le 1er avril 2007 ?

La ministre répond qu'il y a au total un peu plus de cent cinquante chefs de corps. Au 1er avril 2007, environ quatre-vingts mandats seront renouvelés. Dès lors, environ septante mandats seront concernés par les nouvelles dispositions. Pour certains mandats, la déclaration de vacance se produira déjà en 2008.

M. Hugo Vandenberghe se réfère à l'important mouvement de chefs de corps en cours actuellement. Quelque 80 mandats sont concernés simultanément. Tel ne sera pas le cas en avril 2007, où l'on n'aura que des mandats qui deviennent vacants en fin de mandat ou au décès d'un chef de corps. Il convient de souligner que le statut à l'examen n'entrera en vigueur qu'en avril 2007. Toutes les vacances actuelles concernent donc un mandat de 7 ans sans évaluation.

La ministre rappelle que le projet de loi prévoit une évaluation à l'issue du mandat. Le gouvernement n'a cependant pas jugé opportun de raccourcir le mandat de sept à cinq ans. Il juge qu'il est préférable de garder les conditions actuelles.

M. Hugo Vandenberghe considère que le point de vue du gouvernement sur la durée des mandats a changé récemment. En tout cas, pour ce qui est des effets juridiques pratiques, le projet de loi à l'examen n'entrera en application que sous la prochaine législature. Cela signifie aussi que différents statuts de chefs de corps coexisteront pendant un bon moment.

La ministre fait remarquer que l'introduction de l'évaluation n'est pas une chose simple. On ne peut pas changer les règles en cours de mandat pour les personnes désignées selon le régime actuel. Il faut que les personnes qui seront évaluées connaissent les règles à l'avance.

Elle rappelle l'évolution considérable qui est intervenue au cours des dix dernières années en ce qui concerne les chefs de corps. On est passé d'un mandat à vie, sans évaluation, à un mandat de sept ans, non renouvelable et sans évaluation. Demain, on passera à un mandat de cinq ans, renouvelable, avec évaluation.

Dans un avenir proche, tous les magistrats, quel que soit leur niveau de responsabilité, feront l'objet d'une évaluation. Il y aura, pour les magistrats qui assument des responsabilités dans la gestion d'une juridiction, comme c'est déjà le cas pour les magistrats de base, des discussions par rapport à l'action qu'ils avaient annoncée dans leur plan de gestion et la mise en œuvre de cette action. Cela vaudra tant pour les juridictions de première instance que pour les cours d'appel ou la Cour de cassation.

M. Dubié se déclare interpellé par la remarque du Conseil d'État concernant la compatibilité du projet de loi avec l'article 151 de la Constitution (voir doc. Sénat nº 3-1707/1, Avis du Conseil d'État, Observations générales, nº 1.3, p. 37). Comment le gouvernement répond il à cette remarque ?

L'intervenant demande pourquoi ne pas confier l'évaluation des magistrats au Conseil supérieur de la Justice, organe constitutionnel indépendant et efficace. Il faut en effet préserver au maximum l'indépendance de la Justice par rapport aux autres pouvoirs et en particulier par rapport au pouvoir exécutif. Or, le projet prévoit que le ministre de la Justice désigne les membres du collège d'évaluation spécialisés en gestion des ressources humaines. Ces membres, désignés par le pouvoir exécutif, auront une influence importance au sein des collèges d'évaluation.

M. Willems considère que le système du mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois, revient en fait à un mandat de dix ans. La fenêtre de temps pendant laquelle les intéressés entrent en ligne de compte pour un mandat de chef de corps n'est en fait pas très grande. Il y a, en effet, une limitation biologique (on n'entre en ligne de compte comme chef de corps qu'à partir d'un certain âge, moyennant l'expérience nécessaire, etc.), doublée d'un plafond légal (le projet de loi à l'examen prévoit que le candidat doit être à un minimum d'années de l'âge de la pension).

Si l'on combine la limitation de l'article 2, § 3bis, avec les limitations biologiques et sociales, il n'y aura guère de rotation effective dans la pratique. Le mandat de sept ans donne peut-être en pratique plus de marge pour une éventuelle rotation. Le gouvernement a-t-il examiné la question de la possibilité d'avoir une rotation effective dans la pratique, à la lumière de la pyramide des âges des chefs de corps ?

En réponse aux questions sur la constitutionnalité du projet de loi, la ministre rappelle que l'avis du Conseil d'État porte sur l'avant-projet de loi adopté en première lecture par le gouvernement. Ce texte prévoyait un mandat de chef de corps d'une durée de dix ans, avec une possibilité de retrait lorsque l'évaluation du magistrat était négative.

Le Conseil d'État ayant fait remarquer que la Constitution ne permet pas au Roi de retirer un mandat, le gouvernement a abandonné cette solution qui pouvait aboutir à un excès de pouvoir.

La seconde remarque du Conseil d'État portait sur la question de savoir si l'on pouvait évaluer des chefs de corps. L'intervenant renvoie à l'argumentation développée dans l'exposé des motifs concernant l'interprétation de l'article 151 de la Constitution.

Il serait cependant illogique de soutenir que l'évaluation des chefs de corps n'est pas possible au nom du principe d'indépendance des magistrats alors que l'on admet l'évaluation d'un juge de base, qui est tout aussi indépendant qu'un chef de corps.

Pour les chefs de corps, on ne vise pas l'évaluation de son travail juridictionnel mais celle de son travail de gestionnaire. Pourquoi une telle évaluation porterait-elle atteinte à l'indépendance du chef de corps dès lors que le projet prévoit un collège d'évaluation composé de six membres ? Il est exact qu'un des membres du collège d'évaluation est désigné par le ministre de la Justice. C'est le seul des six membres désigné par l'exécutif. Les cinq autres membres sont deux chefs de corps élus par leurs pairs, deux magistrats du Conseil supérieur de la Justice désignés par l'assemblée générale du Conseil supérieur et un magistrat de la Cour des comptes.

Le collège d'évaluation est conçu comme un organe spécialisé dans l'évaluation de la gestion d'une juridiction. Sa composition vise à rencontrer les différentes facettes de compétences et de qualifications attendues des chefs de corps. Les deux membres chefs de corps connaissent le métier de chef de corps; les deux membres magistrats issus du Conseil supérieur de la Justice connaissent parfaitement le fonctionnement de la Justice; un magistrat de la Cour des comptes connaît les questions de gestion de budgets et un membre est spécialisé en gestion des ressources humaines.

La ministre précise que le gouvernement propose, dans le cadre de la réforme des carrières du personnel de niveau A, de donner aux présidents de juridiction la direction et l'autorité sur les greffiers en chef et par conséquent sur les greffes.

À l'avenir, un président d'un tribunal se trouvera, quant à l'autorité hiérarchique qui existera sur l'équipe du greffe, dans une situation comparable à celle du procureur du Roi par rapport à l'équipe du parquet. Le président d'une juridiction sera amené à poser des choix en gestion des ressources humaines. Il est normal qu'il soit évalué sur cet aspect de sa fonction.

À la question de savoir pourquoi ne pas attribuer la compétence d'évaluation des chefs de corps au Conseil supérieur de la Justice, le gouvernement a estimé que les personnes qui donneraient un avis sur la gestion d'un chef de corps devaient connaître le métier. Or, les chefs de corps ne peuvent pas être candidats au Conseil supérieur de la Justice. Les magistrats membres du Conseil sont tous des magistrats de base.

Par ailleurs, il ne fallait pas placer le Conseil supérieur dans une situation difficile. En introduisant le principe du mandat renouvelable et en confiant au Conseil supérieur la tâche de présenter au Roi le candidat pour une nomination à un nouveau mandat, il était préférable de laisser le Conseil supérieur en dehors du processus d'évaluation.

L'intervenante ne pense pas que le fait qu'un des membres du collège d'évaluation soit nommé par le ministre de la Justice mette en péril l'indépendance des chefs de corps. Elle rappelle que, tout comme pour le magistrat de base, l'évaluation ne porte pas sur le travail juridictionnel. On peut s'interroger sur la pertinence d'exclure de l'évaluation ce volet du travail du magistrat de l'évaluation mais le gouvernement n'a pas voulu entrer dans ce débat.

Par ailleurs, les décisions du collège d'évaluation sont prises à la majorité absolue des membres. En cas d'égalité, la voix du président de chambre, qui est un magistrat chef de corps, est prépondérante.

Le projet fait une distinction entre l'évaluation des magistrats du siège et de ceux du ministère public. La composition du collège d'évaluation est adaptée.

À la question concernant l'absence du supérieur hiérarchique dans le collège d'évaluation, la ministre répond que c'est un choix délibéré.

Dès le moment où on conçoit un collège d'évaluation compétent pour tous les chefs de corps, il faut en exclure le supérieur hiérarchique. Lorsque l'on évalue des présidents ou des procureurs du niveau de la première instance, il est possible de faire appel au premier président ou au procureur général.

Par contre, lorsque l'on évalue un premier président ou un procureur général, la situation est plus complexe: tenant compte des rôles linguistiques, cela aurait eu pour conséquence que les deux magistrats du même niveau et du même rôle linguistique s'évaluent successivement l'un l'autre.

Comme le gouvernement ne souhaitait pas prévoir de dérogation par rapport à certains magistrats, il fallait recourir au collège d'évaluation, sans que le supérieur hiérarchique en soit membre.

Le collège d'évaluation, pour avoir une vue complète, demandera l'avis du supérieur hiérarchique. Il se basera également sur le rapport de fonctionnement rédigé par le magistrat à évaluer, ainsi que sur l'avis du service public fédéral Justice, vu le lien existant entre la juridiction et l'administration, et sur l'entretien d'évaluation. Tous ces éléments croisés permettent aux six membres du collège d'évaluation de rendre un avis pertinent sur le travail mené par le chef de corps.

En réponse à la question de M. Willems, la ministre confirme qu'il y a des limites d'âge. L'idée est de garantir que la personne qui postule à un mandat de chef de corps puisse au minimum accomplir un mandat de cinq ans.

En ce qui concerne la durée du mandat, la ministre remarque que la période de dix ans correspond à une certaine réalité. Cela permet aux candidats de mener un travail de fond à la tête de la juridiction.

Le texte à l'examen résulte des travaux d'un groupe de travail, composé de magistrats du siège et du ministère public, qui s'est penché sur la question des évaluations, la durée du mandat, etc. Il ressortait de ces travaux qu'un mandat de sept ans était un peu court pour permettre des réformes en profondeur.

Dans une première version, il avait été opté pour un mandat de dix ans avec trois moments d'évaluation et une possibilité de retrait du mandat. Cette formule a été abandonnée à la suite des remarques de constitutionnalité qu'elle soulevait. L'option finalement retenue est celle d'un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Cela permet aux bons candidats d'avoir une période de gestion de dix ans. Cela rencontre également la volonté du gouvernement d'introduire une formule d'évaluation pour tous les magistrats.

Mme de T' Serclaes renvoie à l'audition de M. Romijn qui avait établi une comparaison entre la durée du mandat des chefs de corps (mandat de cinq ans, renouvelable une fois) et la durée du mandat pour les fonctions à mandat au sein de la police fédérale (mandat de cinq ans, renouvelable sans limitation dans le temps). Lors des discussions qui ont précédé les accords octopus en 1998, un des éléments avancés à la suite des commissions d'enquête Dutroux, Nihoul et consorts était de veiller à ce que les magistrats restent, dans la mesure du possible, maîtres de l'enquête.

Or, les magistrats sont souvent dépendants des services de police et des capacités de recherche qui sont mises à leur disposition. Il est à craindre, avec la différence au niveau du régime des mandats, que l'on n'ait pas au sein des services de police la même dynamique car le système permet aux responsables de rester en place parfois très longtemps, alors qu'au sein de la magistrature la limite de dix ans joue. L'intervenante pense qu'il serait préférable que l'on limite également la durée du mandat au sein de la police. N'y a-t-il pas un déséquilibre entre les deux corps ?

M. Mahoux constate que l'article 3 décrit de manière très détaillée la procédure d'évaluation et les rapports entre la structure d'évaluation et la personne évaluée. L'intervenant constate que tout le processus d'évaluation est unique, sans procédure de recours. Est-ce bien l'option choisie ?

La ministre le confirme. Elle fait remarquer que la procédure d'évaluation pour le magistrat de base ne prévoit pas non plus de recours.

C'est à dessein que l'article 3 décrit de manière très précise les relations entre l'autorité d'évaluation et la personne évaluée. Cela vise à donner des garanties à la personne évaluée afin qu'elle puisse réagir par rapport à certains éléments. De plus, il est important pour la suite de la procédure, et plus spécialement pour le Conseil supérieur de la Justice, que le principe du débat contradictoire ait été respecté. Enfin, la procédure d'évaluation pouvant déboucher sur une non-présentation du candidat par le Conseil supérieur de la Justice, il faut garantir à la personne évaluée un minimum de clarté pour qu'elle sache comment elle peut réagir aux différents stades de la procédure.

Mme de T' Serclaes constate que l'évaluation des magistrats existe déjà depuis 1998. A-t-on tiré des leçons de la manière dont fonctionne l'évaluation pour les magistrats de base, notamment pour ce qui concerne les critères sur la base desquels l'évaluation sera effectuée ?

La ministre répond que les §§ 2 à 7 proviennent d'un arrêté royal qui avait fait l'objet d'une décision du Conseil d'État, lequel estimait qu'une loi était nécessaire.

Quant à l'évaluation, la majorité de ceux qui y participent considèrent qu'il s'agit d'un moment important, car, cela garantit un contact entre le magistrat de base et sa hiérarchie, même si, dans les grandes juridictions, cela demande beaucoup de temps.

Dans son avis, le Conseil Supérieur de la Justice insiste fortement sur la conception de l'évaluation, qui doit consister plutôt en un accompagnement et un stimulus pour le magistrat.

Il est vrai que l'on ne connaît pas beaucoup de cas d'évaluations négatives.

Il importe en tout cas de privilégier des moments où l'on peut faire le point par rapport au travail accompli. Cependant, on peut parler de tout ce qui entoure la décision, mais non de la qualité de la décision elle-même. Or, cette qualité varie selon les individus.

Tout cela n'est pas aisé. C'est pourquoi l'évaluation est confiée au chef de corps, accompagné de deux autres personnes, ce qui offre certaines garanties pour toutes les parties.

L'évaluation présente un aspect dynamique, car demander au chef de corps d'expliquer comment il travaille et quel regard il porte sur l'action qu'il a menée l'oblige à réfléchir à sa gestion. Devoir d'expliquer cette dernièredevant des pairs et d'autres personnes qui connaissent le monde judiciaire ou les questions de gestion rend l'exercice particulièrement pertinent.

Le gouvernement estime en outre qu'une étape entre 18 et 24 mois, et une étape en fin de mandat, cela n'est pas excessif. Certains critiquent la lourdeur de ce système et des tâches qu'il implique. Mais on ne demande pas nécessairement un rapport très long. Le point de départ du rapport de fonctionnement est le plan de gestion que l'on demande aujourd'hui à tous les chefs de corps. Le rapport est une sorte de tableau de bord de l'exécution et des réorientations éventuelles de ce qui a été annoncé.

Cela ne semble pas d'une lourdeur excessive. On le pratique avec les hauts fonctionnaires, les top-managers et les directeurs généraux, qui sont également astreints à la rédaction d'un rapport.

Mme Nyssens demande quelles sont les parties du plan Thémis qui devront faire l'objet d'une loi, et qui sont liées à l'exercice du mandat de chef de corps (formation du chef de corps, autonomie, ...).

Cette loi n'est-elle pas indispensable pour le bon fonctionnement du projet à l'examen ?

M. Dubié relève que, dans l'avis commun du ministère public relatif au projet de loi, on peut lire que « ...une évaluation par un magistrat de la Cour des comptes, et par un spécialiste dans le domaine de la gestion des ressources humaines, n'a aucun sens ».

Cela ne correspond guère aux précédentes déclarations de la ministre.

La ministre répond qu'un choix politique a été fait de confier l'évaluation à une équipe qui regroupe plusieurs disciplines.

On peut au contraire estimer, comme le ministère public, qu'un magistrat ne peut être évalué que par un autre magistrat. L'oratrice estime cependant qu'il s'agit là d'un point de vue réducteur. Le gouvernement souhaite que l'évaluation soit l'œuvre de magistrats et de non-magistrats.

Quant au lien entre le plan Thémis et le présent projet, il est vrai que la composition du collège, traduit déjà une perspective d'avenir en lien avec de nouvelles compétences qui seront octryées aux chefs de juridiction (gestion des ressources humaines), mais il n'en demeure pas moins que le projet est totalement indépendant de la réforme Thémis.

La plupart des éléments de celui-ci devront faire l'objet d'une loi, car si l'on veut préciser le rôle des uns et des autres, des assemblées générales, du Comité de direction, les questions relatives à la responsabilité à l'égard de l'autorité, etc.., tout cela doit figurer dans le Code judiciaire. C'est pourquoi le gouvernement avait choisi de travailler par le biais de sites pilotes sur base volontaire, et avec une décentralisation limitée pour commencer, afin de laisser à la Commission de modernisation le temps de participer à l'élaboration de textes et de faire des propositions au ministre de la Justice, qui les présenterait à son tour au gouvernement, après quoi le parlement en serait saisi.

Cela est indispensable car, à l'heure actuelle, il n'y a pas, dans le Code judiciaire, de dispositions relatives à la responsabilité en matière de gestion, comme cela a été souligné par M. Hubin lors de son audition.

Il n'en demeure pas moins qu'aujourd'hui, le magistrat chef de juridiction est déjà associé à une série de questions. En 2007, il le sera encore plus, notamment en matière de gestion de personnel, puisqu'il aura autorité finale sur le greffe, comme il l'a déjà sur le parquet. En effet, à côté du « coaching » des magistrats, la gestion d'une juridiction comporte aussi la politique à l'égard du personnel (formation, réorganisation, ..).

M. Willems demande des précisions sur la durée pratique du mandat et sur la possibilité de rotation. L'esprit de la loi en projet est de prévoir en fait un mandat de dix ans. L'exposé des motifs fait, lui aussi, une distinction entre le premier mandat de cinq ans, qui est surtout consacré au management, et le deuxième mandat, au cours duquel on peut procéder à des réformes à long terme. L'on part manifestement du principe d'un mandat de dix, et non de cinq ans. En conséquence, certaines catégories d'âge se retrouveront exclues en pratique. Qu'adviendra-t-il par exemple d'un candidat chef de corps âgé de 59 ans ?

L'intervenant craint que le système à l'examen, qui repose indiscutablement sur de bonnes intentions, n'aboutisse en pratique à exclure toute rotation. On peut se demander si un candidat âgé de 59 ans aura vraiment toutes ses chances d'être désigné comme chef de corps. L'intervenant estime que tel devrait être le cas, mais ce n'est absolument pas ce qui ressort de l'esprit du projet de loi à l'examen.

La ministre répond que la volonté du gouvernement était de ne pas exclure certaines catégories d'âge, sauf les personnes qui ne pouvaient plus effectuer un mandat en totalité. La candidature de personnes de 58, 59 ou 60 ans est donc recevable, pour autant qu'elles puissent accomplir un mandat complet de cinq ans.

Cependant, la politique du personnel est confiée au Conseil supérieur de la Justice. C'est donc lui qui apprécie les mérites des uns et des autres. Jusqu'à présent, les motifs retenus par le Conseil ont toujours porté sur les compétences spécifiques des candidats.

On a dit, il est vrai, que le second mandat était peut-être davantage celui de la grande maturité, parce qu'il permettait d'aller au bout de ses projets. Toutefois, en cinq ans, on peut aussi accomplir un travail utile, et insuffler un dynamisme à la gestion d'un corps.

Quant à l'idée de fixer une durée cinq ans renouvelable, la ministre rappelle qu'elle est née du fait que la solution de dix ans avec retrait n'était pas possible, et parce que l'on voulait également qu'à l'évaluation s'attachent des conséquences.

M. Hugo Vandenberghe commente les lignes de force du projet de loi:

— Le projet a tout d'abord pour objet de transformer les mandats de chef de corps, qui sont actuellement des mandats de 7 ans, en mandats de 5 ans renouvelables une fois au sein de la même juridiction ou du même parquet. Dans les faits, toutefois, on instaure un mandat de 10 ans auquel il peut être mis fin après cinq ans.

— En deuxième lieu, le projet de loi instaure une évaluation au cours de la deuxième année et de la cinquième année du mandat.

Le système actuel du mandat de chef de corps pour une durée de sept ans, sans évaluation, était le résultat d'un équilibre voulu et réfléchi, qui consistait à associer l'idée d'un mandat limité dans le temps à celle de sa non-reconductibilité immédiate.

C'est dès lors à juste titre que l'on s'interroge sur la valeur ajoutée du projet de loi et que l'on se demande si une nécessité impérieuse le justifie.

Il faut remarquer à cet égard qu'il existerait actuellement trois « sortes » de chefs de corps: ceux qui ont été nommés à vie avant l'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1998 ou au moment de celle-ci, ceux qui ont été nommés pour un mandat de sept ans après la réforme du 22 décembre 1998 et, enfin, ceux qui sont nommés pour cinq ans en application du nouveau régime légal.

Une initiative législative de plus n'est pas faite pour améliorer la cohérence, bien au contraire.

Ainsi, il faudra évaluer les dispositions transitoires à la lumière du principe d'égalité.

Pour ce qui est de la constitutionnalité des règles proposées, M. Hugo Vandenberghe apporte les précisions suivantes.

La réglementation actuelle n'est pas dénuée de fondement historique.

À l'époque de la réforme Octopus, l'idée de l'assujettissement des juges, nommés à vie, à une évaluation régulière recueillait un large consensus social. Il y avait également un consensus sur la désignation temporaire des chefs de corps, qui, vu le caractère temporaire de leur mandat, n'étaient pas soumis à une évaluation.

Ce consensus se reflète dans la Constitution, dont la lettre ne prévoit pas d'évaluation pour les chefs de corps.

Dans cette perspective, il y a lieu d'examiner si le projet à l'examen est conforme à la Constitution.

Pour les fonctions à mandat non renouvelable, la question de savoir si une évaluation est nécessaire prête à discussion: en 1998, le législateur a estimé qu'une telle évaluation n'était pas nécessaire, ce qui se reflète dans la Constitution.

Le gouvernement estime toutefois, contrairement à l'avis du Conseil d'État, que l'article 151 de la Constitution n'interdit pas d'évaluer les chefs de corps.

Le législateur serait libre de prévoir une évaluation des chefs de corps.

Toutefois, le Conseil d'État est très clair dans son avis:

Selon lui, l'impossibilité de procéder à l'évaluation d'un mandat de chef de corps dans la magistrature assise est inscrite dans l'article 151, § 6, de la Constitution.

En effet, dès lors que les titulaires d'un mandat de chef de corps dans la magistrature assise mentionnés à l'article 151, § 5, alinéa 1er, de la Constitution ne sont pas visés dans l'article 151, § 6, ils ne peuvent être soumis à évaluation.

Il en résulte — toujours selon le Conseil d'État — que dans la mesure où il vise à soumettre les chefs de corps de la magistrature assise à l'évaluation, le projet de loi n'est pas compatible avec l'article 151 de la Constitution ni dans son esprit ni dans sa lettre.

À la lumière de cette prise de position claire du Conseil d'État, on peut s'étonner que la ministre maintienne tout simplement la disposition inconstitutionnelle.

Lors de l'audition en commission, le Conseil supérieur de la Justice a lui aussi invoqué des objections constitutionnelles.

M. Hugo Vandenberghe considère que le collège d'évaluation serait constitué de deux chefs de corps, de deux magistrats du Conseil supérieur de la Justice, d'un membre de la Cour des comptes et d'un « spécialiste en gestion des ressources humaines » nommé par le ministre de la Justice.

Parmi les six membres en question, il y en aurait donc deux qui ne seraient pas des magistrats, à savoir le membre de la Cour des comptes et le représentant du ministre nommé comme « spécialiste en gestion des ressources humaines ».

De plus, il faut aussi qu'un directeur général du Service public fédéral Justice émette un avis.

Le projet de loi introduit donc la possibilité d'influence « politique ».

Dans le « Juristenkrant » du 24 mai 2006, le professeur De Corte précise à cet égard que pareille proposition dépasse l'imagination et pose sérieusement la question de savoir si ceux qui exercent une responsabilité se trouvent bien à la bonne place. Il ajoute que le Constituant a eu la sagesse de soustraire les magistrats à toute forme de contrôle du pouvoir exécutif et a chargé en grande partie le législateur de veiller à cette protection constitutionnelle. Il se demande si la voie choisie dans le projet de loi à l'examen n'est pas l'ultime revanche du pouvoir exécutif.

Le Conseil d'État lui aussi s'interroge au sujet de la composition du collège d'évaluation.

Enfin, l'évaluation du chef de corps est indissociable d'une série d'obligations légales existantes et d'un certain nombre d'autres initiatives législatives, comme le plan Thémis.

Le plan Thémis proposé prévoit une gestion collégiale des entités judiciaires du siège et du parquet.

Cette gestion collégiale paraît difficilement conciliable avec le système complexe d'évaluation individuelle.

À propos de la durée du mandat, l'intervenant renvoie à l'intervention de M. Willems. Il est exact que la disposition prévue dans le projet équivaut à instaurer un mandat de dix ans que l'on interrompt après cinq ans. L'intention exacte du gouvernement n'est pas totalement clarifiée.

L'intervenant souhaite également renvoyer aux divers avis émis à propos du projet de loi à l'examen.

Il se déclare sensible aux remarques formulées par le ministère public et, en particulier, à la comparaison que celui-ci fait avec le mandat des chefs de corps de la police.

En effet, alors que l'instauration des mandats pour les fonctions dirigeantes dans les services de police et dans la magistrature trouve une même origine dans les réformes « Octopus » votées par le parlement en 1998, force est toutefois de constater qu'en ce qui concerne les services de police, les titulaires de fonctions, concernés par le système des mandats, disposent d'un mandat de cinq ans renouvelable sans limitation dans le temps, moyennant une évaluation positive.

Pourquoi les conditions pour devenir chef de corps dans la magistrature diffèrent-elles à ce point de celles applicables aux chefs de corps de la police ? Pourtant, l'accès à la magistrature est déjà subordonné à la détention d'un diplôme universitaire, à des conditions d'ancienneté et à la présentation d'un concours. Pourquoi le système appliqué pour la police ne peut-il pas être appliqué pour la magistrature ?

Le gouvernement devrait pouvoir justifier par des motifs pertinents pourquoi les statuts de chef de corps de police et de magistrat-chef de corps diffèrent. Sinon, il pourrait y avoir un problème au niveau du principe d'égalité.

En outre, se pose la question de savoir comment procéder à l'évaluation. Il y a une différence entre l'évaluation d'un chef de corps de la magistrature assise et celle d'un chef de corps de la magistrature debout.

Quels sont au juste les paramètres utilisés pour l'évaluation d'un procureur général et pour celle d'un premier président ?

Aujourd'hui, tout le monde est évalué en permanence, il existe une culture d'évaluation interne. Mais une évaluation réalisée par des personnes extérieures, opérant sur ordre du ministre, soulève des questions.

Une évaluation faite après dix-huit mois est assurément prématurée. Cette évaluation se résumera à du remplissage de papier. Il peut arriver dans des cas extrêmes qu'après dix-huit mois, on puisse par exemple constater que le chef de corps est incompétent, mais même alors, on n'a aucun moyen d'agir. L'intervenant trouve par contre utile d'avoir un entretien après dix-huit mois. Bénéficier d'un accompagnement dans l'exercice de fonctions à responsabilité est effectivement utile.

Enfin, l'intervenant se dit réservé à propos des mesures transitoires. Des mesures transitoires doivent être possibles, mais en l'espèce, le délai prévu est trop long. On se retrouve dans une situation inextricable avec trois statuts différents de chef de corps. L'intervenant pense que l'on reviendra sur la question à l'occasion de l'introduction du plan Thémis, qui situe l'évaluation du chef de corps dans une autre perspective.

M. Koninckx aimerait avoir des précisions sur la première évaluation prévue après dix-huit mois, qui lui paraît particulièrement précoce. Qu'espère-t-on en tirer ?

La ministre renvoie, en ce qui concerne la question de la constitutionnalité, à l'argumentation développée dans l'exposé des motifs.

Le gouvernement reste convaincu que ce qui n'est pas interdit formellement est autorisé.

L'oratrice souligne que ni le Conseil supérieur de la Justice, ni la Cour de cassation, ni la Conférence permanente des chefs de corps, ni les membres du ministère public n'ont relevé l'inconstitutionnalité du projet pour ce qui est de l'évaluation.

Le Conseil d'État, par contre, le fait. Cependant, l'interprétation que donne le gouvernement est tout aussi valable.

Quant à l'article paru dans le Juristenkrant, il adopte une position assez politique et prête à la ministre de la Justice une attitude qui n'engage que son auteur.

L'oratrice estime qu'il n'y a pas d'argument majeur pour s'opposer à l'introduction de l'évaluation des chefs de corps. Si l'on peut évaluer un juge dans le strict respect de son indépendance, pourquoi ne pourrait-on pas évaluer un président, sachant que l'évaluation ne porte jamais sur le contenu des décisions judiciaires ?

On parle beaucoup des critères de l'évaluation. Cependant, le § 1er, dernier alinéa, de l'article 3 du projet de loi, qui modifie l'article 259novies du Code judiciaire, prévoit que sur la proposition du Conseil supérieur de la Justice, le Roi détermine les critères d'évaluation et la pondération de ces critères compte tenu de la spécificité des fonctions et des mandats, et détermine les modalités d'application de ces dispositions.

Par conséquent, on peut s'attendre en la matière à un certain « sur mesure ».

Il est évident que pour un auditeur du travail ou un président du tribunal de commerce d'une petite juridiction, et pour un chef de corps dirigeant un corps beaucoup plus important, certains critères utilisés seront communs, et d'autres seront différents.

Ainsi, au tribunal de première instance de Nivelles, il y a dix-huit juges. À Bruxelles, il y en a cent et vingt. Les présidents de ces deux juridictions exercent, en théorie, le même métier, mais en pratique, il n'en est pas ainsi. Les exigences ne peuvent donc être les mêmes.

Mme de T' Serclaes fait observer qu'il existe déjà aujourd'hui un tel arrêté, mais qu'il ne s'applique pas aux chefs de corps. Va-t-on revoir cet arrêté, qui date de 2000 ?

La ministre répond que la balle sera dans le camp du Conseil supérieur de la Justice dès que la loi sera entrée en vigueur. Ce Conseil fera une proposition de critères par rapport aux chefs de corps, et l'on verra s'ils ne remettent pas sur le métier ceux relatifs aux magistrats de base.

Mme de T' Serclaes demande si le Roi est tenu de suivre la proposition qui sera formulée. La ministre répond que, jusqu'à présent, il l'a fait. Le contraire serait difficilement compréhensible. Quant aux mesures transitoires, elles résultent d'un choix politique.

La ministre fournit la réponse suivante.Pourquoi avoir prévu une première évaluation après dix-huit mois ? La philosophie qui sous-tend cette étape est de ne pas laisser un candidat devenu chef de corps sans le moindre suivi pendant cinq ans. Cette évaluation a été conçue comme un accompagnement, raison pour laquelle on a prévu des recommandations.

Aujourd'hui, il n'est pas possible de retirer un mandat en cas de gestion catastrophique.

Cependant, rien n'empêche le législateur de prévoir la révision de la Constitution dans le cadre de la possibilité d'introduire l'hypothèse du retrait de mandat.

Porter le débat sur le plan disciplinaire est un mauvais choix. Une personne peut, de bonne foi, s'avérer incapable de mener une bonne gestion, sans pour autant commettre des fautes professionnelles.

Quant au délai dans lequel doit avoir lieu l'évaluation, on est parti d'un délai de vingt-quatre mois.

Ensuite, on s'est demandé combien de temps il fallait pour permettre raisonnablement au collège d'évaluation de réaliser son travail pour les cent cinquante chefs de corps, et l'on a conclu que six mois étaient nécessaires. Le délai a donc été ramené à dix-huit mois.

Cette étape est vraiment conçue comme un moment clé où l'on permet à une équipe de voir avec la personne évaluée comment se passe la mise en œuvre de son plan de gestion.

C'est pourquoi on n'a pas prévu de mention d'insatisfaction, mais seulement des recommandations, pour rester dans la philosophie de l'évaluation telle qu'elle existe aujourd'hui.

Quant à la comparaison avec la situation dans la fonction de police, l'oratrice rappelle que la question ne relève pas de sa compétence. Elle fait toutefois observer que l'évaluation dans la fonction publique n'est pas conçue de la même manière que dans l'ordre judiciaire. Chaque catégorie professionnelle présente des spécificités, dont il faut tenir compte.

M. Mahoux souligne que, dans la police, les chefs de corps font l'objet d'une évaluation. Mme de T' Serclaes répond que leur mandat peut être renouvelé sans limite dans le temps. M. Hugo Vandenberghe évoque l'observation suivante fait par le service d'évaluation de la législation: « Le projet de loi crée un collège d'évaluation composé de deux chambres, l'une francophone et l'autre néerlandophone, chargées respectivement d'évaluer les chefs de corps francophones et néerlandophones, et qui comportent notamment une représentation, respectivement, des chefs de corps francophones et des chefs de corps néerlandophones. Cela ne pose-t-il pas de problème pour les tribunaux de la région de langue allemande (Eupen) ? »

La ministre ne pense pas qu'il y ait de problème pour les juridictions situées dans la région de langue allemande. Cela concerne en l'occurrence deux personnes qui seront évaluées par la chambre francophone.

M. Hugo Vandenberghe demande si la composition de la chambre francophone permet de procéder à l'évaluation d'un candidat de langue allemande. Y a-t-il parmi les évaluateurs une personne qui connaît l'allemand ?

La ministre répond que la composition proposée du Collège ne prévoit pas qu'un des membres soit bilingue légal avec connaissance des langues française et allemande.

M. Hugo Vandenberghe demande comment se fera concrètement l'évaluation d'un magistrat de langue allemande.

L'intervenant souligne qu'il faudra prendre connaissance de documents en langue allemande pour procéder à l'évaluation. De plus, l'évaluation est une procédure très personnelle et il importe de pouvoir s'exprimer dans sa langue maternelle. Si la personne qui fait l'objet de l'évaluation tient à s'exprimer dans sa langue, il serait malvenu dans un pays où l'on parle plusieurs langues de le lui refuser.

L'intervenant pense qu'un magistrat germanophone doit pouvoir demander que son évaluation se déroule en allemand.

La ministre rappelle que ces magistrats sont titulaires d'un diplôme délivré en français.

M. Hugo Vandenberghe admet que l'intéressé a un diplôme en français. Il n'en demeure pas moins qu'il jouit d'un statut légal et qu'il doit pouvoir s'exprimer en allemand.

M. Mahoux présume que c'est possible. On ne peut pas refuser à une personne de parler sa langue lorsque l'on procède à son évaluation. À tout le moins, le recours à un interprète ou à une traduction devrait-il être possible, lorsque le magistrat évalué le demande.

La ministre propose d'amender le texte sur ce point afin de prévoir le recours possible à un interprète. Il est difficile d'exiger la présence au sein du collège d'évaluation d'une personne connaissant l'allemand. Le nombre de chefs de corps s'exprimant également en langue allemande est très faible.

Mme Nyssens demande s'il n'est pas possible de prévoir une autre composition du collège d'évaluation lorsque la personne à évaluer parle allemand. Elle se réfère au régime disciplinaire des barreaux. Lorsqu'un avocat germanophone doit comparaître devant un organe disciplinaire, il est prévu une composition adaptée de cet organe car on a estimé que la personne avait le droit d'être entendue dans sa langue. Elle doute que la simple interprétation des débats soit une solution suffisante.

M. Mahoux pense qu'il est difficile d'exiger que la chambre francophone du collège d'évaluation soit composée d'un membre avec connaissance de l'allemand. Il fait le parallèle avec la composition du Conseil supérieur de la Justice pour lequel le nombre de candidats remplissant ce critère est tellement réduit que le Sénat n'a pas véritablement de choix lors de la désignation.

M. Hugo Vandenberghe souligne que l'évaluation aboutit à des décisions qui déterminent le statut personnel. Si l'intéressé fait valoir qu'il souhaite que la procédure se déroule dans une langue prévue par la Constitution, il n'est pas possible d'écarter cet argument pour des considérations pratiques. L'allemand est langue officielle en Belgique et Eupen-Malmedy est officiellement une région linguistique. Il n'est pas possible de faire se dérouler la procédure dans une langue autre que la langue officielle du territoire si l'intéressé exige que la procédure se fasse dans cette langue constitutionnelle-là. À Strasbourg par exemple, un dossier est toujours préparé et traité par une personne qui a une connaissance active de la langue du dossier en question.

La ministre suggère de s'inspirer de l'article 409, § 5, du Code judiciaire, qui concerne la discipline des magistrats et qui prévoit: « Lorsque le Conseil national de discipline ne compte aucun magistrat justifiant de la connaissance de la langue allemande conformément à la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire, comme membre effectif ou comme suppléant, et que la personne poursuivie disciplinairement demande à pouvoir s'exprimer en langue allemande, le magistrat le plus jeune est remplacé par un magistrat justifiant de la connaissance de la langue allemande désigné par tirage au sort dans la réserve visée au § 3, alinéa 5.

À défaut de magistrat justifiant de la connaissance de la langue allemande, il est fait appel à un interprète. ».

Le gouvernement déposera un amendement pour que le chef de corps qui souhaite s'exprimer en langue allemande puisse le faire et que le collège d'évaluation soit assisté d'un interprète, comme c'est prévu dans une matière aussi sensible que la discipline.

M. Mahoux pense que la solution proposée est élégante.

V. DISCUSSION DES ARTICLES

Intitulé

Le gouvernement présente l'amendement 29 (doc. Sénat, 3-1707/3), qui tend à modifier l'intitulé en fonction des amendements déposés.

Article 1er

Cet article ne donne lieu à aucune observation.

Article 1erbis

Amendement nº 1

Le gouvernement dépose l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à insérer un alinéa nouveau dans l'article 80 du Code judiciaire.

La loi du 15 mai 2006 modifiant la législation relative à la protection de la jeunesse et à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction a mis en place un nouveau système en cas de dessaisissement. Ces dossiers sont traités par des chambres spéciales du tribunal de la jeunesse dont deux membres doivent avoir suivi une formation spécialisée « jeunesse ».

Ce système pose un problème pratique pour la composition des chambres collégiales, principalement dans les petits arrondissements.

L'amendement vise à apporter une solution à ce problème en permettant aux premiers présidents de cour d'appel de désigner des juges de complément qui pourront exercer les fonctions de juge de la jeunesse. Le juge de complément désigné sur la base de l'article 80, al. 3 nouveau pourra travailler à temps partiel dans certains tribunaux et y assumer les fonctions de juge de la jeunesse. Il pourra également siéger dans les chambres collégiales. Cette solution permet par ailleurs d'éviter, dans les tribunaux où le nombre de juges de la jeunesse est limité, qu'un juge de la jeunesse siégeant dans la chambre spéciale à la suite d'un dessaisissement doive y traiter un dossier qu'il a connu précédemment.

La ministre précise que l'amendement étend l'objet du projet de loi dont l'intitulé devra être adapté.

Mme Nyssens comprend l'objectif de l'amendement. La modification proposée n'a rien à voir avec l'évaluation des magistrats. Elle demande si l'on profite du projet de loi à l'examen pour combler un oubli lors des modifications apportées à la loi sur la protection de la jeunesse.

La ministre le confirme. L'idée est de combler une lacune le plus rapidement possible. Le nouveau régime des chambres de dessaisissement entrera en vigueur le 1er septembre 2007 mais il faut disposer des délais suffisants pour ouvrir les places vacantes et pour les présentations par le Conseil supérieur de la Justice.

M. Hugo Vandenberghe fait remarquer qu'il faudra modifier l'intitulé du projet de loi si l'amendement est adopté.

Article 2

Observation générale

M. Hugo Vandenberghe souhaite profiter de l'occasion pour demander des précisions sur la portée des différents statuts des chefs de corps de lege data et une fois que le projet de loi sera devenu loi.

Les différents statuts seront les suivants:

A. Ceux qui étaient déjà chefs de corps au 1er avril 2000

Durée du mandat:

— nombre de mois ou d'années durant lesquels ils étaient déjà chefs de corps avant le 1er avril 2000;

— au 1er avril 2000, ils étaient réputés désignés comme chefs de corps pour une durée de sept ans à compter du 1er avril 2000;

— au terme de cette période de sept ans, ils peuvent, en concurrence avec d'autres candidats, poser leur candidature à un second mandat de chef de corps au sein de la même juridiction pour une nouvelle période de sept ans prenant cours le 1er avril 2007.

Traitement: s'ils ne sont pas candidats à un nouveau mandat de sept ans ou s'ils ne sont pas désignés à nouveau, ils conservent leur traitement de chef de corps jusqu'au jour de leur mise à la retraite, de leur démission, de leur destitution ou, le cas échéant, de leur nomination ou désignation à une autre fonction, même moins bien rémunérée, auquel cas ils perçoivent dès ce moment ce traitement inférieur.t

B. Ceux qui sont désignés chefs de corps après le 1er avril 2000

Durée du mandat: ils sont désignés pour une durée de sept ans, non renouvelable

Traitement: les anciens chefs de corps conservent leur traitement de chef de corps pendant deux ans, à moins qu'ils ne soient, avant l'expiration de ce délai, nommés ou désignés à une autre fonction, même moins bien rémunérée, auquel cas ils perçoivent dès ce moment ce traitement inférieur.

C. Ceux qui seront désignés après que le projet sera devenu loi

Durée du mandat:

— ils sont désignés pour une période de cinq ans;

— après une évaluation favorable, leur mandat est renouvelé pour une seconde période de cinq ans, sans mise en concurrence avec d'autres candidats.

Traitement: à l'expiration de leur mandat de chef de corps, ils perdent leur traitement de chef de corps.

Au sein de la deuxième catégorie (ceux désignés après le 1er avril 2000), il y aura une discrimination de plus après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Même si leur mandat de sept ans est maintenu, ils devront eux aussi être évalués (au même titre que ceux de la première catégorie). Tel n'est pas le cas pour les chefs de corps dont le mandat de sept ans expirera au plus tard le 31 août 2008 (ce qui vaut uniquement pour la deuxième catégorie).

On peut donc conclure à la coexistence, dans la législation actuelle, de deux catégories de chefs de corps qui, bien qu'exerçant des missions au contenu identique, sont soumis à des statuts différents:

— les chefs de corps désignés après le 1er avril 2000 sont discriminés par rapport à ceux qui ont été nommés avant cette date, dont le mandat de sept ans peut être renouvelé et qui peuvent donc être chefs de corps pendant X années + sept ans + sept ans, alors que les premiers ne peuvent l'être que pendant sept ans;

— les chefs de corps désignés après le 1er avril 2000 sont discriminés par rapport à ceux qui ont été nommés avant cette date et qui, au terme de leur mandat, conservent leur traitement de chef de corps jusqu'à leur mise à la retraite, à condition qu'ils ne soient pas nommés ou désignés à une autre fonction durant cette période, alors que les premiers ne conservent leur traitement que pendant deux ans, à condition également qu'ils ne soient pas nommés ou désignés à une autre fonction durant cette période.

Lorsque le projet de loi sera devenu loi, on sera même confronté à trois catégories de chefs de corps, soumises chacune à un statut spécifique, ce qui ne témoigne pas d'une vision politique très cohérente; à cela viendront s'ajouter les discriminations suivantes:

— les chefs de corps nommés après le 1er avril 2000 sont victimes d'une discrimination par rapport à ceux nommés après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, parce que le mandat de cinq ans de ces derniers est reconductible pour cinq ans, sans ouverture d'emploi, et parce qu'ils ont donc la possibilité d'être chefs de corps pendant cinq ans + cinq ans, alors que les premiers cités ne peuvent l'être que pendant sept ans, sans possibilité de reconduction.

— avec l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, les chefs de corps nommés après le 1er avril 2000 sont victimes d'une discrimination par rapport à ceux de la même catégorie dont le mandat expire au plus tard le 30 juin 2008 et qui, contrairement aux premiers cités, ne doivent pas subir d'évaluation;

— les chefs de corps nommés avant le 1er avril 2000 sont victimes d'une discrimination par rapport à ceux nommés après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, parce que le mandat de cinq ans de ces derniers est reconductible pour cinq ans, sans ouverture d'emploi, alors que les premiers cités qui souhaitent prolonger leur mandat doivent entrer en compétition avec d'autres candidats.

Il y a tout lieu de se demander si toutes ces discriminations résisteront au contrôle de la Cour d'arbitrage.

M. Willems demande des précisions au sujet des chefs de corps nommés après le 1er avril 2000. S'ils se portent ensuite candidats à un nouveau mandat, la reconduction se fera-t-elle pour une nouvelle période de sept ans ?

La ministre répond par l'affirmative.

M. Hugo Vandenberghe attire l'attention sur le fait que le projet de loi à l'examen instaure en fait un mandat de dix ans, avec une évaluation intermédiaire. En effet, aucun poste n'est vacant après cinq ans. Il y a donc une première nomination de cinq ans, avec une possibilité de prolonger le mandat jusqu'à dix ans.

M. Mahoux fait remarquer que dans tous les secteurs de la fonction publique, il y a des régimes qui se côtoient en fonction de la date d'application des modifications apportées aux statuts. Il faut en l'occurrence tenir compte de la double démarche du gouvernement qui vise d'une part à apporter des modifications au statut des chefs de corps sur le plan de la durée du mandat et de l'évaluation, tout en garantissant d'autre part le maintien des droits des chefs de corps en place. Il est inévitable d'être confronté, durant une période intermédiaire, à des statuts différents puisque l'on tente de concilier les objectifs de changement et du maintien des droits acquis.

Discussion

M. Hugo Vandenberghe souligne que ce très long article, qui tend à modifier l'article 259quater, vise à instaurer un nouveau régime en matière de délais et une alternance linguistique. Deux problèmes se posent:

1. L'intervenant cite l'exemple d'un magistrat néerlandophone nommé pour cinq ans en qualité de président du tribunal de première instance de Bruxelles. Au même moment, un magistrat francophone est nommé en qualité de procureur du Roi auprès du même tribunal. Que se passera-t-il si le président néerlandophone obtient une évaluation négative après cinq ans, et n'entre donc pas en ligne de compte pour un nouveau mandat de cinq ans, alors que le procureur du Roi obtient une évaluation positive et reste donc en fonction pendant dix ans au total ? Cela signifie-t-il que la vacance de la fonction de président du tribunal ne sera accessible qu'aux néerlandophones ?

En outre, dix ans plus tard, le procureur du Roi francophone devra avoir un successeur néerlandophone. Est-ce à dire que le président nommé pour le second mandat de cinq ans ne pourra pas obtenir de prolongation de son mandat ? L'article 2 règle-t-il ce cas de figure ?

L'intervenant pense que non.

2. L'intervenant renvoie à l'amendement nº 2 g) du gouvernement à l'article 2, 8º, qui fait référence à l'article 319 du Code judiciaire. Un problème d'équilibre linguistique peut éventuellement se poser en la matière. La conséquence de l'amendement est que l'équilibre linguistique peut être rompu en cas de départ anticipé, le premier président de la Cour de cassation et le procureur général étant dans ce cas du même rôle linguistique. Le président bénéficie d'un mandat adjoint. Si le premier président renonce à son mandat avant l'échéance normale de celui-ci, le titulaire du mandat adjoint, qui est d'un autre rôle linguistique que le premier président, devient automatiquement premier président. Cela signifie que le premier président et le procureur général seraient du même rôle linguistique. On réserve dès lors à la Cour de cassation un traitement de solution intermédiaire autre qu'aux autres cours et tribunaux.

La ministre fait remarquer que c'est à la demande de la Cour de cassation qu'un régime différent est prévu.

M. Hugo Vandenberghe pense qu'il n'est pas souhaitable que les deux chefs de corps à la Cour de cassation soient du même rôle linguistique, même pour une période intermédiaire. La question n'est pas d'ordre purement technique. Il ne faut pas perdre de vue qu'ils assurent la représentation officielle du pouvoir judiciaire. Ils exercent également un pouvoir disciplinaire. Le système proposé par le gouvernement risque de causer de nombreuses difficultés.

Il y a d'autre part une utilisation inappropriée des mandats adjoints.

Mme de T' Serclaes demande pourquoi ne pas désigner un suppléant qui remplacerait le chef de corps en cas de cessation prématurée du mandat du chef de corps.

M. Hugo Vandenberghe souligne qu'un mandat adjoint est renouvelable, alors que l'on est nommé pour une période de cinq ans à la Cour de cassation. Dans l'exemple cité par l'intervenant, le procureur général et le premier président de la Cour de cassation seraient du même rôle linguistique en cas de nomination intermédiaire. Ce genre d'enseigne unilatéralement unilingue donnera lieu à une question linguistique.

La ministre confirme que le gouvernement souhaite instaurer un régime particulier pour la Cour de cassation en réinstaurant la quadruple alternance. La première alternance est celle entre le premier président de la Cour de cassation et le procureur général. La seconde alternance est celle entre le premier président et le président, qui sont de rôles linguistiques différents. La même chose vaut pour le ministère public où le procureur général et le premier avocat général appartiennent à des rôles linguistiques différents.

Le gouvernement propose à cet effet de créer des mandats particuliers pour les mandats adjoints. La durée du mandat est de cinq ans, non renouvelable. En cas de départ prématuré de chef de corps, celui qui occupe le mandat adjoint ne monte pas. Tout dépend du moment auquel la vacance s'ouvre. Si c'est dans les deux dernières années du mandat, on applique l'article 319, alinéa 2, et c'est le magistrat le plus ancien qui fait fonction de chef de corps. Si la vacance intervient durant les trois premières années du mandat, c'est l'article 287 du Code judiciaire qui s'applique et l'on désigne le chef du corps après intervention du Conseil supérieur de la Justice.

Mme de T' Serclaes constate qu'il y a un premier président et un président à la Cour de cassation. Où faut-il situer les mandats adjoints par rapport à ces fonctions ?

La ministre répond que l'article 58bis, 3º du Code judiciaire définit les mandats adjoints. Ce sont les mandats de vice-président au tribunal de première instance, au tribunal du travail et au tribunal de commerce, premier substitut du procureur du Roi, premier substitut de l'auditeur du travail, (...) président de chambre à la cour d'appel et à la cour du travail, premier avocat général et avocat général près la cour d'appel et la cour du travail, (...) président et président de section à la Cour de cassation et premier avocat général près la Cour de cassation.

M. Hugo Vandenberghe pense que c'est le renvoi à l'article 319, alinéa 2, du Code judiciaire qui pose problème

M. Hugo Vandenberghe cite l'article 319, alinéa 2, du Code judiciaire, qui dit que: « Lorsque le chef de corps omet de désigner un remplaçant, il est remplacé par un titulaire d'un mandat adjoint dans l'ordre d'ancienneté de service ».

La difficulté réside dans le fait que la Cour de cassation ne compte qu'un seul titulaire de mandat adjoint.

La ministre fait remarquer que le président de section à la Cour de cassation exerce également un mandat adjoint.

L'article 319 du Code judiciaire règle le problème de l'empêchement et du remplacement du chef de corps. La règle est que le chef de corps qui est empêché désigne son remplaçant. Lorsqu'il ne peut pas le désigner, c'est le plus ancien dans les personnes titulaires d'un mandat adjoint qui le remplace.

Le gouvernement propose de créer un nouveau type de mandat adjoint pour le président de la Cour de cassation, mais il en existe d'autres (voir article 58bis du Code judiciaire).

M. Hugo Vandenberghe ne comprend pas pourquoi créer un nouveau mandat adjoint pour le président de la Cour de cassation car il est déjà visé à l'article 58bis, 3º du Code judiciaire.

La ministre renvoie à l'article 319, alinéa 3, du Code judiciaire qui précise que le remplaçant doit satisfaire aux mêmes conditions linguistiques que le chef de corps. En d'autres termes, le président, qui appartient à l'autre rôle linguistique que le premier président en vertu du principe d'alternance, ne peut pas remplacer le chef de corps.

Dans le modèle proposé, si le mandat de premier président prend subitement fin de manière prématurée, le remplaçant sera le titulaire d'un mandat adjoint le plus ancien qui appartient au même rôle linguistique.

Mme de T' Serclaes demande si, au § 6, alinéa 2, proposé, il ne faut pas également renvoyer à l'article 319, alinéa 3.

M. Hugo Vandenberghe souligne que l'on fait maintenant du mandat adjoint du président un mandat sui generis. S'il est déjà mentionné à l'article 58bis que le président bénéficie d'un mandat adjoint, pourquoi faut-il que l'amendement le dise à nouveau ?

M. Mahoux résume le régime proposé comme suit: si le remplacement intervient au cours de la première partie du mandat du chef de corps, on suit la procédure de présentation par le Conseil supérieur de la Justice. Si le remplacement a lieu au cours des deux dernières années du mandat, le remplacement est réglé par le Code judiciaire: c'est le magistrat titulaire d'un mandat adjoint le plus ancien et faisant partie du même rôle linguistique que la personne à remplacer qui est désigné. Il se demande pourquoi créer le poste d'adjoint alors qu'il n'a pas de rôle particulier et qu'il n'est pas amené à remplacer le président défaillant.

La ministre souhaite préciser une de ses déclarations antérieures: le mandat du président de la Cour de cassation existe déjà. Le projet ne crée pas ce mandat. Ce qui est nouveau, c'est le caractère temporaire de ce mandat.

À l'heure actuelle, le titulaire d'un mandat adjoint est désigné pour une période de trois ans, avec évaluation. Si l'évaluation est positive, le mandat est prolongé. On a un système de désignation de trois/six/neuf années qui aboutit ensuite à une nomination à titre définitif en cas d'évaluation positive.

Pour le mandat adjoint de président de la Cour de cassation et le mandat adjoint de premier avocat général de la Cour de cassation, le projet abandonne le système trois/six/neuf au profit d'un système de mandat de cinq ans, non renouvelable. Cela permet de garantir une alternance linguistique horizontale et verticale à la tête de la Cour de cassation.

En cas de vacance prématurée pour le mandat de premier président ou de procureur général, l'exigence d'appartenance au même rôle linguistique a pour effet que ce n'est pas le président ou le premier avocat général qui monte, mais une autre personne, le cas échéant, le magistrat le plus ancien du rôle linguistique de la personne à remplacer.

Pour ne pas pénaliser celui qui occupe le mandat adjoint de président ou de premier avocat général, il est prévu qu'il retrouve la place qui était la sienne précédemment. Il redevient par exemple président de section et continue son ancien mandat adjoint selon le cycle trois/six/neuf/définitif.

M. Willems souligne qu'il n'est question, dans le commentaire de l'article 2, que du mandat adjoint non définitif. Il est clairement mentionné que le chef de corps qui, au moment de sa désignation à ce mandat, était désigné dans un mandat adjoint non définitif, réintègre ce mandat adjoint soit d'office soit à sa demande. Qu'en est-il si, avant d'être nommé chef de corps, il était déjà désigné dans un mandat adjoint définitif ? N'est-il pas autorisé à le réintégrer ?

La ministre répond qu'à l'heure actuelle, seul le magistrat nommé dans un mandat adjoint définitif retrouve son mandat. Le projet veut garantir à la personne titulaire d'un mandat adjoint, qu'il soit définitif ou temporaire, de retrouver son mandat adjoint de telle manière que le fait d'avoir occupé un mandat de chef de corps ne soit pas pénalisant. Le projet adapte le Code judiciaire pour y introduire l'hypothèse du mandat adjoint temporaire. C'est cette hypothèse qui est expliquée dans le commentaire de l'article.

Le régime actuel est pénalisant pour les magistrats titulaires d'un mandat adjoint qui n'ont pas été nommé définitivement. Ces personnes ne retrouvent pas leur mandat adjoint mais doivent reprendre une fonction de base. Le projet veut corriger cela en visant à la fois les magistrats nommés dans un mandat adjoint définitif et ceux nommés dans un mandat adjoint temporaire.

M. Hugo Vandenberghe fait la comparaison avec un parlementaire qui n'est pas réélu.

M. Willems aimerait avoir des précisions sur le cadre du tribunal. Si le chef de corps revient exercer son mandat, est-il en surnombre ? Dans l'intervalle, il aura en effet été remplacé dans son mandat adjoint.

La ministre confirme que la personne est en surnombre. C'est le prix à payer si l'on ne veut pas défavoriser les personnes qui acceptent de prendre le risque de devenir chef de corps.

M. Hugo Vandenberghe estime que la juxtaposition de tous ces divers statuts rend un plan de carrière quasi impossible. Plus on complexifiera le statut, plus on risquera que les juristes intéressants évitent la magistrature.

L'intervenant n'est dès lors plus persuadé que le système fera en sorte que les meilleurs juristes se retrouvent aux postes les plus adéquats. Il faut tenir compte du fait que la jeune génération porte un autre regard sur une carrière qu'autrefois; elle fait une analyse coûts-bénéfices. Avec un statut à ce point complexe et différencié, l'intervenant nourrit quelque inquiétude pour le bon fonctionnement du pouvoir judiciaire. Si l'on dépasse un certain degré de complexité, on ne parvient plus à atteindre l'équité. Le système proposé est par trop complexe. On aurait dû élaborer un statut uniforme.

En ce qui concerne la carrière des magistrats, la ministre précise que le Conseil supérieur de la Justice mène une réflexion sur ce thème et formulera des propositions. Il est vrai que les magistrats ne disposent pas de la maîtrise de leur carrière. La question de l'évaluation n'est pas perçue comme un frein pour la fonction de chef de corps.

M. Hugo Vandenberghe signale que les chefs de corps se plaignent de l'évolution des mentalités au sein des corps. Les magistrats font preuve de moins de flexibilité et de souplesse. Ils attribuent cela à la formalisation et à la standardisation croissantes et la mise en place des évaluations.

La formalisation et l'évaluation génèrent une autre culture. On fait uniquement ce que prescrit la loi. Il faut toutefois bien se rendre compte qu'en passant de 9 à 5, on sonne le glas du pouvoir judiciaire. Celui-ci fonctionnait convenablement, précisément parce que des magistrats étaient prêts à travailler 7 jours sur 7. Ce n'est plus possible dès lors que l'on crée des conditions où les chefs de corps doivent en fait donner des ordres. La réglementation proposée poursuit indubitablement de nobles objectifs, mais le risque n'est pas imaginaire de voir la magistrature adopter une attitude formaliste.

M. Willems note qu'il faut maintenir la cohérence par rapport aux autres législations (par exemple le traitement des plaintes devant le Conseil supérieur de la justice, l'accent étant mis sur l'indépendance du pouvoir judiciaire).

Mme de T' Serclaes pense que la règle de l'alternance linguistique, qui est difficile à mettre en place au niveau de la Cour de cassation, est encore plus compliquée à réaliser au niveau des juridictions bruxelloises. Elle rappelle que le projet propose des mandats de cinq ans, renouvelable une fois. Elle évoque l'hypothèse d'un président du tribunal de première instance du rôle linguistique francophone qui ne demande pas le renouvellement de son mandat après cinq ans alors que le procureur du Roi, du rôle linguistique néerlandophone, le ferait. On devra, dans ce cas, procéder au remplacement du président. Quel sera le rôle linguistique du remplaçant ? Le remplaçant, qui est désigné pour cinq ans, a-t-il la possibilité d'obtenir le renouvellement de son mandat pour rester en place dix ans ?

M. Hugo Vandenberghe demande si le projet de loi règle cette hypothèse. Il pense que le mandat du remplaçant est de cinq ans, non renouvelable. En effet, le premier président francophone a un mandat de cinq ans, renouvelable. Si après cinq ans, le mandat n'est pas renouvelé, il faut remplacer le premier président francophone par un autre magistrat francophone. Ce dernier ne peut cependant pas demander la prolongation de son mandat jusqu'à dix ans, sous peine de ne plus respecter l'équilibre linguistique. Le mandat du premier magistrat désigné est en fait un mandat de dix ans.

Cependant, s'il n'est pas renouvelé après cinq ans, c'est la personne qui le remplace qui achève le mandat de son prédécesseur.

M. Mahoux pense qu'il y a des conditions particulières pour la région bruxelloise car il faut respecter les équilibres linguistiques. Cela ne change rien au principe fondamental du mandat de cinq ans, renouvelable. Ce n'est pas un mandat de dix ans.

Certains magistrats pourront rester en place pendant dix ans, à condition que leur mandat soit renouvelé après cinq ans. D'autres ne pourront rester en place que cinq ans, soit parce que leur évaluation aura été « insuffisante » ou en raison de contraintes linguistiques spécifiques.

Amendement nº 2

La ministre renvoie à la justification écrite de l'amendement nº 2 du gouvernement (doc. Sénat, nº 3-1707/2). Les différentes hypothèses possibles sont évoquées, notamment lors de la fin anticipée du mandat au cours du premier ou du second mandat. L'exigence linguistique est une condition complémentaire supérieure et il faut que la situation bascule après dix ans. Cette formule existe déjà depuis 1998 pour Bruxelles.

Mme de T' Serclaes constate que l'amendement nº 2 du gouvernement (doc. Sénat, nº 3-1707/2) renvoie, pour ce qui concerne le remplaçant, à l'article 319, alinéa 2, du Code judiciaire. Elle pense qu'il faudrait également renvoyer l'alinéa 3 qui est plus explicite quant aux conditions linguistiques auxquelles le remplaçant doit satisfaire.

La ministre pense que la référence à l'article 319, alinéa 3, n'est pas indispensable car l'alinéa 6 du § 6 proposé au littéra G de l'amendement nº 2 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) précise que seuls les candidats qui satisfont aux mêmes conditions linguistiques que le chef de corps dont le mandat prend fin prématurément peuvent poser leur candidature.

M. Hugo Vandenberghe fait remarquer que l'expression « satisfaire aux mêmes conditions linguistiques que le chef de corps » ne signifie pas nécessairement « appartenir au même rôle linguistique que le chef de corps ».

L'intervenant souligne que les mots « satisfaire aux mêmes conditions linguistiques » signifient que le bilinguisme est requis. Cela ne signifie pas être du même rôle linguistique.

En effet, il n'y a pas de rôles linguistiques au sein des cours d'appel et de la Cour de cassation. L'article 319, alinéa 3, fait état de conditions linguistiques, et ne concerne pas le rôle linguistique. L'amendement à l'examen vise le rôle linguistique.

Mme de T' Serclaes pense que par « même condition linguistique » on entend que le candidat doit être bilingue. Cela ne signifie pas que le candidat doit être du même rôle linguistique que le chef de corps dont le mandat prend fin prématurément.

La ministre précise que l'expression « même condition linguistique » figure déjà dans le Code judiciaire. Elle renvoie à la version actuelle de l'article 259quater, § 6.

M. Hugo Vandenberghe conclut qu'il faut chercher une formulation pour préciser que le président et le procureur général doivent être de rôles linguistiques différents. Il faut maintenir la différence de langue en cas de remplacement du premier président ou du procureur général.

La ministre répond comme suit aux observations des membres.

L'alternance linguistique est prévue dans la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire (art. 43 et ss.).

Le projet de loi ne modifie pas ces règles. C'est ainsi que tous les postes déclarés vacants au 1er avril 2007 tombent dans le champ d'application de la loi de 1935.

Le texte prévoit que « les présidents ... doivent appartenir, selon leur diplôme, à un régime linguistique différent ».

Dans le Code judiciaire, on a prévu la durée du mandat, les règles pour l'ouverture de celui-ci, et, en cas de vacance prématurée, les règles de remplacement.

Comme déjà indiqué, s'il y a plus de deux années à accomplir, ou si c'est une vacance très nettement prématurée, il y aura soit application de l'article 287 du Code judiciaire (appel aux candidats, intervention du Conseil supérieur de la Justice), et s'il reste moins de deux ans avant la fin du mandat, c'est l'article 319 qui s'appliquera. Selon cet article, c'est soit le titulaire d'un mandat adjoint s'il en existe dans la juridiction, soit le plus ancien des magistrats qui est le représentant. L'alinéa 3 du même article prévoit que les remplaçants doivent remplir les mêmes conditions linguistiques que le magistrat qu'ils remplacent.

Le projet à l'examen modifie l'article 43quater de la loi précitée de 1935, en y introduisant une modification prévoyant que les premiers président et président, procureur général, et premier avocat général près la Cour de cassation doivent appartenir à un régime linguistique différent.

Le projet contient également une modification de l'article 43, § 4, de la loi de 1935, en ce qui concerne les auditeurs du travail, car, à Bruxelles, l'auditeur du travail avait été oublié dans l'alternance linguistique.En effet, à l'époque où l'on avait envisagé d'intégrer l'auditorat du travail dans le parquet du procureur du Roi, l'on avait jugé inutile de prévoir l'alternance linguistique. Elle est donc rétablie.

Amendement nº 13

Mme de T' Serclaes dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 13), prévoyant la limitation du mandat à cinq ans non renouvelable pour la Cour de cassation. Cet amendement est retiré au profit de l'amendement nº 2 du gouvernement.

À propos de l'article 2, 1º, le service d'Évaluation de la législation fait observer ce qui suit: « Immédiatement/onmiddellijk: cette précision est superfétatoire, à tout le moins en néerlandais, puisque c'est l'essence même de la notion de prolongation (verlengbaar). De plus, en précisant qu'un mandat peut être prolongé immédiatement une seule fois, on ouvre la voie à d'autres interprétations (de nouveaux mandats sont possibles, à condition qu'ils ne se suivent pas sans interruption). »

La ministre ne partage pas ce point de vue. L'idée est bien qu'à la fin de son mandat, le chef de corps peut à nouveau être désigné (« renouvelé ») dans la place qu'il occupe, soit au siège, soit au parquet. Il va de soi qu'un chef de corps peut postuler un mandat de chef de corps auprès d'une autre juridiction, mais, demain, il doit être autorisé à postuler immédiatement le même mandat. La précision n'est donc pas superflue.

En ce qui concerne l'article 2, 3º, le service d'Évaluation observe que, puisqu'on précise dans l'alinéa premier du § 3bis proposé que le mandat ne s'ouvre pas si le titulaire en demande le renouvellement, il n'est pas logique, au deuxième alinéa, de renvoyer, dans cette hypothèse, à la date d'ouverture du deuxième mandat.

Le texte renvoie d'abord deux fois à la commission de nomination, puis, la troisième fois, à la commission de nomination et de désignation.

Il est donné suite à ces observations par l'amendement nº 2, c) à e), du gouvernement.

Le service d'Évaluation fait encore observer que l'article 2, 4º, dernier alinéa, n'est, quant à son contenu, pas à sa place à l'article 259quater, § 4.

La ministre répond, en ce qui concerne l'alinéa 1er, que cette disposition figure déjà actuellement à cette place dans le Code. On a donc gardé la même structure.

Quant à l'alinéa 2, on reprend le mode d'attribution du mandat et ses conséquences dans le même article, et l'on a suivi une logique qui existe déjà dans le Code judiciaire, à l'article 323bis.

À propos de l'article 2, 8º, avant-dernier alinéa, le service d'Évaluation de la législation fait observer ce qui suit:

Les mots « prend fin » ne correspondent pas à l'expression « een einde wordt gemaakt »;

« À l'expiration de cette période » doit être traduit par « Bij het verstrijken » (et non pas par « Na het vestrijken » (après l'expiration)). Est-ce d'ailleurs à l'expiration ou six mois avant l'expiration ? De manière plus générale, l'article 259quater s'applique-t-il dans son intégralité à cette hypothèse ?

La ministre répond que ces deux observations deviennent sans objet par suite du dépôt de l'amendement nº 2 du gouvernement.

À propos de l'article 2, 8º, dernier alinéa, le service d'Évaluation de la législation se demande s'il s'agit d'une déchéance ou d'une irrecevabilité, étant donné que les termes français et néerlandais de la disposition divergent sur ce point.

Le représentant de la ministre répond qu'il s'agit d'une irrecevabilité.

Amendement nº 38

Le gouvernement dépose l'amendement nº 38 (doc. Sénat, nº 3-1707/4), qui vise à modifier l'article 259quater, § 2, du Code judiciaire.

Les premiers présidents des Cours d'appel ont attiré l'attention sur les difficultés auxquelles l'article 259quater, § 2, peut aboutir. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que le ministre de la Justice demande une série d'avis en cas de postulations pour un mandat de chef de corps. Lorsque le chef de corps sortant figure parmi les candidats, on fait appel à un remplaçant qui est soit le titulaire d'un mandat adjoint le plus ancien, soit, à défaut de mandat adjoint au sein de la juridiction, le magistrat le plus ancien. Or, il est assez curieux de demander à un juge ou à un substitut de rendre un avis sur la candidature de son propre chef de juridiction.

Cette situation étant peu idéale, l'amendement propose dans une telle hypothèse de se passer de cet avis et de faire appel à l'avis du supérieur hiérarchique.

Pour la Cour de cassation, où il n'y a pas de supérieur hiérarchique, c'est l'assemblée générale qui rendra un avis. Pour le procureur fédéral, c'est le président du collège des procureurs généraux qui rendra l'avis.

La ministre cite l'exemple d'une petite juridiction comprenant trois magistrats. Si le chef sortant présente sa candidature et qu'il entre en concurrence avec un autre magistrat de la juridiction, ce serait le troisième magistrat de la juridiction qui serait appelé à remettre un avis sur son chef de corps et son collègue. Une telle situation n'est pas saine.

La ministre précise que l'amendement permettra également de rencontrer l'hypothèse dans laquelle, après l'adoption du projet de loi à l'examen, la commission de nomination et de désignation refuserait de renouveler le mandat du chef de corps sortant, bien qu'il ait bénéficié d'une évaluation satisfaisante de la part du collège d'évaluation. Le chef de corps sortant pourrait décider de, malgré tout présenter sa candidature et devrait, dans ce cas, faire l'objet d'un avis émanant d'un magistrat de la juridiction si l'on ne modifie pas l'article 259quater, § 2.

Amendement nº 24

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 24 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à supprimer au 1º de l'article 2 les mots « une seule fois ».

L'auteur renvoie à sa justification écrite.

Amendement nº 14

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 14 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à remplacer le 5º afin de compléter les possibilités de sortie de leur mandat pour les chefs de corps.

Amendement nº 15

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 15 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à apporter une correction technique au 6º de l'article à la suite de l'amendement nº 2 du gouvernement (doc. Sénat, nº 3-1707/2).

Amendement nº 33

Mme de T' Serclaes dépose l'amendement nº 33 (doc. Sénat, nº 3-1707/3) qui découle de l'amendement nº 32 qu'elle dépose à l'article 3. Il est renvoyé pour le surplus à la discussion de l'amendement nº 32.

Amendement nº 42

M. Hugo Vandenberghe dépose l'amendement nº 42 (doc. Sénat, nº 3-1707/4), qui tend à remplacer l'article 259quater proposé.

Lors de la discussion générale de l'avant-projet, des questions fondamentales ont été soulevées au sujet de la constitutionnalité de l'évaluation des chefs de corps, notamment ceux de la Cour de cassation.

L'argumentation du Conseil d'État est la suivante à ce propos:

« Étant donné les modalités de désignation des chefs de corps appelés à faire partie des chambres du collège d'évaluation, il est plus que vraisemblable que les chefs de corps de la Cour de cassation seront amenés à être évalués par des chefs de corps issus de cours ou tribunaux de degré inférieur. Compte tenu de la place particulière qu'occupe la Cour de cassation par rapport aux autres cours et tribunaux de l'ordre judiciaire ainsi que de son rôle d'autorité disciplinaire à l'égard des autres membres de la magistrature assise, en ce compris précisément les chefs de corps des cours et tribunaux, le Conseil d'État se demande, sous réserve des observations qui précèdent, si ces spécificités ne devraient pas conduire l'auteur de l'avant-projet de loi à s'interroger sur la pertinence de l'application aux chefs de corps de la Cour de cassation d'un système d'évaluation tel que celui envisagé par les dispositions en projet. »

Il convient en outre de souligner que le président de la plus haute juridiction, c'est-à-dire le numéro un d'un des trois pouvoirs de l'État, serait soumis à une évaluation par un « spécialiste des ressources humaines ». (voir R. De Corte, Juristenkrant du 24 mai 2006)

Enfin, par son amendement nº 12, le gouvernement a limité à cinq ans le mandat de premier président de la  Cour de cassation et celui de procureur général près la Cour de cassation, ce qui pose une fois de plus la question de l'utilité de l'évaluation prévue.

À la lumière de ce qui précède, cet amendement tend à supprimer l'évaluation des chefs de corps près la Cour de cassation.

Article 2bis (nouveau)

Amendement nº 3

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 3), tendant à insérer dans le projet de loi un article 2bis (nouveau).

Le dispositif proposé concerne les mandats adjoints près la Cour de cassation, à la fois pour le président et pour le premier avocat général.

Pour ceux-ci, comme pour les chefs de corps, l'exigence est posée de pouvoir accomplir un mandat complet.

Une évaluation est également maintenue à l'issue de la cinquième année, malgré le caractère non renouvelable du mandat, étant donné que, théoriquement, les intéressés peuvent postuler une autre place. De plus, l'évaluation du Président de la Cour de cassation est rendue obligatoire par l'article 151 de la Constitution.

La règle est également le retour au mandat adjoint auquel ils avaient été nommés, à l'issue de mandat de cinq ans.

En effet, parmi les mandats adjoints figurent le poste de président à la Cour de cassation, mais également celui des présidents de section de la Cour de cassation. C'est pourquoi il a fallu prévoir cette règle selon laquelle un titulaire de mandat adjoint peut retrouver un autre mandat adjoint à l'issue de son premier mandat adjoint à durée déterminée.

À défaut, une personne désignée comme président à la Cour de cassation pour cinq ans, et qui était auparavant président de section, perdrait ce dernier poste, et se retrouverait conseiller à la Cour de cassation.

L'amendement permet donc de faire en sorte que le fait d'accepter le poste de président ne soit pas préjudiciable au candidat.

Mme de T' Serclaes demande ce qu'il advient s'il n'y a pas de mandat adjoint disponible.

La ministre répond que le c) de l'article 2bis prévoit un surnombre, qui disparaîtra lorsqu'un mandat de même rang deviendra vacant.

Article 3

Amendement nº 4

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 4), tendant à modifier l'article 3 qui, en ses §§ 2 à 8, concerne les magistrats de base et, en son § 9, traite de l'évaluation des chefs de corps.

Il est proposé d'adapter cet article, en ce qui concerne les chefs de corps qui remplacent un chef de corps sortant dans le cadre d'une vacance prématurée, en limitant l'évaluation à l'évaluation finale, étant entendu que le point de départ est le premier jour du mandat du chef de corps sortant.

Mme de T' Serclaes constate que ce système ne concerne que Bruxelles, compte tenu des conditions linguistiques particulières qui s'y appliquent, et qu'il y a lieu de prévoir, par conséquent, la continuation du mandat en cours.

La ministre le confirme. Dans une autre juridiction, en cas de départ prématuré du chef de corps, le poste est déclaré vacant, et le Conseil supérieur de la Justice propose un candidat. À Bruxelles, par contre, il existe un cadre légal qui exige que, l'alternance linguistique primant, l'on doive établir des règles particulières pour les chefs de corps de ces juridictions.

À propos de l'article 3, §§ 5 et 6, le service d'Évaluation de la législation fait observer que le dernier alinéa du § 5 règle la rédaction d'une évaluation écrite définitive, mais sans préciser de délai. Le premier alinéa du § 6 proposé, par contre, impose la communication de l'évaluation dans un délai déterminé après réception des observations sur l'évaluation provisoire.

Il serait plus logique d'imposer d'abord un délai pour la rédaction de l'évaluation, et ensuite, le cas échéant, pour sa communication (voir par exemple le § 9, alinéas 5 et 6, « dans les mêmes délais »).

La commission ne juge pas utile de modifier le texte sur ce point.

À propos de l'article 3, § 9, deuxième alinéa, le service d'Évaluation de la législation fait remarquer que le « résultat de l'évaluation » est traduit par « het resultaat van de evaluatie », alors que le texte néerlandais parle systématiquement de « de beoordeling ». Et est-ce le résultat qui doit être motivé ou l'évaluation définitive elle-même ?

La ministre répond que cette remarque devient sans objet dans le cadre de l'amendement nº 4 du gouvernement.

Amendements nos 25 et 31

Mme de T' Serclaes dépose un amendement (doc.Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 25), tendant à modifier l'article 3.

Cet amendement concerne la première évaluation au terme d'une période de dix-huit mois. Cette évaluation n'est pas de même nature que celle prévue en fin de mandat, mais doit permettre au chef de corps de se sentir conforté dans l'exécution de son mandat, et de discuter avec le corps d'évaluateurs, en évoquant ses difficultés éventuelles et en recevant, s'il y a lieu, des suggestions de la part de ces évaluateurs quant à la mise en œuvre de son plan de gestion.

M. Willems renvoie à l'expression « follow-up gesprek » qui figure dans le texte néerlandais de l'amendement. L'intervenant déclare qu'en ce qui concerne le management dans les pouvoirs publics, on distingue l'« entretien fonctionnel » de l'« entretien d'évaluation ». L'on vise sans doute en l'occurrence un entretien fonctionnel en vue d'apprendre comment le chef de corps remplit au juste son mandat. M. Willems estime préférable d'adopter la terminologie utilisée actuellement dans les pouvoirs publics.

L'amendement nº 25 est retiré au profit de l'amendement nº 31 (doc. Sénat, nº 3-1707/2), qui a le même objet. Il prévoit en outre la suppression de l'alinéa 4 du § 1er, et son remplacement par la phrase « Le chef de corps rédige un rapport de cet entretien. L'original de ce rapport est conservé dans le dossier d'évaluation. ». L'amendement nº 31 ajoute encore, dans la première phrase du texte proposé à l'amendement nº 25 en remplacement de l'alinéa 12 du § 9, les mots « les éventuelles recommandations suscitées par l'entretien de suivi au cours de la deuxième année d'exercice du mandat et ».

La ministre déclare ne pas avoir d'objection de principe à l'amendement de Mme de T' Serclaes, mais qu'il faudra vérifier comment il se combine avec l'amendement nº 4 du gouvernement. Elle rappelle que le gouvernement a conçu la première évaluation de telle façon qu'elle ne pouvait se solder par une mention négative. Il importe en tout cas, tant pour le chef de corps que pour l'autorité, qu'il existe une trace de l'entretien, que cet élément fasse partie du dossier d'évaluation et qu'il soit soumis au Conseil supérieur de la Justice avec les autres pièces. Il importe également que le collège d'évaluation puisse faire des remarques et des recommandations, afin que l'on puisse vérifier, lors de l'évaluation, si l'évalué en a tenu compte.

Amendement nº 16

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 16 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) proposant de modifier le § 9, alinéa 1er, en projet, afin d'exclure les chefs de corps de la Cour de cassation du régime d'évaluation.

Amendement nº 18

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 18 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à remplacer le § 9, alinéa 2, en projet, afin de supprimer la première évaluation intermédiaire après deux ans de mandat. Il est renvoyé à la justification écrite.

Amendement nº 19

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 19 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à apporter diverses modifications au § 9, en projet afin de supprimer la première évaluation intermédiaire après deux ans de mandat. Il est renvoyé à la justification écrite.

Amendement nº 20

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 20 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à compléter le § 9, en projet, par un nouvel alinéa. L'auteur propose de ne retenir qu'une seule évaluation du chef de corps, en fin de mandat. Une évaluation intermédiaire ne serait possible qu'à la demande du chef de corps concerné ou du Conseil supérieur de la Justice. Il est également renvoyé à la justification écrite.

Amendement nº 26

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 26 (doc. Sénat, nº 3-1707/3) qui est un sous-amendement à son amendement nº 20. L'auteur propose de préciser que l'évaluation intermédiaire telle qu'elle est proposée à son amendement nº 20, ne peut porter que sur la mise en place du plan de gestion.

Amendements nos 32 et 51

Mme de T' Serclaes dépose l'amendement nº 32 (doc. Sénat, nº 3-1707/3) qui remplace les amendements nos 25 et 31 du même auteur.

Le projet prévoit deux évaluations au cours du mandat de cinq ans: la première après deux ans, la seconde en fin de mandat. L'auteur propose de se limiter à une évaluation en fin de mandat et de prévoir, après deux ans, un entretien de suivi du chef de corps.

Le littéra B de l'amendement vise à regrouper au § 9 de l'article 259nonies, proposé, l'ensemble des dispositions relatives à l'entretien de suivi du chef de corps. Cet entretien de suivi porte sur la mise en place du plan de gestion par le chef de corps depuis son entrée en fonction, sur les mesures managériales qu'il a prises à cet effet et sur les éventuelles adaptations qu'il y a apportées.

Lors du renouvellement du mandat de chef de corps, un entretien de suivi est à nouveau prévu au cours de ce second mandat. Il portera cette fois sur la mise en place du rapport de fonctionnement établi par le chef de corps à la fin de son premier mandat, en vue du renouvellement de celui-ci.

Le littéra C de l'amendement vise à insérer un nouveau § 10 qui décrit la procédure d'évaluation du chef de corps, laquelle a lieu au cours de la cinquième année d'exercice du mandat. L'amendement ne modifie pas les règles de fond en matière d'évaluation. Il décrit de manière précise la procédure à suivre.

Mme de T' Serclaes dépose l'amendement nº 51 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) qui est un sous-amendement à l'amendement nº 32. Cet amendement découle de l'amendement nº 34 qu'elle a déposé à l'article 5 et qui vise à regrouper au sein du § 10 de l'article 259nonies, toutes les règles relatives à la procédure d'évaluation.

Le gouvernement retire l'amendement nº 4 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) à la suite du dépôt de l'amendement nº 32.

Amendements nos 43 à 46

M. Hugo Vandenberghe dépose l'amendement nº 43 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) visant à supprimer l'alinéa 4 de l'article 3, § 1er, proposé.

Au cours de la discussion générale du projet, des questions fondamentales ont été soulevées au sujet de la constitutionnalité de l'évaluation des chefs de corps.

Comme le gouvernement et les partis de la majorité entendent toutefois maintenir cette évaluation, le présent amendement fait abstraction des objections d'ordre constitutionnel.

L'amendement supprime l'évaluation prévue au cours de la deuxième année du mandat de chef de corps.

Lors des auditions en commission, diverses remarques ont été formulées au sujet du système d'évaluation proposé, en particulier en ce qui concerne la pertinence d'une évaluation effectuée dans le courant de la deuxième année du mandat de chef de corps.

Dans l'avis du Conseil des procureurs du Roi, il est dit que le système d'évaluation, tel qu'il est actuellement prévu, est très lourd et qu'il distraira beaucoup trop le chef de corps de la gestion effective de son parquet. Deux des trois évaluations envisagées sont jugées superflues par le Conseil des procureurs du Roi. Le Conseil précise à ce sujet que la première évaluation, prévue après deux ans, vient trop tôt car, en cas d'évaluation défavorable, il ne peut être mis fin au mandat. Quant à la troisième évaluation, après 10 ans, elle vient trop tard vu que le mandat n'est pas renouvelable immédiatement.

Dans l'avis commun du ministère public également, on peut lire que l'on « peut se poser la question de la valeur ajoutée de cette première évaluation non décisive alors qu'il existe au sein de l'ordre judiciaire une structure hiérarchique (procureurs généraux) et que, si nécessaire, un entretien fonctionnel peut être simplement organisé ».

De son côté, la doctrine s'interroge également sur le bien-fondé d'une évaluation dans le courant de la deuxième année du mandat (R. De Corte, Juristenkrant, 24 mai 2006).

Le présent amendement donne suite à ces observations en supprimant l'évaluation prévue dans le courant de la deuxième année du mandat de chef de corps.

M. Hugo Vandenberghe dépose l'amendement nº 44 (doc. Sénat, nº 3-1707/4), visant à remplacer l'article 259nonies, § 9, alinéa 1er, proposé afin de supprimer l'évaluation prévue au cours de la deuxième année de l'exercice du mandat de chef de corps.

Pour la justification de cet amendement on se reportera à celle de l'amendement 43 du § 1er, alinéa 4.

M. Hugo Vandenberghe dépose l'amendement nº 45 (doc. Sénat, nº 3-1707/3), visant à remplacer l'article 259nonies, § 9, alinéa 3, proposé et à supprimer la première évaluation.

M. Hugo Vandenberghe dépose l'amendement nº 46 (doc. Sénat, nº 3-1707/4), visant à remplacer l'article 259nonies, § 9, alinéa 4, proposé et à supprimer la possibilité de faire émettre un avis motivé par un membre du pouvoir exécutif.

L'amendement supprime la possibilité de faire émettre un avis motivé par le directeur général de la direction générale de l'Organisation judiciaire du Service public fédéral Justice. L'intervention de membres du pouvoir exécutif peut en effet engendrer des problèmes en termes d'indépendance.

Il est tenu compte également de la suppression de la prétendue première évaluation.

M. Willems s'interroge quant à la manière dont M. Vandenberghe conçoit l'évaluation. Il prétend que le système proposé est inconstitutionnel, mais quelle est, selon lui, la manière correcte pour procéder à une évaluation ?

M. Hugo Vandenberghe part du principe que la Constitution interdit l'évaluation des chefs de corps. Les accords Octopus ont prévu que les nominations seraient valables pendant un délai non renouvelable de sept ans, et qu'elles ne pourraient pas faire l'objet d'une évaluation en raison de la fonction des chefs de corps. L'intervenant entend rester fidèle au principe contenu dans les accords Octopus.

M. Koninckx renvoie aux amendements nos 45 et 46, qui prévoient que l'avis est transmis à la fin du cinquante-quatrième mois « voor de evaluatie ». Interprétée littéralement, cette disposition signifie que l'avis doit être transmis après six mois, ce qui n'est certainement pas l'intention.

M. Hugo Vandenberghe répond que tel est le texte actuel du gouvernement. Rien n'empêche évidemment M. Koninckx de déposer un sous-amendement pour préciser les choses.

M. Wille souligne que l'on vise le cinquante-quatrième mois après le début de l'exercice du mandat.

Article 4

Cet article n'appelle pas d'observations, sous réserve d'éventuelles modifications consécutives à la modification des articles précédents.

Article 5

Amendement nº 10

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement 10), tendant à remplacer l'article 5. La modification proposée du § 2 de l'article 259undecies du Code judiciaire, non prévue dans le projet original, se justifie par le fait que l'on crée un régime spécifique pour les mandats adjoints de président et de premier avocat général à la Cour de cassation. En ce qui concerne le § 3 figurant dans le projet, l'amendement supprime, à l'alinéa 2, relatif au mode de délibération du collège d'évaluation, les mots « à la majorité absolue des suffrages ». Enfin, l'amendement supprime le § 4, en raison de l'adaptation de l'article 259nonies, § 9, alinéas 4 et 5.

Amendement nº 30

Le gouvernement dépose à son amendement nº 10 un sous-amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 30), tendant à compléter l'alinéa 1er du § 3 par ce qui suit: « À défaut de magistrat de la chambre francophone justifiant de la connaissance de la langue allemande, il est fait appel à un interprète ». Cet amendement fait suite aux précédentes discussions sur ce sujet.

M. Hugo Vandenberghe renvoie à une observation du service d'évaluation de la législation du Sénat concernant les mots « à la majorité absolue des suffrages » figurant à l'article 5, § 3, alinéa 2. Cette disposition fait double emploi avec l'alinéa 8, où elle se trouve d'ailleurs mieux à sa place.

Cette observation est rencontrée par l'amendement nº 10 du gouvernement.

M. Hugo Vandenberghe renvoie à une observation du service d'évaluation de la législation du Sénat concernant l'article 5, § 3, alinéa 7. L'incompatibilité ne doit-elle pas viser également les parents du partenaire lorsqu'il ne s'agit pas du conjoint ?

La ministre propose de répondre à cette remarque par l'ajout du terme « notamment ».

Elle renvoie à l'article 259ter, qui prévoit: « Les personnes (...) doivent s'abstenir d'émettre un avis chaque fois qu'il existe un intérêt personnel ou contraire. Elles ne peuvent notamment émettre un avis sur des parents ou alliés jusqu'au quatrième degré, ni sur des personnes avec qui elles constituent un ménage de fait. »

M. Hugo Vandenberghe souligne que, dans une telle formule, le mot « notamment » indique qu'il s'agit de l'illustration d'un principe.

Il renvoie à une observation du service d'évaluation de la législation concernant le § 4 proposé. Cette disposition devrait, vu son contenu, figurer à l'article 259nonies, § 9. En outre, elle semble ne devoir s'appliquer qu'aux évalutions visées au § 3, et non à celle dont il est question au § 2.

La ministre rappelle que le § 4 sera supprimé.

Amendement nº 37

Le gouvernement dépose l'amendement nº 37 (doc. Sénat, nº 3-1707/4), qui est un sous-amendement à l'amendement nº 10. Cet amendement propose d'adapter le régime d'incompatibilité applicable aux membres des chambres du collège d'évaluation à la suite des remarques formulées lors de la discussion générale. L'amendement propose de modifier à cet effet le § 3, alinéa 7, proposé à l'amendement nº 10.

Amendement nº 22

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 22 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à remplacer le § 3, alinéa 3, de l'article 259undecies, en projet. L'auteur propose que le supérieur hiérarchique du magistrat à évaluer assure la présidence du collège d'évaluation. Il est renvoyé à la justification écrite.

Amendement nº 21

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 21 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à remplacer le § 4, de l'article 259undecies, en projet, afin de supprimer la première évaluation intermédiaire après deux ans de mandat.

Il est renvoyé à la justification écrite.

Amendement nº 34

Mme de T' Serclaes dépose l'amendement nº 34 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) qui vise à supprimer le § 4, de l'article 259undecies, en projet. L'auteur propose en effet d'intégrer le premier alinéa du § 4 dans l'article 259nonies, § 9 (voir l'amendement nº 32 du même auteur) qui règle la procédure relative à l'entretien de suivi après deux ans de mandat.

Dans la même logique, elle propose de supprimer l'alinéa 2, qui concerne la procédure d'évaluation en fin de mandat, et de l'insérer à l'article 259nonies, § 10. Elle dépose à cet effet un sous-amendement à l'amendement nº 32 (amendement nº 51 de Mme de T' Serclaes, doc. Sénat nº 3-1707/4).

Le gouvernement se rallie à cette suggestion, mais rappelle que son amendement 10, point c, supprime le § 4.

Amendement nº 41

M. Mahoux et Mme Laloy déposent l'amendement nº 41 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) visant à adapter, dans l'article 259undecies, le renvoi fait à l'article 259nonies à la suite de la subdivision de ce dernier en paragraphes.

Amendements nos 47 à 50

M. Hugo Vandenberghe dépose l'amendement nº 47 (doc. Sénat, nº 3-1707/4), qui tend à remplacer l'article 259undecies, § 3, alinéa 2, proposé en vue de prévoir qu'un seul supérieur hiérarchique de l'évalué fait partie du collège d'évaluation. Par ailleurs, il supprime l'évaluation par un magistrat de la Cour des comptes et un spécialiste en gestion des ressources humaines.

Aussi longtemps que le plan Thémis relatif à l'autonomie administrative du comité de direction d'arrondissement reposant sur une formation managériale ciblée et un accompagnement n'est pas inscrit dans la loi, une évaluation par un magistrat de la Cour des comptes et un spécialiste en matière de gestion des ressources humaines n'a aucun sens.

En outre, la composition du collège prévue par l'avant-projet peut engendrer des problèmes en termes d'indépendance dans la mesure où interviennent dans le collège d'évalution des membres qui appartiennent au pouvoir exécutif, et non au pouvoir judiciaire au sens large du terme.

M. Vandenberghe dépose l'amendement nº 48 (doc. Sénat, 3-1707/4), qui vise à remplacer l'article 259undecies, § 3, alinéa 3, proposé, afin de faire présider la chambre par le chef de corps supérieur hiérarchique de l'évalué.

M. Vandenberghe dépose l'amendement nº 49 (doc. Sénat, 3-1707/3), qui vise à supprimer l'article 259undecies, § 4, alinéa 1er, proposé en vue de supprimer la première évaluation proposée.

M. Vandenberghe dépose l'amendement nº 50 (doc. Sénat, 3-1707/3), qui vise à supprimer l'article 259undecies, § 5, alinéa 2, proposé, en vue de supprimer la première évaluation proposée à cet alinéa également.

Article 6

M. Vandenberghe signale qu'il faudra vérifier les références si des amendements sont adoptés.

Article 7

Cet article n'appelle pas d'observations.

Article 8

Amendement nº 35

Mme de T' Serclaes dépose l'amendement nº 35 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) qui est de nature technique et qui découle de l'amendement nº 32 qu'elle a déposé à l'article 3.

Article 9

Cet article n'appelle pas d'observations.

Article 10

Amendement nº 36

Mme de T' Serclaes dépose l'amendement nº 36 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) qui est de nature technique et qui découle de l'amendement nº 32 qu'elle a déposé à l'article 3.

Article 10bis (nouveau)

Amendement nº 5

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 5), tendant à insérer un article 10bis dans le projet de loi. Cet amendement répare un oubli et doit être lu en parallèle avec l'article 2, 4º, du projet. Il ne se justifie pas que le remplaçant qui termine le mandat d'un chef de corps dans une juridiction bruxelloise puisse conserver la différence entre son traitement et le traitement d'un chef de corps pendant deux ans maximum après la fin de la période de remplacement alors que l'article 2, 4º, du projet supprime cette mesure pour les autres chefs de corps.

M. Koninckx souligne que le texte néerlandais emploie in fine les mots « in een ander ambt of functie ». Le texte français emploie les mots « mandat ou fonction ». L'auteur pense que les termes « ambt » et « mandaat » n'ont pas la même signification.

M. Hugo Vandenberghe demande quel texte est correct. Si c'est le texte français, il faut remplacer le mot « ambt » par « mandaat » dans la version néerlandaise.

Amendement nº 40

M. Mahoux et Mme Laloy déposent l'amendement nº 40 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) visant à insérer un nouvel article 10bis dans le projet de loi. Cet amendement technique découle de la subdivision de l'article 259quater en paragraphes.

Article 11

Cet article n'appelle pas d'observations.

Article 11bis (nouveau)

Amendement nº 6

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 6), tendant à insérer dans le projet un article 11bis. Cet article corrige l'article 43quater de la loi du 15 juin 1935, en vue de rétablir la quadruple alternance linguistique en ce qui concerne le premier président et le président, d'une part, le procureur général et le premier avocat général, d'autre part.

Article 12

Amendement nº 7

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 7), tendant à remplacer, au § 1er, alinéa 2, les mots « article 259quater, § 6, alinéa 2 » par les mots « article 259quater, § 6, alinéa 2 ou 3 ». Cet amendement résulte du fait que le projet subdivise l'article 259quater, § 6, alinéa 2.

Amendement nº 23

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 23 (doc. Sénat, nº 3-1707/2) visant à compléter le régime transitoire proposé afin de permettre aux chefs de corps en place et qui bénéficient d'un mandat de sept ans de demander le renouvellement de celui-ci pour une période de trois ans.

M. Hugo Vandenberghe renvoie à une observation du service d'évaluation de la législation à propos du § 3. La référence faite à l'article 259nonies s'applique-t-elle à l'ensemble de l'article ou seulement à l'article 259nonies, § 9 ?

La ministre répond que l'on vise l'évaluation des chefs de corps. Or, cette évaluation est organisée par les §§ 1er et 9 de l'article, alors que les §§ 2 à 8 concernent l'évaluation des magistrats de base. D'ailleurs, le § 9, alinéa 1er, exclut l'application des §§ 2 à 8 pour les chefs de corps.

M. Hugo Vandenberghe propose de déplacer, dans le texte néerlandais, le mot « daarentegen » et de l'insérer entre les mots « worden » et « geëvalueerd ».

Article 12bis (nouveau)

Amendement nº 8

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 8), tendant à insérer dans le projet un article 12bis nouveau.

Le but de cet amendement est de faire en sorte que le président de la Cour de cassation reste désigné à cette fonction selon les règles actuellement d'application (mandat « 3-6-9 »). Il y aura, de par l'introduction d'un président francophone et d'un premier avocat général néerlandophone, un surnombre au niveau du siège, qui disparaîtra au moment où l'intéressé sera admis à l'éméritat ou en cas de départ anticipé. Le système spécifique à la Cour de cassation entrera en vigueur au 1er avril 2007. À cette date, au moment où le premier président néerlandophone et le procureur général francophone entreront en fonction, il y aura donc aussi désignation d'un premier avocat général néerlandophone pour un mandat de sept ans et d'un président francophone pour un mandat de sept ans. Le nouveau système des cinq ans pour la Cour de cassation n'entrera en vigueur que le 1er avril 2014.

M. Hugo Vandenberghe souligne qu'il s'agit d'une date fort éloignée et que ce dispositif constitue un pari sur l'avenir.

Article 13

Amendement nº 9

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2), tendant à modifier et compléter l'article 13, de manière à maintenir, pour les remplaçants en fonction au moment de l'entrée en vigueur de la loi et ceux dont le mandat expire le 1er avril 2007, visés à l'article 259, § 6, alinéas 2 et 3, la différence entre leur traitement et le traitement d'un chef de corps pendant deux ans maximum après la fin de la période de remplacement. Cet amendement tient également compte d'une remarque du service d'Évaluation de la législation, qui faisait observer que les mots « par dérogation à l'article 259quater, §§ 4 et 5, » paraissaient superflus.

M. Koninckx fait remarquer que le texte néerlandais de l'amendement dit seulement « in een ander ambt ». En revanche, le texte français mentionne les mots « à un autre mandat ou une autre fonction ».

Article 13bis (nouveau)

Amendement nº 11

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-1707/2, amendement nº 11), tendant à insérer un article 13bis nouveau dans le projet de loi. Il s'agit de la règle selon laquelle la durée des mandats de président et de premier avocat général, qui débuteront le 1er avril 2007, est de sept ans, et qu'en cas de fin anticipée, il y a un remplaçant du même rôle linguistique.

En ce qui concerne les mandats adjoints, les désignations se font, pour le siège, au sein des juridictions, par les assemblées générales, parmi deux candidats présentés par le chef de corps, avec une motivation.

À Bruxelles, cela s'effectue par groupe linguistique en fonction du rôle. Pour le ministère public, il s'agit d'une désignation par le Roi sur présentation motivée de deux candidats par le chef de corps.

M. Koninckx fait remarquer que le texte néerlandais indique le chiffre « 7 » alors que le texte français écrit « sept » en toutes lettres.

Article 14

M. Hugo Vandenberghe fait remarquer que l'installation est réglée par l'article 5, qui entre en vigueur immédiatement et non le 1er janvier 2008. En revanche, c'est la date à laquelle le collège d'évaluation entrera en activité.

Amendement nº 39

Le gouvernement dépose l'amendement nº 39 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) qui fait suite à une remarque du Service d'évaluation de la législation. L'amendement précise que le collège d'évaluation entame ses travaux à partir du 1er janvier 2008.

M. Koninckx note une discordance entre le texte français, qui indique « à partir du 1er janvier » et le texte néerlandais, qui indique « op 1 januari » (le 1er janvier).

M. Hugo Vandenberghe pense que c'est le texte néerlandais qui est correct.

Le ministre pense qu'on peut écrire « à partir du 1er janvier » et « vanaf 1 januari ».

Article 15

Amendement nº 12

Le gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, Nº 3-1707/2, amendement nº 12), tendant à remplacer l'article 12. Pour des raisons de sécurité, le gouvernement préfère en effet prévoir une autre formule d'entrée en vigueur, comportant une délégation au Roi et une date-butoir, compte tenu de la complexité supplémentaire découlant des amendements déposés.

Amendements nos 27 et 28

Mme Nyssens dépose l'amendement nº 27 (doc. Sénat, nº 3-1707/3) visant à préciser que la loi en projet entrera en vigueur en même temps que la future loi de réforme de l'organisation judiciaire car cette dernière ne manquera pas d'avoir des effets sur le contenu de la fonction de chef de corps.

À titre subsidiaire, elle dépose l'amendement nº 28 (doc. Sénat, nº 3-1707/4) visant à faire coïncider la date d'entrée en vigueur de certaines dispositions de la loi en projet avec celle de l'entrée en vigueur de la future loi de réforme de l'organisation judiciaire car cette dernière ne manquera pas d'avoir des effets sur le contenu de la fonction de chef de corps.

VI. VOTES

L'amendement nº 29 est adopté par 8 voix et 1 abstention.

L'article 1er est adopté par 8 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 1 est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 38 du gouvernement est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 2 du gouvernement est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 13 de Mme de T' Serclaes est retiré.

Les amendements nos 14, 15 et 24 de Mme Nyssens sont rejetés par 8 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 33 de Mme de T' Serclaes et consorts est adopté par 8 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 42 de M. Hugo Vandenberghe est rejeté par 8 voix contre 1.

L'article 2 amendé est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 3 du gouvernement est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 4 du gouvernement et les amendements nos 25 et 31 de Mme de T' Serclaes sont retirés.

Les amendements nos 16, 17 et 18 de Mme Nyssens sont rejetés par 8 voix contre 1.

Les amendements nos 19, 26 et 20 de Mme Nyssens sont rejetés par 8 voix et 1 abstention.

Les amendements nos 51 et 32 de Mme de T' Serclaes est consorts sont adoptés par 8 voix et 1 abstention.

Les amendements nos 43 à 46 de M. Hugo Vandenberghe sont rejetés par 8 voix contre 1.

L'article 3 amendé est adopté par 8 voix contre 1.

L'article 4 est adopté par 8 voix contre 1.

Les amendements nos 37, 30 et 10 du gouvernement sont adoptés par 8 voix contre 1.

Les amendements nos 21 et 22 de Mme Nyssens sont rejetés par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 34 de Mme de T' Serclaes et consorts est retiré.

L'amendement nº 41 de M. Mahoux et Mme Laloy devient sans objet.

Les amendements nos 47 à 50 de M. Hugo Vandenberghe sont rejetés par 8 voix contre 1.

L'article 5 amendé est adopté par 8 voix contre 1.

Les articles 6 et 7 sont adoptés par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 35 de Mme de T' Serclaes et consorts et l'article 8 ainsi amendé sont adoptés 8 voix et 1 abstention.

L'article 9 est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 36 de Mme de T' Serclaes et consorts et l'article 9 ainsi amendé sont adoptés 8 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 5 du gouvernement et l'amendement nº 40 de M. Mahoux et Mme Laloy sont adoptés par 8 voix et 1 abstention.

L'article 11 est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 6 du gouvernement est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 23 de Mme Nyssens est rejeté par 8 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 7 du gouvernement est adopté par 8 voix et 1 abstention.

L'article 12 amendé est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 8 du gouvernement est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 9 du gouvernement est adopté par 8 voix et 1 abstention.

L'article 13 amendé est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 11 du gouvernement est adopté par 8 voix contre 1.

L'amendement nº 39 du gouvernement et l'article 14 ainsi amendé sont adoptés 8 voix contre 1.

L'amendement nº 12 du gouvernement est adopté par 8 voix contre 1.

Les amendements nos 27 et 28 de Mme Nyssens deviennent sans objet.

VII. VOTE FINAL

L'ensemble du projet de loi amendé a été adopté par 8 voix contre 1.


Le présent rapport est a été approuvé à l'unanimité des 10 membres présents.

La rapporteuse, Le président,
Fauzaya TALHAOUI. Hugo VANDENBERGHE.

(1) Note de la rapporteuse: Le projet de loi à l'examen a également été évoqué lors des auditions relatives au projet de loi instaurant la Commission de modernisation de l'ordre judiciaire et le Conseil général des partenaires de l'ordre judiciaire (voir doc. Sénat, nº 3-1720/3).