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M. Berni Collas (MR). - Suite à l'arrêt de la Cour de cassation du 2 septembre 2004, la ministre aurait demandé à l'Ordre des barreaux francophones, néerlandophones et germanophones de réfléchir à une solution législative permettant une certaine prévisibilité du coût d'un procès sans que celui-ci ne constitue, de manière directe ou indirecte, un frein à l'accès à la justice. En effet, depuis cet arrêt, le milieu juridique du pays est plutôt perplexe et désorienté.
Dans cet arrêt, la cour dit qu'il est désormais possible pour la partie gagnante au procès de faire supporter ses frais d'avocat et d'expert(s) technique(s) par la partie perdante.
Nous nous trouvons donc dans une situation d'insécurité juridique parce que nous sommes confrontés à un arrêt de revirement jurisprudentiel rendu par notre cour suprême. Or, les jugements en matière de répétibilité sont contradictoires.
Dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, les juridictions admettent plutôt le principe selon lequel la partie perdante au procès doit prendre en charge les frais d'avocats de la partie gagnant le procès tandis que devant les juridictions de l'arrondissement judiciaire d'Eupen, par exemple, le contraire est de mise.
À côté de la polémique sur la question de l'accessibilité à la justice, l'arrêt de la Cour de cassation pose d'autres problèmes, notamment quant à son champ d'application. Il ne vise que la matière contractuelle alors que les spécialistes s'accordent pour dire qu'il n'y a qu'un pas à faire pour que celui-ci s'applique également en matière extracontractuelle, voire pénale.
Mon collègue Jean-Marie Cheffert vous a déjà interpellé sur ce sujet le 25 novembre 2004 et le 2 juin 2005.
Les sénateurs Alain Destexhe, Clotilde Nyssens ainsi que Hugo Vandenberghe et Jan Steverlynck ont déposé trois propositions de loi concernant le remboursement des frais de justice. Le député Melchior Wathelet a fait de même à la Chambre et la députée Hilde Claes vous a interpellé sur ce sujet en commission de la Justice de la Chambre.
L'Ordre des barreaux francophones, néerlandophones et germanophones ont proposé un texte modifiant l'article 1022 du Code judiciaire et un texte d'arrêté royal de fixation du tarif des sommes récupérables comprenant une grille des indemnités de base ainsi que des indemnités minimales et maximales pour les affaires évaluées en argent. Les justiciables seraient donc en mesure d'évaluer le montant des frais qu'ils risquent de payer en cas d'échec de la procédure. Sur le fond, tant le nord que le sud du pays semblent d'accord mais leurs points de vue divergent sur le pouvoir d'appréciation à laisser au juge au sujet de cette indemnité de procédure.
J'ai eu l'occasion de participer à un colloque consacré à la répétibilité, organisé par l'association eurégionale Advocare ad Mosam créée à Maastricht à l'initiative du bâtonnier de Hasselt et réunissant dans le cadre d'un projet Interreg les barreaux de Hasselt, Tongres, Liège, Verviers et Eupen du côté belge, les barreaux de Maastricht et Roermond du côté hollandais ainsi que le Anwaltverein Aachen du côté allemand. Des magistrats et avocats allemands et hollandais participant à ce colloque ont été surpris d'entendre qu'en Belgique, la répétibilité n'est pas encore organisée par une loi, tandis que dans leurs pays, ce principe existe depuis longtemps.
Madame la ministre, je ne suis ni juriste ni avocat. Je m'adresse à vous en tant que sénateur, certes, mais surtout en ma qualité de simple citoyen.
Suite aux interpellations, vous avez déclaré être convaincue de la nécessité d'une intervention législative en la matière et vouloir poursuivre votre réflexion sur le sujet.
Aujourd'hui, plus d'un an après le fameux arrêt de la Cour de cassation, les magistrats, les avocats ainsi que les justiciables de ce pays attendent toujours la clarté et la sécurité juridique en la matière.
Dès lors, mes questions sont les suivantes. À quel stade se trouve votre réflexion ? À quel(s) principe(s) celle-ci vous a-t-elle conduite ? Comptez-vous déposer un projet de loi et élaborer un arrêté royal mettant fin à la controverse jurisprudentielle et doctrinale ?
De heer Hugo Vandenberghe (CD&V). - Ik zou willen ingaan op de vraag van collega Collas. Veertien dagen geleden heeft de vereniging Magistratuur en Maatschappij in Gent een groot colloquium gehouden over de terugvorderbaarheid van de erelonen van de advocatuur. Naar aanleiding van dat colloquium werd een zeer merkwaardig verslagboek van 250 bladzijden gepubliceerd over deze principiële, maar ook technisch moeilijke en ingewikkelde zaak. In de loop van de namiddag werd daarover een debat gevoerd, waarop onder meer de vertegenwoordiger van de minister, de heer Jacobs, aanwezig was. Uit de uiteenzetting van de heer Jacobs meen ik begrepen te hebben dat de minister het standpunt van de Orde van Vlaamse balies en de Ordre des barreaux francophones et germanophones genegen is. Het wetsvoorstel dat ik heb ingediend, en dat die standpunten weergeeft, kan dus eventueel onmiddellijk op de agenda van de commissie voor de Justitie kunnen worden geplaatst, als de termijnen dat mogelijk maken. Of is de regering misschien van plan om een eigen initiatief te nemen? Het probleem is immers bijzonder complex zodra het kader van de rechtsplegingsvergoeding in burgerlijke zaken wordt overschreden, want daar worden allerlei bijkomende technische aspecten geregeld. Net als de heer Collas meen ik dat er dringend een regeling nodig is omdat de rechtspraak terzake verdeeld is, omdat alle advocaten verplicht zijn daarover te concluderen en omdat er tegenstrijdige vonnissen en arresten worden geveld. Die betwisting in de procesvoering slorpt veel energie op. De wetgever moet dus optreden, anders zal er gedurende jaren onrust en onzekerheid heersen.
Mme Laurette Onkelinx, vice-première ministre et ministre de la Justice. - Je remercie M. Vandenberghe d'être intervenu avant moi.
Il a partiellement répondu à ma place et a notamment déclaré que le problème était complexe. C'est tout à fait exact car la répétibilité est une notion difficile dont la définition qui exige la conciliation de plusieurs objectifs.
Dans la décision que nous devrons prendre sur base, soit d'un projet de loi, soit d'une proposition de loi, nous devrons veiller à ne pas augmenter encore les difficultés d'accès à la justice.
Il faut mettre fin à l'insécurité juridique et éviter d'élaborer des solutions donnant lieu à un procès dans le procès, ce qui risque d'augmenter l'arriéré judiciaire. Une solution mal réfléchie impliquerait certainement un accès plus difficile à la justice.
D'une manière générale, quand on s'adresse à la justice, le résultat est incertain car le juge peut envisager toute une série de solutions. On peut essayer de gagner un procès en estimant que l'on est dans son bon droit, sans pour autant porter atteinte à la justice, peser sur l'arriéré judiciaire, etc.
Si l'on décide qu'une personne qui perd son procès doit prendre en charge les honoraires de l'avocat de la partie adverse en plus de ceux de son propre avocat, toute une catégorie nouvelle de la population n'aura plus accès à la justice. Tout le monde comprendra que ce n'est pas simple.
Les Ordres des avocats proposent que les indemnités de procédure, actuellement sans rapport avec le montant des honoraires, soient relevées par le biais d'un arrêté royal et contribuent de manière forfaitaire à dédommager la partie gagnante. Le juge disposerait néanmoins d'un pouvoir d'appréciation, bien que les Ordres ne soient pas d'accord sur l'étendue de celui-ci.
Cette position des Ordres doit servir de point de départ et mon collaborateur a relayé mon avis lors du colloque de Gand.
Cela dit, les questions qu'il nous reste à trancher sont les suivantes : l'étendue du pouvoir d'appréciation du juge, les critères exacts qui encadreront cette appréciation, la définition des montants pouvant être réclamés à ce titre et le champ d'application exact de la répétibilité, pour n'en citer que quelques-unes.
Il conviendra également d'examiner les implications budgétaires pour l'État. Dans toute une série de procès - je pense, notamment, aux procès sociaux -, que l'État gagne ou perde, c'est lui qui prendrait en charge les indemnités de procédure. L'augmentation de ces dernières aurait donc une influence budgétaire pour l'État.
J'essaie de trouver une solution qui soit juste, pour ne pas toucher à nouveau les personnes à revenus modestes, éprouvant déjà les pires difficultés à payer les frais de justice et d'avocat, solution qui réponde d'une manière correcte à toute la complexité du problème. Je continuerai à négocier avec tous les experts et les acteurs concernés pour essayer d'aboutir à un projet de loi.
Je redis à M. Vandenberghe que, s'il préfère commencer à travailler sur base des propositions - pourquoi pas au sein de la commission de la Justice du Sénat ? -, en permettant à tous les acteurs de s'exprimer, je n'y vois aucun inconvénient.
M. Berni Collas (MR). - Je comprends cette sensibilité à propos de l'accès à la justice.
Je crois cependant avoir entendu, lors de ce colloque, le pressant appel des avocats pour que l'on remédie à la situation et je prends acte de la volonté de la ministre de trouver une solution à ce problème.