3-1203/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2004-2005

25 MAI 2005


Proposition de loi modifiant la loi du 19 juillet 1991 relative aux registres de la population et aux cartes d'identité et modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un registre national des personnes physiques en vue de l'inscription de données relatives au don d'organes et au groupe sanguin sur la carte d'identité électronique

(Déposée par Mme Marie-José Laloy)


DÉVELOPPEMENTS


La présente proposition de loi a comme objectif de prévoir deux mentions supplémentaires sur la carte d'identité électronique, à savoir l'acceptation ou le refus du don d'organes par le titulaire de la carte ainsi que l'inscription de son groupe sanguin.

La loi du 13 juin 1986 (1) sur le prélèvement et la transplantation d'organes prévoit que toute personne, majeure ou non, inscrite au registre de la population ou au registre des étrangers depuis 6 mois, et capable de manifester sa volonté, peut s'adresser à l'administration communale de son domicile afin de déclarer soit son opposition à tout prélèvement d'organes ou de tissus après son décès, soit son consentement, dans un acte de volonté explicite, en tant que candidat donneur d'organes après son décès. L'administration a ensuite l'obligation de faire enregistrer cette décision au Registre national.

Le principe qui prévaut dans notre pays est celui du consentement présumé. Cela signifie que toute personne qui, de son vivant, n'a pas manifesté son opposition au prélèvement d'organes est supposé être d'accord avec le prélèvement d'organes après la mort.

Mais il est important de signaler que si la personne ne s'est pas rendue à l'administration communale pour compléter le formulaire, les membres de sa famille (père, mère, enfants et conjoint) peuvent faire opposition au prélèvement. Par contre, en présence d'une déclaration, la famille ne saura s'opposer à la volonté de la personne décédée.

Notre système est semblable au système français (2) mais diffère du système du consentement explicite qui s'applique notamment en Grande-Bretagne et selon lequel toute personne doit, de son vivant, avoir exprimé son accord pour permettre un prélèvement.

Sans remettre en cause le système qui prévaut en Belgique, on constate cependant qu'il n'aide pas à solutionner la véritable pénurie des donneurs d'organes. En effet, l'absence ou la mauvaise information de la population, les préjugés en cette matière, les démarches à effectuer auprès de l'administration communale, sont autant de facteurs qui freinent le don d'organe.

Les chiffres publiés dans un article du Journal du médecin (3) sont révélateurs de cette situation, puisqu'il est fait référence à « un peu plus de 300 000 Belges seulement qui ont fait la démarche, dont 250 000 pour s'opposer au don d'organes ».

En raison d'une absence d'équilibre entre l'offre et la demande, le nombre de personnes qui décèdent alors qu'elles sont inscrites sur des listes d'attente en vue d'un don d'organe ne cesse d'augmenter.

Face à cette problématique, l'auteur souhaite par le biais de cette proposition de loi, conscientiser la population de l'importance du don d'organes et donc d'encourager chacun à accepter cet acte de générosité et de solidarité, mais aussi à le faciliter et ce, sans préjudice des dispositions applicables dans cette matière.

Parallèlement il sera important de réaliser des campagnes d'informations dans le but de sensibiliser la population ainsi que le corps médical. Ce sera aussi l'occasion de clarifier certains points et croyances, afin d'aider chaque personne à poser ce choix plus facilement.

En effet, avant d'accéder à l'étape de la réalisation technique, la pratique des prélèvements d'organes rencontre de nombreux obstacles auprès du public, qui ne peuvent être franchis qu'à force d'explication. Ces explications conduiront à la compréhension, seule capable d'engendrer la réflexion, susceptible d'instaurer le dialogue, et donc de lever ces obstacles. Ceux-ci sont pourtant de taille: l'image altérée du don, le poids de la mort, la religion, les rapports entre la société et le cadavre, la question de la répartition des organes ...

Par ailleurs, dans un même souci de protéger la vie de chacun, mais cette fois-ci dans le propre intérêt du titulaire, la proposition prévoit l'inscription obligatoire de son groupe sanguin sur sa carte d'identité électronique.

En ce qui concerne ensuite les aspects pratiques, il ne faut pas perdre de vue que la généralisation de la carte d'identité électronique a déjà commencé dans un très grand nombre de communes et devrait se terminer à la fin de 2009 (4) . L'inscription sur la carte elle-même n'est dès lors plus possible vu qu'un grand nombre de cartes ont déjà été délivrées.

En conséquence, l'auteur propose que ces informations soient mentionnées obligatoirement lors du renouvellement quinquennal de la carte d'identité électronique.

Il s'agit d'inscrire l'acceptation ou le refus du don ainsi que le groupe sanguin sur la carte elle-même, c'est-à-dire que ces informations seraient visibles à l'œil nu et lisibles de manière électronique.

Les transplantations et les greffes d'organes devant être effectuées dans des délais très rapides, il est important que le personnel médical puisse directement vérifier les informations utiles sur la carte elle-même. Le même raisonnement vaut aussi à l'égard du titulaire qui, en cas d'accident, peut être sauvé grâce à l'inscription de son groupe sanguin sur sa carte. Cela évitera au personnel médical d'urgence des recherches parfois longues et fastidieuses.

L'auteur souhaite à nouveau insister sur l'importance d'encadrer cette démarche obligatoire par des campagnes de communication susceptibles d'attirer l'attention de la population sur cette problématique parfois trop souvent méconnue, et qui peuvent parvenir à influencer positivement les indécis en faveur du don.

En conclusion, cette proposition empêche une attitude passive de la part du citoyen, et au nom de l'état des personnes, invite dès lors chacun à se poser la question de son vivant du don d'organes, à en discuter avec sa famille, ses proches et à prendre position face à cet acte ultime de solidarité.

Marie-José LALOY.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

L'article 6, § 2, alinéa 2, de la loi du 19 juillet 1991 relative aux registres de la population et aux cartes d'identité et modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un registre national des personnes physiques, modifié en dernier lieu par la loi du 9 juillet 2004, est complété par un 13º et 14º rédigés comme suit:

« 13º l'acceptation ou le refus par le titulaire du don d'organes;

14º le groupe sanguin du titulaire. ».

22 avril 2005.

Marie-José LALOY.

(1) Loi du 13 juin 1986 sur le prélèvement et la transplantation d'organes, Moniteur belge du 14 février 1987.

(2) Loi du 22 décembre 1976 (loi Caillavet) complétée par les lois bioéthiques du 29 juillet 1994.

(3) Journal du médecin no 1624 du 19 octobre 2004.

(4) Note de politique générale du ministre de l'Intérieur 24 novembre 2004, p. 9 et suivantes.