3-1123/2

3-1123/2

Sénat de Belgique

SESSION DE 2004-2005

27 AVRIL 2005


Proposition de loi visant à supprimer l'alinéa 2 de l'article 9, § 2, de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro


RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES PAR M. GERMEAUX


I. INTRODUCTION

La commission a examiné la présente proposition de loi lors de sa réunion du 27 avril 2005.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE L'UN DES AUTEURS DE LA PROPOSITION DE LOI

Mme De Roeck renvoie aux développements écrits de la proposition de loi. L'article 9, § 2, de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro prévoit la création d'une « Commission fédérale pour la recherche médicale et scientifique sur les embryons in vitro » et en règle la composition. Différents critères y sont également fixés, tels que des conditions de diplôme, la parité linguistique, la représentation équilibrée entre les hommes et les femmes ainsi que la représentation des tendances idéologiques.

Toutefois, la disposition en question instaure une incompatibilité entre la qualité de membre de cette Commission fédérale et celle de membre du Comité consultatif de bioéthique. Cette incompatibilité, instaurée par le biais d'un amendement à la proposition de loi initiale (voir doc. Sénat, nº 2-695), a déjà fait l'objet de discussions à l'époque. La crainte a été émise que cette incompatibilité n'aille trop loin. Néanmoins, l'amendement en question a été adopté par 9 voix et 5 abstentions. Or, pour d'autres problèmes éthiques, comme l'euthanasie ou l'interruption de grossesse, on a également créé des commissions de suivi sans toutefois prévoir la même incompatibilité avec la qualité de membre du Conseil consultatif.

Un premier appel aux candidats souhaitant devenir membres de la Commission fédérale pour la recherche médicale et scientifique sur les embryons in vitro a été lancé le 18 février 2004. On a eu du mal à trouver des candidats répondant à tous les critères légaux, surtout du côté néerlandophone. Un deuxième appel a été lancé et a permis de réunir de justesse le nombre de candidats requis, mais certains d'entre eux devront démissionner du Comité consultatif de bioéthique pour pouvoir siéger à la Commission fédérale. L'incompatibilité légale actuelle va donc trop loin, comme le reconnaît d'ailleurs aussi le ministre de la Santé publique. Selon l'intervenante, rien n'empêche qu'un membre du Comité consultatif siège en même temps à la Commission fédérale. La proposition de loi à l'examen vise donc à supprimer l'incompatibilité existante.

III. DISCUSSION GÉNÉRALE

Mme Nyssens attire l'attention sur les différentes missions du Comité consultatif de bioéthique, qui rend des avis de lege ferenda, alors que la Commission fédérale pour la recherche médicale et scientifique sur les embryons in vitro est chargée d'évaluer une loi existante. Il importe de garantir à cette commission un fonctionnement effectif, et ce, afin que la loi du 11 mai 2003 soit appliquée dans des circonstances optimales, mais il ne lui semble en principe pas illogique que ces deux organes se composent de personnes différentes. Il semblerait d'ailleurs que la difficulté à trouver suffisamment de candidats pour la Commission fédérale ne se pose que du côté néerlandophone. On peut dès lors se demander si ce problème est bien dû à l'incompatibilité qui a été prévue ou s'il résulte d'une pénurie d'experts, d'une publicité insuffisante ou des tergiversations des experts face à la charge de travail qui les attend s'ils deviennent membres de la Commission fédérale, et s'il est nécessaire d'allouer une indemnité aux membres.

Il ressort d'ailleurs de l'exposé introductif d'un des auteurs de la proposition de loi que l'on a fini par trouver suffisamment de candidats, de sorte que la Commission fédérale puisse commencer ses travaux. Si on devait lever l'incompatibilité, comme le prévoit la proposition de loi, ne faudrait-il pas publier un nouvel appel aux candidats ?

M. Vankrunkelsven déclare soutenir la proposition de loi. Il attire toutefois l'attention sur une autre rigidité dans la composition de la Commission fédérale, à savoir l'obligation de désigner 4 docteurs en science sur un total de 14 membres. Il propose de supprimer cette obligation et de charger le ministre de la Santé publique de pourvoir à ces 4 places vacantes, sans préjudice de l'obligation générale, pour les 14 membres, d'être spécialisés dans les aspects médicaux, scientifiques, juridiques, éthiques et sociaux relatifs à la recherche sur les embryons.

Mme De Roeck doute que le problème soit dû à un manque d'intérêt. Elle constate cependant que de nombreuses personnes siègent déjà dans le Comité consultatif de bioéthique, dans la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'application de la loi relative à l'euthanasie ou dans un comité d'éthique local. Il est exact que les autres critères prévus par la loi du 11 mai 2003 ont, eux aussi, une incidence non négligeable, mais la situation sur le terrain montre que c'est surtout l'incompatibilité entre la qualité de membre de la Commission fédérale et celle de membre du Comité consultatif qui pose problème. Il est vrai que l'on dispose maintenant d'un nombre suffisant de candidats — fût-ce de justesse — mais si la loi reste inchangée, ceux-ci risquent soit de devoir se démettre d'autres commissions, soit de devoir renoncer à leur qualité de membre de la Commission fédérale. L'intervenante demande dès lors que les Chambres législatives votent rapidement la modification législative proposée; elle ajoute que celle-ci n'entraînera pas nécessairement des problèmes déontologiques, dans la mesure où certains experts du Comité consultatif de bioéthique et de la Commission fédérale s'occupent peut-être de dossiers distincts.

M. Mahoux rappelle qu'à l'origine, on avait instauré l'incompatibilité pour prévenir un conflit d'intérêts du fait que certaines personnes interviendraient simultanément dans chacun des deux organes et parce que l'on visait à une composition pluraliste. Il se peut que l'on soit allé trop loin en matière d'incompatibilité entre la qualité de membre du Comité consultatif et de membre de la Commission fédérale pour la recherche médicale et scientifique sur les embryons in vitro, de sorte que la loi est devenue inopérationnelle. Il n'y a en effet pas de problèmes fondamentaux de nature communautaire ou idéologique en l'espèce.

L'intervenant n'est pas d'accord avec ceux qui soutiennent qu'aussi longtemps que les membres de la Commission fédérale pour la recherche médicale et scientifique sur les embryons in vitro n'auront pas été désignés et que ladite commission ne fonctionnera pas de manière effective, aucune recherche sur des embryons ne peut avoir lieu. Même si les choses ne sont pas claires pour d'aucuns dans ce dossier, il ne fait aucun doute que pareille recherche peut parfaitement se faire aujourd'hui. La modification proposée clarifiera les choses sur le terrain et rassurera les opposants à la loi du 11 mai 2003, en permettant d'exercer un meilleur contrôle sur le terrain.

M. Brotchi partage l'avis de l'intervenant précédent. L'essentiel, c'est que tant la Commission fédérale pour la recherche médicale et scientifique sur les embryons in vitro que le Comité consultatif de bioéthique comptent en leur sein des personnes compétentes. Du reste, la pratique montre que les membres des diverses commissions d'éthique qui ont été créées exercent leur mandat en toute autonomie et consciencieusement. Même les chercheurs de terrain n'oseraient jamais entamer un projet de recherche sans solliciter préalablement l'avis du comité d'éthique. Il prône en conséquence la levée de l'incompatibilité, comme proposé dans le texte à l'examen, dès lors qu'il n'y a selon lui aucun danger à cet égard.

Mme Van de Casteele déclare qu'en tant que coauteure, elle soutient également la modification de loi proposée. Il n'y a aucune honte à devoir constater qu'une législation donnée s'avère trop rigide dans la pratique et à vouloir remédier à cette situation. Le but est en effet que la Commission fédérale pour la recherche médicale et scientifique sur les embryons in vitro puisse entamer ses travaux le plus rapidement possible. L'intervenante pense qu'il n'est pas nécessaire de lancer un nouvel appel aux candidats puisque le deuxième appel a permis d'en retenir un nombre suffisant. Elle propose de différer la discussion sur les autres problèmes éventuels qui ont été signalés au niveau de la composition, étant donné qu'en pratique, c'est surtout l'incompatibilité qui pose problème.

M. Beke soutient la proposition de loi pour les motifs qui ont déjà été exposés. Il rappelle que la préoccupation exprimée aujourd'hui l'a déjà été par les membres de son groupe politique dès la législature précédente, lors de la discussion de la proposition de loi nº 2-695, qui a donné naissance à la loi du 11 mai 2003.

IV. VOTES

Les articles 1er à 2 sont adoptés sans autre discussion à l'unanimité des 13 membres présents.

L'ensemble de la proposition de loi nº 3-1123 a été adopté à l'unanimité des 13 membres présents.

Confiance a été faite au rapporteur pour un rapport oral en séance plénière.

Le rapporteur, La présidente,
Jacques GERMEAUX. Annemie VAN de CASTEELE.