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17 JUILLET 2004
Procédure d'évocation
Le présent projet de loi, qui relève de la procédure facultativement bicamérale (article 78 de la Constitution), a été déposé par le gouvernement à la Chambre des représentants le 20 avril 2004 (doc. Chambre, nº 51-1035/1) et adopté par cette dernière par 87 voix contre 39 et 7 abstentions et transmis au Sénat le 15 juillet 2004. Le Sénat a évoqué le projet le 16 juillet 2004.
La commission a examiné le projet au cours de ses réunions des 16 et 17 juillet 2004, en présence de la ministre de l'Économie.
L'actuelle procédure d'implantation est régie par la loi du 29 juin 1975 relative aux implantations commerciales et par ses arrêtés d'exécution. Cette loi, également appelée « loi cadenas », a été approuvée en réponse à l'évolution sociale et économique de l'époque. C'est en effet à cette époque que les grands magasins ont commencé à se multiplier. Selon la procédure actuelle, tout complexe commercial (commerce de détail) d'une surface déterminée à savoir 1 500 m2 de surface bâtie brute et 1 000 m2 de surface commerciale nette en zone 1 et respectivement 600 m2 et 400 m2 hors zone 1 est tenu de demander une autorisation socioéconomique pour l'implantation d'un nouveau magasin, l'extension ou la modification importante de la nature de l'activité commerciale de magasins ou complexes commerciaux existants.
Près de trente ans plus tard, la loi de 1975 présente toutefois plusieurs lacunes et différents responsables politiques s'attèlent à sa réforme depuis dix ans déjà. Sous la législature 1995-1999, beaucoup de travaux ont eu lieu afin d'aboutir à un nouveau projet de loi. Sous la précédente législature, ce projet de loi a cependant été rejeté par le Conseil des ministres (octobre 2001). Un nouveau projet nettement plus simple (Picqué-Daems) réduisant le délai de traitement des demandes de 165 à 90 jours a finalement été approuvé par le Conseil des ministres en octobre 2002. En dépit du large concensus que réunissait ce projet, la commission de l'Économie de la Chambre n'a pu examiner ni approuver le texte dans son intégralité, par manque de temps en fin de législature. Aujourd'hui, cet examen a bien eu lieu et c'est hier que la commission de l'Économie a approuvé le texte légal à la majorité (14 juillet 2004).
Le projet de loi ne vise nullement à libéraliser le secteur de la distribution ou à cadenasser la création d'implantations commerciales de moyenne ou grande taille, mais bien à améliorer le cadre légal vieux de trente ans et à mettre en place une procédure simplifiée, transparente et équitable.
En effet, contrairement à celle des autres États membres européens, la loi belge sur les implantations n'a pas du tout évolué, alors qu'en Belgique, comme dans le reste de l'Europe, la structure des villes, la demande et les besoins des consommateurs ainsi que l'aménagement du territoire ont connu une évolution significative.
La réglementation relative aux implantations doit être adaptée aux besoins et aux caractéristiques du paysage commercial actuel. Car, si la Belgique se caractérisait autrefois par un nombre élevé de points de vente de taille restreinte dans le centre des villes et des villages, notre pays compte surtout à présent des commerces de taille moyenne, magasins de périphérie qui relient les noyaux urbains entre eux. La tendance la plus récente est toutefois l'expansion de grandes chaînes de distribution européennes à proximité des entrées et sorties de grands axes de pénétration.
Par conséquent, il convient d'améliorer la cohésion entre les petites, les moyennes et les grandes entreprises de distribution sans entraver la création de nouvelles implantations commerciales ou l'extension d'implantations existantes et sans vider les noyaux urbains.
En outre, la procédure actuelle est également complexe et manque de transparence.
Tout d'abord, en raison de la distinction entre commerces « de zone 1 » (zone urbanisée) et « hors zone 1 ».
Deuxièmement, en raison du double critère : celui de la surface bâtie brute (les murs extérieurs du bâtiment, y compris les espaces de stockage) et de la surface bâtie nette (l'espace de vente accessible au public).
Troisièmement, car il existe trois organes consultatifs différents : le Comité socioéconomique pour la distribution, la Commission provinciale pour la distribution et la Commission nationale pour la distribution.
De surcroît, la procédure actuelle entraîne d'énormes contraintes administratives et est surtout très longue. Ainsi, le demandeur peut attendre jusqu'à 115 jours calendrier avant de recevoir un avis défavorable et jusqu'à 165 jours avant la notification d'un avis favorable ou d'un avis favorable sous conditions.
De plus, la législation actuelle offre peu de sécurité juridique. En effet, aucun recours ne peut être introduit en cas d'avis défavorable, que le collège des bourgmestre et des échevins est d'ailleurs tenu de suivre.
Le présent projet de loi relatif à l'autorisation des implantations commerciales ne modifie pas la philosophie de base de la réglementation actuelle en la matière, à savoir les quatres critères d'examen : 1) l'impact de la situation géographique de l'implantation commerciale, 2) l'impact sur les commerces existants, 3) l'impact sur l'emploi, et 4) les intérêts du consommateur, mais il poursuit l'objectif d'une amélioration considérable pour le demandeur. D'une part, car le projet de loi prévoit une procédure d'octroi de l'autorisation socio-économique simplifiée sur le plan administratif et plus transparente dans des délais stricts et plus courts, et d'autre part, car le demandeur dispose désormais d'une sécurité juridique nettement accrue.
En ce qui concerne spécifiquement la simplification administrative, les éléments suivants contribuent à une procédure simplifiée avec signification plus rapide de la décision relative à l'obtention ou non d'une autorisation socioéconomique :
la suppression de la distinction zonale est une simplification, car qu'un commerce se situe dans un noyau urbain ou non, une autorisation socio-économique n'est requise que pour les implantations d'une surface commerciale nette d'au moins 400 m2;
la suppression du double critère surface bâtie brute/surface commerciale nette. Contrairement à la procédure actuelle, un seul critère doit être vérifié, à savoir celui de la surface commerciale nette ou de la surface de vente proprement dite, et ce, uniquement pour les projets d'au moins 400 m2;
le collège des bourgmestres et échevins décide de façon autonome (c'est-à-dire sans avis préalable) quant aux projets d'une surface commerciale nette comprise entre 400 et 1 000 m2. La décision peut ainsi être signifiée plus rapidement au demandeur;
la décision est signifiée dans les 50 jours calendrier pour les projets entre 400 et 1 000 m2 et dans les 70 jours calendrier pour les projets d'une surface commerciale nette supérieure à 1 000 m2;
une procédure simplifiée pour les extensions restreintes qui correspondent à l'évolution normale d'un commerce et pour les déménagements dans un rayon d'1 kilomètre. De tels projets sont uniquement soumis à une déclaration préalable auprès du conseil communal;
seuls les projets d'une surface commerciale nette supérieure à 1 000 m2 requièrent un avis préalable d'un seul comité consultatif, qui réunit tant l'expertise technique nécessaire que les intérêts des organisations socioéconomiques (y compris les classes moyennnes). Il s'agit du Comité socioéconomique national pour la distribution, fusion du Comité socio-économique pour la distribution et de la Commission nationale pour la distribution. Ce comité donne, par définition, un avis non contraignant sur la base des critères d'examen actuels. Cet avis oriente le collège des bourgmestre et échevins qui doit toujours motiver sa décision en vertu de la loi de motivation de 1991.
Le présent projet de loi prévoit la suppression des commissions provinciales. Une représentation provinciale reste toutefois prévue via la représentation des organisations des classes moyennes au sein du Comité socioéconomique national pour la distribution.
En conclusion, la ministre souligne quelques aspects importants du projet de loi, qui contribuent à une sécurité juridique accrue, à savoir :
le demandeur et la commune peuvent être entendus par le Comité socioéconomique national pour la distribution. Pour les projets d'une surface de vente nette supérieure à 2 000 m2, les communes limitrophes qui en font la demande doivent obligatoirement être entendues. Les projets d'implantations d'une telle taille ont en effet un impact sur l'aménagement du territoire, les autres commerces et l'emploi, impact qui dépasse les limites de la commune;
une abstention de décision du collège des bourgmestre et échevins équivaut à une décision favorable et sur simple demande, le demandeur peut en recevoir une copie;
dans tous les cas décision favorable, décision favorable sous conditions, décision défavorable et abstention de décision un recours contre la décision du conseil communal peut être introduit auprès du Comité interministériel pour la distribution;
ce recours peut être introduit tant par le demandeur que par l'ensemble du Comité socioéconomique national pour la distribution et les associations socio-économiques du comité consultatif (au moins 7 membres).
Bref, le présent projet de loi relatif à l'autorisation des implantations commerciales vise surtout à mettre en place une procédure simplifiée et plus rapide. Il garantit aussi une sécurité juridique accrue sans affecter la philosophie de base, à savoir les quatre critères d'examen de l'actuelle loi sur les implantations commerciales.
Mme De Roeck déplore de devoir traiter dans l'urgence un tel projet de loi (surnommé « loi Ikea », mais dont il semble qu'Ikea ne soit nullement demandeur) qui aura d'énormes conséquences à long terme.
L'intervenante a de nombreuses critiques et quelques questions à formuler par rapport à l'exposé introductif de la ministre.
Celle-ci a déclaré que la législation actuelle devait être simplifiée d'urgence. Beaucoup de raisons peuvent être invoquées à l'appui de cette affirmation, comme l'excès de formalités administratives et la complexité de la procédure. La question est de savoir si le but poursuivi (raccourcir le délai dans lequel les entreprises obtiennent une décision) ne peut pas être atteint sans pour autant vider la loi de son contenu et ouvrir la porte à une atteinte à l'aménagement du territoire. Mme De Roeck aurait souhaité que les pouvoirs publics fassent preuve du même souci à l'égard, par exemple, des personnes qui doivent attendre plusieurs années avant de savoir si elles pourront ou non rester en Belgique.
Le projet donne en outre une complète autonomie de décision aux villes et communes, au motif que ces entités sont les mieux placées pour savoir où des implantations commerciales sont ou non indiquées, cependant que les conséquences de telles implantations s'étendent bien au-delà des limites de la ville ou de la commune concernée. C'est pourquoi il conviendrait à tout le moins de confier cette compétence aux régions. Sans vouloir sous-estimer le rôle des bourgmestres et des collèges des bourgmestre et échevins et leur souci de garantir l'emploi et l'aménagement du territoire dans leur ville ou leur commune, l'intervenante craint que le lobbying exercé par les grandes entreprises ne soit tel que certaines de ces instances ne seront pas en mesure d'y résister, et seront confrontées après coup aux conséquences négatives de leurs décisions.
L'argument selon lequel les implantations commerciales rendent une ville ou une commune plus vivante ne se vérifie pas toujours non plus dans la pratique. Ainsi, l'implantation d'une grande surface à la limite extérieure d'une petite ville peut avoir pour conséquence que cette ville et ses magasins se vident. On renforce ainsi des tendances déjà existantes dans notre société.
L'intervenante constate également que le Comité socioéconomique national pour la distribution nouvellement créé n'aura qu'une compétence d'avis. De plus, une série de paramètres dont cet organe devra tenir compte devront faire l'objet d'un arrêté royal. Il est donc très difficile, à l'heure actuelle, d'en apprécier le contenu et l'on demande en fait au législateur de donner carte blanche à l'exécutif sur ce point.
Mme De Roeck constate ensuite que des informations contradictoires circulent à propos des dossiers refusés. La ministre cite à cet égard le chiffre de 400 dossiers, alors que Unizo parle de 200 dossiers.
L'intervenante ajoute que, jusqu'à présent, il semble y avoir beaucoup plus d'opposants que de partisans de la loi en projet, y compris parmi les grandes organisations qui ne paraissent pas, en l'occurrence, avoir été entendues par leurs relais politiques traditionnels.
Un autre argument souvent invoqué est l'existence du plan structurel d'aménagement (ruimtelijk structuurplan), qui garantirait la subsistance d'espaces ouverts. Cependant, dans les déclarations d'intentions préalables aux négociations en vue de la formation du gouvernement flamand, l'intervenante a lu à plusieurs reprises qu'il était question de revoir les zones d'extension d'habitat et d'implantation des industries. Elle a donc des craintes pour l'avenir, et estime que le projet à l'examen risque d'ouvrir la porte à une révision du cadre actuel de l'aménagement du territoire.
L'argument de la création d'emplois est aussi souvent invoqué. L'oratrice ne croit cependant pas que la loi en projet produira nécessairement cet effet. D'une part, en effet, ce n'est pas parce qu'un magasin de meubles supplémentaire s'implante dans une région, que le consommateur achètera davantage. D'autre part, une des entreprises présentées comme les principales demanderesses de cette loi vend de plus en plus de produits fabriqués en Chine. Voter la loi en projet aura donc plutôt pour effet de créer des emplois dans un pays, où l'on sait que les conditions de travail sont loin d'être idéales.
M. Steverlynck critique le rythme de travail forcené qui est suivi pour l'examen du présent projet. Il s'interroge sur l'utilité d'une seconde lecture par le Sénat puisque M. Lenssen a déclaré que le texte ne pouvait plus être amendé car la Chambre n'était plus en mesure de procéder à un nouvel examen avant les vacances parlementaires. Une telle attitude est révélatrice du niveau de priorité réservé, à l'approche des vacances, à la protection des petits indépendants face à la pression des grandes chaînes de distribution.
À l'issue du super-conseil des ministres de Gembloux, le gouvernement a justifié un assouplissement de la loi du 29 juin 1975 relative aux implantations commerciales afin de donner aux grands groupes de distribution la possibilité d'assurer leur croissance sur le marché belge, ce qui aura un effet positif sur l'emploi.
Dans son exposé introductif, la ministre a qualifié la loi du 29 juin 1975 de « loi-cadenas ». L'orateur ne partage pas cette analyse. Il estime que le régime d'implantations commerciales, voulu par le législateur en 1975 en réaction à l'essor important des grands magasins au cours des années soixante et septante, a permis de canaliser l'extension de la distribution tout en permettant la réalisation de nouvelles implantations ou l'extension d'implantations existantes.
M. Steverlynck renvoie sur ce point aux informations chiffrées figurant dans le rapport de la Chambre (doc. Chambre, nº 51 1035/007, p. 34 et suivantes).
En ce qui concerne l'évolution de l'emploi brut créé en moyenne par 1 000 m2 de nouveaux commerces à grande échelle, l'intervenant constate que celui-ci n'a cessé de diminuer pour tomber, en 2002, à 5,8 travailleurs à temps plein et 2,8 travailleurs à temps partiel. L'orateur précise en outre que ces données sont brutes et ne tiennent pas compte du recul de l'emploi dans les commerces de détail. D'autre part, les créations réelles d'emploi sont souvent bien en deçà des chiffres annoncés lors du dépôt des dossiers. M. Steverlynck estime que, en chiffres nets, la création de nouvelles implantations commerciales a plutôt un effet destructeur que créateur d'emplois.
L'orateur constate que, dans le résumé déposé à la Chambre (doc. Chambre n 51 1035/001, p. 3), le gouvernement admet que la loi du 29 juin 1975 n'a pas mis un frein à l'évolution qui s'est produite dans la distribution, mais l'a accompagnée en recherchant un équilibre entre les commerces de type et de taille différents. Il se demande dès lors pour quelles raisons il est nécessaire de modifier aujourd'hui la loi de 1975.
L'objectif du projet à l'examen n'est donc pas, selon le gouvernement, de changer les principes de base de la loi actuelle, à savoir : assurer à l'utilisateur final une offre aussi large et équilibrée que possible, et cela au niveau de l'assortiment, de la qualité et de la proximité. De plus, la loi devrait garantir la viabilité des centres commerciaux des villes en les préservant d'un développement trop important des activités commerciales périphériques.
M. Steverlynck pense cependant que les conséquences pratiques du projet de loi seront en contradiction avec l'objectif théorique précité. Le projet a pour effet de vider la loi de 1975 de sa substance. En effet, en donnant aux communes le pouvoir de décider seules pour les projets dont la surface commerciale est comprise entre 400 m2 et 1 000 m2, il est à craindre que celles-ci cèderont aux pressions des grands groupes et que, de la sorte, l'on assiste à une extension effreinée de la grande distribution au détriment du commerce de proximité.
L'orateur peut souscrire à l'objectif de simplification de la procédure et de réduction des délais pour les traitements des demandes. Il doute cependant que l'amélioration de la sécurité juridique annoncée par le gouvernement soit réellement atteint.
Le collège des bourgmestres et échevins, qui se voit attribuer un pouvoir autonome de décision pour les demandes concernant des projets ayant une surface commerciale nette entre 400 m2 et 1 000 m2, doit disposer du temps nécessaire pour apprécier de manière correcte tous les éléments du dossier. C'est d'autant plus important que pour ce type de dossier, le Comité socioéconomique national pour la Distribution ne doit pas remettre d'avis.
M. Steverlynck met en outre en garde contre le risque que, dans de nombreux cas, faute de temps, le collège des bourgmestre et échevins ne prenne aucune décision. Or, en l'absence de décision, celle-ci est réputée favorable. Un recours contre la décision de la commune est ouvert auprès du Comité interministériel pour la distribution mais, à nouveau, l'absence de décision en degré d'appel équivaut à la confirmation de la décision attaquée.
L'orateur en déduit que, dans le régime mis en place, l'inertie des autorités profite à la grande distribution. Il renvoie par ailleurs aux critiques formulées par le Conseil d'État concernant le procédé de l'autorisation tacite (doc. Chambre nº 51 1035/001, p. 33).
Pour tenir compte de ces remarques, les auteurs ont prévu, à l'article 9 du projet, que le collège des bourgmestre et échevins délivre sur simple demande une confirmation de l'absence de décision rendue dans les délais.
Cette correction n'offre cependant pas toutes les garanties voulues. En effet, une telle procédure ne permet pas de s'assurer que tous les éléments essentiels (critères économiques, environnementaux, emploi ...) du dossier ont été effectivement pris en compte. De même, la procédure proposée ne permet pas de déterminer avec précision la date de prise de cours du délai d'appel : est-ce le moment à partir duquel l'absence de décision se réalise ou celui où l'on demande la confirmation de l'absence de décision ?
En ce qui concerne les projets commerciaux dont la surface est supérieure à 1 000 m2, le projet prévoit que le Comité socioéconomique national pour la distribution remet un avis non contraignant. L'article 7, § 2, précise les critères que le comité doit prendre en considération pour l'élaboration de son avis. Le projet est cependant muet sur les critères qui doivent être pris en considération par le collège des bourgmestre et échevins, à qui incombe le pouvoir de décision. Le collège doit-il se baser exclusivement sur les quatre critères définis à l'article 7, § 2 ? Peut-il prendre d'autres critères en considération ?
Le projet précise que l'avis du Comité socioéconomique national pour la distribution doit être motivé. Étant donné la composition de cet organe, l'intervenant doute que les membres du comité puissent aboutir à un accord. Pour assurer une plus grande transparence quant à la portée de l'avis, ne faudrait-il pas prévoir un vote au sein dudit comité pour aboutir soit à un avis favorable, soit à un avis favorable moyennant le respect de certaines conditions ou enfin à un avis défavorable. Cela faciliterait la tâche ultérieure des communes dans l'élaboration du processus décisionnel.
Enfin, selon la principale critique, que formulent aussi les diverses organisations des classes moyennes et la Vereniging van Vlaamse steden en gemeenten, il y a un manque de proportionnalité entre la décision prise au niveau communal et les conséquences de cette décision. Il n'est pas bon que les autorisations pour les ouvertures de magasins de plus de 2 000 m2 soient octroyées par les communes. Pareille décision devrait être prise au niveau régional ou, en cas d'objections institutionnelles, à tout le moins au niveau de la députation permanente, un organe qui détient déjà d'importantes compétences dans le domaines de l'aménagement du territoire.
Cette dernière remarque est aussi étayée par les conclusions de l'étude, Ruimte voor grootschalige distributie, qui a été réalisée à la demande de l'ancien ministre de l'aménagement du territoire, M. Van Mechelen. Celle-ci indique très clairement que les projets commerciaux à grande échelle ont toujours des retombées dépassant les frontières communales et que, les décisions les concernant doivent dès lors être prises à un niveau supérieur.
Quant au contenu du projet, l'intervenant rappelle ensuite que les partis de la majorité ont déclaré, avant les élections, qu'il fallait amender le projet de loi en détail. Ils voient apparemment les choses autrement aujourd'hui. Les partis de la majorité font ostensiblement le jeu du grand capital et le moins que l'on puisse dire est qu'ils ne portent pas vraiment les petits indépendants dans leur coeur, même s'ils affirment que les décisions d'implantation n'ont aucune conséquence pour le commerce de détail ni pour la viabilité des centres urbains. Les exemples étrangers prouvent le contraire.
Globalement, on peut noter à cet égard que notre pays a besoin d'une vision cohérente et d'une politique en matière de commerce de détail. Cela implique non seulement des mesures en matière d'implantation, mais aussi des mesures touchant à d'autres domaines politiques tels que la fiscalité, les possibilités de crédit, les compensations en cas de nuisances résultant de travaux publics, la sécurité sociale, ... Or le gouvernement actuel n'a encore pris aucune mesure dans ces domaines. Dans le cadre qui vient d'être esquissé, l'intervenant trouve que la régionalisation au niveau flamand qui est proposée serait une bonne chose. Il voudrait néanmoins déjà la voir réalisée grâce aux dispositions à l'examen et déposera dès lors des amendements.
Mme Van dermeersch dit aussi être indignée par la précipitation avec laquelle ce projet est expédié par le Sénat et par le fait que le gouvernement cède sous la pression de certains groupes multinationaux (Ikea).
Elle concède toutefois qu'il peut s'avérer nécessaire de réviser une loi vieille de 30 ans. Mais alors, il faut la réviser sur la base d'un débat sérieux et d'une procédure décente, dans le but de créer la sécurité juridique et non pas dans celui de conférer une compétence autonome au collège des bourgmestre et échevins. L'intervenante doute fort que les communes disposent des moyens et du savoir-faire nécessaire à une vision globale pour prendre de telles décisions. Vat-on pour autant octroyer des moyens et du savoir-faire aux villes et communes, pour leur permettre de remplir leur nouvelle mission ? Comment peut-on éviter une surenchère entre communes ? Comment peut-on éviter une politisation et un laxisme dans l'octroi des autorisations en question ?
La membre souligne en outre que les magasins de quartier, qui remplissent aussi une forme de contrôle social et de service social à l'égard des personnes âgées et des plus faibles se heurteront à des difficultés. Voilà notamment pourquoi elle estime que l'ouverture de vastes hypermarchés à l'extérieur des centres urbains n'est pas une bonne idée. Elle se demande en outre qui assumera les missions visées ci-dessus que remplissent actuellement les magasins de quartier.
Enfin, comme l'intervenant précédent, la membre stigmatise l'absence de plan général et global pour le commerce de détail, dans le cadre duquel on pourrait aussi conférer certaines compétences aux régions. D'autant plus que ce transfert de compétences figure aussi dans les programmes de parti du VLD e du Sp.a-Spirit.
M. Collas estime que les avantages et les inconvénients du projet à l'examen ont déjà été suffisamment bien expliqué par plusieurs intervenants. Personnellement, il estime que les avantages l'emporteront sur les inconvénients.
Mme Kapompolé déclare que le projet à l'examen permet de penser globalement et d'agir localement. Elle estime à cet égard que le niveau local est le plus à même d'apprécier la situation locale, et, si nécessaire, il peut y avoir une collaboration entre plusieurs villes et communes.
Un autre volet essentiel du projet de loi à l'examen est la réforme du Comité socioéconomique. L'intervenante apprécie que d'autres parties concernées y soient aussi associées. Par contre, le fait que son fonctionnement concret doive encore être défini par voie d'arrêté royal est pour elle un « inconvénient ».
La membre se réjouit par ailleurs des progrès accomplis en matière de simplification administrative, même si elle avait escompté que l'on exploite aussi les possiblités offertes par l'administration électronique.
Enfin, en ce qui concerne la baisse des ventes au détail, Mme Kapompolé déclare que beaucoup de villes sont parvenues à combiner la présence de magasins de détail spécialisés dans le centre urbain et de grandes surfaces à l'extérieur de celui-ci. Il faut faire en sorte que cette combinaison réussisse encore à l'avenir, mais il faut tenir compte aussi d'une réalité spécifique : le budget du client n'est pas illimité.
Mme Vienne souhaite faire trois observations, notamment sur le niveau du pouvoir compétent, sur la problématique de l'aménagement du territoire et sur l'évolution du secteur de la grande distribution en matière d'emploi.
En ce qui concerne le niveau du pouvoir compétent, l'oratrice est d'avis que la compétence doit rester fédérale. Au niveau fédéral, il faut avoir une réflexion sur la façon dont on peut, dans un si petit pays, gérer de manière intelligente sur l'ensemble du territoire, différentes implantations de grandes surfaces dont l'importance dépasse parfois le territoire belge. Cette réflexion doit aller au-delà de nos frontières territiorales, vu que la grande distribution ne connaît pas de frontières. Des habitants belges peuvent parfaitement faire leurs achats en France par exemple.
La composition du Comité socioéconomique national pour la distribution devrait être de nature à rassurer les régions. En effet, l'article 4, § 1er, 2º, prévoit que des membres effectifs et suppléants seront désignés sur proposition des régions.
En ce qui concerne l'aménagement du territoire, l'intervenante renvoie aux évolutions commerciales. Le centre-ville actuel doit être considéré comme un lieu de vie, un lieu d'échanges et un lieu de loisirs, où le commerce est plutôt spécialisé. L'image du centre-ville comme lieu pour faire tous ses achats semble dépassée.
La dernière observation porte sur l'emploi. L'intervenante s'étonne de la remarque que les grandes surfaces font perdre de l'emploi, ce qui lui semble inexact. Il est vrai que les espérances d'emploi ne sont pas toujours réalisées, ce qui vaut pour toute implantion d'entreprises. Il y a également des regroupements dans le secteur de la distribution, mais cette concentration se fait aussi dans d'autres secteurs, par exemple dans le secteur bancaire, le secteur agro-alimentaire, etc. La grande distribution est en effet regroupée, mais ceci est un acquis.
Il ne faut pas oublier, qu'en matière d'emploi et de développement, les grandes entreprises font également travailler tout un réseau de PME de production et un réseau d'artisans.
L'oratrice conclut que le projet de loi à l'examen semble équilibré et acceptable.
M. Wille s'étonne de la prise de position idéologique de Mme de Roeck et du fait que la plupart des membres optent pour une intervention visant à créer un climat politique plutôt qu'à entamer un débat fondamental sur la distribution et la consommation ainsi que sur l'économie et l'emploi. Dans une discussion de fond, il faut avoir l'honnêteté politique et intellectuelle de regarder en face les effets de la législation existante. D'aucuns nient par exemple qu'un grand nombre de décisions de refus qui ont été prises par le passé concernaient surtout des entreprises de petite taille.
En ce qui concerne l'intervention de M. Steverlynck, le membre s'interroge à propos du plaidoyer en faveur de la députation permanente. Cela conduit à une discussion fondamentale sur les tâches essentielles des pouvoirs publics. M. Steverlynck semble ne faire aucun cas de la structure de la prise de décision dans ce qu'il est convenu d'appeler le « paquet Rome » (aménagement du territoire, environnement, économie).
L'intervenant conclut qu'il est absolument nécessaire de modifier la loi et que le projet à l'examen fait les bons choix en ce qui concerne la structure et l'organisation du processus décisionnel.
Mme De Roeck souhaite dire clairement qu'elle défend le petit commerçant, la viabilité des villes et un bon aménagement structurel du territoire.
M. Steverlynck précise qu'il ne défend pas le commerce de détail par nostalgie. Les bons détaillants sont en effet des entrepreneurs qui sont capables de se défendre, qui sont créatifs et qui ont le sens de l'initiative. Tout ce qu'il veut, c'est fournir aux détaillants les opportunités nécessaires et instaurer un équilibre dans les relations commerciales. La loi de 1975 a été votée pour éviter que les détaillants ne se fassent « laminer »; tel doit également être l'objectif de la nouvelle législation.
L'intervenant pense cependant que le projet à l'examen vide ces belles intentions de leur substance et ne permet plus une mise en balance raisonnable des intérêts en jeu.
Pour ce qui est de la députation permanente, l'intervenant souligne que le but final est de régionaliser cette matière. Lorsqu'il est question de grandes implantations commerciales, le pouvoir de décision doit se situer non pas au niveau de la commune, mais à un échelon supérieur. Cependant, comme la régionalisation de cette matière nécessite une majorité spéciale qui ne peut pas être atteinte aujourd'hui, il est proposé ici de confier cette compétence à la députation permanente.
M. Wille fait référence à l'intervention des représentants d'Unizo au sein de la commission compétente de la Chambre, qui ont clairement montré que la législation actuelle conduit au démantèlement des petits commerces. Il faut vérifier pourquoi la législation en vigueur a produit les résultats en question. Il est bien entendu nécessaire que le commerce se développe de manière harmonieuse et qu'un équilibre s'installe. L'on ne peut pas se contenter de critiquer la nouvelle législation. On doit aussi tenir compte des effets néfastes qu'entraînerait le maintien de la situation existante.
M. Steverlynck fait observer que le but qui consiste à trouver un bon équilibre entre les petites et moyennes entreprises et la grande distribution n'apparaît pas dans le projet à l'examen. Le système de l'approbation tacite, par exemple, permet d'effectuer une mise en balance des intérêts en présence.
Mme De Roeck confirme qu'elle partage le point de vue du ministre, parce que la loi du 29 juin 1975 relative aux implantations commerciales doit être améliorée. Elle a engendré une trop grande paperasserie et les procédures sont trop longues.
Le présent projet de loi ne répond toutefois pas à sa préoccupation. S'il est vrai qu'il rationalise certains points, il ouvre par ailleurs largement la porte à une nouvelle prise d'assaut des espaces inoccupés et à de nouvelles atteintes au confort d'habitation dans nos villes. L'intervenant rejette totalement la remarque selon laquelle son objection est dictée par une méfiance fondamentale envers les pouvoirs locaux. Le pouvoir de décision qui est conféré aux collèges des bourgmestre et échevins dépasse cependant le niveau communal. C'est pourquoi elle plaide pour que l'on confie le pouvoir de décision à un niveau de pouvoir supérieur.
L'intervenante est convaincue que nombre de villes et de communes exerceront correctement leur compétence en la matière. D'autres ne seront pas à la hauteur et céderont aux groupes de pression.
1. La ministre ne souscrit pas à l'hypothèse de départ de Mme De Roeck, selon laquelle le projet aurait pu se contenter de raccourcir les délais dans lesquels les procédures doivent être clôturées et selon laquelle, en allant plus loin, le projet viderait complètement la loi actuelle de son sens.
La ratio legis du projet consiste en la révision approfondie d'une législation vieille de trente ans. Ce projet tend en particulier à une totale transparence des procédures. C'est pourquoi le pouvoir de décision en matière d'autorisation d'implantations commerciales est attribué à un organe politique démocratique, le collège des bourgmestre et échevins, qui est soumis à la réglementation relative à la publicité de l'administration et qui est tenu de motiver ses décisions. On crée en outre un organe consultatif, le Comité socioéconomique national pour la distribution, au sein duquel siégeront tant des représentants du pouvoir fédéral que des représentants des régions. Ceux-ci seront désignés par des mandataires politiques qui, chacun à son niveau de pouvoir, seront responsables politiquement.
Enfin, un recours est ouvert en cette matière, contre toutes les décisions du collège des bourgmestre et échevins, auprès du Comité interministériel pour la distribution au sein duquel siègent les ministres fédéraux et régionaux de l'Économie. La sécurité juridique est donc garantie de manière amplement suffisante.
Le risque d'assister à une cascade de décisions tacites est exclu. L'article 8, § 3, dispose qu'à défaut de décision du collège des bourgmestre et échevins dans les délais légaux, la décision est réputée favorable.
La ministre estime dès lors que les procédures proposées placent les administrations locales face à leurs responsabilités en les obligeant à prendre des décisions juridiquement fondées. Elle regrette que d'aucuns mettent en doute la compétence du collège des bourgmestre et échevins en cette matière et qu'ils aillent jusqu'à considérer cet organe comme une proie toute désignée pour le lobbying. Il faut respecter l'autonomie locale en l'espèce.
2. Selon la ministre, il n'y a aucune raison de craindre que le projet à l'examen ne compromette l'aménagement du territoire, surtout lorsque les décisions du collège des bourgmestres et échevins ont des effets transfontaliers. Lorsqu'un projet d'implantation commerciale porte sur une surface commerciale de plus de 2 000 m2, les villes et les communes limitrophes peuvent être entendues à leur demande. C'est pourquoi la commission compétente de la Chambre a adopté un amendement selon lequel ces villes et communes doivent être informées du projet (doc. Chambre, nº 51-1035/7, p. 23).
Si le collège des bourgmestre et échevins compétent ne tient pas compte des remarques des villes et communes limitrophes, celles-ci peuvent encore introduire un recours auprès du Comité interministériel pour la distribution précité.
Le projet ne donne donc pas « carte blanche » pour remettre en cause l'aménagement du territoire ni pour miner le plan de secteur. La Belgique connaît une législation relativement stricte en ce qui concerne l'aménagement du territoire. Cette législation détermine pour ainsi dire l'affectation de chaque mètre carré. On peut modifier cette affectation par exemple pour entamer des zones d'extension d'habitat mais les régions ont compétence exclusive en la matière. La législation en matière d'aménagement du territoire offre suffisamment de garanties.
3. Contrairement à ce que certains prétendent, les régions ne sont pas mises hors-jeu. Le Comité socio-économique national pour la distribution compte notamment six membres effectifs et six membres suppléants qui sont désignés sur proposition des régions.
4. Selon certaines critiques, les quatres critères de contrôle définis à l'article 7, § 2, sont insuffisants.
La ministre attire tout d'abord l'attention sur le fait que ces critères peuvent être complétés ou précisés par arrêté royal.
Elle s'oppose ensuite à l'amendement nº 10 de MM. Steverlynck et Caluwé, qui tend à compléter l'article 8 par un § 5, notamment, en vertu duquel le collège des bourgmestre et échevins et la députation permanente doivent motiver leurs décisions en tenant compte des critères fixés par le Roi conformément à l'article 7, § 2 (doc. Sénat, nº 3-816/2).
La ministre justifie son opposition par l'argument selon lequel on prendrait ainsi une décision « guidée ». On donnerait l'impression que la compétence d'évaluation du collège des bourgmestre et échevins serait limitée en fonction des quatres critères définis à l'article 7, § 2. Or, il ne faut pas perdre de vue que le collège est tenu, conformément à la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, d'indiquer dans ses décisions les considérations de droit et de fait qui leur servent de fondement.
Quel est ce fondement juridique ? Il s'agit bien entendu du texte à l'examen, avec les critères définis à l'article 7, § 2. Toutefois, le collège peut également invoquer d'autres considérations juridiques concernant, par exemple, la mobilité et l'aménagement du territoire.
5. S'agissant de l'impact négatif du projet sur le nombre de commerces de détail, la ministre fait remarquer que ce nombre a déjà diminué sous l'empire de la législation actuelle qui n'a manifestement eu aucune incidence à ce niveau.
6. En ce qui concerne la question du transfert aux régions de la compétence de délivrer les autorisations pour les implantations commerciales, la ministre souligne qu'il faudrait modifier radicalement la loi, ce qui prendrait du temps. L'on a tenté à plusieurs reprises, depuis 1995, de revoir la loi du 29 juin 1975 relative aux implantations commerciales. Le fait que l'on envisage un transfert de la compétence en la matière aux régions ne saurait faire obstacle à l'approbation du projet à l'examen. Ces deux choses n'ont rien à voir l'une avec l'autre.
7. Pour ce qui est de la demande visant à encourager le traitement de cette matière par la voie électronique, la ministre déclare que le projet aurait sans doute pu être un peu mieux étoffé à cet égard. Mais on pourra régler les choses dans l'arrêté royal qui doit encore être pris. On va en tout cas vérifier si l'on peut utiliser les moyens de télécommunication pour introduire les dossiers, par exemple. Sur ce point, la ministre donne la préférence à une méthode horizontale plutôt qu'à un régime spécifique qui serait défini dans le cadre du présent projet de loi.
M. Steverlynck souhaite répliquer sur trois points.
En ce qui concerne la compétence de contrôle du collège des bourgmestre et échevins, il prend acte du fait que le collège peut se baser non seulement sur les quatre critères définis à l'article 7, § 2, mais aussi sur d'autres considérations de fait et de droit, lorsqu'il met en balance les intérêts en présence. Le collège devra motiver sa décision sur la base des quatre critères précités, surtout lorsque le Comité socioéconomique national pour la distribution aura rendu un avis.
Or, ce comité ne doit pas rendre d'avis sur les projets de moins de 1 000 m2 et le collège des bourgmestre et échevins ne sera dès lors pas tenu de vérifier si les quatre critères sont remplis, d'une part, et pourra tenir compte d'autres critères, d'autre part. De là l'amendement nº 10 de l'intervenant, tendant à obliger le collège des bourgmestre et échevins à motiver sa décision au moins en fonction de ces quatre critères.
La ministre reconnaît que le collège des bourgmestre et échevins doit examiner l'avis du Comité socioéconomique national pour la distribution à la lumière des quatre critères définis à l'article 7, § 2. S'il ne le fait pas, le Conseil d'État annulera sa décision. Dans les cas où l'avis du comité précité ne doit pas être recueilli, c'est-à-dire ceux où il est question de projets portant sur une superficie de 400 à 1 000 m2, le collège doit néanmoins mentionner dans sa décision les considérations de fait et de droit qui fondent celle-ci. Il est à peu près certain que le Conseil d'État annulerait la décision du collège au cas où celui-ci n'aurait pas tenu compte des quatre critères en question.
Par ailleurs, M. Steverlynck rappelle que le Conseil d'État a estimé que la délégation des régions au Comité socioéconomique national pour la distribution ne pourrait pas être purement facultative. Il faudrait dès lors conclure des accords de coopération avec les régions.
Enfin, l'intervenant s'interroge sur la compétence du collège des bourgmestre et échevins dans cette matière. La commune ne dispose en effet pas des instruments adéquats. Au cas où une petite commune subirait des pressions importantes, la tentation serait grande de laisser passer le délai dans lequel l'avis doit être rendu, ce qui emporterait l'approbation tacite de la demande.
La ministre souligne qu'elle a acquis son expérience de gestion dans une ville de taille moyenne, qui peut même être qualifiée de grande selon les normes flamandes. Aujourd'hui, elle habite dans un petit village de 8 000 habitants, qui est traversé de part en part par une route régionale en bordure de laquelle sont installées quantité de grandes implantations commerciales. La ministre peut constater sur place que, malgré sa petite taille, cette commune s'acquitte avec beaucoup de calme et de tranquillité de ses missions en matière d'aménagment du territoire et que les décideurs locaux ne se laissent absolument pas influencer par des groupes de pression.
En réponse à la question de M. Steverlynck relative aux accords de coopération avec les régions, la ministre déclare qu'aucun accord de ce type n'est prévu à ce stade. Les régions sont représentées au sein du Comité socioéconomique national pour la distribution qui va être créé.
Mme De Roeck maintient son objection à la possibilité qui est offerte au collège des bourgmestre et échevins d'accéder tacitement à une demande en restant en défaut de statuer (article 8, § 3) et elle ne peut dès lors pas souscrire au présent projet de loi.
La ministre répète qu'à l'inverse de la préopinante, elle fait bel et bien confiance aux organes décisionnels qui sont créés par le présent projet de loi et qu'elle se fie au sens des responsabilités politiques des mandataires politiques concernés.
MM. Steverlynck et Caluwé déposent les amendements nºs 1, 2 et 3 qui tendent à transférer du fédéral aux régions la compétence liée à la loi relative aux implantations commerciales (voir doc. Sénat nº 3-816/2, 2003-2004).
La ministre propose de rejeter ces amendements, qui ont également été déposés au cours de la discussion à la Chambre des représentants, parce qu'ils sont incorrects du point de vue légistique.
Article 3
MM. Steverlynck et Caluwé déposent ensuite l'amendement nº 4 qui vise à soumettre les implantations commerciales d'une superficie de plus de 2 000 m2 à une autorisation à délivrer par la députation permanente.
La ministre répond que le gouvernement juge qu'il n'est pas opportun d'accorder cette compétence à la députation permanente (qui fait d'ailleurs aussi l'objet des amendements nºs 6, 7, 10 et 13), bien qu'il soit possible de le faire du point de vue légistique. Les provinces sont déjà associées indirectment à l'octroi des autorisations socioéconomiques, en ce sens qu'elles peuvent faire appel des permis d'urbanisme. De plus, ces amendements créent un niveau de pouvoir supplémentaire, ce qui est contraire à l'objectif du présent projet qui est d'inscrire des délais de décision plus rapides dans la procédure.
Le projet à l'examen répond à la préoccupation relative au caractère transfrontalier des grands projets, dès lors qu'il prévoit que les communes riveraines seront entendues par le Comité socioéconomique national pour la distribution, si elles le souhaitent.
L'article 11 du projet prévoit les voies de recours nécessaires et toute personne physique ou morale peut former un recours devant le Conseil d'État.
Enfin, le collège des bourgmestre et échevins doit motiver sa décision. La commune est ainsi obligée de tenir compte des plans communaux d'exécution spatiale ancrés dans le plan d'aménagement structurel provincial, lequel s'inscrit à son tour dans le schéma de développement de l'espace régional , des intérêts des consommateurs, de l'impact sur l'emploi et des conséquences pour les commerces existants, sans oublier les aspects liés à la mobilité.
La ministre estime par conséquent que ces amendements ne sont pas acceptables.
M. Wille ajoute que les amendements qui tendent à attribuer des compétences à la députation permanente ne précisent pas clairement si cela doit se faire ou non dans le cadre de la cogestion. Si oui, la casuistique montre que la députation permanente peut être interpellée non pas à propos de cas spécifiques, mais seulement en ce qui concerne le cadre politique général de sa décision éventuelle. Par conséquent, on attribuerait ainsi des compétences à un niveau de pouvoir qui, démocratiquement, ne peut pas être appelé à rendre des comptes.
M. Steverlynck réplique que l'attribution de compétences à un niveau de pouvoir supérieur n'empêche pas de raccourcir la procédure. En ce qui concerne les projets transfrontaliers, l'intervenant répète que le fait d'entendre les communes limitrophes n'équivaut pas à recueillir un avis ni, a fortiori, à prendre une décision.
MM. Steverlynck et Caluwé déposent l'amendement nº 5, qui vise à préciser que les limitations prévues à l'article 3 concernent la surface commerciale nette autorisée.
La ministre déclare qu'il existe effectivement des implantations qui sont exploitées sans autorisation ou en vertu d'une autorisation partielle. Le projet à l'examen ne vise toutefois pas à résoudre le problème de ces exploitations non réglementaires, ni à régulariser celles-ci. Il est d'ailleurs impossible d'octroyer une autorisation pour des exploitations non réglementaires, et il faut que les communes le sachent. La ministre demande par conséquent de rejeter cet amendement.
Article 6
Pour la discussion de l'amendement nº 6, on se reportera à la discussion de l'amendement nº 4 à l'article 3.
Article 7
Pour la discussion de l'amendement nº 7, on se reportera également à la discussion de l'amendement nº 4.
MM. Steverlynck et Caluwé déposent ensuite l'amendement nº 8, qui tend à faire en sorte que l'avis du Comité socioéconomique national pour la distribution soit plus clair. Cet avis deviendrait alors un meilleur outil pour la commune.
La ministre souligne que le projet à l'examen crée une nouvelle constellation par rapport à la législation existante. En effet, le fait de spécifier l'avis conformément à la législation actuelle a des conséquences en matière de procédure. En cas d'avis défavorable, le collège des bourgmestre et échevins perd son pouvoir de décision, étant donné que l'avis est contraignant. L'avis prévu dans le projet parlera de lui-même. La ministre demande que l'amendement soit rejeté.
Articles 8 et 9
MM. Steverlynck et Caluwé déposent l'amendement nº 9 qui tend à donner force obligatoire à l'avis du Comité socioéconomique national pour la distribution lorsqu'il est défavorable ou favorable sous conditions.
La ministre déclare que cela rendrait le projet encore plus strict que la législation actuelle en vertu de laquelle seul l'avis défavorable est obligatoire. De plus, un avis obligatoire prive le collège de son pouvoir de décision. La ministre demande dès lors que l'amendement soit rejeté.
Pour la discussion de l'amendement nº 10, il est à nouveau renvoyé à la discussion de l'amendement nº 4 à l'article 3.
MM. Steverlynck et Caluwé déposent l'amendement nº 11 qui tend à lier la décision du collège des bourgmestre et échevins aux critères définis à l'article 7, § 2.
MM. Steverlynck et Caluwé déposent ensuite les amendement nos 15 et 16 qui tendent à supprimer le principe des autorisations tacites.
La ministre renvoie à la discussion générale et demande de rejeter ces amendements.
Article 11
MM. Caluwé et Steverlynck déposent un amendement nº 12 visant à remplacer le 3º à l'article 11, § 2, du projet de loi.
M. Steverlynck explique que l'amendement vise à élargir la compétence d'introduire un recours pour le Comité socioéconomique national en octroyant ce pouvoir à chacun de ses membres alors que le texte proposé exige l'action de sept membres au moins.
La ministre répond qu'il serait illogique de permettre à chaque membre individuel d'introduire un recours contre chaque décision du comité dont il fait partie. L'objectif n'est pas de permettre à un groupe d'intérêt d'imposer sa volonté à la majorité. La ministre rappelle que le même amendement a été rejeté à la Chambre des représentants.
MM. Caluwé et Steverlynck déposent un amendement nº 13 visant à modifier l'article 11 du projet de loi de manière à viser aussi les décisions de la députation permanente.
M. Steverlynck explique que l'objectif est d'ouvrir également un recours contre les décisions de la députation permanente.
Article 12
M. Caluwé et Steverlynck déposent un amendement nº 14 visant à ajouter un quatrième alinéa à l'article 12 du projet de loi.
M. Steverlynck explique que l'amendement nº 14 impose au secrétariat du Comité national d'établir une banque de données reprenant toutes les demandes d'autorisation et les décisions prises.
La ministre estime qu'il n'appartient pas au législateur de régler ce qui tient au fonctionnement du secrétariat. C'est d'abord le comité de direction de chaque administration qui détermine ses propres règles d'organisation interne. Si des questions doivent encore être réglées, elles le seront par arrêté royal ou par circulaire.
M. Steverlynck demande si la ministre est néanmoins d'accord sur l'idée d'une base de données et d'un rapport annuel et si elle a l'intention de faire adopter un arrêté royal sur ce point.
La ministre répond qu'il lui semble évident que le secrétariat conservera les données sur les demandes introduites et les décisions rendues. Si, néanmoins, le secrétariat ne le faisait pas, on pourrait toujours intervenir. Mais c'est presque une règle de bonne administration.
Les amendements nºs 1, 2 et 3 sont rejetés par 10 voix contre 4.
L'amendement nº 4 est rejeté par 12 voix contre 2 et 2 abstentions.
L'amendement nº 5 est rejeté par 11 voix contre 5.
Les amendements nºs 6 et 7 sont rejetés par 12 voix contre 2 et 2 abstentions.
Les amendements nºs 8 et 9 sont rejetés par 11 voix contre 5.
L'amendement nº 10 est rejeté par 12 voix contre 2 abstentions.
L'amendement nº 11 est rejeté par 11 voix contre 5.
L'amendement nº 12 est rejeté par 11 voix contre 4 et 1 abstention.
L'amendement nº 13 est rejeté par 12 voix contre 2 et 2 abstentions.
L'amendement nº 14 est rejeté par 11 voix contre 5.
Les amendements nºs 15 et 16 sont rejetés par 11 voix contre 3 et 2 abstentions.
Le projet de loi est entièrement adopté par 11 voix contre 5.
Ce rapport a été approuvé à l'unanimité des 11 membres présents.
Les rapporteurs, | Le président, |
Christiane VIENNE. Paul WILLE. |
Pierre GALAND. |
Le texte adopté par la commission
est identique au texte
du projet transmis par la Chambre des représentants
(voir doc. Chambre, nº 51-1035/12)