3-779/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2003-2004

24 JUIN 2004


Proposition de loi visant à insérer un article 3ter dans la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail

(Déposée par Mme Annemie Van de Casteele et M. Jacques Germeaux)


DÉVELOPPEMENTS


Le décret flamand du 17 juillet 2000 visant à l'introduction d'un budget d'assistance personnelle (1) crée le cadre juridique permettant d'octroyer des budgets d'assistance personnelle aux personnes handicapées. Ce budget leur permet de financer les frais de l'assistance personnelle et de son organisation. À cet effet, elles passent un contrat avec un assistant personnel.

Conformément à l'article 12 de l'arrêté du gouvernement flamand du 15 décembre 2000 (2), ce contrat prend la forme :

« 1º d'un contrat de travail entre le titulaire du budget et l'assistant personnel, le titulaire du budget en sa qualité d'employeur devant remplir ses obligations de droit fiscal et social;

2º d'un contrat assurant l'assistance personnelle du titulaire du budget, que celui-ci conclut avec un bureau d'intérim, un prestataire de services indépendant ou avec une structure ou institution, qui présente au Fonds flamand une déclaration sur l'honneur certifiant que les activités (effectuées dans le cadre dudit contrat) ne sont pas déjà subventionnées par les autorités fédérales, communautaires, régionales ou locales. »

Lors de l'examen du décret en commission du Bien-être, de la Santé et de l'Égalité des chances du Parlement flamand, il a été précisé d'emblée que les intervenants de proximité, les parents et les alliés pourraient tenir lieu d'assistants personnels (3).

Depuis l'instauration du budget d'assistance personnelle, on s'est, à plusieurs reprises, posé la question de savoir si un contrat de travail entre conjoints était possible. Dans sa réponse à la question posée par Mme Mia De Schamphelaere, la ministre de l'Emploi et du Travail de l'époque, Mme Onkelinx, déclare ce qui suit (4) : « À la lumière de la doctrine que vous avez fournie et de la jurisprudence que l'on peut trouver à ce propos, on constate également que du point de vue du droit du travail, il n'existe pas d'obstacle juridique à la conclusion d'un contrat de travail entre époux et à ce que les principes généraux soient appliqués à cette situation. En conséquence, un(e) époux(se) peut exercer une activité professionnelle comme travailleur sous l'autorité de son époux(se), par exemple dans le cadre d'un budget d'assistance personnelle, à condition qu'il existe réellement une telle relation d'autorité. Le fait de savoir si le lien d'autorité est réel dépendra des circonstances concrètes. Il appartiendra aux parties concernées par le contrat d'en apporter la preuve. En cas de doute, seule une décision du juge pourra apporter une réponse définitive. En ce qui concerne l'article 213 du Code civil relatif à l'obligation pour chaque époux de se prêter aide et assistance mutuelle, il convient de noter qu'il existe une différence entre cette obligation et l'obligation d'exercer l'activité professionnelle en tant que travailleur soumis à l'autorité de l'époux(se). La qualité d'époux et la communauté d'intérêt qu'elle implique n'empêchent pas l'existence d'un lien d'autorité. »

Quelque 900 personnes bénéficient d'un budget d'assistance personnelle. Plusieurs centaines d'entre elles ont pris leur conjoint, un de leurs parents ou un de leurs enfants comme assistant personnel. L'ONSS a fait savoir qu'il n'admettrait plus cette situation à partir du 1er janvier 2005. L'office justifie simplement sa décision en posant qu'un contrat de travail requiert qu'un employeur puisse exercer son autorité, et qu'il ne saurait être question d'autorité patronale lorsqu'il s'agit de proches parents.

La décision de l'ONSS est en totale contradiction avec la jurisprudence récente de la Cour de cassation, depuis l'arrêt du 23 décembre 2002. « Pour la cour [du travail d'Anvers], cette jurisprudence récente de cassation implique qu'il ne faut plus rechercher, parmi les données factuelles, les éléments constitutifs soit d'un statut de travailleur indépendant, soit d'un statut de travailleur salarié.

Il faut partir du statut choisi par les parties et vérifier si les éléments de fait ne contredisent pas celui-ci.

La cour peut se rallier à cette approche, dès lors que celle-ci permet de concilier la liberté contractuelle, qui est un des principes essentiels du droit des obligations, avec le caractère contraignant du droit du travail. » (5) (traduction)

Afin de lever l'insécurité juridique dans laquelle se trouvent les bénéficiaires d'un budget d'assistance personnelle, les auteurs souhaitent instituer une présomption de contrat de travail dans la loi relative aux contrats de travail. Tout contrat conclu entre un titulaire de budget et un assistant personnel, au sens du décret du 17 juillet 2000, sera présumé être un contrat de travail. Les personnes handicapées auront ainsi la garantie de pouvoir choisir librement leur assistant personnel. Si l'intéressé souhaite engager un tiers comme assistant personnel, il sera libre de le faire, et s'il souhaite engager à ce titre un membre de sa famille il aura l'assurance que l'ONSS ne lui mettra pas des bâtons dans les roues.

Annemie VAN de CASTEELE.
Jacques GERMEAUX.

PROPOSITION DE LOI


Article 1er

La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Art. 2

Il est inséré dans la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, un article 3ter, rédigé comme suit :

« Art. 3ter. ­ Tout assistant personnel qui, dans le cadre du décret du 27 juin 1990 portant création d'un Fonds flamand pour l'intégration sociale des personnes handicapées en vue de l'introduction d'un budget d'assistance personnelle, effectue un travail pour le titulaire du budget est présumé être lié à celui-ci par un contrat de travail. »

12 mai 2004.

Annemie VAN de CASTEELE.
Jacques GERMEAUX.

(1) Décret du 17 juillet 2000 modifiant le décret du 27 juin 1990 portant création d'un Fonds flamand pour l'intégration sociale des personnes handicapées en vue de l'introduction d'un budget d'assistance personnelle, Moniteur belge du 17 août 2000.

(2) Arrêté du Gouvernement flamand du 15 décembre 2000 établissant les conditions d'octroi d'un budget d'assistance personnelle aux personnes handicapées (Moniteur belge du 30 janvier 2001).

(3) Parlement flamand, doc. nº 283 (1999-2000), nº 3, rapport, p. 5.

(4) Sénat, Questions et Réponses, nº 2-37 (2000-2001), question nº 1292 de Mme De Schamphelaere, 18 mai 2001.

(5) Cour du travail d'Anvers, 4 septembre 2003; voir également Cour de cassation, 15 janvier 2004.