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Mme Marie-José Laloy (PS). - À l'heure où l'ONU dénonce par une résolution la brutale opération militaire menée par l'armée israélienne dans la ville de Rafah, qui a coûté la vie à des dizaines de civils palestiniens, et demande à l'État d'Israël de respecter les obligations que lui impose le droit humanitaire international, M. Marwane Barghouti, membre du Conseil législatif palestinien, est menacé par la justice israélienne d'une réclusion à perpétuité après avoir été reconnu coupable du meurtre de cinq Israéliens.
Or, dans un rapport sur le procès de Marwane Barghouti, rédigé par le juriste français Simon Foreman pour le compte de l'Union interparlementaire, il est souligné que ce procès n'est pas conforme aux normes internationales. Je vous ai d'ailleurs fait parvenir, monsieur le vice-premier ministre, une copie de l'intégralité du rapport de M. Foreman.
La capture de M. Barghouti, à la suite d'une opération militaire, heurte ainsi les Accords d'Oslo qui habilitent les institutions palestiniennes à juger les infractions commises en territoire palestinien. Par ailleurs, la détention au secret, les mauvais traitements et, plus généralement, les conditions de détention, tout comme la restriction des communications de M. Barghouti avec ses avocats et les manquements à la présomption d'innocence, participent de l'enjeu politique de ce procès.
Je rappelle que de nombreux observateurs de la région considèrent M. Barghouti comme un interlocuteur ayant l'autorité nécessaire pour faire accepter un plan de paix basé sur des concessions réciproques.
Dans ce contexte, quelle légitimité revêt pour la Belgique la condamnation d'un parlementaire démocratiquement élu, qui devrait être prononcée le dimanche 6 juin, vu les manquements à la procédure judiciaire mentionnés et quelle réaction peut-on attendre de vous-même et de votre département ?
M. Louis Michel, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères. - Je connais personnellement M. Barghouti. J'ai eu à plusieurs reprises des contacts avec lui et je l'ai rencontré. Son cas est évidemment bien connu et nos postes diplomatiques à Tel-Aviv et à Jérusalem ont reçu pour consigne de suivre cette affaire de très près, ce que font d'ailleurs la plupart des ambassades et consulats européens sur place.
Une présence de diplomates européens au tribunal pendant les procès est toujours assurée pour pouvoir vérifier si ceux-ci se déroulent de façon équitable et pour montrer notre intérêt pour leur bon déroulement. La cour devrait se prononcer le 6 juin 2004 et j'ai appris que M. Barghouti risquait d'être condamné à cinq fois une peine de prison à vie.
J'ai bien reçu, madame, votre lettre portant en annexe le rapport du juriste français Simon Foreman. Ce rapport contient certains éléments pouvant indiquer qu'il s'agit d'un procès politique, M. Barghouti étant un Palestinien autochtone proche d'Arafat.
Nous suivrons donc cette affaire avec beaucoup d'attention et j'ai demandé à notre ambassadeur à Tel-Aviv de nous informer en temps réel de tout nouvel élément dans ce dossier. Je ne manquerai pas de prendre les initiatives et de faire les démarches nécessaires en fonction des informations que je recevrai.
Le document que vous m'avez fait parvenir contient un certain nombre d'éléments qui sont de nature à mettre en cause le caractère serein du procès. Ce texte émane d'un avocat ; ce n'est donc pas une instance juridictionnelle qui donne un avis. Ces éléments sont importants et il convient de vérifier la réalité de certains faits étayant ce rapport, faits qui nous interpellent.
Nous sommes extrêmement concernés par cette question. Je ne manquerai pas de vous tenir informée. J'ai aussi l'intention de demander à l'ambassadeur d'Israël en Belgique de me rencontrer pour évoquer le problème.
Mme Marie-José Laloy (PS). - Un avocat indépendant a été autorisé à réaliser cette étude pour l'Union interparlementaire (UIP) parce le gouvernement israélien avait refusé une mission de parlementaires demandée par le comité des droits de l'homme de l'UIP. Dans un deuxième temps, nous avons donc jugé utile d'avoir recours aux services d'un juriste totalement indépendant.
Lors de la dernière session à Mexico, voici quelques semaines, ce rapport a été présenté et adopté à la quasi-unanimité de tous les représentants des parlements, y compris celui de la Belgique. Nous étions présents avec M. de Donnea. Nous avons examiné tous les documents. Il s'agit donc d'un soutien supplémentaire qui peut témoigner du bien-fondé des documents qui vous ont été transmis.
M. Louis Michel, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères. - Je ne doute évidemment pas du bien-fondé de ces documents. Ils sont bien étayés. J'ai eu l'occasion de les parcourir rapidement. Il s'agit d'éléments qui nous permettront de nous forger notre propre appréciation. Je ne manquerai pas de suivre cette affaire de très près, je le répète, et de vous communiquer les résultats de mes démarches.
J'ai évoqué la question israélo-palestinienne avec les interlocuteurs que j'ai rencontrés aux États-Unis. J'aurai peut-être l'occasion d'en dire un mot en réponse à la demande d'explications de M. Galand.