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8 JUILLET 2003
La présente proposition de loi reprend, avec quelques modifications, le texte d'une proposition qui a déjà été déposée au Sénat le 15 janvier 2001 (doc. Sénat, nº 2-621/1 2000/2001).
Déjà le 22 décembre 1995, M. Santkin déposait une proposition de loi modifiant et complétant les dispositions du Code civil concernant les règles particulières aux baux relatifs à la résidence principale du preneur.
En effet, l'article 23 de la Constitution énonce que chacun a le droit de disposer d'un logement décent. Si ce droit est aujourd'hui élevé au titre de droit constitutionnel, il appartient au législateur de le concrétiser afin qu'il puisse rencontrer son objectif de sauvegarde de la dignité humaine.
Comme le mettent en évidence les auteurs du Rapport général sur la pauvreté, il est capital d'investir les moyens nécessaires afin d'éviter qu'une famille ne se retrouve dans la rue.
Le texte alors déposé se situait en droite ligne de cette philosophie.
Inspiré de la législation française, il avait pour objet de modifier la section II du livre III, titre VIII, chapitre II, du Code civil relatif à la protection de la résidence principale du preneur en complétant, d'une part, son article 11 et en insérant, d'autre part, un nouvel article 11bis.
En complétant l'article 11, on voulait étendre le pouvoir d'appréciation du juge en fixant des éléments objectifs qui donnent un contenu au droit du logement.
Le logement, c'est le lieu d'éducation des enfants, le point d'ancrage vital de la famille. Il est dès lors primordial de pouvoir disposer avec certitude d'un logement de bonne qualité à un prix équitable et dans un environnement agréable.
En insérant un nouvel article 11bis, on tendait à limiter la précarité dans laquelle se trouvent les familles. Si l'angoisse de l'expulsion qui participe de la souffrance humaine et familiale vécue par les plus pauvres d'entre nous est déjà intolérable, l'expulsion en période de froid constitue une menace plus grave encore.
En effet, dans ces circonstances, au-delà des difficultés d'existence, c'est leur survie qu'ils doivent alors assurer.
Au cours de la session 1997-1998, le ministre de la Justice de l'époque a déposé un projet de loi modifiant certaines dispositions du Code judiciaire relatives à la procédure en matière de louage des choses et la loi du 30 décembre 1975 concernant les biens trouvés en dehors des propriétés privées ou mis sur la voie publique en exécution de jugements d'expulsion.
Lors de l'examen de ce projet au Sénat, dans le cadre de la procédure d'évocation, de nombreux amendements ont été déposés en vue d'améliorer les dispositions soumises à approbation.
In fine, la loi du 30 novembre 1998 a ainsi introduit un article 1344ter dans le Code judiciaire. Cet article s'applique à toute demande introduite par requête écrite, par citation ou par comparution volontaire, tendant à l'expulsion d'une personne physique qui a conclu un bail à loyer visé à la section II ou la section IIbis du livre III, titre VIII, chapitre II du Code civil portant sur un bien qui, selon l'acte introductif d'instance, sert de domicile au preneur ou, à défaut de domicile, de résidence.
Ainsi, que la demande soit introduite par requête écrite, par comparution volontaire, ou par citation, la loi prévoit qu'après un délai de quelques jours seulement, une copie de la requête écrite ou de la citation parvienne au centre public d'aide sociale du domicile du preneur, ou à défaut de domicile, de la résidence du preneur.
Il est également prévu que le preneur puisse manifester son opposition à la communication de la copie de l'acte introductif d'instance au centre public d'aide sociale, dans le procès-verbal de comparution volontaire ou auprès du greffe dans un délai de deux jours à partir de la convocation par pli judiciaire ou auprès de l'huissier de justice dans un délai de deux jours à partir de la signification.
Afin d'aider au mieux les personnes concernées, qui se retrouvent dans une situation particulièrement délicate, surtout en période hivernale, nous pensons que les associations de défense des locataires devraient également être informées selon les mêmes modalités que celles prévues pour les CPAS.
Les services du Syndicat des locataires, notamment, peuvent prodiguer des conseils préventifs si l'affaire peut être soumise au tout début de la procédure. Ainsi, ils vérifient la régularité des procédures, informent sur les voies de recours et peuvent faire conclure des accords amiables entre propriétaires et locataires, qui excluent l'expulsion.
Mais, dans la plupart des cas, les locataires se présentent tardivement et même jusqu'à la veille de l'expulsion. Dans de telles circonstances, l'urgence est d'éviter l'expulsion dont l'inhumanité est évidente.
En conséquence, des contacts sont pris avec tous les intervenants (propriétaire, avocat, huissier), des propositions d'apurement sont faites et des délais sont demandés. Si l'expulsion ne peut être écartée, une solution de relogement, souvent provisoire, est activement recherchée et très souvent concrétisée.
La présente proposition de loi se fixe pour objectif de modifier l'article 1344ter du Code judiciaire dans ce sens.
En outre, comme le prévoit déjà la législation française, nous entendons qu'il soit sursis aux mesures d'expulsion pendant les mois les plus froids de l'année afin d'endiguer quelque peu le processus d'exclusion sociale dont sont victimes de plus en plus d'entre nous. Il ne s'agit nullement d'une atteinte au droit de propriété en ce que cette disposition n'empêche l'expulsion que dans le cas où aucune possibilité de relogement n'est prévue.
La présente proposition prévoit donc une modification de l'article 1344quater du Code judiciaire dans ce sens.
Marie-José LALOY. Philippe MAHOUX. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
À l'article 1344ter du Code judiciaire, inséré par la loi du 30 novembre 1998, sont apportées les modifications suivantes :
A. Le § 2 est complété par l'alinéa suivant :
« Le greffier envoie, selon les mêmes modalités, une copie de la requête écrite à l'organisme de défense des locataires le plus proche du domicile ou, à défaut de domicile, de la résidence du preneur. »
B. Le § 3 est complété par l'alinéa suivant :
« L'huissier de justice envoie, selon les mêmes modalités, une copie de la citation à l'organisme de défense de locataires le plus proche du domicile ou, à défaut de domicile, de la résidence du preneur. »
C. Au § 4, les mots « et à l'organisme de défense des locataires » sont insérés entre les mots « centre public d'aide sociale » et les mots « dans le procès-verbal ».
Art. 3
À l'article 1344quater, alinéa 1er, inséré par la loi du 30 décembre 1998, sont apportées les modifications suivantes :
A. Les mots « , en particulier pendant l'hiver » sont supprimés;
B. La dernière phrase est remplacée comme suit :
« Malgré l'expiration des délais accordés précédemment, il doit être sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er décembre de chaque année jusqu'au 28 février de l'année suivante, à moins que le relogement de l'intéressé soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l'unité, les ressources financières et les besoins de la famille. »
Art. 4
La présente loi entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.
19 juin 2003.
Marie-José LALOY. Philippe MAHOUX. |