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25 MARS 2003
Le projet de loi bicaméral à l'examen a initialement été déposé comme une proposition de loi à la Chambre des représentants par M. Hugo Coveliers et consorts le 6 mai 2002 (doc. Chambre nº 50-1790/1).
Le projet vise à adapter la loi du 18 juillet 1991 organique du contrôle des services de police et de renseignements, de manière que le Comité permanent de contrôle des services de police (Comité P) puisse continuer, après la réforme des polices, à jouer le rôle qui lui est dévolu.
Le texte de la proposition de loi a été adopté en séance plénière de la Chambre des représentants le 27 février 2003 et le projet de loi a été transmis au Sénat le 28 février 2003.
Le projet de loi a été discuté en commission de l'Intérieur et des Affaires administratives les 18 et 25 mars 2003.
Le ministre confirme son soutien aux aménagements que la proposition de loi votée à l'unanimité par la Chambre prévoit d'apporter à la loi organique du 18 juillet 1991 du contrôle des services de police et de renseignements. Il se rallie tant aux modifications qui résultent immédiatement de la réforme des polices et de la nouvelle structure policière qu'à celles qui touchent plus directement le fonctionnement même du Comité P.
Il s'agit de l'instauration de modalités opérationnelles utiles à la conduite même des enquêtes mais surtout, de manière plus substantielle, de la restauration du Comité P dans sa vocation d'observatoire de la chose policière. Son Service d'enquêtes n'interviendra désormais dans les plaintes individuelles que si les organes du contrôle interne ou de l'inspection générale des services de police n'ont pas pu remédier aux situations qu'ils dénonçaient.
Le ministre partage la conviction d'une évidente complémentarité des rôles entre le Comité P et l'Inspection générale dont il redéfinit clairement les rôles respectifs pour éviter toute équivoque et tout sentiment de préséance ou de subordination mal comprise de l'un vis-à-vis de l'autre.
L'Inspection générale des services de police constitue une instance de contrôle externe du fonctionnement des services de police et du comportement de ses membres, instituée au service du pouvoir exécutif. Son rôle essentiel consiste à mener des inspections et à se livrer à des contrôles en regard d'événements portés à sa connaissance. L'Inspection apparaît la mieux outillée pour instruire les plaintes individuelles formulées contre les services de police et formuler des propositions de remède au service concerné et aux ministres de tutelle lorsqu'elle constate une certaine récurrence dans les faits dénoncés.
Le rôle du Comité P est de mettre pareillement en évidence les dysfonctionnements policiers. Accomplissant ses missions au bénéfice du pouvoir législatif, son contrôle est naturellement plus général, moins « individualisable », puisqu'il vise l'appareil policier dans son ensemble et que les remèdes à apporter seront souvent de nature réglementaire ou législative. Cela ne signifie évidemment pas que le Comité P peut ou doit se désintéresser des plaintes individuelles qui lui sont transmises ou qui sont quotidiennement traitées par l'Inspection générale.
Ces plaintes peuvent en effet parfois constituer les symptômes de dysfonctionnements plus généraux dont le Comité P doit rendre compte aux ministres compétents et à la Commission du suivi.
L'Inspection générale et le Comité permanent de contrôle des services de police peuvent être saisis d'une plainte ou dénonciation identique. Si le Comité permanent P, sur la base de l'article 10 de sa loi organique, décide de ne pas examiner cette plainte ou dénonciation, alors l'inspection générale y donnera suite.
Si les relations entre les deux institutions, notamment en matière de traitement des plaintes et dénonciations, sont régies par la loi, celle du 18 juillet 1991 et celle du 7 décembre 1998 ou les dispositions réglementaires qui en résultent, elles sont aussi, en vertu de la loi, régies par d'autres dispositions.
En effet, sur la base de l'article 14bis de la loi du 18 juillet 1991 qui précise que « le Comité permanent P se concerte avec l'inspection générale en vue d'assurer ses missions légales de contrôle des services de police », le Comité permanent P, qui est une institution qui relève de l'autorité du Parlement, et l'Inspection générale, service autonome dépendant directement des ministres de l'Intérieur et de la Justice, ont conclu un protocole d'accord pour régler leur coopération et concertation ainsi que l'échange d'informations et parfois de dossiers entre eux.
Le protocole précise aussi que, dans l'hypothèse d'une saisine simultanée, il y a un échange d'informations et que l'inspection générale de la police fédérale et de la police locale donne suite à la plainte ou dénonciation qui n'est pas examinée par le Comité permanent P.
Ce protocole prévoit aussi que l'inspecteur général et un de ses collaborateurs et le président et un membre du Comité permanent de contrôle des services de police se rencontrent régulièrement en vue d'évoquer les différents aspects de leurs missions et, s'il échet, de leur coopération ponctuelle ou plus générale.
C'est ainsi notamment qu'il leur appartiendra de convenir entre eux des modalités d'alimentation et de consultation d'une banque de données relative aux plaintes et dénonciations. Il faudra ici faire preuve de rationalité tant pour le bon fonctionnement des deux organes de contrôle que pour simplifier les tâches administratives imposées aux services de police. Une formule devra être trouvée pour que ceux-ci informent en un même mouvement le Comité P et l'Inspection générale.
Toujours en matière de répartition des tâches, le Comité permanent P, après avoir consulté sur ce point l'inspecteur général, a fait au ministre de la Justice la proposition de répartition des tâches prévue à l'article 16 de la loi du 18 juillet 1991. Le ministre de la Justice ne saurait tarder à prendre la directive ad hoc. Cette question sera ensuite précisée dans le protocole.
L'article 14bis in fine tel que modifié par l'article 5 du projet dispose que : « Les données individuelles peuvent uniquement être communiquées aux services de police en ce qui concerne leur personnel et à l'Inspection générale de la police fédérale et de la police locale ». Cette modalité était d'ailleurs dans une certaine mesure aussi visée par le protocole.
En effet, il est indispensable pour le bon fonctionnement de l'Inspection générale, mais aussi du Comité permanent P, qu'un échange bilatéral d'informations s'opère. Pour l'exercice des différentes missions qui lui incombent, il peut être particulièrement utile et parfois même indispensable que l'inspecteur général puisse prendre connaissance de certaines informations ou de certains éléments contenus dans l'un ou l'autre dossier géré par le Comité permanent P.
La question s'est déjà posée et le Comité permanent P y a donné suite. La nouvelle disposition évoquée supra précise et renforce les mécanismes de coopération entre les deux institutions. Il conviendra cependant encore qu'elles en précisent maintenant les modalités pratiques dans le protocole qui les lie.
M. Closset déclare que le projet à l'examen vise à optimaliser le fonctionnement du Comité permanent P mais souligne que certaines dispositions (article 3, c) génèrent également des conséquences pour l'Inspection générale qui seront difficiles à supporter en raison de la capacité volontairement limitée concédée par l'exécutif à l'Inspection générale pour l'exécution de ses missions imposées par le législateur.
Une analyse du projet démontre tout d'abord que les modifications proposées à la loi du 18 juillet 1991 tendent également à changer la portée de la loi du 7 décembre 1998 sur la police intégrée sans pour autant adapter cette loi directement. Ainsi, et sur la base des développements de cette proposition de loi, la loi sur le Comité permanent P évolue de facto vers une loi interprétative du titre V de la loi sur la police intégrée, ce qui risque non seulement de perturber la cohérence du cadre juridique mais aussi de compromettre le bon fonctionnement de l'Inspection générale.
Ensuite, les mesures proposées dans le cadre de l'amélioration de la récolte d'informations par le Comité P ne forment pas une base suffisante qui permettrait une amélioration de l'échange d'informations entre le Comité P et l'Inspection générale, parce qu'aucune disposition légale ne donne réellement accès aux informations du Comité P. Pourtant, la nécessité pour l'Inspection générale de pouvoir disposer de certaines informations détenues par le Comité P n'est pas contestée.
En ce qui concerne l'impact de ce projet de loi sur la loi sur la police intégrée, M. Closset explique la portée du titre V de cette loi qui crée une Inspection générale sur la police fédérale et locale.
Dans son exposé des motifs, le législateur explique que cette inspection est « autonome » et externe aux polices locales et fédérale et qu'elle ne fait pas partie des services de police (doc. Chambre, 1997-1998, nº 1676/1, p. 9). L'alinéa 2 de l'article 149 sur la police intégrée accentue encore cette indépendance en prévoyant un arrêté royal qui fixe entre autres « les règles particulières relatives au statut des fonctionnaires de police de manière à garantir l'indépendance de l'Inspection générale à l'égard des services de police ».
Vu cette position d'impartialité et le recul nécessaire dont elle dispose par rapport aux services de police, le législateur a confié aux membres du personnel de l'Inspection générale, sur la base de l'article 27 de la loi disciplinaire (loi du 13 mai 1999), l'exécution d'enquêtes préalables dans des situations délicates (doc. Chambre, 1998-1999, nº 1965/1, p. 14).
En guise de conclusion, il appert que l'Inspection générale se situe entre l'organe de contrôle purement externe qu'est le Comité P et les services de contrôle interne.
En cataloguant l'Inspection générale dans les développements du projet comme interne, l'interprétation de la portée du titre V de la loi sur la police intégrée est non seulement modifiée mais également incompatible avec la teneur même des articles de la loi sur la police intégrée.
Ainsi, sur la base de cette qualification, la possibilité de pouvoir entreprendre des enquêtes plus générales, telles que des enquêtes de contrôle thématiques, serait réservée au Comité P comme seul organe de contrôle externe, tandis que la loi sur la police intégrée précise dans son premier alinéa de l'article 147 que « les membres de l'Inspection générale disposent d'un droit d'inspection général et permanent ».
Ces inspections s'exercent sur la base, d'une part, de l'analyse des plaintes reçues et, d'autre part, des procédures et directives réglementaires en vigueur. À cette fin, toutes les unités et services de police sont obligés d'informer l'Inspection générale des plaintes reçues ainsi que de la suite qui leur a été réservée.
Stipulons encore que la compétence de l'Inspection générale en matière de plaintes émane directement de la loi sur la police intégrée, à savoir l'article 145, alinéa 3, et qu'elle n'est assujettie à aucune restriction. Au contraire, l'Inspection générale dispose d'un droit d'évocation et d'un pouvoir exclusif de médiation en matière de plaintes, ce qui la distingue indubitablement des organes de contrôle interne et du Comité permanent P.
De ce qui précède, il apparaît que le Comité P et l'Inspection générale sont deux institutions dont les missions sont semblables mais non identiques et qui, dans différents domaines, sont pourtant amenés à collaborer étroitement et à échanger des informations. Il n'y a entre eux aucun caractère de subordination.
Le transfert de compétence en matière de traitement des plaintes tel que prévu à l'article 3, c, du projet revêt un caractère trop abrupt, manquant de nuances et superfétatoire par rapport à la réalité et à la pratique qui a déjà cours aujourd'hui.
Afin de rencontrer et de respecter les sensibilités mutuelles tout en conservant l'esprit du texte proposé, le texte devrait être légèrement modifié.
Quant aux mesures proposées dans le cadre de l'amélioration de la récolte d'informations, il est indispensable, pour le bon fonctionnement tant du Comité P que de l'Inspection générale, tous deux des services de contrôle généraux (ratione loci et ratione materiae et personae), qu'un échange bilatéral d'informations s'opère.
L'obligation, pour l'Inspection générale, de transmettre l'information au Comité permanent P est déjà légalement réglée mais, jusqu'à présent, il n'existe aucune disposition légale qui donne accès aux informations du Comité P.
Dans son article 5, b, alinéa 2, le projet de loi crée la possibilité d'un accès éventuel à des données individuelles, mais la loi ne met pas en évidence l'absolue nécessité non seulement de rendre possible, mais effectivement de procéder à des échanges d'informations, non pas utiles mais indispensables au bon fonctionnement de l'Inspection générale.
En effet, l'obligation imposée faut-il le rappeler par le ministre de l'Intérieur via l'article 11, 2º, de l'arrêté royal du 20 juillet 2001 sur l'Inspection générale, oblige l'Inspection générale d'alimenter et d'exploiter la banque de données relative aux plaintes et dénonciations et ce, en coordination avec le Comité permanent de contrôle des services de police. Dans cette logique, il nous paraît indispensable d'adapter l'article 5, b, alinéa 2, du projet en permettant la communication des données individuelles à l'Inspection générale de la police fédérale et de la police locale lorsqu'elles cadrent avec les missions de cette dernière.
En conclusion, M. Closset souligne que ces observations visent uniquement à garantir l'équilibre et l'harmonie entre les deux services de contrôle à compétence générale et doivent éviter que la cohérence du cadre juridique actuel ne soit perturbée.
M. Bourdoux rappelle que le Comité permanent P est une institution qui relève du Parlement. Les missions du Comité P sont formulées ou approuvées par le président de la Chambre des représentants qui est aussi président de la commission d'accompagnement du Comité P.
La proposition de loi nº 50-1790/1 émane d'une initiative strictement parlementaire. Elle a été rédigée par les membres de la commission d'accompagnement du Comité P au sein de la Chambre des représentants et en collaboration avec les membres du Comité P. Elle a fait également l'objet de discussions au sein de la commission de l'Intérieur de la Chambre.
Il ressort clairement des travaux parlementaires relatifs à la loi sur la police intégrée que le contrôle externe des polices ferait l'objet de la révision d'une autre loi, celle du 18 juillet 1991. En effet, lors des discussions relatives à la loi sur la police intégrée, cette problématique a été évoquée.
Il a ainsi été précisé à suffisance en ce qui concerne le caractère externe du contrôle assumé par le Comité P « qu'il convient d'établir strictement une distinction à l'égard du contrôle externe, qui est réalisé par l'actuel Comité permanent de contrôle des services de police, le Comité P, qui dépend directement du Parlement, et qui doit être considéré comme un pur contrôle externe » (1).
Dans le même ordre d'idées, « à l'occasion du remodelage du paysage policier belge, il semble indiqué de doter les polices fédérale et locale d'un propre service d'Inspection générale. Conçu comme un instrument dans les mains des ministres responsables, il ne se substitue pas aux nombreux mécanismes de contrôle sur la police que prévoient déjà notre système juridique et nos institutions. Outre l'instrument particulier dont dispose le Parlement par la mise en place du Comité de contrôle des services de police, des mécanismes de contrôle des activités policières, qui ressortent en particulier de compétences ministérielles, sont à mettre en oeuvre [...] » (2); ou encore « quoi qu'il en soit, l'Inspection générale demeure un instrument placé sous la supervision directe des deux ministres [...] » (3).
Il a été convenu que le Comité P, qui est un organe de contrôle externe, fera l'objet d'une réforme (4).
Dans la mesure où l'intention du législateur laissait subsister certains doutes, il fut encore précisé que : « Sur la base de l'avis du Conseil d'État, on peut conclure qu'il est nécessaire d'organiser les relations entre l'Inspection générale et le Comité permanent de contrôle des services de police » (5).
Ainsi, toujours dans les mêmes discussions : « l'article 45 [de la loi sur la police intégrée] impose au chef de corps de faire part au bourgmestre ou au collège des plaintes externes sur le fonctionnement du corps ou l'intervention de son personnel. L'article 145 précise que l'Inspection générale assume la médiation exigée concernant les plaintes sur des faits qui ne constituent pas un délit. Ces deux articles ne font toutefois pas abstraction de la nécessité de disposer d'un contrôle externe efficient » (6).
Ces multiples réflexions et commentaires inspirés notamment par l'analyse des travaux parlementaires impliquent, dans le prolongement de toute une série d'autres considérations et explicitations, que tant le législateur que les représentants du gouvernement qu'il a entendus n'ont eu de considération que pour une seule institution au titre de contrôle externe.
On doit cependant souligner au demeurant que l'Inspection générale, tout en relevant directement du (des) ministre(s) de l'Intérieur (et de la Justice), est autonome et extérieure par rapport à la police fédérale et locale. En effet, l'Inspection générale des polices est un service qui dépend de l'exécutif et qui ne fait pas partie de la police intégrée. Elle trouve son origine dans la loi du 7 décembre 1998.
L'article 9 de la loi organique du 18 juillet 1991 du contrôle des services de police et de renseignements prévoit que le Comité P ne peut rendre un avis sur un projet de loi, d'arrêté royal, de circulaire, ou sur des documents de toutes natures exprimant les orientations politiques des ministres compétents, qu'à la demande de la Chambre des représentants, du Sénat, ou du ministre compétent.
L'orateur se réjouit donc du fait que l'inspecteur général, qui appartient à l'administration du ministre de l'Intérieur et non à la police intégrée, ait reçu la possibilité de s'exprimer tout comme les représentants du Comité P.
Mme Lizin estime que la commission doit se prononcer sur le fait de savoir quelle suite sera donnée aux observations de l'Inspection générale concernant la partie de la loi du 18 juillet 1991, censée affaiblir le pouvoir de l'inspection.
M. Bourdoux souligne que le projet discuté n'affecte en rien les missions et compétences de l'Inspection générale de la police fédérale et de la police locale.
Dès l'origine, la présente proposition de loi était clairement et uniquement un instrument purement technique qui devait rencontrer les problèmes découlant de la réforme des services de police qui n'avaient pas encore été réglés. En l'occurrence, le statut disciplinaire et l'évaluation des membres du Service d'enquêtes n'avaient pas été fixés.
De plus, l'accès aux banques de données n'avait pas été expressément réglementé. Une mauvaise interprétation, notamment d'un arrêté royal du 20 juillet 2001, pouvait aussi modifier la portée de la loi du 18 juillet 1991. Il importait dès lors que le Parlement précise la portée de certaines dispositions de cette loi, notamment celles évoquées ci-dessus.
Une autre raison à la base de la modification en projet est la recrudescence du nombre des plaintes et dénonciations. En 2002, le Comité P a traité près de 2 500 plaintes et dénonciations. Conformément à la loi du 18 juillet 1991, le Comité P est chargé d'examiner et de se prononcer formellement sur chaque plainte individuelle. C'est pourquoi il a été proposé de transférer la compétence d'examiner certaines plaintes au commissaire général pour la police fédérale et aux chefs de corps pour les polices locales. Ceci permettrait au Comité P de se consacrer mieux et plus à ses autres missions.
En outre, cette proposition exprime aussi une marque de confiance envers la hiérarchie de la police et l'Inspection générale : le commissaire général et les chefs de corps sont invités à faire preuve de transparence et à traiter eux-mêmes certaines plaintes. Le Comité veille alors à la cohérence et à la pertinence de l'ensemble.
L'article 10 de la loi du 18 juillet 1991 vise le cas où une plainte ou une dénonciation est traitée simultanément par l'Inspection générale de la police fédérale et de la police locale et par le Service d'enquêtes du Comité P. Si la personne qui a déposé la plainte ou fait la dénonciation n'a pas sollicité expressément l'intervention du Comité, le Comité peut décider de ne pas donner suite à cette plainte ou à cette dénonciation.
Le Comité P en transfère dès lors en quelque sorte l'examen à l'inspecteur général qui l'examinera alors sur la base de la loi du 7 décembre 1998. Il a en effet une compétence propre en la matière.
À l'heure actuelle, le Comité est noyé de plaintes. Dès lors qu'un arrêté royal du 20 juillet 2001 pris en exécution de la loi du 7 décembre 1998 sur la police intégrée et réglant le fonctionnement de l'Inspection générale a en quelque sorte donné lieu à un problème juridique purement technique, il convenait aussi de l'évoquer. En effet, un arrêté royal ne saurait modifier la portée d'une loi, certainement pas d'une autre loi que celle dans laquelle il trouve son fondement. Il s'agit en effet d'une norme juridique supérieure.
Dans la pratique, la collaboration entre le Comité P et l'Inspection générale se déroule sans problèmes sur la base d'un Protocole signé au mois de juillet 2002.
L'orateur renvoie à l'article 14bis de la loi du 18 juillet 1991 qui prévoit que le Comité P enquête également sur les activités et les méthodes de l'Inspection générale de la police fédérale et de la police locale. L'accès du Comité P aux données de l'Inspection générale se limite aux missions dévolues au Comité P, conformément à l'article 14bis de la loi. La finalité du Comité P en cette qualité est une finalité de contrôle et une finalité de monitoring global du système policier.
M. Bourdoux rappelle que, dans le cadre de la discussion de la loi disciplinaire et de la loi sur la police intégrée, un problème technique s'est posé en ce qui concerne la communication de données judiciaires à la hiérarchie. À l'ancienne gendarmerie, des personnes étaient répertoriées comme « placées sous le coup de poursuites judiciaires » simplement sur la base d'une décision de la hiérarchie et cela avait des conséquences administratives et statutaires importantes.
Cette matière a fait l'objet d'une concertation syndicale et actuellement le problème n'est toujours pas réglé, ni dans le cadre de la loi disciplinaire, ni dans le cadre de la loi statutaire régissant le personnel de la police intégrée. La proposition de M. Closset constitue dès lors une voie détournée de régler la question.
L'inspecteur général, par un droit d'accès général aux informations du Comité P (et donc une obligation corrélative de ce dernier), aurait à des fins statutaires ou disciplinaires accès à des informations qui, dans l'état actuel des choses, ne lui sont pas directement accessibles. La question échapperait dès lors à la concertation syndicale prévue par la législation régissant le fonctionnement de la police intégrée.
Dans ce cadre, la deuxième proposition de l'inspecteur général modifie en fait non pas la loi du 18 juillet 1991 mais la loi du 7 décembre 1998 et la loi disciplinaire. Si on admet que l'inspecteur a droit à des informations de nature judiciaire, cela signifie que le Comité P est tenu de donner de tels renseignements. Or, les membres du Comité P n'ont pas un accès général et a priori à de telles informations.
Même le Service d'enquêtes qui, en théorie, a accès à ces informations ne devrait pas être amené à les mettre a priori et systématiquement à la disposition de l'inspecteur général. Il est bien entendu que chaque demande sera examinée.
Mme Lizin en conclut que la deuxième proposition faite par M. Closset constitue une extension des compétences de l'inspecteur général. Cela n'est pas l'objectif du projet de loi.
M. Bourdoux explique que, dans la pratique, le Comité P communique à l'Inspection générale les numéros des dossiers judiciaires auprès des parquets. L'Inspection générale peut s'adresser aux autorités judiciaires pour avoir accès à ces dossiers.
En ce qui concerne l'aspect disciplinaire : les enquêtes de contrôle du Comité P se font en confiance par rapport aux services de police concernés et dans une finalité non judiciaire et non disciplinaire. L'anonymat des personnes entendues est respecté. Dès lors, le Comité P ne communique a priori pas d'éléments susceptibles de mener à des poursuites ou à des conséquences statutaires à l'encontre de policiers individuels à l'Inspection générale. Pour les cas les plus graves, il fait cependant rapport à l'autorité judiciaire ou au ministre et à sa Commission d'accompagnement.
Il précise qu'avant la mise en place du protocole de 2002, le Comité P et l'Inspection générale se communiquaient déjà mutuellement la liste des plaintes déposées et traitées.
Le projet à l'examen n'apporte pas des modifications de fond à la loi du 18 juillet 1991 mais l'actualise pour qu'elle soit en concordance avec la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux.
M. Moureaux estime que le système des plaintes prête à confusion. Bien que les citoyens disposent de plusieurs voies pour déposer plainte (Comité P, Inspection générale, Justice), il déplore que le Comité P se limite à donner des avis structurels sur d'éventuelles modifications de la législation concernée. Pour l'opinion publique, le comité P est l'organe qui traite les plaintes individuelles. Or, le ministre estime que ces plaintes relèvent de la compétence de l'Inspection générale. Si la conception du citoyen ne correspond pas à la réalité juridique, se pose un problème majeur.
Il a nettement l'impression que la guerre des polices a été suivie par une guerre des contrôleurs des policiers. Un service prête sa collaboration à la rédaction d'une proposition de loi qui est contestée par l'autre service devant la présente commission. Si le Parlement veut vraiment être efficace pour le citoyen, l'ensemble de cet édifice devrait être remis sur le metier.
M. Bourdoux répond que le Comité P est le garant final du bon traitement des plaintes, y compris celles traitées par les services de contrôle interne et par l'Inspection générale. Le citoyen a le droit de demander une seconde lecture de son dossier au Comité P lorsqu'il n'est pas satisfait de son traitement par la police ou par l'Inspection générale. Il ne s'agit pas d'un droit de recours proprement dit mais d'une lecture sur la base d'un complément d'information que le Comité P est en droit de solliciter auprès des services policiers. Ensuite il prend position et décide à propos de l'ensemble du dossier.
Une des préoccupations du projet à l'examen est d'assurer que toute plainte soit examinée, tout en permettant au Comité P de transférer certaines plaintes à l'Inspection générale afin d'éviter que le nombre de plaintes rend impossible ses missions légales comme organe du Parlement.
M. Moureaux déplore que le Comité P, que l'on a présenté à l'opinion publique comme un comité indépendant qui traiterait les plaintes des citoyens, se limite à des avis structurels au législateur. Il estime qu'il faudra revenir sur la possibilité pour le citoyen d'adresser ses plaintes à une instance indépendante.
Mme Lizin répond que le citoyen peut toujours s'adresser au Comité P mais elle rappelle que cet organe n'a pas comme objectif de traiter des plaintes individuelles.
Article 1er
L'article 1er est adopté par 6 voix et 2 abstentions.
Article 2
L'article 2 est adopté par 5 voix et 3 abstentions.
Article 3
Amendement nº 1
Mme Lizin dépose à cet article un amendement (doc. Sénat, nº 2-1518/2) qui vise à remplacer le c) de cet article par une disposition qui évite que le texte de loi comporte une disposition permettant au Comité P de transférer à l'Inspection générale le pouvoir d'examiner des plaintes. En effet, la compétence de l'Inspection générale découle directement de la loi et ne dépend pas d'un transfert opéré par le Comité P.
Le ministre déclare qu'il se limite à un avis technique sur cet amendement étant donné que le projet émane d'une initiative parlementaire et concerne un organe parlementaire. Il estime que l'amendement nº 1 précise dans le texte la portée exacte qu'on veut lui donner. Dans la mesure où il se limite à ce résultat, le ministre ne souhaite pas s'opposer à cet amendement.
M. Van Dooren, président du Comité P, affirme que les relations et la collaboration du Comité P avec l'Inspection générale sont positives depuis le début. Le Comité P n'a jamais pensé que le projet en discussion déclencherait cette réaction. La présidente de la commission, Mme Lizin, était elle-même présente lorsque le Comité P a été chargé d'élaborer le texte en question, conjointement avec la commission d'accompagnement de la Chambre. Le texte a été mis au point et a été approuvé par la commission d'accompagnement de la Chambre et signé par les membres de celle-ci.
Le projet a été voté à l'unanimité par la commission de l'Intérieur, des Affaires générales et de la Fonction publique de la Chambre. Le ministre de l'Intérieur, sous l'autorité duquel l'Inspection générale travaille, n'a formulé aucune observation au cours de la discussion à la Chambre.
Il ne veut donner d'aucune façon l'impression que le Comité P touche, même indirectement, aux compétences ou aux missions de l'Inspection générale.
Mme Pehlivan déclare que son groupe rejettera l'amendement, de manière que le projet puisse être adopté par les deux assemblées avant la dissolution. MM. Malmendier et Wille se rallient à cette déclaration au nom de leurs groupes respectifs.
L'amendement nº 1 est rejeté par 7 voix contre 1 et 1 abstention.
L'article est adopté par 6 voix contre 2 et 1 abstention.
Articles 4 à 18
Chacun des articles 4 à 18 est adopté par 6 voix et 3 abstentions.
L'ensemble du projet a été adopté par 6 voix et 3 abstentions.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 8 membres présents.
Le rapporteur, Frans LOZIE. |
La présidente, Anne-Marie LIZIN. |
(1) Doc. Chambre, 1997-1998, nº 1676/1, pp. 9-10.
(2) Doc. Chambre, 1997-1998, nº 1676/1, p. 82.
(3) Doc. Chambre, 1997-1998, nº 1676/1, p. 83.
(4) Doc. Chambre, 1997-1998, nº 1676/1, p. 3.
(5) Doc. Chambre, 1997-1998, nº 1676/8, p. 21.
(6) Doc. Chambre, 1997-1998, nº 1676/8, p. 42.