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22 JUIN 2000
Le premier constituant belge a fait de l'excellent travail pour l'époque. La Constitution belge a été vantée par-delà les frontières pour le libéralisme de ses principes, qui protégeaient remarquablement les droits du citoyen.
En 1831, le Congrès national belge opta résolument pour une monarchie constitutionnelle. Léopold Ier n'accepta la fonction de monarque qu'après de longues hésitations, précisément parce qu'à ce moment, la Constitution belge octroyait relativement peu de pouvoirs au monarque.
Depuis 1831, année de l'avènement du Royaume de Belgique, il s'est produit une évolution sociale sans pareille. Le suffrage universel pur et simple, l'accroissement de la prospérité mais aussi du bien-être ont métamorphosé la Belgique en un État-providence moderne.
Cette même émancipation sociale a également influé sur la façon dont la population allait appréhender ses institutions politiques. Par le truchement de la presse et de la société civile, l'emprise de la population sur la politique s'est accentuée. Au point que « la politique » s'est vu attribuer en quelque sorte une fonction de bouc émissaire à l'occasion d'une série de scandales qui ont jeté le discrédit sur l'ensemble de la classe politique.
Si l'on excepte la question royale en 1951, avec Léopold III dans le rôle principal, et la question de l'avortement, qui vit Baudouin refuser de signer la loi sur l'interruption de grossesse, la monarchie a su tenir bon en tant qu'institution. Grâce à la protection offerte par la Constitution et à la continuité de vues manifestée par les souverains récents Baudouin et Albert II, la maison royale peut compter sur une large adhésion dans la population, au détriment d'autres institutions comme le gouvernement, le Parlement et la justice.
Une démocratie moderne telle que la nôtre ne doit toutefois pas craindre de soumettre toutes les institutions à une évaluation permanente. Et la monarchie ne fait pas exception à la règle.
Ces dernières années ont vu se produire un certain nombre d'incidents qui incitent à tout le moins à la réflexion.
Nous pensons aux propos tenus récemment par le Prince Laurent, aux révélations d'un agent de la CIA selon lesquelles le Roi Baudouin aurait soutenu la campagne de l'adversaire du président chilien de gauche Allende, à l'impossibilité d'interroger la maison royale sur son implication en Afrique centrale, ainsi qu'aux milliards présumés qui seraient déposés sur des comptes à l'étranger.
La présente résolution vise dès lors à faire évaluer objectivement le rôle politique de la monarchie et, le cas échéant, à l'adapter par une législation appropriée.
Vincent VAN QUICKENBORNE. Jean-Marie DEDECKER. |
Le Sénat,
A. Considérant qu'il s'est produit dans le passé un certain nombre d'événements justifiant que l'on évalue les prérogatives du Roi;
B. Considérant que d'autres pays, tels les Pays-Bas et l'Espagne, veulent, eux aussi, réformer la monarchie constitutionnelle;
C. Considérant qu'en 1949 déjà, une initiative semblable avait été prise avec la création de la « Commission chargée d'émettre un avis motivé sur l'application des principes constitutionnels relatifs à l'exercice des prérogatives du Roi et aux rapports des grands pouvoirs constitutionnels entre eux »; qu'un certain nombre de parlementaires avaient fait remarquer, à propos de cet avis, que « l'extrême concision du rapport n'a pas permis d'exposer d'une manière suffisamment développée les principes et les règles qui conditionnent la bonne application du régime parlementaire. Il y a là une source de malentendus pour l'avenir »; qu'à la lumière de l'affaire de l'avortement, cette citation peut à tout le moins être qualifiée d'assez exacte et de prémonitoire;
demande au gouvernement fédéral de créer une commission chargée d'examiner et d'évaluer les principes constitutionnels relatifs à l'exercice des prérogatives du Roi.
Vincent VAN QUICKENBORNE. Jean-Marie DEDECKER. |