2-215

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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 4 JULI 2002 - OCHTENDVERGADERING

(Vervolg)

Herziening van artikel 157 van de Grondwet (Stuk 2-697)

Bespreking

M. Jean-Marie Happart (PS), rapporteur. - Le projet de modification de l'article 157 de la Constitution qui vous est aujourd'hui présenté comporte deux volets. Le premier vise à supprimer les juridictions militaires en temps de paix et le second porte sur la création par la loi de tribunaux d'application des peines.

La commission des Affaires institutionnelles a examiné le présent projet au cours de ses réunions des 25 avril, 8, 16, 22 et 29 mai 2002, en présence du ministre de la Justice.

Dans son exposé introductif, M. Verwilghen a précisé les deux raisons qui ont, en fait, amené la préconstituante à déclarer qu'il y avait lieu à révision de l'article 157 de la Constitution.

Il s'agit, d'une part, de la déclaration gouvernementale du 14 juillet 1999 qui stipulait que la concrétisation rapide et complète des accords Octopus était un objectif majeur du gouvernement et, d'autre part, de la suite à donner à une recommandation de la commission d'enquête parlementaire Dutroux visant à la création de tribunaux d'application des peines.

Il a également tenu à rappeler les différentes initiatives législatives qui ont montré à suffisance la volonté de réformer les juridictions militaires. L'article 157, premier alinéa, de la Constitution, en projet, maintient les juridictions militaires uniquement pour le temps de guerre. Il ne sera donc pas possible de rétablir ces juridictions en temps de paix par l'entremise d'une simple loi.

La deuxième partie de la révision de l'article 157 prévoit donc la création légale de tribunaux d'application des peines. Le ministre a expliqué la nécessité de cette modification, d'une part, parce que le gouvernement a opté pour l'introduction de véritables tribunaux d'application des peines et des mesures ad hoc et, d'autre part, parce que le ministre est convaincu que ces tribunaux doivent être pluridisciplinaires dans leur composition. Cette pluridisciplinarité constitue un enrichissement énorme et une garantie supplémentaire pour la protection de la société, la réinsertion et la réintégration optimale du condamné.

M. Verwilghen a précisé qu'une commission présidée par M. Holsters, président émérite de la cour de Cassation, a été chargée de préparer un projet de loi relatif aux tribunaux d'application des peines. Cette commission devrait remettre son rapport au ministre pour la fin juin.

Concernant les juridictions militaires, les points abordés ont été, tout d'abord, l'opportunité et la portée du projet de loi portant suppression des tribunaux militaires en temps de paix à la lumière, notamment, des critères distinctifs de l'état de guerre.

Les membres ont également insisté dans leurs questions sur l'incidence de la suppression des juridictions militaires en temps de paix sur les opérations militaires belges à l'étranger. M. Lozie a notamment demandé s'il était prévu que les troupes belges soient accompagnées par une autorité juridictionnelle compétente en la matière, comme elles le sont aujourd'hui par un membre de l'auditorat militaire.

MM. Cheron, Barbeaux et Vandenberghe ont estimé que la notion d'« état de guerre » au sens de l'article 167, §1er, alinéa 2 de la Constitution méritait quelques clarifications. Selon eux, cette notion était quelque peu dépassée.

Ils ont fait remarquer que depuis 1990, les Forces armées belges ont été chargées quasi en permanence d'opérations de maintien de la paix à l'étranger sans que l'état de guerre n'ait été décrété.

Certains étaient d'avis qu'il serait préférable de renoncer à la distinction, dépassée dans les faits, entre l'état de guerre et le temps de paix.

Dans ses réponses au sujet de l'objet de la réforme, le ministre a insisté sur le fait que cette proposition visait à défendre l'équilibre entre deux objectifs différents, à savoir une protection juridique adéquate et une action militaire efficace. C'est la raison pour laquelle les militaires relèveront, en temps de paix, de la compétence des cours et tribunaux ordinaires et en temps de guerre, ce qui reste une situation d'exception, de celle des juridictions militaires.

Pour répondre aux inquiétudes de certains commissaires quant à l'incidence de la suppression des juridictions militaires, en temps de paix, sur le maintien des règles de droit dans les unités de l'armée belge en mission à l'étranger, M. Verwilghen a précisé que les tâches de l'auditeur militaire seront accomplies par le ministère public tel qu'il a été concrétisé après l'instauration du parquet fédéral.

En effet, l'article 144ter, paragraphe 1er, 1º du code judiciaire attribue au procureur fédéral le pouvoir de poursuivre, notamment, les crimes contre l'humanité et les génocides, conformément à la loi du 16 juin 1993 relative à la répression des violations graves du droit international humanitaire. Le procureur fédéral peut déléguer un membre du parquet fédéral ou d'un parquet du procureur du Roi, qui est titulaire du brevet technique militaire et qui connaît donc les éléments essentiels de l'organisation des forces armées et des autres questions militaires. Il devra exercer une surveillance sur les unités de l'armée belge opérant à l'étranger, comme l'auditorat militaire le fait à l'heure actuelle. Sa tâche consistera également à informer les militaires belges sur le droit applicable dans les pays dans lesquels ils opèrent. Le magistrat du parquet remplit alors le rôle de conseiller juridique.

En ce qui concerne la notion d'état de guerre, le ministre a précisé qu'il y a lieu de renvoyer à l'article 167, 1er paragraphe, §2, de la Constitution qui n'est d'ailleurs pas ouvert à révision.

Les autres points abordés ont été la création de juridictions militaires en temps de guerre et leur compétence ratione materiæ. Concernant ce point, le ministre a tenu à préciser toute la difficulté, dans la pratique, d'établir la distinction entre les délits spécifiquement militaires et les délits de droit commun. Dans bien des cas, les faits qui constituent une infraction au droit pénal militaire auront été commis en liaison avec d'autres faits punissables en vertu du droit pénal général.

Quant à la question de la modification de la procédure pénale, le ministre a déclaré que le projet de loi en préparation concernait les juridictions militaires en temps de guerre et visait à supprimer l'absence de distinction entre les poursuites et l'instruction, qui avait été dénoncée par Strasbourg. En temps de guerre, un auditeur de guerre pourra donc faire appel à un juge d'instruction, s'il l'estime nécessaire.

Concernant l'accroissement de la charge de travail des juridictions ordinaires après la suppression des juridictions militaires en temps de paix, M. Verwilghen a répondu qu'à l'heure actuelle, les juridictions militaires instruisaient chaque année environ 6.000 délits et infractions civiles commis par des militaires belges sur notre territoire et à l'étranger. Ce chiffre n'est pas énorme proportionnellement à la charge de travail des cours et tribunaux ordinaires. Il faudra cependant les doter des moyens nécessaires, tant sur le plan financier que pour le personnel.

Dans un commentaire final, le ministre a insisté sur le fait que l'article 157, alinéa 1er, proposé n'entrera en vigueur qu'après le vote, par le parlement fédéral, du projet de loi abrogeant la loi du 15 juin 1899 comprenant les titres I et II du code de procédure pénale militaire. Il a également précisé que la suppression de l'auditorat militaire en temps de paix nécessitera l'intégration de ses membres au sein des parquets près les tribunaux de première instance. L'opération a déjà commencé au parquet du tribunal de première instance de Bruxelles.

En ce qui concerne les tribunaux d'application des peines, la question de la conformité de la révision proposée et de la déclaration de révision de la Constitution a été abordée. Le ministre a répondu que l'article 157 de la Constitution a été déclaré ouvert à révision, eu égard à la volonté de supprimer les tribunaux militaires et de créer un tribunal d'arrondissement.

Cependant, il est acquis, dans la doctrine, que rien n'empêche la constituante, lors de la révision d'un article, d'aller dans une toute autre direction que celle indiquée par la préconstituante au cas où les préoccupations sociales qui auraient guidé cette dernière lors de l'élaboration de la déclaration de révision de la Constitution auraient connu de profonds changements.

Le ministre a insisté sur le fait que le principe de la création des tribunaux d'application des peines était l'aboutissement du travail de plusieurs commissions d'enquête parlementaire.

Les autres thèmes abordés ont été la notion de loi dans l'article 157, alinéa 2 proposé, de la Constitution. Selon M. Vandenberghe, les communautés devraient être associées à la création des tribunaux d'application des peines étant donné que le reclassement et l'amendement des condamnés sont étroitement liés à la compétence communautaire.

En ce qui concerne l'intégration dans l'article 157 de la Constitution de la création par la loi des tribunaux d'application des peines, Mme de T' Serclaes a déposé un amendement afin d'insérer cette disposition au dernier alinéa de l'article 157 de la Constitution et non pas en tant qu'alinéa 2 nouveau.

En ce qui concerne l'éventualité d'organiser des auditions, je ferai un bref commentaire, en vous renvoyant pour l'essentiel au rapport écrit.

Nous avons entendu M. Durant, premier président de la Cour militaire. En ce qui concerne la note explicative du gouvernement jointe à la proposition de révision de l'article 157 de la Constitution, il a souhaité faire remarquer, à propos de la condamnation de la Belgique par la Cour européenne des droits de l'homme, que l'auditeur général près la Cour militaire a édicté des circulaires empêchant dorénavant un magistrat militaire instructeur d'exercer les poursuites dans la même affaire.

Par ailleurs, l'idée selon laquelle le constituant interdirait au législateur d'avoir recours aux juridictions militaires dans certaines circonstances en temps de paix ne pourrait être qualifiée de sage au point de vue politique. Ce point de vue repose sur deux certains arguments, le danger de confier les affaires les plus difficiles à des magistrats inexpérimentés et le rejet du texte proposé parce que, pour définir la notion de guerre, il fait référence à l'article 167, §1er, alinéa 2, de la Constitution. En effet, selon M. Durant, le temps où l'on se déclarait la guerre appartient au passé. Néanmoins, si l'article 157 devait être modifié, il serait préférable de faire référence non pas aux notions juridiques relatives à l'état de guerre mais bien, comme les Conventions de Genève, à la réalité, à savoir la nécessité pour le pays et les forces armées de disposer d'instruments qui permettent la survie de la société.

Sur le rôle et le fonctionnement des juridictions militaires, il a tenu également à rappeler que celles-ci assuraient le respect de la discipline militaire et, par l'intermédiaire des magistrats envoyés en accompagnement des troupes, jouaient aussi un rôle préventif et donc de véritable protection à l'égard de ces militaires à l'étranger.

Nous avons ensuite entendu M. Mine, auditeur général près la Cour militaire. Tout en se ralliant à l'argumentation du premier président, M. Mine a exposé de manière plus détaillée les différentes missions exercées par les cellules judiciaires qui accompagnent les troupes en opérations de longue durée à l'étranger, soit veiller à la protection du statut des militaires en opérations et à la prééminence du droit national, garantir la qualité de l'action judiciaire ainsi que la rapidité de l'action publique en vue du maintien de la discipline, fournir un appui juridique au commandement et, enfin, remplir une fonction de conseiller juridique afin de résoudre les problèmes personnels auxquels les militaires pourraient être confrontés.

Au vu de ces considérations, et à moins d'un réaménagement en profondeur de notre organisation judiciaire en matière de compétences et de procédures, M. Mine voyait mal comment les missions des cellules judiciaires existantes pourraient, dans l'état actuel des choses, être reprises par d'autres instances.

À la suite des deux premières auditions, un échange de vues a été organisé. Il portait essentiellement sur la crainte, exprimée par M. De Decker, que la suppression des juridictions militaires en temps de paix ne crée un vide juridique.

M. De Decker président a également tenu à préciser qu'il ne soutenait pas la thèse selon laquelle un militaire doit être renvoyé devant les juridictions militaires pour tous les délits de droit commun. Les délits de nature civile doivent, selon lui, être soustraits à la compétence de ces juridictions.

J'ai moi-même fait observer que l'existence d'un système juridique propre pour les militaires pouvait être ressentie par l'opinion publique comme l'expression d'un esprit corporatiste visant à protéger les militaires à l'égard de la société civile. En effet, la possibilité pour un militaire d'interjeter appel devant la Cour militaire contre une condamnation du tribunal militaire, alors que le civil condamné pour les mêmes faits par la cour d'assises ne bénéficie pas de ce degré d'appel, en est un exemple.

J'en viens à l'audition du général major M. Lejoly, chef de cabinet du ministre de la Défense.

M. Lejoly a particulièrement mis l'accent sur l'encadrement juridique des troupes belges à l'étranger en temps de paix. Il a ensuite tenu à préciser que la plupart des troupes militaires en opération à l'étranger ne disposaient pas d'un appui juridique sur place. C'est uniquement le cas des gros détachements. Il a reconnu la nécessité d'avoir une assistance juridique de première ligne, ce qui implique une formation juridique des militaires, parallèlement à une formation militaire des magistrats, non seulement aux règles de discipline et au droit pénal, mais aussi aux réalités du fonctionnement d'une unité en opération. Un échange de vues a également été organisé, pour lequel je vous renvoie à l'excellent rapport.

Le ministre de la Justice a précisé que le projet de loi qui donnera exécution à l'article 157 de la Constitution révisé prévoit que, lorsque les troupes sont envoyées à l'étranger, le procureur fédéral ayant compétence sur tout le territoire belge et étant chargé des relations internationales pourra décider d'envoyer un magistrat à l'étranger. Il a également trouvé très positif le fait que le département de la Défense soit à même de développer un corps de militaires dotés d'une formation judiciaire poussée, qui pourrait servir d'interface avec le parquet fédéral. Selon lui, il n'est pas nécessaire d'envoyer systématiquement un magistrat, mais bien de prévoir un mécanisme permettant de répondre aux situations de crise dans lesquelles les autorités militaires pourraient se trouver.

J'en terminerai par l'audition du lieutenant général Jockin, vice-chef de la Défense, et du général major Segers, commandant militaire du Palais de la Nation et ancien JSO.

Selon MM. Jockin et Segers, il est tout à fait possible de fonctionner sans juridiction militaire, à condition que cette suppression soit compensée par la présence d'un organe de liaison entre l'état-major de la Défense et la juridiction civile, de manière à assurer un flux continu d'informations. Les magistrats désignés pour remplir cette tâche devront être sensibilisés aux questions militaires posées dans le cas concret.

M. Jockin a expliqué qu'actuellement déjà, pour chaque commandement de terrain est prévue l'assistance d'un officier spécialisé en droit humanitaire.

MM. Dubié et Wille ont trouvé intéressante l'idée de confier à l'officier spécialisé en droit humanitaire, moyennant une formation complémentaire, le rôle d'interface avec le magistrat civil, qui ne sera envoyé sur place qu'en cas de besoin.

Un point important de nos travaux est sans conteste l'évaluation des auditions.

Comme l'a fait observer M. le président, les auditions ont clairement démontré la nécessité d'un encadrement judiciaire convenable des militaires belges en mission à l'étranger. Il faudrait, d'une part, former les magistrats civils aux matières militaires et, d'autre part, prévoir un corps d'officiers-juristes.

Le ministre de la Justice a répondu que, dans l'intervalle, les Forces armées ont déjà formé une centaine d'hommes au droit des conflits armés. Par ailleurs, l'avant-projet de loi d'exécution de l'article 157, alinéa 1er, proposé, de la Constitution, qui est actuellement soumis pour avis au Conseil d'État, prévoit la formation de juristes en vue d'accompagner les troupes belges en mission à l'étranger.

M. Cheron s'est inquiété de savoir si, lorsque les juridictions militaires seront supprimées en temps de paix, ces juridictions seront encore capables de fonctionner en temps de guerre.

Le ministre a admis que la notion d'« état de guerre » visée à l'article 167 paragraphe 1er, alinéa 2 de la Constitution était dépassée et devrait faire l'objet d'un débat. Il a cependant fait remarquer que cet article n'a pas été déclaré soumis à révision et qu'il appartient donc au parlement siégeant en tant que préconstituant de juger si cet article doit être déclaré soumis à révision conformément à l'article 195 de la Constitution.

Concernant les juridictions militaires, M. Vandenberghe a déposé un amendement visant à prévoir l'existence de juridictions militaires non seulement dans le cas où l'état de guerre défini à l'article 167 aurait été décrété, mais aussi dans les circonstances exceptionnelles comme des attentats terroristes ou des opérations militaires d'envergure dans un contexte international ou supranational, dans lesquelles des juridictions militaires devraient pouvoir fonctionner, quand bien même l'état de guerre n'aurait pas été décrété.

Le ministre de la Justice a, dans les grandes lignes, pu souscrire au raisonnement qui sous-tendait cet amendement. Il a craint toutefois que l'amendement ne soit perçu comme un moyen détourné pour modifier indirectement l'article 167, §1er de la Constitution, qui n'a pas été soumis à révision au cours de la présente législature.

Les votes sont intervenus. L'amendement numéro 1 du gouvernement qui visait à expliciter et à transférer l'article 1er de la disposition transitoire figurant à l'article 2, ainsi que l'amendement de Mme de T' Serclaes ont été adoptés ; les amendements de M. Vandenberghe ont été rejetés. Le présent projet a été adopté par dix voix et une abstention à la suite d'un débat dans lequel la démocratie parlementaire a trouvé son compte.

Le présent rapport a été adopté à l'unanimité des membres présents.

M. Michel Barbeaux (CDH). - Je remercie M. Happart pour son rapport qui nous a donné un bon éclairage des travaux en commission. Ces derniers ont été intéressants et fructueux dans la mesure où nous avons pu auditionner une série de personnes directement concernées par le projet. Comme l'a dit le rapporteur dans sa conclusion, le débat fut véritablement démocratique.

Je voudrais aussi rendre un hommage. Je tiens à saluer le travail remarquable qui a été accompli par l'auditorat des juridictions militaires durant de longues années, notamment lors de l'accompagnement des nombreuses missions à l'étranger, et je tiens à souligner tout le dévouement dont ces magistrats ont fait preuve dans l'accomplissement de leurs tâches, que ce soit sur le sol belge ou sur un sol étranger.

Depuis les accords Octopus qui ont consacré « nuitamment » le principe de suppression des tribunaux militaires en temps de paix, la situation de ces mêmes juridictions est totalement incertaine. Cette incertitude « pèse », et il est temps que le constituant y mette fin par respect pour les parties concernées.

Le CDH votera donc favorablement cette révision constitutionnelle, et ce pour trois raisons. La première tient au fait qu'il y a lieu de lever une incompréhension du citoyen qui ne perçoit pas, à tort ou à raison, pourquoi un militaire est jugé par ses pairs, en particulier pour des infractions relevant de sa vie privée et donc du droit commun. Un adage anglais dit : « La justice ne doit pas uniquement être rendue, elle doit être perçue comme avoir été rendue ». La suspicion jetée sur les tribunaux militaires depuis quelques années, surtout en raison de quelques affaires récentes plus médiatisées, doit être levée.

C'est le rôle du Parlement que d'aller à la rencontre d'un souhait majoritairement émis par les citoyens.

La seconde raison tient au fait qu'il y a lieu de débloquer le projet de loi abrogeant la loi du 15 juin 1899 comprenant les titres I et II du Code de procédure pénale militaire qui est en attente pour avis à la section législation du Conseil d'État depuis le 11 janvier 2002. Ce projet doit être examiné et voté avant la fin de la présente législature, comme vous l'avez laissé entendre, monsieur le ministre.

La troisième raison tient aux promesses faites par le gouvernement et dont le CDH surveillera la bonne mise en oeuvre, à savoir le rôle précieux de l'auditorat qui sera d'une certaine manière préservé puisque, selon le ministre, « le procureur fédéral pourra à l'avenir déléguer un membre du parquet fédéral ou d'un parquet du procureur du Roi qui est titulaire du brevet technique de militaire et qui a donc une connaissance des éléments essentiels de l'organisation des forces armées et d'autres questions militaires, pour qu'il exerce une surveillance des unités de l'armée belge opérant à l'étranger, comme l'auditorat le fait à l'heure actuelle ». Vous promettez aussi, monsieur le ministre, que « des substituts du procureur du Roi, ou un magistrat fédéral, suivront une formation complémentaire dans la matière en question... ». Vous poursuivez : « En temps de paix, le ministère public pourra toujours surveiller les militaires belges en mission à l'étranger, faire rapport sur des infractions qu'ils auraient éventuellement commises, accomplir des actes de recherche et engager une action publique ». Ce sont là des propos que vous avez tenus en commission des Affaires institutionnelles.

Or, notre scepticisme de départ tenait précisément au rôle essentiel de l'auditorat à l'étranger, rôle qui a priori pouvait être menacé par le projet du gouvernement.

C'est pourquoi, le CDH tient à souligner qu'il sera très attentif à ce que le rôle de l'auditorat dans les missions à l'étranger soit intégralement « préservé » lorsque le projet de loi relatif à l'intégration des juridictions militaires dans les compétences des juridictions civiles traitant des matières pénales sera à l'examen. Comme l'ont précisément expliqué MM. Durant et Mine en commission, l'auditorat joue un rôle essentiel à plusieurs titres : tout d'abord, il veille à la protection du statut des militaires en opération et à la prééminence du droit national dans des pays ou situations caractérisés par l'absence d'autorité publique et donc par un vide juridique. Ensuite, ces cellules judiciaires garantissent sur le terrain la qualité de l'action judiciaire : en effet, il est impossible de soutenir la thèse selon laquelle l'on peut recueillir des informations précises et rapides et mener des instructions de qualité depuis un bureau à Bruxelles lorsque les opérations se déroulent à plusieurs milliers de kilomètres de notre pays. L'auditorat apporte également un appui au commandement militaire. De par sa présence, il incite le chef de corps présent sur place à prendre au plus vite les mesures disciplinaires pour rétablir l'ordre. Des mesures d'ordre ou de prévention peuvent être prises sur la base de constatations judiciaires. Enfin, l'auditeur général entendu par la commission des Affaires institutionnelles a souligné combien la mission de l'auditorat était devenue « sociale » puisque les cellules judiciaires ont un rôle de conseiller juridique auprès des militaires qui peuvent être perturbés par des problèmes personnels et judiciaires se déroulant à des milliers de kilomètres de l'endroit où ils sont basés.

Le CDH tient à mentionner qu'il sera également attentif à ce que les nombreuses lois - on parle d'une quarantaine de textes au total dont une quinzaine plus fondamentaux - qui seront « touchées » par cette réforme, notamment de par la notion d' « état de guerre », puissent être au plus vite mises en conformité avec les nouvelles dispositions adoptées. Le ministère de la Justice doit s'atteler au plus vite à mesurer l'impact législatif exact de la réforme et à engranger les modifications nécessaires.

Enfin, faut-il toutefois le souligner tant la problématique semble évidente, il serait impardonnable de la part du gouvernement que le transfert de ce contentieux particulier amplifie encore l'arriéré judiciaire en Belgique.

À la veille de la suppression d'une structure judiciaire qui fonctionnait correctement, il y a donc une urgence : celle de traiter l'arriéré judiciaire avec le plus grand sérieux. Des mesures viennent d'être prises en ce sens à Bruxelles.

Enfin, le CDH tient à formuler ses regrets quant au fait que l'on n'ait pu consacrer plus de temps, lors de sa discussion en commission, à l'amendement du sénateur Vandenberghe visant à « compléter » la notion un peu désuète d'état de guerre. Il comporte des éléments intéressants telle la notion de circonstances exceptionnelles qui aurait dû être discutée plus en profondeur.

Quant à la seconde partie de la révision de l'article 157 de la Constitution, à savoir la consécration constitutionnelle de l'existence des tribunaux d'application des peines, malgré nos interrogations quant à la constitutionnalité d'une telle insertion puisque la déclaration du 4 mai 1999 ne la prévoit pas en tant que telle, le CDH la soutiendra au motif qu'elle constitue une recommandation fondamentale de la commission d'enquête Dutroux et consorts et qu'elle fait partie de l'accord Octopus que nous avons signé.

M. Jean-Marie Happart (PS), rapporteur. - La décision de supprimer les juridictions militaires en temps de paix ne date pas d'hier. En effet, cette décision fut prise, en 1998, dans le cadre des accords Octopus. Les socialistes ont tenu à ce que cette suppression soit explicitement reprise dans l'accord du gouvernement Verhofstadt.

Le débat sur la légitimité et la place des juridictions militaires dans un État démocratique s'est reposé avec acuité à la suite des verdicts prononcés récemment à l'encontre de militaires belges.

Ces décisions ont été vivement critiquées par l'opinion publique, non seulement quant au fond, mais aussi quant à la procédure et aux conséquences y afférentes. Il est vrai que la justice militaire n'a pas été capable de dépasser un esprit de corps.

Dès lors, une telle juridiction jouissant de privilèges exorbitants du point de vue de sa composition inspire une certaine méfiance aux justiciables et ne peut être perçue comme équitable et impartiale dans ses jugements.

Il n'y a donc aucune raison de maintenir un système judiciaire différent de celui qui est applicable à la société civile. En effet, en temps de paix, les militaires sont des justiciables comme les autres et doivent donc être jugés comme tout citoyen belge lorsqu'ils commettent des infractions.

Autre point de satisfaction pour notre groupe : l'inscription dans la Constitution de la possibilité pour le législateur de créer des tribunaux d'application des peines. La pluridisciplinarité de ces tribunaux constitue en effet une garantie supplémentaire pour la protection de la société, la réinsertion et la réintégration optimale du condamné.

En conclusion, le groupe socialiste se réjouit de cette proposition de révision qui offre à tous les citoyens, qu'ils soient ou non militaires, la garantie d'être jugés devant les mêmes juridictions. Mon groupe votera évidemment pour cette proposition.

Mevrouw Mia De Schamphelaere (CD&V). - Er bestond bij de ondertekening van de Octopus-akkoorden in 1998 een ruime consensus. Vandaag, vier jaar later, gelden de krachtlijnen van deze akkoorden onverminderd. Justitie en veiligheid werden zo mogelijk nog meer prioritair en het streven naar een grotere efficiëntie van het gerechtelijk apparaat is een centraal gegeven voor al wie oprecht bezorgd is om het algemeen belang.

De efficiëntie moet dan ook de toetssteen zijn voor het ontwerp dat ons vandaag wordt voorgelegd. Maar net dat criterium voldoet voor ons niet.

Dat geldt in de eerste plaats voor de voorgenomen afschaffing van de militaire gerechten. Bij ons rijst de vraag of deze ongenuanceerde afschaffing wel is vooraf gegaan door de noodzakelijke reflectie over de vernieuwde taak van de krijgsmacht. Haar centrale opdracht is immers niet langer de verdediging van de grenzen, maar de deelname aan internationale opdrachten van verschillende aard.

De hoorzittingen in de commissie voor de Institutionele Aangelegenheden hebben mijn vermoeden ter zake bevestigd. Er werd zowel vanuit gerechtelijke als militaire kringen op gewezen dat er in het kader van delicate opdrachten in vredestijd een situatie dreigt te ontstaan die niet meer, maar minder controle op de gewapende macht tot gevolg heeft. Ik kan dit vooruitzicht met de beste wil van de wereld niet in overeenstemming brengen met de algemene doelstellingen van de Octopus-partijen.

We stellen immers vast dat het huidige voorstel tot herziening van de Grondwet niet of nauwelijks met deze vraagstukken rekening houdt, maar in zijn motivering veeleer ingaat op een probleem dat door de feiten is achterhaald, namelijk de veroordeling van België door het Europees Hof voor de Rechten van de Mens. Er werd in het kader van de werkzaamheden van de commissie terecht op gewezen dat het Comité van Ministers van de Raad van Europa inmiddels heeft kunnen vaststellen dat dit probleem is opgelost.

Een dergelijke werkwijze komt vreemd over, zeker wanneer het een herziening van de Grondwet betreft. Voor ons is een Grondwet nog steeds een document dat stabiliteit uitstraalt en dat door de Grondwetgever slechts gewijzigd wordt wanneer er daar dringende redenen voor zijn. Het is bijgevolg duidelijk dat de regering alle doelstellingen die ze met dit voorstel tot herziening wenst te bereiken, ook met gewoon wetgevend werk kan realiseren. Wat de militaire rechtbanken betreft, is dit herzieningsvoorstel dus op zijn minst overbodig, misschien zelfs contraproductief.

Meteen is ook aangegeven in welke mate dit voorstel tot herziening surrealistisch is. Alles zal namelijk afhangen van de uitvoering die de wetgever aan een en ander zal willen geven. Ik kan het mij moeilijk voorstellen dat de regering ter zake nog geen plannen zou hebben gemaakt, maar toch laat ze ons in het ongewisse over de teneur van haar projecten.

Het voorstel stelt de inrichting van de strafuitvoeringsrechtbanken in het vooruitzicht. Ook hier zal veel, zo niet alles, afhangen van de wetgeving tot regeling van de samenstelling, bevoegdheid en werking van deze rechtbanken. Zal het hier gaan om echte rechtbanken die voldoen aan de waarborgen van artikel 6 van het EVRM? Zolang er over die en andere vragen geen duidelijkheid komt, kan van ons niet worden verwacht dat wij dit voorstel steunen.

Bovendien rijst de vraag of een verankering van de strafuitvoeringsrechtbanken op het federale niveau wel wenselijk is. Artikel 10.3 van het Internationaal Verdrag van 19 december 1966 inzake burgerrechten en politieke rechten bepaalt immers dat het gevangenisstelsel dient te voorzien in een behandeling van gevangenen die in de eerste plaats gericht is op de heropvoeding en de reclassering. Deze heropvoeding en reclassering zijn duidelijk nauw verbonden met de gemeenschapsbevoegdheden inzake bijstand aan personen en de intellectuele, morele en sociale vorming. Het lijkt dus allerminst opportuun de gemeenschappen a priori uit te sluiten van iedere bevoegdheid ter zake, maar dat is net wat in de huidige benadering van artikel 157 van het Gerechtelijk Wetboek aan het gebeuren is.

Onze fractie staat onverminderd achter de doelstellingen van de Octopus-akkoorden, maar dat is ook de reden voor ons wantrouwen tegenover de methode die in dit voorstel werd gevolgd. Een onthouding lijkt ons dan ook de enige logische houding. Wij zullen de wetten die ter uitvoering van dit voorstel zullen worden voorgesteld, bovendien op de voet volgen.

De heer Marc Verwilghen, minister van Justitie. - Voor de wijziging van artikel 157 van de Grondwet bestaat een dubbele reden. Een eerst reden betreft de afschaffing van de militaire gerechten in vredestijd. Die vraag bestaat reeds geruime tijd. België werd reeds in 1986 door het Europees Hof voor de Rechten van de Mens veroordeeld omdat het Wetboek van militaire strafrechtspleging niet in een scheiding voorzag tussen het onderzoek en de vervolging. De ministerraad van de Raad van Europa wacht op een wetswijziging.

De CD&V-fractie verklaart om verscheidene redenen geen vertrouwen te hebben in de wijziging. Waarom is men er, ondanks de regeringsverklaring van 1992, nog steeds niet in geslaagd om die wijziging te realiseren? Er zijn wel initiatieven geweest. Een eerste betreft artikel 157 van de Grondwet.

L'article 157 de la Constitution, tel qu'il est modifié et soumis par le gouvernement au Sénat, maintient les juridictions militaires pour le temps de guerre uniquement. Cette modification ne permet pas de rétablir les juridictions militaires en temps de paix par l'entremise d'une simple loi.

La présente proposition constitue le premier pas vers la concrétisation de la décision Octopus, soutenue par plus que la majorité d'antan. Elle repose sur l'idée qu'une distinction doit être faite entre le temps de paix, situation pendant laquelle l'existence de juridictions militaires ne se justifie plus, et le temps de guerre, situation qui remet en cause le fonctionnement normal des institutions et qui demande que les structures existantes soient adaptées.

We hebben het daar niet bij gelaten. Op 11 januari 2002 heeft de ministerraad een wetsontwerp opgesteld, dat voor advies aan de Raad van State werd voorgelegd. We hebben het advies inmiddels ontvangen. De tekst wordt momenteel aangepast en zal zeer binnenkort aan het parlement wordt voorgelegd.

Er is een tweede reden voor de wijziging van artikel 157 van de Grondwet. De voorgestelde wijzigingen zijn het resultaat van debatten die werden gevoerd naar aanleiding van de parlementaire onderzoekscommissie omtrent de vermoorde en vermiste kinderen. Een van de aanbevelingen van de onderzoekscommissie was dat er een heuse strafuitvoeringsrechtbank moet komen.

Mijn voorganger, de huidige voorzitter van CD&V, de heer De Clerck, heeft er duidelijk op gewezen dat het huidige commissiemodel voor de voorwaardelijke invrijheidsstelling slechts een overgangsfase was in afwachting van de oprichting van een volwaardige strafuitvoeringsrechtbank.

La modification proposée de l'article 157 de la Constitution prévoit donc également la création par la loi de tribunaux d'application des peines. Cette modification de la Constitution est nécessaire, d'une part, parce que j'opte pour l'institution de véritables tribunaux d'application des peines et des mesures et, d'autre part, parce que je suis convaincu que ces tribunaux doivent être pluridisciplinaires dans leur composition. Il y a donc lieu de désigner, à côté du magistrat président, deux experts dans le domaine de l'exécution des peines et de l'insertion sociale.

Seule une modification de la Constitution peut permettre de combiner le modèle de la commission - juges professionnels assistés des pairs - à l'exigence selon laquelle les juridictions ordinaires doivent se prononcer sur les mesures modifiant la nature et la durée de la peine infligée. Bien entendu, tous les droits qui doivent être garantis le seront dans le projet qui émanera du travail actuellement fourni par la commission Holsters.

In dit licht nodig ik de Senaat uit de vereiste bijzondere meerderheid voor de wijziging van de Grondwet te leveren.

-De bespreking is gesloten.